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Droit au respect de la notoriété

Un article de JurisPedia, le droit partagé.
Version du 1 mai 2010 à 17:29 par Remus (discuter | contributions)

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Droit international > Droit européen > Droit des médias > Droit de la publicité


Ces dernières années on observe que la presse et les médias se servent d’informations personnelles telles que l’image, ou autre information personnelle non seulement à des fins journalistiques mais également à des fins publicitaires. Tous les jours, dans le monde entier, on retrouve des personnes connues ou non qui tentent de promouvoir des produits et des services. Afin de garantir les droits économiques de ces personnes une disposition est nécessaire.

La signification du droit dit Right of Publicity

Le droit dit right of publicity, traduit par : «le droit au respect de la notoriété », a été reconnu pour la première fois très récemment, plus précisément en 1953 aux États-Unis dans l’affaire « Haelan Laboratories, Inc. v. Topps Chewing Gum, Inc ». Ce droit est associé au pouvoir exclusif du concerné d’utiliser des éléments de sa personnalité (comme par exemple son image et son nom ou des informations concernant sa vie privée) avec pour but l’obtention d’avantages économiques et la possibilité d’obtenir réparation si ces informations sont utilisées à son insu. Il s’agit de la relation économique et juridique de la personne avec les éléments de sa personnalité. De plus, de nos jours, l’implication des médias et plus particulièrement celle de la publicité est très intense dans cette relation.

Right of Privacy et Right of Publicity

Aux États-Unis, le droit dit right of publicity est issu du droit dit right of privacy qui a été reconnu pour la première fois dans l’affaire Pavesich où il y eut usage de l’image personnelle à des fins publicitaire. Le right of privacy protège les intérêts non-financiers de la personne. À l’origine de cette reconnaissance on retrouve la protection des célébrités aux États-Unis contre la publication d’éléments personnels ainsi que contre la violation de leur vie privé. Tant que l’opinion publique estimait que la dignité humaine était froissée par l’exposition de la personne et de sa vie (par exemple l’utilisation de la personne en tant qu’objet de publicité), le right of privacy suffisait pour protéger la personnalité. Cependant, ce droit s’est avéré insuffisant lorsqu’il a été question de la protection des droits économiques face à l’abus d’information des célébrités pour des raisons économique et publicitaires. C'est-à-dire lorsque le droit de la personne sur la valeur commerciale de sa personnalité a dû être reconnu. Le fait que de nombreuses personnalités utilisent leur notoriété à des fins pécuniaires au moyen de contrats de publicité, a conduit les juges à estimer que ces personnes ne subissent pas de préjudice moral, mais seulement un préjudice matériel. La phrase de McCarthy au sujet de ces personnes qui s’inquiètent plus de leur poche que de la protection de leur âme illustre parfaitement la situation. Suite au comportement de certaines célébrités et sur base de la théorie de renonciation (waiver), il a été décidé que quiconque recherche la publicité renonce implicitement au droit à la protection de sa vie privée.

Les bénéficaires du droit

Afin de faire valoir le right of publicity la personne doit détenir des informations personnelles économiquement exploitables. Ainsi, le bénéficiaire du droit n’est pas nécessairement une personne connue ou une célébrité. Toute personne physique indépendamment de son degré de célébrité est bénéficiaire du right of publicity. Toutefois, dans le passé, les cas concernant ce droit ne se rapportaient qu’à des personnes célèbres et principalement la protection de leur personnalité contre l’exploitation commerciale. Les profits réalisés grâce à l’image, la voix ou d’autres parties de la personnalité des célébrités sont en général très élevés. La valeur commerciale de ces informations varie selon le degré de célébrité et est pris en compte dans le calcul de la compensation. Aux États-Unis, selon le droit et la théorie, toute personne, (indépendamment du degré de célébrité) est protégé de l’exploitation commerciale d’une tierce personne. Dans le cas où la personne n’est pas connue du public, la valeur des informations de sa personne pour la compensation est évaluée selon la rémunération des amateurs par les agences de mannequins.

