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Typosquatting (fr) : Différence entre versions

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« Internet accélère l’avènement de la société de marché, avec une poussé violente de concurrence et de compétition », selon l’essayiste français Alain Minc.
 
« Internet accélère l’avènement de la société de marché, avec une poussé violente de concurrence et de compétition », selon l’essayiste français Alain Minc.
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Cet auteur aurait pu facilement ajouter que cette concurrence et cette compétition exacerbées étaient pratiquées sur la toile avec davantage de malveillance et de perfidie, se traduisant par l’apparition de nouveaux agissements parasitaires, tels que le « cybersquatting » et le « [[typosquatting(fr)|typosquatting]] », in extenso.
 
Cet auteur aurait pu facilement ajouter que cette concurrence et cette compétition exacerbées étaient pratiquées sur la toile avec davantage de malveillance et de perfidie, se traduisant par l’apparition de nouveaux agissements parasitaires, tels que le « cybersquatting » et le « [[typosquatting(fr)|typosquatting]] », in extenso.
  

Version du 25 octobre 2009 à 21:27


Cet article est une ébauche relative au droit français, vous pouvez partager vos connaissances juridiques en le modifiant, vous pouvez également faire une recherche dans le moteur...'
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« Internet accélère l’avènement de la société de marché, avec une poussé violente de concurrence et de compétition », selon l’essayiste français Alain Minc.

Cet auteur aurait pu facilement ajouter que cette concurrence et cette compétition exacerbées étaient pratiquées sur la toile avec davantage de malveillance et de perfidie, se traduisant par l’apparition de nouveaux agissements parasitaires, tels que le « cybersquatting » et le « typosquatting », in extenso.

Dès lors, des entreprises jouissant d’une certaine renommée et qui ne s’étaient pas préoccupées suffisamment vite d’asseoir leur emprise commerciale sur l’Internet, par la création de leur site, se sont retrouvées dans des situations très indélicates ; en cause l’insuffisance des règles qui gouvernent ce cyberespace.

En effet, l’attribution du nom de l’adresse d’un site web, appelé « nom de domaine », est réalisée par des organismes privés, qui ont élaborés des règles au niveau international en dehors de celles étatiques, engendrant des confrontations de normes, de droits. Ainsi, des titulaires légitimes de marques, de dénominations sociales, de sigles ou d’enseignes ont subi des préjudices liés à l’enregistrement successif de noms de domaine identiques ou quasi-identiques aux leurs. Un important contentieux en a résulté, en France, comme dans la plupart des Etats, que l’adoption de législations étatiques ont tenté de stabiliser, croyant au bienfait du cadre juridique national face à la désinvolture de règles contractuelles de droit privé international.


Sommaire

L’enregistrement des noms de domaine

La notion et la nature juridique d’un nom de domaine

  • La notion

Les pages html d’un site web sont associées à une adresse numérique fixe, l’adresse IP pour « Internet Protocol », qui correspond à une série de quatre ou six nombres séparés par des points, ces nombres étant compris entre 0 et 255. Or, l’utilisation par un internaute de ces adresses numériques pour aller consulter un site est incommode et manque d’optimisation. Ainsi, un système de nommage s’est mis en place pour faire correspondre l’adresse IP du site à une adresse alphanumérique : « le nom de domaine ».

Un nom de domaine est composé de deux parties : le radical et l’extension, tous deux séparé par un point.

Le radical, ou « nom de second niveau », correspond au nom proprement dit, soit la plupart du temps à une dénomination sociale, à un nom commercial ou à une marque préexistante, l’identification de l’entreprise avec le site se faisant donc immédiatement. Ce nom de second niveau est soumis à quelques prescriptions particulières, comme ne pas dépasser un maximum de 63 caractères alphanumériques, ne pas contenir d’espace ou ne pas être accentué.

Quant à l’extension (ou domaine), également appelé « nom de premier niveau », cette dernière sera choisie par le déposant parmi plusieurs domaines :

- Les generic Top Level Domain (gTLD), associés à la nature de l’organisation ou de son activité, indépendamment de son pays d’origine. La déclinaison se fait notamment en <.com> pour les sociétés commerciales, en <.org> pour les organismes à but non lucratif ou encore <.net> pour les organisations de réseaux.

