Pouvoirs de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (fr) : Différence entre versions
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(→La publicité des sanctions prononcées par la C.N.I.L) |
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La seule modification apportée par lAssemblée au 1° de larticle 45 nouveau est de '''consacrer limpossibilité pour la C.N.I.L de sanctionner financièrement lEtat''' . Cet amendement se fonde sur labsence de personnalité morale de la C.N.I.L qui conduirait lEtat à être condamné à se verser une somme dargent à lui-même. Cet amendement se comprend dautant mieux que des recours juridictionnels restent ouverts et si la publicité des avis, décisions et avertissements de la C.N.I.L reste possible. '''LEtat est donc désormais à labri des sanctions pécuniaires, comme du verrouillage des données ou de linterruption du fichier prononcé par la C.N.I.L.''' La publicité des sanctions que pourrait éventuellement prononcer la C.N.I.L est également très encadrée. | La seule modification apportée par lAssemblée au 1° de larticle 45 nouveau est de '''consacrer limpossibilité pour la C.N.I.L de sanctionner financièrement lEtat''' . Cet amendement se fonde sur labsence de personnalité morale de la C.N.I.L qui conduirait lEtat à être condamné à se verser une somme dargent à lui-même. Cet amendement se comprend dautant mieux que des recours juridictionnels restent ouverts et si la publicité des avis, décisions et avertissements de la C.N.I.L reste possible. '''LEtat est donc désormais à labri des sanctions pécuniaires, comme du verrouillage des données ou de linterruption du fichier prononcé par la C.N.I.L.''' La publicité des sanctions que pourrait éventuellement prononcer la C.N.I.L est également très encadrée. | ||
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=====La publicité des sanctions prononcées par la C.N.I.L ===== | =====La publicité des sanctions prononcées par la C.N.I.L ===== | ||
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+ | La C.N.I.L rend publique les avertissements quelle adresse au terme de linstruction des plaintes dont elle a connaissance. La commission a ainsi rendu public le 19 juin 2004 quatre avertissements adressés à des banques ([http://www.cnil.fr/index.php?id=1592 C.N.I.L, « La CNIL délivre un avertissement à quatre banques», 19 juin 2004) . De nouvelles sanctions appellent de nouvelles interrogations quant à la publicité qui peut leur être donné. | ||
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+ | '''La publicité des sanctions subordonnée à « la mauvaise foi de la part du responsable du traitement »''' | ||
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+ | La mauvaise foi est définie comme étant ''« lattitude de celui qui manque de loyauté envers autrui, surtout lorsque ses agissements révèlent la conscience ou la volonté de nuire »'' (G.CORNU, « Vocabulaire Juridique », Association Henry CAPITANT, PUF, p. 555)
ce qui laisse une large place à linterprétation. Une fois encore, il conviendra de suivre lévolution de la doctrine de la C.N.I.L. | ||
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+ | '''Une publicité réduite pour les traitements de lEtat''' | ||
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+ | Larticle 45 II dans sa version dorigine consacrait la possibilité pour la C.N.I.L, en cas durgence, de '''saisir le premier ministre''' pour ''« quil prenne les mesures permettant de faire cesser, le cas échéant, la violation constatée si le traitement en cause est au nombre de ceux qui sont mentionnés au I et II de larticle 26 »'' (Article 45 II 2°). Toujours dans la version originale de cet article, '''le premier ministre devait alors rendre publiques les suites données à cette saisine dans un délai de quinze jours à compter de la réception.''' | ||
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+ | Le Sénat a estimé cette nouvelle exigence de publicité ''« inédite et mal adaptée à des fichiers dont certains affectent la défense nationale ou la sûreté de lEtat (
) la lutte contre la délinquance ou le terrorisme »'' ( [http://www.senat.fr/rap/l02-218/l02-218.html Rapport de M. Alex Türk, n° 218 (2002-2003), déposé le 19 mars 2003 page 139]) et la donc supprimée. LAssemblée na pas souhaité modifier cette nouvelle disposition introduite par le Sénat. '''Désormais, la C.N.I.L ne peut quinformer, et non plus saisir, le premier ministre qui na plus à rendre publiques les suites quil a donné à cette information. ''' | ||
