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Régime juridique de l'œuvre audiovisuelle (fr)

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Version du 5 juin 2008 à 13:23 par Fanny (discuter | contributions)

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Au sein des œuvres protégées par le droit d’auteur, une place toute particulière a été accordée à l’œuvre audiovisuelle. L’article L.112-2 du Code de la propriété intellectuelle (CPI), dispose que « sont considérées notamment comme œuvres de l’esprit au sens du présent code (…) les œuvres cinématographiques et autres œuvres consistant dans des séquences animées d’images, sonorisées ou non, dénommées ensemble œuvres audiovisuelles». En raison de l’étendue de travail que peut demander la conception d’une œuvre audiovisuelle, un grand nombre de personnes est appelé à contribuer à sa création. Lorsque l’œuvre nécessite la présence de plusieurs auteurs, différents régimes peuvent s’appliquer. L’article L.113-2 du CPI dispose qu’ « est dite de collaboration, l’œuvre à la création de laquelle ont concouru plusieurs personnes physiques; est dite composite l’œuvre nouvelle à laquelle est incorporée une œuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière ; est dite collective l’œuvre créée sur l’initiative d’une personne physique ou morale qui l’édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l’ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu’il soit possible d’attribuer à chacun d’eux un droit distinct sur l’ensemble réalisé». Au regard de cet article, l’œuvre réalisée à plusieurs peut être soit une œuvre de collaboration, soit une œuvre composite, soit une œuvre collective.


L'oeuvre audiovisuelle et le droit d'auteur

Qualification de l'oeuvre

Selon l’article L.113-7 du CPI, l’œuvre audiovisuelle est présumée être une œuvre de collaboration. En effet, la qualification en œuvre de collaboration semble être la solution que le législateur a entendu imposer ; la loi du 27 mars 1997, qui transpose dans le CPI la directive communautaire du 29 octobre 1993, a inséré les dispositions relatives à la durée de protection de l’œuvre audiovisuelle au sein de l’article L. 132-2 du CPI qui traite des œuvres de collaboration. C’est indiscutablement admettre que l’œuvre audiovisuelle constitue un type particulier d’œuvre de collaboration. La jurisprudence a quant à elle, affirmé que l’œuvre audiovisuelle est nécessairement une œuvre de collaboration et ne pourra jamais se voir appliquer le régime de l’œuvre collective. Elle présuppose donc une participation effective de ces personnes à la réalisation concrète de l’œuvre.

Un régime spécifique

Selon l’article L 113-2 6° CPI, un régime spécifique est réservé à cette œuvre. Le statut spécial des œuvres audiovisuelles se manifeste surtout dans la détermination des titulaires des droits d’auteur. D’abord la loi précise que certains contributeurs sont présumés auteurs et ensuite le code organise une cession des droits patrimoniaux au profit du producteur. De plus l’originalité du régime réside dans le fait que le droit moral des auteurs est suspendu pendant la phase de réalisation de l’œuvre et que l’œuvre est présumée, par les tribunaux, être une œuvre de collaboration. Enfin les rapports avec les producteurs sont réglés par un contrat de production audiovisuelle, lequel entraine présomption simple de cession des droits exclusifs des coauteurs.

Attribution et exercice des droits

L’article L 113-7 du CPI, énumère la liste des cinq auteurs présumés de l’œuvre (l’auteur du scénario, l’auteur de l’adaptation, l’auteur du texte parlé, l’auteur des compositions musicales avec ou sans paroles spécialement réalisées pour l’œuvre, le réalisateur). On remarquera toutefois qu’à la différence du « Work made for hire » du droit américain, le producteur n’est pas investit de la qualité d’auteur. Quand l’œuvre audiovisuelle, est tirée d’une œuvre préexistante encore protégée, le ou les auteurs de l’œuvre originaire sont assimilés aux auteurs de l’œuvre nouvelle, soit en effet ils participent à l’œuvre nouvelle, c'est-à-dire à son adaptation (donc visés par la présomption), soit ils n’y participent pas, mais par fiction, ils sont investis des même droits que les collaborateurs de l’œuvre nouvelle entendue au sens stricte. La présomption légale de coauteur est une présomption simple, elle peut donc supporter la preuve contraire, que tel coauteur présumé n’a en réalité rien crée. L’inverse est également possible puisque la liste du CPI n’est pas limitative. Tout intervenant peut donc revendiquer la qualité de coauteur dès l’instant où sera établit qu’il n’est pas intervenu en simple technicien, c'est-à-dire simple exécutant des ordres du réalisateur, mais qu’il a fait acte de création intellectuelle. L’œuvre audiovisuelle apparaît juridiquement comme la propriété indivise des coauteurs, ce qui justifie en théorie l’existence de la règle de l’unanimité pour ce qui concerne l’exploitation de l’œuvre dans son ensemble.