Éléments protégés de la personnalité

L’image

L’image est l’élément principal de la personnalité qui risque l’exploitation commerciale. Quel que soit le moyen utilisé pour la représenter, elle permet de reconnaître l’identité de la personne. L’utilisation à grande échelle, l’effet des nouvelles technologies, ainsi que le tournant de la culture de production et de la consommation de l’image ont amené de nouveaux moyens d’exploitation. De plus, on enregistre de nombreux cas d’usage de sosie ou de représentation numérique. Aujourd’hui, l’utilisation de l’image existe sous de nouvelles formes telles que la télé réalité, la promotion de produits par le sponsoring ainsi que l’exploitation de l’image sur la toile.

Le nom

Le nom fait également partie de la personnalité. Cependant, la protection du nom de l’exploitation commerciale et publicitaire est très difficile. La protection la plus simple contre l’exploitation commerciale du nom provient du fait qu’en raison des fréquentes homonymies, le nom n’est pas vraiment un élément caractéristique de l’identité d’une personne, en tous cas bien mois que son image. Lorsque le nom d’une personne est étroitement lié à son identité, qu’il s’agisse d’un nom ou d’un pseudonyme, il est protégé à l’instar de l’image. Le nom est protégé à l’instar de l’image uniquement lorsque celui-ci est étroitement lié avec son identité, qu’il s’agisse de son vrai nom ou d’un pseudonyme.

La voix

Chez les artistes, les chanteurs d’opéra ou même de musique moderne, la voix représente un élément indissociable de leur identité. La prétention de protection a débuté lorsque les compagnies publicitaires ont entrepris d’utiliser les voice-alikes (opposés aux look-alikes) afin qu’ils ne soient pas chargés de payer en plus le droit de cession. Dès lors les tribunaux réalisèrent que la voix de certaines personnes avait le même besoin de protection que l’image. La protection de la voix a été reconnue pour la première fois dans le cadre du right of publicity dans l’affaire Midler v. Ford Motor Co. La compagnie Ford avait demandé à l’actrice et chanteuse Bette Midler d’interpréter une de ses chansons pour la promotion d’une de leur voiture. Suite au refus de l’actrice, la compagnie a obtenu les droits d’auteur et fit appel à une autre chanteuse avec une voix similaire. Le tribunal conclut que la protection de la création de l’artiste était insuffisante et que l’identité vocale de la personne devait être protégée.

Right of publicity en Europe

Une étude comparative de la théorie et de la jurisprudence des quelques pays membres révèle qu’en Europe, les biens protégés par le right of publicity aux États-Unis, sont encore protégés par le right of privacy et par le droit de la personnalité. Toutefois, les problèmes persistent à cause du développement dans le monde des médias aussi une institutionnalisation du right of publicity devient nécessaire.

France

Dispositions générales

En France, la protection de l’usage l’image, de la voix, du nom etc. par les médias et les agences de publicités à des fins pécuniaires trouve sa justification dans la protection de la vie privée. Précisément le droit a l’image repose sur l’article 9 du Code civil aux termes duquel « chacun a droit au respect de sa vie privée ». En application de l’article 9 du Code civil, la jurisprudence ouvre droit à réparation aux personnes dont l'image a été utilisée, sans leur consentement, à des fins publicitaires. La protection de l’image s’étend à tous les éléments de la personnalité, comme l'image mais aussi à la voix, à condition toutefois que l'atteinte à la personnalité soit sensible. Par extension le respect de la vie privée peut s’étendre au droit au nom : les patronymes célèbres ne peuvent pas être utilisés en publicité sans autorisation préalable. De même l’utilisation de noms ordinaires peut provoquer des contentieux. La règle générale en la matière est que toute exploitation publicitaire de l’image d’une personne – ou de ses biens – appelle une autorisation préalable a l’exploitation de l’intéressé (c'est-à-dire souvent une rémunération) à défaut, l’exploitation publicitaire non autorisée de l’image d’une personne ou de ses biens sans autorisation préalable peut justifier une interdiction de sa part et/ou une réparation financière si un préjudice est établi. L’article 368 du Code pénal érige en délit le fait de retransmettre l’image d’une personne sans son consentement. Au contraire l’enregistrement réalisé au vu et au su de l’intéressé n’encourt pas de condamnation.