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+ | Le Sénat considère que la ''Texte italique'' «C.N.I.L demeure libre dinformer par le biais de son rapport annuel des signalements effectués à lattention du premier ministre et des suites que celui-ci y a apporté ». Cette information est dune nature très différente. En effet, seuls les professionnels des données personnelles analysent en profondeur le rapport annuel de la commission, alors que la réponse du premier ministre est susceptible dêtre plus médiatisée. | ||
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+ | Enfin, largumentation sénatoriale est incomplète dans la mesure où elle nexplique pas la nature du risque que ferait porter la publicité de la réponse du premier ministre sur les traitements de souveraineté. Il ne sagit nullement de les interdire, mais de maintenir lopinion informée sur létat de léquilibre entre la sécurité et les libertés individuelles. | ||
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+ | La protection actuelle des données personnelles est très loin dêtre efficace en pratique, et la nécessité dune réforme est criante. | ||
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+ | La transition de la prédominance du contrôle a priori vers celle de la régulation a posteriori animant la philosophie de la directive est en cours. En revanche, de nombreuses interrogations subsistent, notamment quant au budget alloué à la C.N.I.L pour mener à bien ses nouvelles missions. En effet, la commission devra avoir les moyens, tant humains que financiers pour jouer convenablement son rôle. A défaut, les nouvelles attributions risquent de ne pas atteindre leurs objectifs et les traitements illicites continueront de fleurir aux dépens des droits des personnes. | ||
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+ | Une autre question épineuse est celle du statut très libéral des fichiers Etatiques des articles 26 et 27 sur lesquels la C.N.I.L na aucun moyen de contrôle a posteriori. Les fichiers dits de souveraineté ne rentrent pas dans le champ dapplication de la directive. Ce nest donc pas le droit communautaire qui exige ces régimes particuliers au bénéfice de lEtat, mais le lEtat lui-même par le biais du gouvernement. Le rôle de la C.N.I.L dans les déboires qua pu connaître le fichier des infractions constatées (STIC)[22] nest sûrement pas étranger à la baisse de ses pouvoirs. De même que son « auto-saisine » ([http://www.zdnet.fr/actualites/internet/0,39020774,2124514,00.htm J.THOREL et E.DUMOUT, « La Cnil se rebiffe contre le projet de loi du ministre de l'Intérieur », 25 octobre 2002, CNetNetwork.inc]) quant à la loi sur la sécurité intérieure. | ||
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+ | Si de nombreux rapports font état du danger que représentent les traitements de données personnelles réalisés par des personnes privées, il ne faut pas négliger la menace potentielle que peuvent constituer des traitements étatiques affranchis de nombreux moyens de contrôle. En effet, la technologie permet, chaque jour un peu plus, de surveiller lensemble des comportements des individus. Est-ce pour autan une raison de souscrire à cette vision du monde ? Pour lheure, nous vivons dans un pays où, normalement, chacun est présumé innocent jusquà la preuve de sa culpabilité. Avec un fichage incontrôlé nous risquons de basculer vers une société dans laquelle chacun est un coupable potentiel et doit être surveillé à ce titre. Naturellement, la philosophie du projet nest pas celle-ci. Il importe cependant que ceux enjeux soient présents, tant dans le débat public que, dans celui qui sera mené par les sénateurs quand ils procéderont à la seconde lecture du projet de loi. | ||
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Version du 24 février 2005 à 17:07
Cet article est une ébauche relative au droit comparé, vous pouvez partager vos connaissances juridiques en le modifiant... |
France > Droit public (fr) > Droit administratif (fr) > Autorité administrative indépendante (fr)
La Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) a été créée par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. C'est cette loi qui qualifie la CNIL d'autorité administrative indépendante.
Sommaire
Composition
Elle est composée de 17 commissaires répartis ainsi: 4 parlementaires (2 députés, 2 sénateurs), 2 membres du Conseil économique et social, 6 représentants des hautes juridictions (2 conseillers au Conseil dÉtat, 2 conseillers à la Cour de cassation, 2 conseillers à la Cour des comptes), 5 personnalités qualifiées désignées par le Président de lAssemblée nationale (1 personnalité), par le Président du Sénat (1 personnalité), par le conseil des ministres (3 personnalités).
