Remix et droits d'auteur (fr) : Différence entre versions
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Version du 16 juin 2009 à 14:29
Le remixage d’une œuvre n’est pas un fait nouveau, bien des artistes ont repris des morceaux pour les modifiés et se les appropriés à leur manière. Mais aujourd’hui, avec l’air du numérique, l’internet et les logiciels, la technique du remix est donné à tous ; et ce fait prend une ampleur d’autant plus grande. La technique du remix se heurte au droit d’auteur en ce qu’elle utilise une œuvre préexistante appartenant à un artiste et pour laquelle il faut respecter le droit d’auteur.
Sommaire
Notions
Définition du remix
En musique, un remix est une version modifiée d’un morceau réalisée en studio ou en live grâce à des techniques d’édition audio. Le remix est parfois rare et permet de vendre plus de disques. La version remixée d’un morceau peut être un réarrangement sous un genre musical différent de la version originale. Des morceaux pop ou R'n'b peuvent par exemple être remixés en dance, house, techno, voire même en acoustique ou en orchestration classique. Il peut aussi s'agir d'une version instrumentale dont le remixeur a ôté toute la partie vocale, ou une partie. Le remix est en fait, l'adaptation d'un morceau préexistant sous la forme voulu par le remixeur qui y apporte sa touche personnelle. Il y a différentes technique de remix qui n’utilisent pas seulement un morceau préexistant mais plusieurs.
Les différentes techniques de remix
Parmi les différents types de remix, on trouve le mash up audio (ou bootleg) qui consiste en l'association, dans un même morceau, de deux ou plusieurs titres existants (généralement les parties vocales d'un morceau sur la musique d'un autre). La plupart des mash up sont illicite, les ayants droit les tolèrent jusqu’à présent, mais ils ne sont pas à l’abri de sanctions. Pour aller plus loin, il y a aussi le ciné-remix qui consiste à remixer des extraits d’une œuvre cinématographique. Le ciné-remixeur modifie généralement l’image et le procédé narratif. Il effectue un réel travail de réalisateur, scénariste, dialoguiste, allant parfois jusqu’à recomposer la bande sonore du film. Ce type de remix est aujourd’hui très employé et souvent vu sur internet grâce aux sites de vidéo en ligne tels que Youtube ou Dailymotion et pose beaucoup de problèmes relatif les droits d’auteur. Le remix crée à partir d’une œuvre préexistante, une œuvre dérivée ou composite. Mais cette création se heurte au droit d’auteur de l’œuvre originaire. Il y a là une réelle complexité juridique de l’application des droits d’auteur sur ce type d’œuvre que sont les remixes.
Une œuvre composite qui se heurte au droit d’auteur
L’œuvre composite est crée à partir d’une œuvre préexistante, sans aucune collaboration de l’auteur de cette dernière. L’auteur de l’œuvre préexistante reste titulaire des droits d’auteurs sur celle-ci et a le droit d’autoriser ou d’interdire l’incorporation de son œuvre dans une œuvre nouvelle. Selon l’article L 113-4 du Code de la propriété intellectuelle, « L’œuvre composite est la propriété de l'auteur qui l'a réalisée, sous réserve des droits de l'auteur de l’œuvre préexistante ». L’auteur de l’œuvre composite a, quand à lui, un droit de représentation et de reproduction sur son œuvre. Dans ce cas là, le titulaire des droits sur l’œuvre originaire peut prétendre à ce qu’une rémunération lui soit versée à chaque fois que cette représentation ou reproduction est exercé. Pour être protégeable par le droit d’auteur, l’œuvre composite doit répondre à certains critères. Elle doit être originale et respecter les droits des auteurs, les droits des artistes-interprètes et les droits des producteurs de l’œuvre préexistante.
Originalité de l’œuvre composite
S’il est original, le remix peut et être protégé par le droit d’auteur comme étant un œuvre composite. La notion d’originalité est définie par la jurisprudence comme l’empreinte de la personnalité de l’auteur. La personnalité de l’auteur du remix pourrait donc se distinguer dans le choix de l’œuvre préexistante et dans le choix de la transformation du morceau. L’auteur du remix exerce un réel travail sur la rythmique et parfois sur la mélodie, allant ainsi jusqu’à créer un œuvre nouvelle. L’œuvre composite originale doit aussi respecter les droits d’auteur de l’œuvre préexistante.