Pour le producteur, en général c’est une personne morale qui est donc automatiquement exclue de la qualité d’auteur, mais si c’est une personne physique, il pourra prétendre à la qualité de coauteur en établissant qu’au-delà de son apport financier, il a fournit un apport intellectuel. (civ 1e, 16 juillet 97, RJDA 01/98 p 311).

Contenu de la protection

- Sur application du droit moral

Pour l’exploitation du film, chaque coauteur est fondé à protester contre une atteinte portée au respect de l’œuvre, ou au droit à la paternité de l’œuvre, mais en pratique la spécificité de l’œuvre audiovisuelle, appelle certains correctifs rendus nécessaires car le but est d’éviter que l’exercice normal du droit moral par l’un des contributeurs, ne soit de nature à remettre en cause l’élaboration de l’œuvre. C’est pour cela que l’article L 121-5 dispose en son alinéa 5 que les droits propres des auteurs ne peuvent être exercés que sur l’œuvre achevée. (on considère que l’œuvre est achevée quand la version définitive a été établie d’un commun accord entre réalisateur et producteur ; l’accord éventuel d’un autre coauteur peut être requis au cas d’apport décisif de celui-ci). Par conséquent, pendant la phase d’élaboration de l’œuvre, la seule prérogative qui soit permise pour un auteur, c’est le cas de retrait, auquel cas, il ne pourrait s’opposer à l’utilisation de la partie de sa contribution déjà réalisée, toutefois, il conserve le droit au respect de sa part contributive, ainsi que le droit à la paternité pour cette même part. Au stade de l’exploitation, le droit moral recouvre sa plénitude, le plus souvent à travers le droit au respect de l’œuvre : toute coupure, publicité, incrustation de toute sorte sera soumise à une autorisation expresse.

- Sur application du droit patrimonial

Par application de l’article L 113-3b du CPI, les coauteurs doivent exercer leurs droits d’un commun accord ce qui entraîne que les contrats d’exploitation et de cession doivent être passés par tous les coauteurs. Pour autant, la loi du 3 juillet 1985 est venue modifier le domaine de l’exploitation de l’œuvre audiovisuelle en règlementant le contrat de production audiovisuelle. Le producteur, en principe n’est pas un coauteur présumé, mais dès l’instant où il prend une initiative et la responsabilité de la réalisation de l’œuvre, il est cessionnaire des droits exclusifs d’exploitation de l’œuvre. Cette présomption légale de cession, emporte toutefois, certaines limites ; d’une part, l’article L132-24 du CPI prévoit la possibilité de faire jouer une clause contraire qui vise à permettre à un des coauteurs de se réserver le droit d’exploitation sur sa propre contribution, d’autre part, la présomption de cession dont est investit le producteur, ne concerne jamais que la seule exploitation de l’œuvre prise dans son ensemble. Enfin la présomption de cession ne concerne en principe pas les auteurs des compositions musicales qui le plus souvent sont membres de sociétés de gestion collective de droits, qui en tant que cessionnaires de leurs droits sont habilitées à leur rétrocéder leurs recettes après collecte. La rémunération proportionnelle est due à chaque coauteur pour chaque mode d’exploitation nonobstant la présomption de cession et ce en vertu de l’article L 132-25 du CPI. Quand le public paie un prix pour recevoir communication de l’œuvre audiovisuelle, la rémunération est proportionnelle à ce prix, sous réserve de tenir compte le cas échéant, des tarifs distributeurs accordés à l’exploitant fixés par décret. Dans certains cas la rémunération peut être forfaitaire, notamment, dans certaines hypothèses spécialement et limitativement posées par la loi, étant précisé in fine, que le choix reste possible et que dans la plupart des contrats de distribution c’est la rémunération proportionnelle qui prévôt. Enfin, en cas de télédiffusion d’une œuvre audiovisuelle, il apparaît presque impossible, de tenir compte du succès de l’œuvre permettant de fixer une rémunération proportionnelle, certes l’audimat existe, mais c’est un critère insuffisant, d’où en pratique le contrat général de représentation que passe le télédiffuseur avec les différentes sociétés de gestion, au terme duquel, il est prévu que ce même télédiffuseur peut puiser dans le répertoire de ces sociétés moyennant un pourcentage qui peut varier entre 3 et 6%.

- Durée de la protection


La qualification en œuvre de collaboration se révèle très bénéfique pour les auteurs et les ayants droit (et donc pour le producteur) puisque l’œuvre audiovisuelle va ainsi échapper aux règles dérogatoires du droit commun qui concernent la durée de la protection des œuvres collectives.