Le mandat des commissaires est de 5 ans à l'exeption des parlementaires dont le mandat prend terme avec celui du mandat électif.
Rôle
Pouvoirs
Pouvoirs a priori
Pouvoirs a posteriori
Conformément à la philosophie de la directive cadre relative à la protection des données personnelles (Directive 95/46 CE du Parlement et du Conseil, 24 octobre 1995, relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, JO L 281 du 23.11.1995, p. 31), le projet de transposition tend à alléger les formalités préalables à la création dun traitement (contrôle a priori)( Sur le contrôle a priori voir le compte-rendu de lintervention de Me Etienne DROUARD, « La refonte du régime de déclaration à la C.N.I.L » dans le cadre du séminaire « Informatique et Libertés, quelles protections face à quelles menaces ? ». Voir sur Droit-Tic (consulté le 30 mai 2004).) tout en tâchant dassurer un contrôle a posteriori plus efficace. La Commission Nationale de lInformatique et des Libertés (C.N.I.L) se voit donc attribuer de nouvelles prérogatives. En revanche, son pouvoir sur les traitements réalisés pour le compte de lEtat est revu à la baisse.
Le contrôle a posteriori de la commission sexercera par le biais de pouvoirs dinvestigation et de sanction.
Une clarification du pouvoir dinvestigation, une consécration relative du pouvoir dinjonction
Si le pouvoir dinvestigation de la C.N.I.L ne fait lobjet que de simples précisions, le pouvoir dinjonction est bien nouveau.
Le pouvoir dinvestigation de la C.N.I.L précisé
Il convient de sintéresser au droit positif avant de considérer lapport éventuel du projet de loi.
Le pouvoir dinvestigation de la C.N.I.L dans la loi « Informatique et Libertés »
Ce pouvoir est une attribution traditionnelle de la C.N.I.L dans la loi dîtes, « Informatique et Libertés » (Loi 78/17 du 6 janvier 1978 relative à linformatique, aux fichiers et aux Libertés, JORF 7 janvier 1978. Voir sur Droit-Tic). En effet, larticle 11 de la loi fait expressément référence aux missions dinvestigation et de contrôle de la commission :
« La commission ( ) pour des missions d'investigation et de contrôle effectuées sous sa direction. »
Larticle 12 de la loi sempressant de préciser que les membres et les agents de la C.N.I.L sont soumis à une obligation de secret professionnel « pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont pu avoir connaissance en raison de leurs fonctions ».
Sur le fondement du décret n°81-1142 du 23 décembre 1981, article 1-1° (Décret n°81-1142 du 23 décembre 1981. Voir le décret sur légifrance), , sont sanctionnées les personnes qui ont entravé l'action de la CNIL :
« Soit en s'opposant à l'exercice des vérifications sur place, soit en refusant de communiquer à ses membres, à ses agents (...) les renseignements ou documents utiles à la mission qui leur est confiée par la commission, ou en dissimulant lesdits documents, ou encore en les faisant disparaître, soit en communiquant des informations qui ne sont pas conformes au contenu des enregistrements au moment où la demande a été formulée (...) » Des sanctions ont dailleurs été prononcées sur ce fondement, notamment par la chambre correctionnelle du Tribunal grande instance de Paris dans un arrêt du 16 décembre 1994 (Tribunal grande instance de Paris 17ème ch. correctionnelle, 16 décembre 1994, Procureur de la République et EDF-GDF /XXXX et alii. Legalis.net : Voir l'arrêt(consulté le 3 mai 2004).).
Les précisions apportées par le projet de transposition
Le projet de loi, loin de bouleverser le pouvoir dinvestigation de la C.N.I.L, apporte quelques précisions.
Ainsi, larticle 44 nouveau de la loi dispose que les membres de la C.N.I.L et les agents habilités peuvent « demander communication de tous documents nécessaires à laccomplissement de leur mission », peu importe le support électronique ou non de linformation. Or, les membres et les agents de la C.N.I.L sont déjà soumis au secret professionnel dans le cadre de la loi ancienne. Rien ne leur interdisait donc jusquà lors de « demander communication de tous documents nécessaires à laccomplissement de leur mission».