- Les country code Top Level Domain (ccTLD) – « codes des pays » - représentés par deux lettres caractérisant le nom du pays considéré. Pour la France, ce sera <.fr>, pour le Japon <.jp>, pour l’Espagne <.es>, etc. On peut noter également que certains pays, comme la France, ont crée des sous-domaines. Pour les associations ce sera <.asso.fr>, pour les avocats <.avocat.fr> ou pour ne donner qu’un dernier exemple, les noms de domaine enregistrés en tant que marques, <.tm.fr>.

- Les « extensions régionales », telles que <.eu> ou <.asia>, qui correspondent à une zone géographique recouvrant plusieurs Etats.


  • La nature juridique

En droit français, le nom de domaine est considéré comme un signe distinctif non couvert par un droit de propriété, à l’opposé de la marque déposée, qui est « l’unique signe distinctif à être couvert par un droit privatif » [1]. Dès lors, sa protection est basée sur le droit commun, l’action en responsabilité délictuelle de l’article 1382 du Code Civil. Dans ce sens, l’article 10 de la charte de nommage de l’AFNIC prévoit que le réservataire d’un nom de domaine ne jouit d’aucun droit de propriété intellectuelle.


Or, au niveau européen, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), dans un arrêt du 18 septembre 2007, a énoncé que le nom de domaine constituait un bien au sens de l’article 1 du premier protocole de la Convention de Rome ; ceci « à l’instar des marques et des œuvres de l’esprit ». Donc, la CEDH a reconnu l’existence d’un nouveau droit de propriété attaché au nom de domaine, mais qui ne connaît pas d’existence en droit français. En connaitra-t-il une un jour prochain ?


Une compétence dévolue à des organismes privés : l’ICANN, l’AFNIC et les bureaux d’enregistrement

Le Domain Name System (DNS) – « système de nommage » - a été établi en 1984 avec l’apparition de noms de domaine en extension <.com>, <.org> et <.edu>. Deux ans plus tard, ce sera le tour de l’extension en <.fr>.


En 1993, la société américaine de droit privé, Network Solutions Inc., remporte le contrat avec la National Science Foundation pour l’enregistrement des noms de domaine. Cette société de droit privé va, pendant plus de cinq ans, attribuer seule des noms de domaine pour certaines des extensions gTLD, notamment le <.com>.


Cette situation de monopole privé, ainsi que l’insuffisance du système de nommage vis-à-vis des modalités d’attribution des noms de domaine va aboutir à la création en 1998 de l’Internet Corporation of Assigned Names and Numbers (ICANN), qui pour le coup, est un organisme privé à but non lucratif. L’ICANN sera donc chargée de gérer le système de nommage des noms de domaine de premier niveau pour les codes génériques (gTLD) et les codes nationaux (ccTLD), parmi d’autres fonctions comme allouer l’espace des adresses IP. In fine, l’ICANN a un rôle de superviseur et de coordinateur des antennes nationales pour assurer une bonne gestion du DNS, afin de garantir la « résolution universelle », que chaque internaute puisse trouver toutes les adresses viables.


Le 1er janvier de cette même année 1998, l’Association française pour le nommage internet en coopération (AFNIC) commence à occuper ses fonctions, suite à sa création en décembre 1997 par une intention commune de l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria) et de l’Etat.

Le Préambule de la Charte de l’AFNIC, en sa version du 30 mars 2009, présente la fonction de cette association, régie par les dispositions de la loi du 1er juillet 1901, de la manière suivante : « est chargée d'attribuer et de gérer les noms de domaine, au sein des zones de nommage correspondant au territoire national qui lui ont été déléguées ».

L’AFNIC a reçu l’aval de l’ICANN pour accomplir cette fonction et elle admet son état de dépendance technique envers cette dernière.

Dans la suite du Préambule, il est précisé que : «L’AFNIC a la qualité d'office d’enregistrement et exerce sa mission en application des dispositions des articles L.45 et R.20-44-34 et suivants du Code des Postes et des Communications électroniques » et du fait de cette qualité, elle élabore « un ensemble de règles relatives à l'enregistrement et à la maintenance des noms de domaine qu'elle administre », règles contenues dans sa Charte.


Or, malgré cette mission qui est reconnue à l’AFNIC, il faut appréhender qu’ : « aucune demande d’opération relative à un nom de domaine ne peut être adressée directement à l'AFNIC », mais à « un bureau d’enregistrement, qui agit comme interface entre le demandeur ou le titulaire et l'AFNIC », selon l’article 9 de la dite Charte.

