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Liberté d'expression et autorité judiciaire (fr)

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France > Droit des médias > Droit de la presse > Droit pénal de la presse

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Le droit à l'information et la liberté d'expression sont des principes fondamentaux de notre société. Les professionnels de l'information jouent un rôle de « chien de garde » de la liberté d'expression et d'information du public. Cela dit, la liberté reconnue aux journalistes n'est pas illimitée. La réglementation de l'information policière et judiciaire mêle dispositions de la loi du 29 Juillet 1881, relative à la liberté de la presse, et dispositions contenues dans d'autres textes, spécifiques ou non à ces activités, codifiées dans le code pénal, le code de procédure civile, le code civil...Ces textes retiennent, d'une façon qui ne peut cependant être absolue , le principe de la publicité de l'action policière et judiciaire, et donc du droit à l'information à diverses étapes de la procédure des actions de la justice.

La protection de la liberté d'information judiciaire et policière

Aux termes des réglementations spécifiques au droit des médias (loi de 1881) et générales (les règles de droit commun posées par les codes français), la publicité est, en principe, la règle s'agissant de l'audience ou des débats des juridictions et des décisions de justice.

La publicité des débats ou audiences des juridictions

En 1994, la chambre criminelle a proposé une définition générale du compte-rendu judiciaire (publicité des débats ou audiences): « D'une part, il consiste à mettre en rapport les prétentions contraires des parties et à permettre par une narration générale ou partielle d'apprécier l'ensemble des débats judiciaires. D'autre part, l'auteur du compte rendu doit s'abstenir de toute dénaturation des faits et de toute imputation malveillante spécialement à l'égard des membres de la juridiction ».

Les dispositions de la loi de 1881

L'immunité

En Droit pénal des médias, on rencontre une institution, appelée immunité, qui provoque la disparition de l'infraction. L'effet est radical, on ne recherche pas les circonstances susceptibles de justifier l'acte délictueux, mais on se borne à constater l'immunité et dès lors l'acte devient licite pour les personnes concernées.

La loi du 29 Juillet 1881 prévoit deux sortes d'immunités générales ayant trait aux débats et comptes rendus parlementaires ou judiciaires. L'alinéa 3 de l'article 41 vise à garantir la liberté d'information en énonçant un principe d'impunité et d'immunité concernant la publicité des débats ou audiences des juridictions.

Pour bénéficier de cette immunité, garantie de la liberté de communication et du droit du public à l'information, il faut que le compte rendu soit « fidèle » et « fait de bonne foi ». La fidélité de l'information par rapport au débat suppose qu'il n'y ait pas d'inexactitude, de dénaturation ou de partialité de la part du journaliste. Quant à la bonne foi, l'information donnée ne doit pas être tardive ou motivée par une intention de nuire, traduire un manque de prudence, d'objectivité, de circonspection ou de sincérité.

C'est à celui qui se prévaut de l'immunité de prouver que ces conditions sont réunies, il peut le faire selon le mode de preuve du droit commun.

Exception d'immunité

Avant toute chose, il ne faut pas que la publication d'information ayant trait au débat n'ait été interdite par un texte particulier. Les exceptions sont, tout d'abord, prévues pour assurer le respect de la personne mise en cause et l'intimité de la vie privée. C'est le cas de l'article 39 qui interdit les comptes rendus des procès en diffamation (lorsque l'imputation concerne la vie privée, lorsque les faits remontent à plus de dix ans, lorsqu'elle se réfère à un fait constituant une infraction amnistiée ou prescrite...), des procès en recherche de paternité ou procès en divorce. L'article 38 ter limite les techniques d'information de la justice « dès l'ouverture de l'audience des juridictions administratives et judiciaires, l'emploi de tout appareil permettant d'enregistrer de fixer ou de transmettre la parole ou l'image est interdit ».

L'immunité ne joue pas pour les commentaires ou les fictions imaginées à partir des débats ou pour les propos tenus par un avocat à la sortie de l'audience. De plus n'est pas un compte-rendu judiciaire le fait pour un prévenu d'évoquer un procès dans un livre où il remet en cause un magistrat.