Dispositions spécifiques

Les personnalités publiques s’adressent souvent au juge pour interdire des publicités utilisant leur image ou demander des indemnités compensatrices du préjudice causé et la jurisprudence française est sévère pour l’exploitation commerciale de l’image d’une personne publique. Les mannequins et top-modèles posent des problèmes particuliers en raison du consentement qu’ils donnent en principe à la divulgation de leur image lors des défilés de mode notamment. La convention collective des mannequins limite en principe à deux ans la durée pendant laquelle une photo peut être réutilisée sans autorisation, et le modèle peut s’opposer à des utilisations susceptibles de lui porter préjudice. L'exploitation publicitaire de l'image d’un mannequin professionnel ou d'un comédien appelle la conclusion préalable d'un contrat de travail aux termes duquel le professionnel concerné cède à son employeur tout ou partie des droits sur son image et sur ses prestations. L’artiste interprète engagé pour les besoins d'une production publicitaire doit souscrire un contrat de travail avec le producteur du film publicitaire, sans préjudice des droits spéciaux qui lui sont reconnus par le Code de la propriété intellectuelle sur l’exploitation de l’œuvre publicitaire.

Grèce

En Grèce, le droit de contrôler l’usage économique et l’exploitation de l’image ou du nom est intégré depuis des années dans l’ordonnance 57 du code civil, considéré tant par la jurisprudence que par la théorie comme l’expression du droit à la personnalité. La théorie et la jurisprudence grecque ne reconnaissent pas un droit autonome d’exploitation commerciale de la personnalité, un tel droit n’étant pas patrimonial ni transmissible. Selon le droit civil grec, un contrat dont l’objet serait l’exploitation commerciale de la personnalité est frappé de nullité (art. 335 du Code civil hellénique). Inversement, la concession d’une autorisation partielle d’exploitation d’un élément précis de la personnalité est valable. L’autorisation susmentionnée doit être conforme aux principes de moralité (art. 178 du Code civil) et ne doit pas engendrer une limitation disproportionnée de la liberté individuelle. Dans les cercles juridiques grecs ont lieu depuis longtemps des discussions et des propositions concernant l’établissement du right of publicity afin de combler les lacunes existantes. Un évènement clé, une première en Grèce, concerne un incident avec le Président de la Grèce, K. Karamanlis. Il fut approché par un japonais qui souhaitait le prendre en photo pendant qu’il jouait au golf. Le Président, curieux, voulu savoir ce qu’il comptait faire de cette photo. Le japonais lui répondit qu’il allait la vendre à un magazine de son pays contre une grosse somme d’argent. Dans ce cas, il s’agit clairement d’un cas d’exploitation d’éléments de la personnalité à des fins commerciales qui ne possède pas de base d’ajustement législatif.

Allemagne

L’Allemagne fut la première en Europe à réagir au sujet de l’exploitation commerciale d’éléments de la personnalité. Aujourd’hui, en Allemagne, la construction juridique utilisée au niveau théorique est intéressante. On y parle désormais de droit de la publicité en tant que partie du droit de la personnalité qui présente deux facettes : la négative (protection de la vie privée) et la positive (exploitation des éléments économiques). Il n’y a pas transmission de tous les droits mais uniquement de certains aspects de la personnalité qui présentent un caractère éthique et financier. En ce qui concerne le côté pratique l’Allemagne gère l’exploitation économique des éléments de la personnalité à l’instar des États-Unis. Le concerné à deux possibilités : demander réparation du dommage moral ou demander restitution du bénéfice sur la base de la réglementation relative aux abus de droit et à l’enrichissement sans cause.

Sources

  • http://regibus.com/cours.php, Jean Jacques BIOLAY,Le droit de la publicité
  • McCarthy, The rights of Publicity and Privacy p.5
  • Midler v. Ford Motor co., 849 F. 2d 460 (9th Cir. 1988)
  • Aggeli Pierrina – Koriatopoulou,DΙΜΕΕ 1/2007, p 22
  • Karakostas Ioannis, Le droit des Medias, Athènes 2005, p.422
  • Sinodinou Tatiana – Eleni, L’image sur l’internet, 2007, p. 300