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Régime juridique du logiciel (fr)

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Il n’existe pas de définition juridique du logiciel qui fasse autorité.
Néanmoins, on peut définir le logiciel comme étant un programme d’instructions générales ou particuliers, adressées à une machine, en vue du traitement d’une information donnée.

L’article L112-2 du Code de la propriété intellectuelle, considère le logiciel comme étant une œuvre de l’esprit. À ce titre, le logiciel ainsi que le « matériel de conception préparatoire » bénéficient de la protection du droit d’auteur. Pour être analysé, le régime juridique du logiciel nécessite au préalable quelques précisions au niveau de la terminologie. Cette étude met en lumière la spécificité de cette œuvre de l’esprit, qui s’avère être dérogatoire et cela sur plusieurs points.

Toutefois, cette spécificité en ce qui concerne la protection des droits d'auteur n’empêche pas le logiciel de posséder un certain seuil de protection. La classification du logiciel comme œuvre de l'esprit est certaine et occulte la qualification de celui-ci au regard du droit civil.


Présentation

Jusqu’en 1985, la question était posée de savoir s’il fallait admettre ou non le logiciel au sein du cercle protecteur des œuvres de l’esprit. Le problème de son insertion résultait de sa vocation même. Elle n’est pas de « transmettre des sentiments ou des informations à d’autres êtres humains, mais seulement de permettre l’utilisation de machines ».
En effet, le programmes informatiques ont un caractère essentiellement utilitaire et technique. Les juges étaient donc partagés sur l’idée d’une éventuelle protection du logiciel du droit d’auteur.
On peut dire que le droit d’auteur a été élu par opportunité.
Dès la promulgation du C. prop. int. en 1992, le législateur n’a eu de cesse, malgré les règles diverses touchant aux logiciels, de fondre le régime du logiciel au sein du régime général.
La directive communautaire du 14 mai 1994, a entériné, de manière définitive la qualification. De même, les accords ADPIC (article 10) et le Traité additionnel à la Convention de Berne, du 20 décembre 1996 (article 4).

Terminologie

Définition

La Commission de terminologie et de néologie de l'informatique, à l'époque commission de terminologie de l'informatique, a donné du logiciel la définition suivante :

« Ensemble des programmes, procédés et règles, et éventuellement de la documentation, relatifs au fonctionnement d'un ensemble de traitement de données[1] »
Sous le vocable "logiciel" (en anglais software, antonyme d'hardware i.e matériel), l'on trouve un certain nombre de programmes : de "base" touchant au fonctionnement de la machine, ou "d'application", constituant des instructions pour des opérations particulières.
Sur internet, les logiciels sont essentiels pour la navigation et la recherche, le paiement électronique, le cryptage, le langage, ils doivent de ce fait être protégés. Mais déjà, il est question de revenir sur l'exclusion de la brevatabilité (l'invention qui fait appel à un programme peut être brevetée, par exemple le système "un clic", fonctionnalisant les mouvements du "e-commerce").

Classification

Etant donné qu’il n’existe pas de définition juridique du logiciel faisant autorité, il est utile de recenser les différents objets susceptibles de bénéficier d’une protection.

  • Les systèmes d’exploitation. Bien que leur aspect fonctionnel soit très poussé, il a été admis assez rapidement que les logiciels d’exploitation (tels Unix, MVS, DOS, etc.) constituaient des œuvres de l’esprit ; comme ils sont rares, leur originalité de principe n’est pas discutée.
  • Les logiciels résidents. Ce sont les logiciels sur cartes informatiques ou en mémoire morte.
  • Les logiciels d’application. Ils constituent la grande généralité des traitements de texte, tableurs, logiciels graphiques, logiciels de comptabilité, des applications scientifiques, etc.
  • Les applications générées. Ce sont les macros, scripts qui, développées à partir de possibilités de programmation des logiciels d’application, réalisent des logiciels dérivés personnalisés. Si ces développements sont suffisamment originaux, rien ne permet de les exclure de la protection.
  • Les systèmes experts. Composés de bases (connaissances et règles) et de moteurs, c’est-à-dire d’éléments logiciels eux-mêmes éventuellement protégeables, ils bénéficient de la protection.