La règlementation générale

Le principe de la publicité des débats est très largement posé par la loi de 1881 et l'attachement à un tel principe tient aux dangers et inconvénients d'une justice secrète. Le caractère public des audiences est considéré comme une garantie pour la protection, la défense et le respect des droits du justiciable. Il semble normal que le public puisse avoir accès à la justice et être informé de ses actions, étant donné que c'est au nom du peuple que la justice est rendue. Les médias ne font qu'élargir cette publicité. Le droit commun vient cependant apporter quelques restrictions nécessaires à ce principe de publicité.

Limites au Principe

Certaines limites s'imposent à tous (professionnels des médias comme à quiconque) du fait de la nature des affaires. À moins d'y être seuls admis, les journalistes ne peuvent pas rendre compte d'une audience tenue à huis clos. Il s'agit d'assurer la sérénité de l'action de la justice et, tenant compte de la nature de certaines affaires, d'éviter les scandales et des désordres publics. Les articles 3061, pour les jugements de crimes, et 4002, en matière correctionnelle, du code de procédure civile restreignent la publicité pour des raisons d'ordre public, si elle apparaît comme dangereuse pour l'ordre et les moeurs.

En plus des limites au principe de publicité des audiences interdisant la mise en oeuvre de l'immunité contenues dans la loi de 1881, l'article 143 alinéa 4 de l'ordonnance du 2 Février 1945, relative à l'enfance délinquante, sanctionne la publication des débats judiciaires en matière de minorité. Cet article dispose qu'est interdite la publication des comptes rendus des débats des tribunaux pour enfants.

L'enregistrement

La réglementation générale de la publicité des débats posent également des restrictions quant à l'usage de certaines techniques de communication.

L'article 38 ter de la loi de 1881 interdit « l'emploi de tout appareil permettant d'enregistrer (...) » dans les audiences; « Toutefois, sur demande présentée avant l'audience, le président peut autoriser des prises de vue quand les débats ne sont pas commencés, et à la condition que les parties ou leurs représentants et le ministère y consente ». L'article L221-1 du code du patrimoine n'autorise un enregistrement audiovisuel de procès qu'à des fins de constitution d'archives historiques de la justice. L'enregistrement ne peut être réalisé que sur décisions de l'autorité judiciaire en fonction de l'intérêt de celui-ci pour la constitution d'archives historiques. Il ne doit pas porter atteinte au bon déroulement des débats, ni au libre exercice des droit de la défense.

Le seul autre moment ou acte judiciaire pour lequel est expressément posé le principe de la publicité, c'est à l'égard de l'action de la justice elle-même en ce qui concerne les décisions de justice elle-mêmes.

La liberté de communication des décisions judiciaires

Le principe de la publicité des décisions de justice a un caractère général et presque absolu. Il est posé par de nombreux textes, qui s'appliquent ou profitent également aux médias. Ce principe est confirmé par la du 29 Juillet 1881 ainsi que par le droit commun.

La liberté de publication dans la loi de 1881

La publication des décisions de justice sous leur forme nominative est le pendant du principe de publicité de l'audience. Pour garantir le respect du principe de publicité des décisions, élément et condition de la liberté d'information, l'article 39 précise que les restrictions qu'il fixe (notamment quant aux interdictions de compte rendu dans les affaires de diffamation, filiation, divorce..) ne s'applique pas au dispositif des décisions.

De la loi de 1881 vont découler des restrictions dans l'application du principe de liberté de publication. Elle sont apportées à titre d'exception. En contradiction avec le principe de publicité des décision, les tribunaux ont parfois restreint ce principe du fait de l'abus de cette liberté de diffusion de l'information. Au cas où la volonté de nuire, par la publication, pourrait être établie, il serait alors éventuellement possible d'obtenir une condamnation pour diffamation

Le régime générale du principe de liberté de publication des décisions

Puisque le principe est également en droit commun celui de la publicité, les médias sont normalement libres de contribuer à cette publicité; Elle est exigée par la loi,à peine de nullité, mais n'est pas limitée à l'enceinte du prétoire; au contraire, il entre dans la mission du journaliste de donner à cette publicité un caractère extensif en vue d'informer le public, qui pratiquement, ne peut avoir connaissance, autrement que par la voie de la presse, des décisions susceptibles de lui permettre de régler sa conduite ». La justice est rendue au nom et pour le peuple, le principe de la publicité des décisions de justice et le relai des médias offre un accès public légitime a la Justice et à ses actions, au même titre que les comptes rendus judiciaires.