Ces bureaux d’enregistrement, ou « registars » en anglais, sont des sociétés qui ont passé un contrat avec l’AFNIC, sans pour autant être labellisées par elle, leur permettant d’enregistrer les noms de domaine en <.fr> et <.re>.

Il existe environ 1000 bureaux d’enregistrement en situation contractuelle avec l’AFNIC.


La procédure d’attribution des nom de domaine

La recherche d’antériorité

La première étape à observer dans cette procédure d’attribution est celle de la recherche d’antériorité, qui aura pour but de vérifier la disponibilité du nom de domaine, étant logique que deux noms de domaine ne doivent pas être identiques.

Et pour vérifier la disponibilité du nom de domaine souhaité par le déposant, ce dernier devra consulter la base de données appelée « Whois » ; qui est accessible par exemple sur le site de l’AFNIC. Cette base de données est définie par la Charte, comme étant un : « service de recherche fourni par les registres permettant d'obtenir des informations administratives et techniques sur un nom de domaine ou sur une adresse IP ».


Une fois la disponibilité avérée, le nom de domaine choisi pourra être enregistré auprès d’un bureau d’enregistrement, conformément à des dispositions contractuelles ayant pour objet le respect des principes directeurs d’attribution des noms de domaine.


« Premier arrivé, premier servi » : règle pilote des principes directeurs d’attribution des noms de domaine

Les principes directeurs d’attribution des noms de domaine ont été initialement crées par l’ICANN en 1999, qui a élaboré des principes généraux peu contraignants, appelés principes UDRP pour « Uniform policy dispute resolution ».

En effet, le principe « premier arrivé, premier servi » qui est la règle « première » en matière d’attribution des noms de domaine ne peut pas être plus libertaire. Cette règle trouve sa légitimité dans le fait d’être un principe de droit international qui a vocation à s’appliquer dans la gestion des ressources rares. Et la singularité d’un nom de domaine en fait sa rareté.

Ensuite, il est simplement demandé au déposant du nom de domaine « une sorte de déclaration sur l’honneur » [2] vu qu’il doit garantir, sans vérification de la part des bureaux d’enregistrement, certains impératifs. L’article 2 de ces principes prévoit par exemple qu’il incombe au déposant « de déterminer si votre enregistrement de nom de domaine porte en quelque manière que ce soit atteinte aux droits d’autrui » ou que le déposant affirme et garantit que ce dit enregistrement n’est pas fait « à des fins illicites ».


Face à la largesse de ces principes UDRP, appliqués comme « base » par les « antennes nationales de l’ICANN », ces dernières ont souhaité user de leur possibilité d’élaborer une charte d’attribution des noms de domaine, afin d’appliquer à leur domaine national des règles plus intelligibles et précises, donc a priori plus contraignantes.

Pour le domaine <.fr>, l’AFNIC ne s’est pas fait prier et a crée sa charte de nommage, ou plutôt ses chartes de nommage successives. Ainsi, l’article 14 de la charte, version en vigueur, énonce que : « Le demandeur choisit librement le ou les terme(s) qu'il souhaite utiliser à titre de nom de domaine et est seul responsable de son choix. Il lui appartient et à lui seul de s'assurer que le terme qu'il souhaite utiliser à titre de nom de domaine, sans que cette liste ne soit exhaustive : (…) 3) ne porte pas atteinte aux règles de la concurrence et du comportement loyal en matière commerciale ; 4) ne porte pas atteinte aux droits des tiers, en particulier : - n’est pas identique ou susceptible d’être confondu avec un nom sur lequel est conféré un droit de propriété intellectuelle français ou communautaire (propriété littéraire et artistique et/ou propriété industrielle), - n’est pas identique au nom patronymique d'une personne, sauf si le demandeur a un droit ou un intérêt légitime à faire valoir sur ce nom et agit de bonne foi (…) ».

Dés lors, le déposant d’un nom de domaine en <.fr> ou <.re>, est mieux informé sur les droits que le nom enregistré ne doit pas porter atteinte, tel que le droit de propriété intellectuelle ; alors que les principes UDRP visent les « droits d’autrui » en général.


Or, malgré les efforts de précision opérés par l’AFNIC, la règle « premier arrivé, premier servi » qui a pour revers d’exclure tout enregistrement d’un nom de domaine identique à un préexistant, a entrainé le développement des pratiques de « cybersquatting » et de «  typosquatting ; et parfois, alors même que la « déclaration sur l’honneur » ai été respectée par le déposant.