Larticle 21 du projet de loi clarifie les conditions dopposition du secret professionnel aux membres et agents de la C.N.I.L « Sauf dans les cas où elles sont astreintes au secret professionnel, les personnes interrogées dans le cadre des vérifications faites par la commission en application du f du 1° de larticle 11 sont tenues de fournir les renseignements demandés par celle-ci pour lexercice de ses missions » La rédaction de larticle 21, très protectrice du secret, risque de compliquer grandement le travail de la C.N.I.L puisque les entreprises pourront éventuellement opposer le secret des affaires pour interdire laccès à des traitements néanmoins susceptibles de comporter des risques pour les libertés individuelles.
Le projet de loi précise également que les membres et les agents de la CNIL peuvent se rendre, entre 6 heures et 21 heures, dans tout local servant à la mise en uvre d'un traitement de données à caractère personnel, à l'exclusion des parties de celui-ci affectées au domicile privé. Il sagit dun rappel des principes.
Enfin, larticle 51 nouveau reprend les dispositions de lancien article 44 de la loi et du décret n°81-1142 du 23 décembre 1981 pour affirmer à nouveau le délit dentrave à laction de la C.N.I.L.
Si les pouvoirs dinvestigation de la C.N.I.L sont plus précisés que réellement élargis, celle-ci se voit néanmoins dotée de réels pouvoirs dinjonction et de sanction.
Le pouvoir dinjonction de la C.N.I.L limité aux « traitements privés »
Le pouvoir dinjonction de la C.N.I.L est nouveau, mais ne peut être exercé contre lEtat.
La C.N.I.L peut prononcer des injonctions de cesser le traitement ou de procéder à sa destruction
Le projet de loi prévoit non seulement un pouvoir de sanction pécuniaire au bénéfice de la C.N.I.L mais lui reconnaît également la possibilité de prononcer des injonctions (Article 45 nouveau) de cesser le traitement ou de procéder à sa destruction pour le traitement relevant de larticle 22 nouveau. Il sagit des fichiers soumis à lobligation de déclaration.
Pour les fichiers qui ont fait lobjet dune autorisation par la commission sur le fondement de larticle 25, celle-ci peut la retirer. En revanche, la loi nouvelle ne donne pas dindications quant au statut du fichier dont lautorisation a été retirée. Il y a fort à parier quil faudra alors attendre une décision judiciaire de verrouillage ou de destruction.
Les fichiers Etatiques soumis à autorisation sur le fondement des articles 26 et 27 et non sur celui de larticle 25 ne rentrent pas dans le champ dapplication du pouvoir dinjonction.
Le II de larticle 45 institut une procédure durgence « lorsque la mise en uvre du traitement ou lexploitation des données traitées entraîne une violation des droits mentionnés à larticle 1 Au terme de cette procédure,la C.N.I.L peut « décider linterruption de la mise en uvre du traitement pour une durée maximale de trois mois » ou le « verrouillage des données à caractère personnel », également pour une durée maximale de trois mois.
La portée des droits mentionnés à larticle 1er de la loi est très générale :« L'informatique doit être au service de chaque citoyen. (
) Elle ne doit porter atteinte ni à l'identité humaine, ni aux droits de l'homme, ni à la vie privée, ni aux libertés individuelles ou publiques ». Il faudra donc attendre le développement de la doctrine de la C.N.I.L pour connaître le champ dapplication réel de cette procédure durgence. De nombreux traitement de données personnelles mis en uvre par lEtat ne sont toutefois pas concernés par cette mesure durgence.
Les fichiers étatiques relevant des articles 26 I, 26 II et 27 sont exclus de la procédure durgence
Nous avons vu que les fichiers Etatiques relevant des articles 26 et 27 nentraient pas dans le champ dapplication du pouvoir dinjonction. Il en va de même dans lhypothèse de la procédure durgence.