Atténuation de l'impact médiatique

La loi du 4 Janvier 1993 a donné au juge d'instruction et à la chambre d'instruction la possibilité d'ordonner des publications judiciaires à la suite d'un non lieu. L'objectif de ces dispositions vise à atténuer les impacts médiatiques que peuvent avoir les éléments et dossiers d'instruction relatés dans la presse écrite ou audiovisuelle. Il s'agit donc d'informer les lecteurs, auditeurs, spectateurs, que telle affaire portée précédemment à leur connaissance a finalement aboutit à un non lieu. Les domaines de ces articles est limité à la phase de l'instruction, donc il ne concerne pas les classements sans suites et les décisions de relaxe ou d'acquittement. Ce sont les juridictions de l'instruction qui déterminent la teneur de la communication diffusée.

Atténuation du principe due à la minorité

Certaines exceptions au principe de publicité des décisions peuvent être ici aussi apportées. Les seules exceptions légales explicites concernent les jugements de mineurs délinquants. L'article 14 de l'ordonnance du 2 Février 1945, limitant déjà la publicité des débats des tribunaux pour enfants, indique que pourra être publié la décision d'une décision concernant un mineur délinquant mais sans mention de son nom, même par initiale.

Reproduction par des tiers

Le principe de publicité permet également aux tiers de se faire délivrer des copies des jugements prononcés publiquement. Les éditeurs de banques de données jurisprudentielles font partie de ces tiers et sont donc libres de reproduire les ordonnances, jugements et arrêts y compris les ordonnances ou arrêts de non-lieu dès lors qu'aucune disposition législative ne le leur interdit. Le nom des parties est obligatoirement mentionné dans les décisions de justice qui les concernent, ne serait-ce que pour les leur rendre opposables. Le nom des parties apparaît donc sur les reproductions des décisions.

Tant que les décisions de justice étaient publiées dans des recueils spécialisés consultés essentiellement par les professionnels du droit et les étudiants des facultés de droit, la mention du nom de ces protagonistes ne posait pas de réel problème.

La question de l'anonymisation des décisions de justice sur internet

Une nouvelle réflexion sur l'anonymisation des décisions de justice doit être engagée du fait de leur reproduction de celles-ci dans des banques de données informatisées.

La publicité des décisions par voie télématique ou sur internet

En effet, dès lors que les décisions de justice sont archivées sur des supports informatisés ou diffusées par voie télématique ou sur le réseau Internet elles deviennent accessibles à quiconque. Ainsi, l'accès à ces banques de données jurisprudentielles informatisées n'est plus réservé aux seuls professionnels du droit mais est désormais ouvert à toute personne, « dont des sociétés qui ont pour activité principale la constitution de « mégabases » de données nominatives qu'elles revendent à des sociétés commerciales telles que les assurances, les établissements de crédit, les agences de travail intérimaire ou les agences immobilières... ».

De plus, l'édition électronique ne connaît pas de limites et permet d'enregistrer la totalité des décisions rendues. « Ce type d'exploitation des banques de données jurisprudentielles peut aboutir à la constitution d'un gigantesque casier « juridique » des personnes sans qu'aucun contrôle ne puisse être exercé dessus ».

L'anonymisation des décisions

En France, l'anonymisation des décisions de justice publiées n'est prévue que dans certains cas limitativement énumérés par les textes pour assurer le respect de la vie privée ou la minorité des personnes mises en cause. La lecture des articles 39 à 39 sexies de loi de 1881 permet toutefois de constater que de nombreuses décisions dans lesquelles l'honneur ou la probité des personnes condamnées est mise en cause ne se voient pas imposer une obligation d' « anonymisation » par le législateur.

Au nom du « droit à l’oubli », la Commission Nationale Informatique et Libertés (CNIL) recommande l’anonymisation des décisions de justice librement accessibles sur l’internet.

Dans une délibération du 29 novembre 2001, la CNIL a estimé qu'« il serait souhaitable que les éditeurs de bases de données de décisions de justice librement accessibles sur des sites Internet s'abstiennent, dans le souci du respect de la vie privée des personnes physiques concernées et de l’indispensable « droit à l’oubli », d'y faire figurer le nom et l'adresse des parties au procès ou des témoins » et que « les éditeurs de bases de données de décisions de justice accessibles par Internet, moyennant paiement par abonnement notamment, s'abstiennent, à l'avenir (...) d'y faire figurer l'adresse des parties au procès ou des témoins ».