La notion de « typosquatting »

Une notion dans le sillage du « cybersquatting »

Par un avis publié au Journal Officiel le 17 avril 2008, la Commission générale de terminologie et de néologie a crée le terme de « cybersquat », inspiré de son équivalent anglais « cybersquatting », répondant à sa mission d’enrichissement de la langue française.

La commission en a donné la définition suivante : « Pratique consistant à accaparer, en le déposant, un nom de domaine reprenant ou évoquant une marque, un nom commercial, un patronyme ou toute autre dénomination, afin de tirer un profit matériel ou moral de sa notoriété présente ou à venir ». Elle ajoute que cette pratique « consiste par exemple à déposer des noms en très grand nombre dans l'espoir de revendre certains d'entre eux ».

En effet, de nombreux noms de domaine correspondant à des marques et autres signes distinctifs antérieurs ont été enregistrés au détriment, voire à l’insu de leurs légitimes titulaires. Dès lors, du fait de la règle, bien connue désormais, « premier arrivé, premier servi », les entreprises victimes se sont vues refuser par les organismes gestionnaires, l’emploi de leur propre marque ou autre signes, en tant que nom de domaine pour leur site professionnel. S’en est suivi alors de véritable opération de chantage entre les détenteurs des noms de domaine « frauduleux » et les titulaires légitimes, les forçant à payer le prix fort dans le seul espoir de retrouver cette juste possession. Ainsi, le nom de domaine <.business.com> a pu être revendu à 7,5 millions de dollars ou encore celui de <.MP3audiobooks.com> à 8 millions de dollars.

Et on peut noter que la commission générale de terminologie et de néologie fait enter dans cette notion de « cybersquat » celle de « typosquat », car elle indique que : « des variantes orthographiques d'une même dénomination : on parlera dans ce cas de « typosquat » (en anglais : typosquatting) » peuvent aussi être déposées dans l’espoir d’être revendu. Le « typosquat » serait donc dérivé, une acception de la notion de « cybersquat ».


Le « typosquatting » stricto sensu

Grâce à la procédure de règlement des litiges de l’OMPI, essentiellement, les noms de domaine qui avaient été « cybersquattés » ont été récupéré par la majorité des titulaires légitimes de marques et dénominations sociales renommées, ce qui a mis un frein à cette pratique parasitaire. Néanmoins, ceci n’a pas arrêté la malveillance des « cybersquatteurs », qui ont diversifié leur pratique en enregistrant des noms de domaine notoires avec des fautes d’orthographes ; d’où l’avènement du « typosquatting ».

Le « typosquatting » serait donc une pratique consistant : « à enregistrer un nom de domaine typographiquement proche d’une marque ou d’une dénomination sociale dans le but de créer une confusion » [3]. Et cette confusion aurait pour but de détourner l’internaute du site initialement cherché, pour le diriger accidentellement, c’est-à-dire par une faute de frappe, sur un autre qui propose des services similaires. L’exemple souvent cité par les juristes pour illustrer cette pratique de « typosquat » est celui de <rueducommerce.com>, qui a été « typosquatté » en <rueducommerc.com> et <rueducommrece.com>. Ici, l’on voit bien que l’oublie ou l’inversion de lettres peuvent arriver aisément quand on tape le nom de domaine, d’où l’intérêt du « typosquatting » pour dévier une clientèle de sites de sociétés connues et donc économiquement puissante.

Néanmoins, il n’y a pas que des gens mal intentionnés et en quête d’argent facile qui ont recours au « typosquatting », il peut s’agir des entreprises elles-mêmes afin de se prémunir des dommages liés à cette pratique.

Pour d’autres exemples de typosquatting, lire l’article « Vers une nouvelle affaire de typosquatting en fr. ?».


Vers le « Grabbing »

Le « Grabbing » ou « gang name » est une « pratique proche du typosquatting », selon Christiane Féral-Schul. Car au lieu d’enregistrer des noms de domaine avec une simple modification orthographique pour entraîner une erreur, là, la confusion va être plus redoutable, du fait qu’un nom de domaine correspondant à des marques de grande renommée va être enregistré en y ajoutant un mot qui peut être totalement assimilable à ces dernières. Ainsi, l’enregistrement du nom de domaine <lancomeparis.com> parasite celui de <lancome.com> ; même schéma pour <lorealparis.com> par rapport à <loreal.com>. Et cette pratique s’est développée, toujours dans le but de revendre à ces grosses multinationales les noms de domaine en question, à des prix exorbitants.