Contrairement à la version du projet de loi adoptée en première lecture par lAssemblée, la C.N.I.L sest vu retirer par le Sénat, la possibilité qui lui était offerte de « détruire le traitement de données » (Rapport de M. Alex Türk, n° 218 (2002-2003), déposé le 19 mars 2003). Cet amendement du Sénat se fonde sur le nouvel article 14 qui prévoit que le juge peut ordonner leffacement de tout ou partie des données à caractère personnel.
l est dautan plus étonnant que lAssemblée namende pas le texte du adopté par le Sénat en seconde lecture dès lors que, son propre rapporteur observait : « que le temps judiciaire nest pas celui des traitements de données personnelles, et que la possibilité offerte à la C.N.I.L de supprimer des traitements, menace dissuasive sil en est, est susceptible dêtre mise en uvre bien plus rapidement que sil sagit dune décision judiciaire » (Rapport de M. Francis Delattre, n° 1537, déposé le 13 avril 2004, page 38).
Il est aisé de comprendre que la destruction du fichier est une mesure irréversible qui se doit dêtre encadrée. Toutefois, le verrouillage de certaines données, voir du fichier dans son ensemble pour une durée de trois mois ne comporte pas les mêmes risques. LAssemblée a pourtant souhaité soustraire les traitements étatiques relevant des articles 26 I, 26 II et 27 à ces sanctions éventuelles.
De nouveaux pouvoirs de sanction et une publicité très encadrés
Sous lempire de la loi 78/17, la C.N.I.L était susceptible dadresser successivement des avertissements puis une mise en demeure de cesser un agissement contraire à la loi. Elle pouvait également instruire des plaintes puis transmettre ses résultats au parquet (Pour une illustration récente voir : Commission Nationale de lInformatique et des Libertés, « La C.N.I.L dénonce au parquet la diffusion sur Internet dune liste noire de notaires », C.N.I.L, 26 mai 2004). Jusqu'à présent, ce pouvoir n'a été utilisé qu'avec une extrême parcimonie. En effet, entre 1978 et 2001, seules dix huit dénonciations ont été effectuées, soit moins d'une par an. Durant l'été 2002, un cap avait été franchi avec deux dénonciations (La Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) a dénoncé le 9 juillet 2002 la société Impact Net au Parquet. Le 10 juillet 2002, elle fait de même pour une affaire concernant la divulgation sur Internet d'une liste de francs-maçons de diverses obédiences). Enfin, à lautomne 2002 la C.N.I.L affirmait sa volonté dutiliser plus fréquemment la possibilité qui lui était offerte en transmettant, en conclusion de son opération « Boite à Spam », pas moins de cinq dossiers au parquet (J.LE CLAINCHE, « Courriels non sollicités : Enfin vers une application effective des sanctions », DROIT-TIC.com, 26 novembre 2003). Avant de transmettre ces dossiers, la C.N.I.L avait adressée des avertissements et des mises en demeure de cesser les agissements illicites. Avec sept transmissions au parquet pour lannée 2002 contre dix sept pour les vingt trois années précédentes, la C.N.I.L attend avec impatience ses nouveaux pouvoirs.
La graduation des sanctions, à défaut dêtre nouvelle, est reprise à larticle 45 nouveau de la loi. En revanche, le caractère novateur du projet provient de la possibilité désormais offerte à la C.N.I.L de prononcer après une procédure contradictoire une sanction pécuniaire, une injonction de cesser le traitement ou de procéder à sa destruction ou encore un retrait de lautorisation accordée.
Régime et exceptions des sanctions pécuniaires
En cas de violation de la loi 78/17, la C.N.I.L pourra, après avoir averti et mis en demeure les intéressés de faire cesser le manquement, prononcer une sanction pécuniaire pouvant aller jusquà 150 000 et 300 000 en cas de récidive dans les cinq ans, sans excéder 5% du chiffre daffaire hors taxe, dans la limite de 300 000 (Article 47 nouveau).