Le droit d’auteur attaché à l’œuvre préexistante
Pour utiliser l’œuvre d’un artiste et faire un remix avec celle-ci, il faut une autorisation de ce dernier. Dés lors que la mélodie est reconnaissable, l’autorisation des ayants droits est nécessaire. Car, selon l’arrêt du TGI de Paris du 5 juillet 2000 La personnalité de l’auteur peut se manifester quelque soit le nombre de notes. Cela signifie donc, que si le remix a transformé l’œuvre originaire de telle manière que celle-ci n’est plus identifiable, l’œuvre ne peut être qualifié de contrefaçon. Elle peut être diffusé sans aucune autorisation car c’est une œuvre nouvelle qui est alors crée. La Cour d’appel de Toulouse, dans un arrêt du 16 mars 2000 a débouté des discs jockeys du délit de contrefaçon car ils avaient diffusé, au cours de soirées, des œuvres protégées et avaient produit, à partir des morceaux préexistants et par diverses manipulations, « une musique nouvelle et différente ne rendant plus reconnaissable la musique d'origine par un auditeur moyen ». Dans le cas où l’œuvre préexistante est bien reconnaissable, l’auteur du remix de celle-ci devra respecter les droits d’auteur (attachés à l’œuvre protégées) et, par extension, les droits voisins.
Le respect des droits d’auteur
L’auteur du remix se doit de respecter, d’abord, les droits patrimoniaux de l’auteur de l’œuvre préexistante. C'est-à-dire le droit de représentation, le droit de reproduction. Ces droits permettent à l’auteur de percevoir une rémunération pour sa création. Puis, l’auteur doit aussi respecter le droit moral, c'est-à-dire, selon l’article L 121-1 de Code de la propriété intellectuelle, le droit au respect de son nom, de sa qualité et de son œuvre. Le droit moral étant un droit perpétuel, inaliénable et imprescriptible, il est nécessaire de requérir l’autorisation de l’auteur pour toute adaptation de l’œuvre, incorporation dans une autre œuvre musicale et synchronisation avec une œuvre audiovisuelle. Au regard du respect de la paternité, les titres des œuvres et les noms des auteurs doivent être mentionnés sur les pochettes, jaquettes, livrets, sauf si ces derniers y ont expressément renoncé. Grace à ce droit moral, l’auteur de l’œuvre préexistante pourra s’opposer a toute utilisation de son œuvre qu’il jugera comme portant atteinte à l’intégrité de celle-ci. Ainsi il pourra interdire le remix de son œuvre lorsqu’il jugera que celui-ci la détériore. Lorsqu’on parle d’autorisation on entend, d’abord l’autorisation de l’auteur de l’œuvre musicale mais aussi, l’autorisation de l’éditeur musical à qui l’auteur aura cédé ses droits patrimoniaux. En cas de ciné remix ; pour une œuvre audiovisuelle reproduite, par extrait ou en entier, il est nécessaire de requérir les autorisations de l’auteur du scénario, de l’auteur de l’adaptation, de l’auteur du texte parlé, de l’auteur des compositions musicales et du réalisateur. La demande d’autorisation sera adressée au producteur de l’œuvre audiovisuelle car il est présumé être cessionnaire des droits.
Le respect des droits voisins
L’auteur du remix doit respecter les droits des artistes interprètes et des producteurs de l’œuvre qu’il a choisi de remixer. Les artistes interprètes disposent eux aussi du droit moral mais celui-ci est restreint. Il se compose d’un droit de paternité et du droit au respect de leur interprétation. L’exercice du droit moral des artistes interprètes ne doit pas porter atteinte à l’exercice du droit moral des auteurs.
Une nouvelle exception permettant l’utilisation d’un contenu existant protégé par le droit d’auteur ?