Le contentieux du « typosquatting »

Le contentieux extra-judiciaire

La procédure de règlement alternatif des litiges à l’aune des principes directeurs d’attribution des noms de domaine

En 1999, suite à l’élaboration des principes UDRP, l’ICANN a mis au point une procédure de règlement alternatif des litiges, tranchant le différend par référence à ces derniers. L’ICANN ne s’occupe pas directement de cette tâche, mais l’a déléguée à des organes désignés par elle, tels que l’Institute For Dispute Resolution (CPR), l’Asian Domain Name Dispute Resolution Centre (ADNDCR) ou encore l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle(OMPI).

Cette « procédure administrative obligatoire », d’après l’article 4 des dits principes, permet au titulaire d’une marque exclusivement, de s’opposer à l’attribution d’un nom de domaine, en y déposant une plainte. Cette plainte peut être rejetée notamment si le déposant du nom de domaine prouve être de bonne foi ou qu’il en fait un usage non commercial et loyal, sans créer de confusion possible, telle que le prévoit les principes UDRP. Dés lors, certains titulaires de marque, même de renommée, ont vu leurs plaintes éconduites, car les instances de règlement alternatif des litiges règlent l’affaire relativement aux principes et non sur le fondement d’un droit des marques, pouvant ne pas être semblable d’un pays à l’autre.

Cette procédure est dite « obligatoire » car une personne qui souhaite se voir attribuer un nom de domaine doit y adhérer impérativement.

De plus, elle est dite « administrative », du fait qu’elle ne relève pas d’une procédure d’arbitrage et encore moins d’une procédure judiciaire. Par conséquent, le plaignant qui n’aurait pas eu gain de cause devant l’organisme administratif, pourra former une action devant la juridiction judiciaire de son pays, statuant cette fois-ci relativement au droit positif national et notamment par rapport au droit des marques. Il y a donc un cumul de la procédure administrative avec celle juridictionnelle, sachant que la dernière l’emporte en cas de « contradiction ».


Quant à l’AFNIC, cette dernière a façonné une procédure de règlement alternatif des litiges qui diffère de celle de l’ICANN, car il existe deux procédures distinctes et que le champ d’application de ces procédures est plus étendu.

En effet, on rencontre une procédure de règlement alternatif des litiges dite « par recommandation en ligne » gérée par le Centre de médiation et d’arbitrage de Paris et une autre dite « par décision technique » administrée par l’OMPI.

Quant au champ d’application, l’instance de règlement ne traite pas uniquement des conflits entre un nom de domaine et une marque, mais aussi entre le dit nom et les autres signes distinctifs et droits visés à l’article 14 de la charte de l’AFNIC , version en vigueur. Et dans la même logique que les principes URDP, la plainte pourra être rejetée si le déposant du nom de domaine contesté prouve sa bonne foi, ou qu’il a un intérêt légitime à l’exploitation du nom litigieux, conformément à la charte de l’AFNIC. Et de la même façon que pour la procédure de l’ICANN, c’est une procédure « obligatoire » (par adhésion impérative) et « administrative », l’instance réglant le différend en se référant à la charte de l’AFNIC en vigueur et non par rapport au droit positif sur le territoire national ; le cumul et la primauté de la décision judicaire étant toujours de mise.

On peut ainsi noter que l’OMPI, dans le cadre de cette procédure, a pu être saisie à plusieurs reprises pour trancher des cas de « typosquatting ». Ainsi, la compagnie aérienne Air France, victime de l’enregistrement du nom de domaine <arifrance.com>, s’est vue transférer le nom litigieux par décision de l’OMPI du 22 juillet 2003.

La plupart du temps, l’OMPI donne raison aux plaignants et transfert à ces derniers le nom de domaine contesté.

Ce qui fut le cas notamment pour les noms de domaine <axabanqu.fr>, <credit-mutu.fr> et <credit-mutul.fr>, transférés aux sociétés plaignantes Axa et Crédit Mutuel, par décision de l’OMPI. S’agissant de l’affaire Axa du 26 février 2007 , l’expert avait pu constaté qu’il était : « incontestable que le nom de domaine litigieux imite et usurpe les droits antérieurs détenus par le Requérant, la seule suppression de la lettre “e” à la fin du nom de domaine <axabanqu.fr> n’altérant en rien le risque de confusion engendré à raison de l’imitation des marques antérieures et de l’usurpation de la dénomination sociale, nom commercial, enseigne et noms de domaine antérieurs », comme il était incontestable « comme cela a été relevé par de nombreux autres experts, qu’il s’agit là d’un cas de “typosquatting” classique ayant pour objet de profiter d’une erreur de frappe de l’internaute pour détourner celui-ci vers un site Internet distinct, et ce généralement à titre lucratif ». De ce fait, l’expert ne pouvait qu’établir la violation des droits du requérant par l’enregistrement du nom de domaine « frauduleux ».