La qualification et la protection juridique du logiciel

La qualification en droit civil

Les termes du problème ne sont pas restrictifs en droit français. En effet, l'art. 1129 al. 1er du Code civil n'exige pas que la chose soit matérielle, qui énonce :

« il faut que l'obligation ait pour objet une chose au moins déterminée quant à son espèce ».

De même, l'art. 1593 expose que

« tout ce qui est dans le commerce peut être vendu lorsque des lois particulières n'en ont pas prohibé l'aliénation ».

Interpréter ces dispositions comme ne s'appliquant qu'à des choses matérielles revient à interpréter strictement une notion du droit commun. C'est en suivant ce raisonnement que la Cour fédérale de justice allemande a été amenée à interpréter de manière extensive, voire contre la lettre de la loi, une disposition du Code civil allemand (v. Qualification du logiciel en droit d'auteur et en droit civil allemands).

L'enjeu de la qualification du logiciel est l'aménagement du rapport de force entre « acheteur » et « vendeur ». Faut-il que des contrats courants soient définis unilatéralement et à leur avantage par les stipulations des différents fournisseurs de logiciel ou ne serait-il pas préférable de s'en remettre à l'équilibre que l'on trouve dans les contrats nommés institués par le Code civil ? En fait, les contrats dits « de licence » détaillent précisément « tout ce que vous n'avez pas le droit de faire » au prétexte de protéger les droits de l'auteur.

À la question de la qualification du logiciel au regard du droit civil, commence à s'affirmer nettement la réponse de la Cour de cassation. Les juges du fond, mais également la Cour de cassation, utilisent l'expression « vente de logiciel ». Un arrêt de la chambre commerciale du 5 juin 2007[2], rendu à la suite de plusieurs autres arrêts en ce sens[3], énonce : « la résiliation des contrats de location et de maintenance n'entraîne pas, lorsque ces contrats constituent un ensemble contractuel complexe et indivisible, la résolution du contrat de vente mais seulement sa caducité , l'acquéreur devant restituer le bien vendu et le vendeur son prix, sauf à diminuer celui-ci d'une indemnité correspondant à la dépréciation subie par la chose en raison de l'utilisation que l'acquéreur en a faite et à tenir compte du préjudice subi par l'acquéreur par suite de l'anéantissement de cet ensemble contractuel » (nous graissons). On peut donc parler de jurisprudence constante.

Ces formules claires et répétées de la chambre commerciale ne doivent pas faire oublier la position différente adoptée par la chambre criminelle dans un arrêt du 2 novembre 2005[4], qui estime que la fourniture d'un logiciel ne confère au contractant qu'un droit d'usage constitue un service au sens de l'art. L 216-1 du Code de la consommation. On peut expliquer cette position par le principe d'interprétation stricte de la règle pénale.

La qualification du logiciel en droit civil réagit sur les clauses qui peuvent être stipulées dans un contrat relatif à un logiciel. Par exemple, si une personne devient propriétaire d'un exemplaire d'un logiciel, l'usage de son bien ne pourra pas être trop restreint par le contrat, sauf à ignorer le caractère absolu du droit de propriété. Dans ce même cas, une action pour vice caché est possible. Le cas échéant, le juge appelé à se prononcer dans un litige relatif à un logiciel, pourra procéder à la requalification du contrat, indépendamment de l'appellation de « contrat de licence » choisie par les parties.

La protection juridique

=La condition de l'originalité

La protection du droit d'auteur

La condition de l'originalité

Classiquement, une œuvre est considérée comme étant originale lorsqu’elle révèle de l’empreinte de la personnalité de son auteur. Dès lors, la question a été posée de savoir si le logiciel pouvait satisfaire à cette exigence et rapidement, s’est révélée l’incompatibilité entre la notion subjective de l’originalité et du logiciel.

« Dire que le logiciel est une œuvre du langage…, c’est oublier que le langage algorithmique s’apparente à une formulation mathématique et ne laisse pas de place à la fantaisie ou à l’originalité et ne peut pas porter la « marque de la personnalité de son auteur » à tel point que le programmateur est souvent une personne différente de l’analyste »

En 1986, une véritable rupture s’est produite car les magistrats de la Cour de Cassation ont pour la première fois donné une définition de l’originalité du l’originalité du logiciel.