Les restrictions à la possibilité de rendre compte de l'action policière et judiciaire

Dans l'affaire Sunday Times, la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) souligne que la liberté d'expression est assortie d'exceptions. La presse doit avoir le droit de diffuser des informations, et le public a le doit d'en recevoir. Pour qu'une ingérence soit possible, au sens de l'article 10 paragraphe 2 de la Convention Européenne de Sauvegarde des droits de l'Homme (CESDH), il faut que celle-ci soit prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure nécessaire dans une société démocratique. Toute restriction préalable à la publication appelle de la part de la cour l'examen le plus scrupuleux, spécialement dans le cas de la presse, l'information étant un bien périssable et en retarder la publication, même pour une brève période, risquerait fort de la priver de toute valeur et de tout intérêt. Cependant, la protection de la liberté d'information ne permet pas de justifier certaines dérives. L'article 10 paragraphe 2 de la CESH cite au titre des possibles atteintes à la liberté d'expression rendues nécessaires pour la protection de la réputation ou des droits d'autrui, la défense de l'ordre ou la garantie l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire par exemple.

L'indispensable respect de la dignité, de l'intégrité des personnes et de l'action de la Justice

La réglementation de la liberté d'expression posent des limites notamment quant à l'indispensable respect de la dignité et de l'intégrité des personnes mises en cause ou victimes, mais aussi au respect de l'indépendance et de l'autorité de la justice.

Le respect de l'action de la justice

La loi de 1881

En dehors des débats et des décision de justice, la loi de 1881 dispose qu'il est « interdit de rendre compte des délibérations intérieures, soit des jurys; soit des cours et tribunaux ». Il s'agit du délibéré, pour lequel le secret doit être absolu. C'est une garantie essentielle de la nécessaire indépendance des décisions de justice.

La règlementation générale

Le code pénal prévoit des restrictions à la liberté de communication dès lors que par ses excès, elle porterait atteinte à l'indépendance et à l'autorité de la justice. En principe, les décisions de justice peuvent être librement rendues publiques et peuvent aussi être librement commentées, sous réserves de certaines limites: diffamation, outrage et notamment l'atteinte à l'autorité de la justice. « Le fait de chercher à jeter le discrédit, publiquement, par actes, paroles, écrits ou images de toute nature, sur un acte ou une décision juridictionnelle, dans des conditions de nature à porter atteinte à l'autorité de la justice ou à son indépendance » est incriminé par le code pénal à l'article 434-25 pour permettre le respect de l'impartialité du pouvoir judiciaire.

La publication, avant la décision définitive, de commentaire tendant à exercer des pressions pour influencer les déclarations des témoins ou la décision des juridictions d'instruction ou de jugement est interdite (article 434-16 Code pénal). L'élément intentionnel est ici très important, le résultat seul ne suffit pas. Il faut qu'il y ait volonté d'exercer une pression, de la part de l'auteur des propos ou écrits rendus publics; sur les témoins, jurés ou les juges... il faut une intention coupable particulière. Les possibilités d'application et donc la portée réelle d'une telle disposition apparaissent assez réduites.

Les conséquences néfastes d'un article de presse sur l'impartialité du pouvoir judiciaire l'emportent sur la liberté d'information; du fait de l'application de l'alinéa 2 de l'article 10 de la CESDH. La jurisprudence de la cour européenne exige des journalistes qu'ils se livrent à un travail rigoureux. La publication par la presse d'informations portant atteinte aux droits ou à la réputation d'autrui, ou à l'indépendance du pouvoir judiciaire ne sera efficacement protégée par la CEDH que si la gravité de l'affaire dévoilée par la presse a un intérêt pour le public, que si le travail du journaliste est rigoureux (ne pas se fonder sur des sources fantaisistes). La protection dépendra également de la qualité de la personne dont les droits sont atteints (la publication sera plus efficacement protégée lorsqu'elle concerne une « personnalité »).

La protection de la dignité et de l'intégrité des personnes

La protection de la présomption d'innocence et le secret de l'instruction

La présomption d'innocence

Le secret de l'instruction et de l'enquête

Le délit de violation du secret de l'instruction