La procédure de règlement des différends des offices d’enregistrement ?

Le décret du 6 février 2007 (voir supra) prévoit que des offices d’enregistrement, personnes morales de droit privé, auront pour mission de collecter « en tant que de besoin auprès des bureaux d'enregistrement » et de conserver « les données de toute nature nécessaires à l'identification des personnes morales ou physiques titulaires de noms de domaine », qui seront confinées dans une base de donnée respectueuse de la loi du 6 janvier 1978 dite « fichiers et libertés ».

Il faut donc bien différencier ces offices d’enregistrement, qui sont « chargées d'attribuer et de gérer les noms de domaine », des bureaux d’enregistrement (vues infra) qui « fournissent des services d'enregistrement de nom de domaine » et qui sont liés contractuellement avec les dites offices, selon l’article R.20-44-34 du Code des Postes et des communications électroniques (CPCE). Le dit Code poursuit à l’article suivant que : « chaque office est choisi, après consultation publique, par arrêté du ministre chargé des communications électroniques ». Or, l’appel à candidature de ces offices pour le <.fr> a été publié au JO le 15 janvier 2009, ce qui fait qu’à ce jour, le ministre chargé des communications électroniques n’en a toujours pas désignées une.

Mais malgré cette inexistence temporaire, il faut considérer que ces offices d’enregistrement auront la possibilité de recourir à une procédure de règlement des litiges, afin de permettre à des personnes qui auront un intérêt, de contester l’enregistrement effectif de noms de domaine litigieux.

En effet, l’article R20-44-36 du CPCE prévoit que : « La désignation d'un office peut être assortie de prescriptions portant notamment sur : (…)- la mise en place de procédures de règlement des différends ». Ce qui signifie que ce sera le ministre chargé des communications électroniques qui donnera ses « prescriptions » quant au déroulement de cette procédure. Ainsi, un organisme qui gère l’attribution des noms de domaine se verra confier également la mission de régler les conflits d’attribution, alors que dans le cadre de l’ICANN ou de l’AFNIC, ces dernières étaient neutres, déléguant la procédure de règlement alternatif des litiges à des instances telles que l’OMPI. « Seront-ils à la fois juges et parties ? », comme l’énonce justement Emilie Tardieu-Guigues.

Néanmoins, ce texte est tellement lacunaire quant au rôle joué par les offices dans cette procédure, qu’il y a de fortes chances qu’à terme, cela aboutisse à une « passivité » [4] de ces dites offices.

Mais, alors que l’on constate l’efficacité de la procédure de règlement alternatif des litiges de l’OMPI et la possibilité de recourir au juge judiciaire, cette « passivité » serait-elle dommageable ?



Le contentieux judiciaire

Face à un acte de « typosquatting », la partie lésée a la possibilité d’intenter une action en justice sur la base de plusieurs fondements.

En effet, le titulaire d’une marque pourra intenter une action en contrefaçon dirigée contre le « typosquatteur », ayant enregistré un nom de domaine quasi-identique à la dite marque, soit une imitation quasi-servile. Cependant, dans l’hypothèse où l’acte de contrefaçon ne serait pas avéré ou qu’il ne s’agirait pas d’une marque qui a été « typosquattée », mais simplement un signe distinctif non rattaché à un droit de propriété, tel qu’une dénomination sociale, le demandeur pourra recourir à deux actions, qui ne sont pas exclusives l’une de l’autre, à savoir une action en concurrence déloyale et celle fondée sur un acte parasitaire.

Ce sont donc trois actions complémentaires, auxquelles la partie lésée peut avoir recours et qui auront des chances d’aboutir, à l’aune des éléments factuels et de l’appréciation souveraine des juges du fond.


L’action en contrefaçon

Cette action « vise à faire constater l’infraction, cesser le trouble et obtenir réparation du préjudice subi du fait de l’atteinte à l’image de marque et de l’indisponibilité du nom de domaine. Ce préjudice peut s’analyser comme une perte de chance de contacter des clients sur l’internet et donc, comme une perte financière subie » [5].