Seuls les cas ou « des profits ou avantages économiques sont tirés de la mise en uvre du traitement » font lobjet de sanctions pécuniaires
Le Sénat avait souhaité, en dépit de lavis défavorable de la commission des Lois, restreindre la portée de ces sanctions aux cas dans lesquels « des profits ou avantages économiques sont tirés de la mise en uvre du traitement » (Rapport de M. Alex Türk, n° 218 (2002-2003), déposé le 19 mars 2003). A ce titre, le rapporteur de lAssemblée soulignait (Rapport de M. Francis Delattre, n° 1537, déposé le 13 avril 2004, page 37.) « les sanctions pécuniaires peuvent trouver à sappliquer à des personnes morales de droit privé à but non lucratif, à linstar des associations, pour lesquelles le critère de profit nest pas applicable et celui davantage économique source déventuelles difficultés dinterprétation ». Cette disposition a cependant été reprise par lAssemblée nationale (Article 47 §2 1° nouveau).
Larticle 47 alinéa 1er sinscrit dans la philosophie de la directive en fondant la sanction pécuniaire sur la dangerosité du manquement à la loi : « Le montant de la sanction pécuniaire ( ) est proportionné à la gravité des manquements commis et aux avantages tirés de ce manquement ». Cette disposition est susceptible dêtre interprétée largement de manière à permettre à la C.N.I.L dexercer au mieux sa mission.
Tout au contraire, la disposition insérée par le Sénat au 1° du §2 du même article subordonnant la sanction pécuniaire à la réalisation de « profits ou davantages économiques tirés de la mise en uvre du traitement » se fonde sur une considération économique. Cette restriction du champs dapplication du pouvoir de sanction pourrait être interprétée comme de la défiance au regard de lanalyse que pourrait faire la C.N.I.L de lalinéa premier de larticle 47.
Si lAssemblée nationale na pas souhaité amender la disposition introduite par le Sénat, cest peut-être quune autre question monopolisait lattention des députés.
Limpossibilité pour la C.N.I.L de sanctionner financièrement lEtat.
La seule modification apportée par lAssemblée au 1° de larticle 45 nouveau est de consacrer limpossibilité pour la C.N.I.L de sanctionner financièrement lEtat . Cet amendement se fonde sur labsence de personnalité morale de la C.N.I.L qui conduirait lEtat à être condamné à se verser une somme dargent à lui-même. Cet amendement se comprend dautant mieux que des recours juridictionnels restent ouverts et si la publicité des avis, décisions et avertissements de la C.N.I.L reste possible. LEtat est donc désormais à labri des sanctions pécuniaires, comme du verrouillage des données ou de linterruption du fichier prononcé par la C.N.I.L. La publicité des sanctions que pourrait éventuellement prononcer la C.N.I.L est également très encadrée.
La publicité des sanctions prononcées par la C.N.I.L
La C.N.I.L rend publique les avertissements quelle adresse au terme de linstruction des plaintes dont elle a connaissance. La commission a ainsi rendu public le 19 juin 2004 quatre avertissements adressés à des banques ([http://www.cnil.fr/index.php?id=1592 C.N.I.L, « La CNIL délivre un avertissement à quatre banques», 19 juin 2004) . De nouvelles sanctions appellent de nouvelles interrogations quant à la publicité qui peut leur être donné.
La publicité des sanctions subordonnée à « la mauvaise foi de la part du responsable du traitement »
La possibilité de rendre public les avertissements est maintenue. En revanche, lamendement 30, adopté par lAssemblée, subordonne la publicité des autres sanctions à « la mauvaise foi de la part du responsable du traitement » (Rapport de M. Francis Delattre, n° 1537, déposé le 13 avril 2004, page 39.). . Concrètement, la C.N.I.L pourra uniquement « en cas de mauvaise foi ordonner linsertion des autres sanctions quelle prononce dans des publications, journaux et supports quelle désigne » (Article 46 alinea second).
La mauvaise foi est définie comme étant « lattitude de celui qui manque de loyauté envers autrui, surtout lorsque ses agissements révèlent la conscience ou la volonté de nuire » (G.CORNU, « Vocabulaire Juridique », Association Henry CAPITANT, PUF, p. 555) ce qui laisse une large place à linterprétation. Une fois encore, il conviendra de suivre lévolution de la doctrine de la C.N.I.L.