Selon la Cour, «Ayant recherché, comme ils y étaient tenus, si les logiciels élaborés par M. Pachot étaient originaux, les juges du fond ont souverainement estimé que leur auteur avait fait preuve d’un effort personnalisé allant au-delà de la simple mise en œuvre d’une logique automatique et contraignante et que la matérialisation de cet effort résidait dans une structure individualisée. Qu’en l’état de ces énonciations et constatations, la Cour d’appel, qui a ainsi retenu que les logiciels conçus par M. Pachot portaient la marque de son apport intellectuel, a légalement justifié sa décision de ce chef»

La marque de l’apport intellectuel apparaît donc comme la condition d’originalité du logiciel. Celle-ci est officieusement recherchée pour qualifier la marque de l’apport personnel de l’auteur et donc l’originalité.
Le Professeur Gautier note à ce sujet que « l’empreinte de la personnalité du créateur du logiciel, […] se trouverait principalement dans le « choix » effectué entre plusieurs méthodes possibles, matérialisé dans le programme définitif. Ce n’est au demeurant qu’une façon de reprendre l’apprécitation composition\expression que (Desbois) a durablement imposé en droit positif ».



On considère que le critère départiteur pour déterminer si tel programme relève des brevets ou du droit d’auteur constituerait à rechercher par voie d’expertise quelle est la part prépondérante. Si l’invention technique et pratique prime sur l’œuvre ou se détache nettement d’elle. L’avantage des brevets reste la protection des idées, exclues du droit d’auteur mais aussi de la propriété industrielle.


Le seuil de protection

On se rappelle la célèbre jurisprudence Inkasso[5]de la Cour fédérale de justice allemande qui avait abouti à la classification du logiciel comme œuvre de l'esprit soumise au droit de la propriété intellectuelle, en ne lui accordant dans un premier temps qu'une protection symbolique. Dans un premier temps, la Cour de cassation avait adopté une position similaire[6]. La directive concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur[7] a accordé au logiciel une position plus favorable. La transposition de cette directive a abouti à la rédaction actuelle de l'art. L. 112-2 13° du Code de la propriété intellectuelle et artistique.

Les exceptions

Notes et références

  1. Arrêté du ministre du Ministre de l'Industrie du 22 décembre 1981 relatif à l'enrichissement du vocabulaire de l'informatique : JORF du 17 janvier 1982, p. 624-626.
  2. Cass. com. 5 juin 2007 Cass. com. 5 juin 2007 : Bull. civ. 2007
  3. Not. Cass. com 11 juillet 2006. « le vendeur professionnel d'un matériel informatique est tenu d'une obligation de renseignement et de conseil envers un client dépourvu de toute compétence en la matière (…) l'obligation de délivrance du vendeur de produits complexes n'est pleinement exécutée qu'une fois réalisée la mise au point effective de la chose vendue ». Cass. com. 28 septembre 2004, également rendus en visant l'art. 1604 du Code civil
  4. Crim. 2 novembre 2005 : Bull. crim. 2005 n° 273 p. 950
  5. BGH 9 mai 1985 - I ZR 52/83 Inkassopro-Programm : BGHZ 94, p. 276 et s. ; GRUR 1985, p. 1041, NJW-RR 1985, p. 22 ; CR 1985, p. 22 ; BB 1985, p. 1747 ; MDR 1986, p. 121. BGH 4 octobre 1990 - I ZR 139/89 Betriebssystem : BGHZ 112, p. 264 ; NJW-RR 1991, p. 1231 ; CR 1991, p. 80 ; BB 1991, suppl. au n° 18, p. 2 ; MDR 1991, p. 503, jur-PC 1991, p. 888.
  6. Cass. ass. plén., 7 mars 1986, nos84-93.509, Atari, JCP E 1986, II, n° 14713 et JCP G 1986, II, n° 20631, note Mousseron, Teyssié et Vivant, JCPE 1986, I, n° 15791, n° 5, obs. Vivant et Lucas, D. 1986, jur. 405, concl. Cabannes et note Edelman, RD propr. ind. 1986, n° 3, p. 206 avec le rapport du Conseiller Jonquères.
  7. Directive 91/250/CEE du Conseil, du 14 mai 1991, concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur : JOCE n° L 122 du 17 mai 1991, p. 42

Voir aussi