L’action en référé

Le titulaire de la marque, victime de « typosquatting », qui voudrait faire rapidement stopper l’atteinte, « peut saisir en référé la juridiction civile compétente », selon l’article L.716-6 du Code de la Propriété intellectuelle (CPI). Cette action sera engagée à l’encontre de l’éditeur du site au nom de domaine litigieux.

En plus de sa rapidité, un des intérêts de cette action en référé, est que le titulaire de la marque n’aura pas besoin de prouver la caractérisation de l’infraction de contrefaçon – pas avant l’action au fond du moins – mais devra juste apporter la preuve de sa qualité de titulaire de la marque et d’une atteinte vraisemblable ou imminente à ses droits.

Et si le demandeur apporte les preuves requises, le juge en référé pourra « ordonner, au besoin sous astreinte, à l'encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d'actes argués de contrefaçon », d’après le dit article du CPI. Dès lors, à l’aune de cette rédaction qui vise « des intermédiaires dont il utilise les services », il serait donc possible d’intenter une action en référé contre le bureau d’enregistrement et qu’à ce titre, le juge puisse ordonner au registar de geler le nom de domaine litigieux, de le radier, voire de le transférer au titulaire de la marque.


De plus, une personne titulaire d’une marque notoire peut être « fondée à agir sur le fondement de l’article L.713-5 du Code la Propriété Intellectuelle », comme a pu l’énoncer le juge des référés du Tribunal de grande instance de Paris, dans son ordonnance du 10 avril 2006, dans l’affaire Rue du commerce. Le juge a donc pu constater que « l’utilisation frauduleuse des marques constitue un trouble manifestement illicite constitutif des pouvoir du juge des référés ; qu’il sera fait droit à la mesure de transfert des noms de domaine contrefaisant », <rueducommerc.com> et <rueducommrece.com> à la société demanderesse. Mais ce qui est également notable dans cette affaire, c’est que : « si la présente décision est donc des plus classiques » car « il s’agit d’une nouvelle condamnation par les juges de la pratique de cybersquatting ou plus précisément de typosquatting, (…)l’est moins en revanche la condamnation solidaire de la société défenderesse, titulaire des dits noms de domaine et de l’unité d’enregistrement accréditée auprès de l’ICANN »[6]. Les bureaux d’enregistrement des noms de domaine (registars) doivent se méfier désormais, car attribuer des noms de domaine « frauduleux » d’une marque notoire, ça peut coûter cher.

Une action au fond doit être consécutive d’une action en référé.


L’action au fond

Pour obtenir réparation du préjudice du à l’enregistrement d’un nom de domaine contrefaisant, le titulaire de la marque - qui détient « un droit de propriété sur cette marque pour les produits et services qu'il a désignés » selon l’article L.713-1 du CPI – doit avoir subi un acte de contrefaçon.

La contrefaçon, selon l’article L.716-1 du CPI, est « l'atteinte portée au droit du propriétaire de la marque » ; cette atteinte étant constituée par la « violation des interdictions prévues aux articles L.713-2, L.713-3 et L.713-4», soit la reproduction, l’usage ou l’apposition de la marque sans l’autorisation du propriétaire de cette dernière.

De plus, en application du principe de spécialité qui régit le droit des marques, la contrefaçon est caractérisée si l’usage ou la reproduction illicite de la marque est rattachée à des produits et services similaires à ceux de la marque contrefaite. Par conséquent, l’enregistrement d’un nom de domaine avec un radical identique à une marque antérieure et qui désigne un site de produits et services également identiques, constitue un acte de contrefaçon, car il s’agit d’un usage de la marque sans l’autorisation du propriétaire et il y aurait même un acte de reproduction sur le site internet. De ce fait, la pratique de « cybersquatting » est facilement qualifiable de contrefaçon, si le principe de spécialité est respecté, car l’imitation de la marque est servile et le risque de confusion immédiat.


Mais s’agissant d’un acte de « typosquatting », la marque n’étant pas enregistrée en un nom de domaine strictement similaire, mais avec une faute d’orthographe, la déduction de la contrefaçon ne se fait pas immédiatement. Il faut donc recourir au principe prétorien bien établi en matière de contrefaçon, à savoir que l’acte de contrefaçon se détermine par rapport aux ressemblances et non par rapport aux différences.

Dés lors, si le nom de domaine est une imitation quasi-servile de la marque, car on constate une ressemblance manifeste entre les deux, plutôt que seulement quelques différences et qu’il y a donc un risque de confusion, la contrefaçon existe.