Parmi les exceptions au droit d’auteur, il y a notamment, l’exception de coutre citation qui permet de citer un œuvre protégé par le droit d’auteur. Mais Traditionnellement, cette exception n'est pas considérée comme transposable en matière musicale car la source et le nom de l'auteur ne peuvent être mentionnés. La citation peut être justifiée par son caractère polémique, critique, scientifique ou d'information de l'œuvre à laquelle elle est incorporée, ce qui n’est peu concevable en matière musicale. On ne peut donc pas opposer l’exception de citation pour justifier l’utilisation d’une œuvre protégé dans un remix.
La parodie, la caricature ou le pastiche est un moyen d’utiliser une œuvre protégé sans autorisation de son auteur. A condition de poursuive une intention humoristique. Ici on se rapproche d’une exception qui pourrait être valable, car le remix d’une œuvre est parfois fait dans un but humoristique. De même, certains mash-up superposent une bande sonore sur les images d’une bande annonce de film ; ce qui constitue bien une parodie.
La Commission européenne, dans un livre vert du 16 juillet 2008, consacré au « droit d’auteur dans l’économie de la connaissance », a lancé une consultation portant notamment sur la création d’une nouvelle exception au droit d’auteur permettant l’utilisation de contenu protégé pour créer des œuvres dérivées ou nouvelles. Cette exception, qui serait introduite pour les œuvres dites «transformatives » aurait pour effet de se libérer de l’obligation d’autorisation des auteurs de l’œuvre originaire, mais à condition que le test en trois étapes prévu par la Convention de Berne soit respecté. C'est-à-dire dans « certains cas spéciaux, à condition que de telles reproductions n'entrent pas en conflit avec une exploitation normale de l'œuvre et ne causent pas un préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'auteur ». Mais malgré l’intérêt qu’elle peut susciter, l’introduction d’une telle exception ne paraît pas souhaitable en droit français car elle pourrait porter atteinte aux droits de l’auteur de l’œuvre préexistante.
Remix avec autorisation
L’auteur du remix, pour être dans la légalité doit requérir l’autorisation de l’auteur de l’œuvre d’origine qu’il a choisi d’utiliser ainsi que l’autorisation de l’éditeur musical. Ces autorisations doivent mentionner :
- Les doits cédés (audio et/ou vidéo)
- La durée des droits ainsi que la durée de l’exploitation de ceux-ci
- La destination envisagée de l’œuvre (si c’est pour une intégration de morceaux modifiés dans une œuvre audiovisuel ou dans un album de compilation multi-artistes)
- Les modes d’exploitation de l’œuvre envisagés (si c’est une exploitation commerciale par exemple)
- La rémunération
- Les territoires d’exploitation
Le remix peut parfois être sollicité dans un but promotionnel par les producteurs cinématographiques américains pour créer des bandes-annonces alternatives. Il peut alors ce produire un « buzz » qui aura un impact positif sur l’œuvre d’origine. Les remixes peuvent également devenir des outils de revalorisation des back catalogue (catalogue d’artiste « anciens »), ce qui permet de faire découvrir ou redécouvrir au public des œuvres oubliées Pour la sortie du film Slumdog Millionaire réalisé par Danny Boyle, produit par la société «Film4 » et distribué par la Fox et Warner, la société anglaise Addictive TV a été contacté pour réaliser un remake de la bande annonce du film en question dans lequel ils ont reconstitué un clip vidéo musical à partir de séquences du film. Ce remix a contribué à la promotion du film. Le remix permet de revisiter des œuvres oubliées ou inconnues du public ou de promouvoir des œuvres récentes. Mais le droit semble constituer un frein à ce type d’œuvres qui représente un outil de promotion et un vecteur de création artistique de plus en plus utilisé.
Voir aussi
RiP A remix manifesto Film documentaire canadien de Brett Gaylor sur les droits d'auteur et la culture du remix
Sources
Lamy, Droit de la communication
Le mash up face au droit d'auteur (article), Ismay Marçais
Les contrats de la musique, Pierre-Marie Bouvery