Une publicité réduite pour les traitements de lEtat
Larticle 45 II dans sa version dorigine consacrait la possibilité pour la C.N.I.L, en cas durgence, de saisir le premier ministre pour « quil prenne les mesures permettant de faire cesser, le cas échéant, la violation constatée si le traitement en cause est au nombre de ceux qui sont mentionnés au I et II de larticle 26 » (Article 45 II 2°). Toujours dans la version originale de cet article, le premier ministre devait alors rendre publiques les suites données à cette saisine dans un délai de quinze jours à compter de la réception.
Le Sénat a estimé cette nouvelle exigence de publicité « inédite et mal adaptée à des fichiers dont certains affectent la défense nationale ou la sûreté de lEtat ( ) la lutte contre la délinquance ou le terrorisme » ( Rapport de M. Alex Türk, n° 218 (2002-2003), déposé le 19 mars 2003 page 139) et la donc supprimée. LAssemblée na pas souhaité modifier cette nouvelle disposition introduite par le Sénat. Désormais, la C.N.I.L ne peut quinformer, et non plus saisir, le premier ministre qui na plus à rendre publiques les suites quil a donné à cette information.
Le Sénat considère que la Texte italique «C.N.I.L demeure libre dinformer par le biais de son rapport annuel des signalements effectués à lattention du premier ministre et des suites que celui-ci y a apporté ». Cette information est dune nature très différente. En effet, seuls les professionnels des données personnelles analysent en profondeur le rapport annuel de la commission, alors que la réponse du premier ministre est susceptible dêtre plus médiatisée.
Enfin, largumentation sénatoriale est incomplète dans la mesure où elle nexplique pas la nature du risque que ferait porter la publicité de la réponse du premier ministre sur les traitements de souveraineté. Il ne sagit nullement de les interdire, mais de maintenir lopinion informée sur létat de léquilibre entre la sécurité et les libertés individuelles.
La protection actuelle des données personnelles est très loin dêtre efficace en pratique, et la nécessité dune réforme est criante.
La transition de la prédominance du contrôle a priori vers celle de la régulation a posteriori animant la philosophie de la directive est en cours. En revanche, de nombreuses interrogations subsistent, notamment quant au budget alloué à la C.N.I.L pour mener à bien ses nouvelles missions. En effet, la commission devra avoir les moyens, tant humains que financiers pour jouer convenablement son rôle. A défaut, les nouvelles attributions risquent de ne pas atteindre leurs objectifs et les traitements illicites continueront de fleurir aux dépens des droits des personnes.
Une autre question épineuse est celle du statut très libéral des fichiers Etatiques des articles 26 et 27 sur lesquels la C.N.I.L na aucun moyen de contrôle a posteriori. Les fichiers dits de souveraineté ne rentrent pas dans le champ dapplication de la directive. Ce nest donc pas le droit communautaire qui exige ces régimes particuliers au bénéfice de lEtat, mais le lEtat lui-même par le biais du gouvernement. Le rôle de la C.N.I.L dans les déboires qua pu connaître le fichier des infractions constatées (STIC)[22] nest sûrement pas étranger à la baisse de ses pouvoirs. De même que son « auto-saisine » (J.THOREL et E.DUMOUT, « La Cnil se rebiffe contre le projet de loi du ministre de l'Intérieur », 25 octobre 2002, CNetNetwork.inc) quant à la loi sur la sécurité intérieure.
Si de nombreux rapports font état du danger que représentent les traitements de données personnelles réalisés par des personnes privées, il ne faut pas négliger la menace potentielle que peuvent constituer des traitements étatiques affranchis de nombreux moyens de contrôle. En effet, la technologie permet, chaque jour un peu plus, de surveiller lensemble des comportements des individus. Est-ce pour autan une raison de souscrire à cette vision du monde ? Pour lheure, nous vivons dans un pays où, normalement, chacun est présumé innocent jusquà la preuve de sa culpabilité. Avec un fichage incontrôlé nous risquons de basculer vers une société dans laquelle chacun est un coupable potentiel et doit être surveillé à ce titre. Naturellement, la philosophie du projet nest pas celle-ci. Il importe cependant que ceux enjeux soient présents, tant dans le débat public que, dans celui qui sera mené par les sénateurs quand ils procéderont à la seconde lecture du projet de loi.
Liens
- http://www.cnil.fr/ Le site de la CNIL