Le jugement du Tribunal de grande instance de Nanterre du 17 novembre 2005 peut parfaitement illustrer un acte de contrefaçon, dans le cadre d’une pratique de « typosquatting ». Il s’agissait d’une affaire opposant la société Free, propriétaire de la marque, de la dénomination sociale, du nom commercial et du nom de domaine en <.fr>, éponymes, à la société Eurodns et son représentant français, qui avait réservé et mis en vente des noms de domaine en extension <.fr> typographiquement proches de celui de free, également pour des services de télécommunication.

Ainsi, les juges du fond ont fait la démonstration de l’existence de la contrefaçon de la manière suivante : « Attendu que l’emploi du nom de domaine litigieux, qui permet de se connecter à un service télématique sur lequel des messages sont reçus, diffusés et stockés et d’accéder à des pages internet de publicité, d’information en matière de télécommunication et de messagerie, constitue une contrefaçon par imitation des marques protégées "Free" en raison du risque de confusion qu’il crée dans l’esprit des internautes qui feront un rapprochement dans le secteur des télécommunications entre le signe "Free" et "www.free" ; que le risque de confusion est le même établi en ce qui concerne le nom de domaine "freee.fr" alors que l’adjonction d’une troisième lettre "e" ne modifie pas sa ressemblance phonétique ni son aspect visuel avec les signes invoqués et les deux noms de domaine "freeadsl" et "adslfree" dans la mesure où ils associent le signe "free" au terme "adsl", le rattachant sans aucune ambiguïté au domaine de l’internet et de l’adsl dans lequel le signe "free" est protégé et exploité ».


L’action en concurrence déloyale

Ce type d’action peut être fondée s’il existe entre les parties – en l’occurrence, le titulaire d’une marque ou d’un autre signe distinctif et le titulaire du nom de domaine orthographiquement modifié – une situation de concurrence réelle, c’est-à-dire que leurs activités respectives soient proches.

Ainsi, dans une espèce opposant deux sociétés concurrentes au titre de l’exploitation de site internet de commerce électronique de pneumatiques adressé notamment à une clientèle française, la Cour d’appel de Lyon, dans un arrêt du 31 janvier 2008 a confirmé « le caractère déloyal des actes litigieux en soulignant la mauvaise foi de la société concurrente », qui avait enregistré les noms de domaine « pneuonline », « pneusonline » et « pneu-online » en extensions <.com>, <.fr> et <.de> notamment et « qui avait connaissance du nom de domaine exploité par les sociétés Pneus-Online et ne pouvait ignorer le risque de confusion généré ainsi, alors qu’elle avait en outre faussé le jeu de la concurrence en appliquant un taux de TVA distinct du taux en vigueur en France » [7] ; la société malveillante ayant son siège en Allemagne.

Les actes parasitaires

La tentative de stabilisation du contentieux par l’adoption de législations nationales

La loi belge du 26 juin 2003 relative à l’enregistrement abusif des noms de domaine

La loi de l’Etat de New-York du 16 mars 2007

La loi française du 9 juillet 2004 et son décret d’application du 6 février 2007 : un décret source d’ambigüités et donc d’inefficacité

Voir aussi

Liens externes

Notes et références

  1. BOUVEL, A., SARDAIN., F., « Actualité des noms de domaine : le droit tenté par la diversité », Propr. Intell., juillet 2009/n°32, p.216
  2. TARDIEU-GUIGUES, E., « L’article R.20-44-45 du décret du 6 février 2007 (…)arrêt « Sunshine », RLDI, 2009/50, n°1657, p.64
  3. Christiane Féral-Schuhl, Cyberdroit, le droit l’épreuve de l’Internet, Dalloz-Dunod, 5e éd., 2008, 1000 p., p.566
  4. SARDAIN, F., « Le nouveau régime d’attribution des noms de domaine français », Comm. Com. électr. 2007, étude 8
  5. Christiane Féral-Schuhl, Cyberdroit, le droit l’épreuve de l’Internet, Dalloz-Dunod, 5e éd., 2008, 1000 p., p.572
  6. TGI Paris, réf.,10 avril 2006, Sté Rue du commerce, RLDI, mai 2006/16, n°467, p.30, obs. Costes
  7. CA Lyon, 3eciv., 31 janv. 2008, 06/05922, Gazette Palais, 24 juill. 2008, n°206, p.36