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Régime juridique des archives audiovisuelles de la justice (fr)

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Pendant longtemps, les chroniqueurs judiciaires étaient les seuls à même de rendre compte des procès, rivalisant d'imagination, au moyen du récit ou du dessin, dans la description des parties, des faits, afin de rendre compte le mieux possible de l'actualité des prétoires. Les moyens audiovisuels sont ensuite apparus comme un moyen de rapporter de manière plus fidèle ce qu'il se passait dans les tribunaux. Les journaux télévisés mettent de plus en plus en avant des affaires judiciaires, le plus souvent pénales. Celles-ci sont également régulièrement exploitées par l'édition, le cinéma, la télévision... Il est donc apparu essentiel de réglementer l'enregistrement des débats judiciaires par des moyens audiovisuels

Le débat sur l'accès des caméras aux audiences

Les arguments pour

Autoriser les caméras à accéder aux tribunaux aurait une vertu pédagogique. En effet, il y a actuellement une perte de confiance des citoyens envers leur justice, le sentiment que la justice n'est plus là pour protéger le citoyen est de plus en plus pregnant. Le fort résonnement médiatique de cas d'erreurs judiciaires, comme l'affaire Patrick Dils, ou le fiasco de l'affaire d'Outreau, amplifient ce phénomène. La justice est donc souvent vue comme lointaine, froide, complexe, comme une machine qui broie les êtres humains, même innocents. Filmer et diffuser les audiences pourrait ainsi avoir pour effet de renverser cette tendance, en montrant la réalité de la justice au quotidien, en lui donnant un visage plus humain.

Il est d'ailleurs possible de consulter les minutes des procès sous la forme écrite, les décisions de justice sont également publiées. La publicité des audiences est donc déjà de rigueur, il s'agit d'une garantie de la régularité et de l'impartialité de la justice. Les jugements sont d'ailleurs rendus au nom du peuple français. Sur le plan juridique, la publicité des débats est notamment assurée par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, comme une garantie de procès équitable. La justice ne doit donc rien avoir à cacher. Le secret instaure lui la suscpicion et le doute, les juges n'étant pas contraints par le regard du peuple. En autorisant les caméras à pénétrer dans les prétoires, la justice s'adapterait à l'évolution des technologies, la caméra étant un moyen plus moderne de garantir la publicité des procès. Le droit à l'information des citoyens fonde donc également l'accès des caméras aux tribunaux. Ceux-ci doivent être alertés des dérives du système judiciaire.

Les arguments contre

D'abord, la publicité des des débats peut parfaitement être atténuée pour des considérations d'ordre public ou pour le respect de la vie privée, en matière de divorce par exemple. Ainsi, le président du tribunal peut régulièrement ordonner un huis clos. Un juge pourrait donc tout a fait interdire l'acces des cameras à son tribunal pour ces motifs. Ensuite, la présence de caméras ne risque-t-elle pas de transformer le procès en spectacle médiatique ? Il y a le risque que les avocats, les accusés, les parties civiles, se prennent pour des comédiens, afin d'influencer l'opinion publique au risque de fausser les débats. Cela peut également poser un problème du point de vue de la présomption d'innocence.

La législation

La constitution des archives

La première entrée d’une caméra dans un prétoire remonte à l’année 1945-1946, lors des procès intentés par les Alliés contre les criminels de guerre nazis et japonais à Nuremberg et à Tokyo, dans le cadre de tribunaux militaires internationaux créés spécialement à cette occasion. Autorisés à pénétrer dans les tribunaux jusqu’en 1953, les photographes ne le furent plus ensuite. Depuis 1981, leur présence, comme celle des reporters de télévision, se limite au début et à la fin de l’audience.

En principe, selon l'article 308 du Code de procédure pénale, à l'ouverture de l'audience, l'emploi de tout appareil d'enregistrement ou de diffusion sonore, de caméra de télévision ou de cinéma, d'appareils photographiques est interdit. Mais comme tout principe, il comporte des exceptions encadrées par la loi du 11 juillet 1985 « tendant à la constitution d'archives audiovisuelles de la justice » complété par le décret n° 86-74 du 15 janvier 1986. Cette loi a été votée sur proposition du garde des Sceaux de l’époque, Robert Badinter, dans la perspective du procès de l'ancien SS et chef de la gestapo lyonnaise, Klaus Barbie. Le régime est aujourd'hui codifié au titre II du livre II du Code du patrimoine.

La loi prévoit d'abord que « les audiences publiques devant les juridictions de l'ordre administratif ou judiciaire peuvent faire l'objet d'un enregistrement audiovisuel ou sonore dans les conditions prévues par le présent titre lorsque cet enregistrement présente un intérêt pour la constitution d'archives historiques de la justice » (article L 122-1). Ainsi, l'accès des caméras aux tribunaux est très restreint puisqu'il se limite aux procès présentant un intérêt au regard de l'Histoire. La décision d'autoriser l'enregistrement du procès revient au premier président de la Cour de Cassation ou au vice-président du Conseil d'Etat, selon la juridiction. Pour les Cours d'appel et toute autre juridiction de son ressort, la décision est de la compétence du Premier président de la Cour d'appel. La décision peut être prise d'office ou à la requête de l'une des parties, toute demande demande devant être présentée au plus tard huit jours avant le début de l'audience. L'ordonnance du 20 février 2004, ratifié par la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit est venue imposer la consultation, par l'autorité compétente en matière de décision d'enregistrement des audiences, d'une Commission consultative des archives audiovisuelles de la justice. Les enregistrements doivent être réalisés « dans des conditions ne portant atteinte ni au bon déroulement des débats ni au libre exercice des droits de la défense. Ils sont réalisés à partir de points fixes ». (article L 221-4). Dans le cas contraire, le président de l'audience peut, dans l'exercice de son pouvoir de police, s'opposer aux enregistrements ou les interrompre momentanément. Les enregistrements sont, ensuite, transmis à l'administration des Archives de France, responsable de leur conservation,

Ont ainsi pu être filmés, selon ces règles, le procès Klaus Barbie ou celui de l'ancien préfet de police de la Gironde sous Vichy, Maurice Papon, accusé d'avoir fait déporter 1600 juifs. Toutefois, depuis quelques temps, on observe que des présidents de juridictions autorisent des tournages pour des affaires ne présentant pas d'intérêt historique. On peut citer le magazine « 3600 secondes », sur France 3, qui a consacré un de ses numéros à des comparutions immédiates au Tribunal de grande instance de Lyon. Au cinéma, Raymond Depardon a présenté en salles un film, intitulé, 10ème chambre, instants d'audience, tourné dans l’enceinte de la 10ème chambre correctionnelle du tribunal de Paris, grâce à l’autorisation du président de la Cour d’appel, Jean-Marie Coulon. Un aménagement de la loi serait donc souhaitable pour permettre plus clairement ce type de tournage.

La communication et la reproduction des archives

L'utilisation des archives est très encadrée. D'abord, selon l'article L 222-1, pendant les vingt ans qui suivent la clôture du procès, la consultation intégrale ou partielle de l'enregistrement audiovisuel ou sonore, à des fins historiques ou scientifiques, peut être autorisée par l'autorité administrative. Une fois ce délai écoulé, la consultation est libre, mais la reproduction ou la diffusion doit faire l’objet d’une autorisation pendant encore trente ans. La loi du 13 juillet 1990 est venue alléger cette réglementation puisqu’elle autorise la reproduction et la diffusion de l’enregistrement des audiences des procès pour crimes contre l’humanité dès que ce procès a pris fin.

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