Obligations tenant aux quotas de diffusion d'oeuvres audiovisuelles

L’objectif des quotas de diffusion participe de la défense de l’identité culturelle des programmes de télévision. La mise en place des quotas de diffusion remonte aux années 70. Les cahiers des charges des sociétés de programme avaient alors fixé un objectif de programmation de 60% d’œuvres de fiction d’origine française. En 1971, une convention fixa un quota de 50% de films français dans la programmation cinématographique des chaînes. Ensuite, le principe des quotas de diffusion a été inscrit dans l’article 27 de la loi de 30 septembre 1986, lequel précise que les décrets d’application fixeront les obligations concernant la diffusion d’œuvres d’expression originale française et européenne. Il s’agit désormais du décret du 17 janvier 1990, modifié en 2001.

La directive TSF du 3 octobre 1989

Cette directive précise la réglementation des quotas au niveau européen. L’objectif essentiel étant de concilier la libre circulation des idées, principe figurant à l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, ainsi que la liberté de réception des programmes audiovisuels, avec la construction de l’espace audiovisuel au nom du marché unique. C’est l’article 4 de la directive qui régit les quotas de diffusion. Il s’agit d’un texte très peu contraignant qui s’applique en outre à des œuvres définies beaucoup plus largement qu’en France, puisque la définition européenne de l’œuvre englobe l’œuvre audiovisuelle et l’œuvre cinématographique et inclut les émissions « de plateau », ce que ne fait pas la réglementation française. En effet, la France a établi des obligations beaucoup plus strictes ce qui est permis par l’article 3 de la directive : « les Etats membres ont la faculté (…) de prévoir des règles plus détaillées ou plus strictes dans les domaines couverts par la présente directive ».

La modification de 2001

- Homogénéisation de l’obligation

Pour chacun de leur programmes, les éditeurs de services de télévision doivent réserver, dans le temps total annuellement consacré à la diffusion d’œuvres audiovisuelles au moins 60% à la diffusion d’œuvres audiovisuelles européennes et 40% à la diffusion d’œuvres d’expression originale française.

- Cas des éditeurs de services de télévision distribués par câble ou diffusés par satellite

La convention passée par le CSA avec ces services peut fixer des proportions de diffusion d’œuvres audiovisuelles inférieures à ces quotas, sans toutefois que la proportion prévue pour les œuvres européenne puisse être inférieure à 50%, en contrepartie de l’engagement pris par l’éditeur de services d’investir dans la production un volume minimal d’œuvres d’expression originale française inédites produites par des entreprises de production indépendantes au sens du décret de 2001.

- Les heures de grande écoute

Les obligations de diffusion d’œuvres d’expression originale française d’une part, d’œuvres européennes d’autre part, doivent être respectées aux heures de grande écoute. Sont considérées comme heures de grande écoute, pour les services de cinéma, quel que soit le vecteur de diffusion ou de distribution de ces programmes, les heures comprises entre 20h30 et 22h30. Pour les autres éditeurs de services de télévision quel que soit leur support de diffusion, sont considérées comme heures de grande écoute les heures comprises entre 18h et 23h ainsi que le mercredi les heures comprises entre 14h et 18h.

Obligation de production des oeuvres audiovisuelles

L’article 5 de la directive du 3 octobre 1989 précise que les Etats membres doivent veiller, chaque fois que cela est réalisable et par des mayens appropriés à ce que les diffuseurs réservent au moins 10% de leur temps d’antenne (à l’exclusion du temps consacré aux informations, aux manifestations sportives, à des jeux, à la publicité, aux services de télétexte et au télé-achat) ou 10% au moins de leur budget de programmation à des œuvres européennes émanant de producteurs indépendants d’organismes de télévision. Au niveau national, cette obligation a pour objectif principal de contribuer à la construction d’une industrie française des programmes forte et diversifiée, apte à répondre aux besoins des diffuseurs. Cette obligation intervient dans les différents services de télévision tels que les services de télévision par voie hertzienne terrestre ou par câble et satellite. Pour ces derniers, depuis 2003, on constate une obligation pour les éditeurs de services de consacrer chaque année au moins 16% de leur chiffre d’affaires annuel à des dépenses contribuant au développement de la production d’œuvres audiovisuelles européennes ou d’expression originale française, la part de cette obligation spécifiquement réservée à des œuvres d’expression originale française étant fixé par la convention sans pouvoir être inférieure aux trois-quarts du montant total de l’obligation.


Sources

Droit de la communication, Charles Debbasch, Hervé Isar, Xavier Agostinelli, Précis Dalloz

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