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Codification du droit de la communication (fr) : Différence entre versions

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  Plusieurs chantiers ont été lancés au cours de ces vingt dernières années dans le but de parvenir à une codification du droit de la communication. L’objectif était et demeure de répondre aux attentes d’une plus grande accessibilité et d’une meilleure intelligibilité du droit de la communication. Dans cette optique, l'Assemblée générale du Conseil d'Etat a examiné en 2006 une étude commandée par le Premier ministre destinée à analyser l'opportunité de reprendre après deux projets de lois rejetés en 1993 et 1996, le travail de codification du droit de la communication.
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Plusieurs chantiers ont été lancés au cours de ces vingt dernières années dans le but de parvenir à une codification du droit de la communication. L’objectif était et demeure de répondre aux attentes d’une plus grande accessibilité et d’une meilleure intelligibilité du droit de la communication. Dans cette optique, l'Assemblée générale du [[Conseil d'État (fr)|Conseil d'État]] a examiné en 2006 une étude commandée par le Premier ministre destinée à analyser l'opportunité de reprendre, après deux projets de lois rejetés en 1993 et 1996, le travail de codification du droit de la communication.
  
  
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==Le projet de 1993==
 
==Le projet de 1993==
  
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Le premier projet de codification date de 1993. Mais il n'avait pu être inscrit à l'ordre du jour des débats parlementaires en raison notamment des réticences de parlementaires de la majorité à adopter à droit constant des dispositions du droit de l’audiovisuel qu’ils avaient combattues lors de la précédente législature. De plus, ce projet est  rapidement devenu obsolète en raison des modifications législatives qui sont intervenues depuis dans le domaine de la communication (notamment, en ce qui concerne l'audiovisuel, les lois n° 94-88 du 1er février 1994<ref>[[JORF:MICX9300166L|''Loi n°94-88 du 1 février 1994 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication]], [[Journal officiel (fr)|JORF]] n°27 du 2 février 1994 page 1800</ref> et n° 96-659 du 26 juillet 1996 portant réglementation des télécommunications<ref>[[JORF:MIPX9600022L|''Loi n°96-659 du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications'']], [[Journal officiel (fr)|JORF]] n°174 du 27 juillet 1996 page 11384</ref> et, en ce qui concerne le cinéma, la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement du commerce et de l'artisanat<ref>[[JORF:COMX9600031L|''Loi n°96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat'']], [[Journal officiel (fr)|JORF]] n°156 du 6 juillet 1996 page 10199</ref>). À cela s’est rajoutée la modification des [[Code (fr)|Codes]] existants notamment le nouveau [[Code pénal (fr)|Code pénal]] et l'évolution du [[Code général des impôts (fr)|Code général des impôts]].
  
  Le premier projet de codification date de 1993. Mais il n'avait pu être inscrit à l'ordre du jour des débats parlementaires en raison notamment des réticences de parlementaires de la majorité à adopter à droit constant des dispositions du droit de l’audiovisuel qu’ils avaient combattues lors de la précédente législature. Il est  rapidement devenu obsolète en raison des modifications législatives qui sont intervenues depuis dans le domaine de la communication (notamment, en ce qui concerne l'audiovisuel, les lois n° 94-88 du 1er février 1994 et n° 96-659 du 26 juillet 1996 portant réglementation des télécommunications et, en ce qui concerne le cinéma, la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement du commerce et de l'artisanat). A cela s’est rajoutée la modification des codes existants notamment le nouveau code pénal et l'évolution du code général des impôts.
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Autre difficulté posée par le projet de [[Code (fr)|Code]] déposé en 1993, il possédait quelques imperfections mineures mais très lacunaires :
  
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* Les dispositions concernant l'affichage et la publicité avaient été insérées dans le livre Ier, qui contient les règles applicables à l'ensemble des moyens de communication. Or, l'affichage est en fait un mode de communication spécifique, auquel il convient de réserver un livre particulier, à l'égal de ce qui est prévu pour l'écrit, l'audiovisuel ou le cinéma.
  
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* La présence dans le livre Ier de dispositions relatives à l'emploi de la langue française était également problématique, dans la mesure où le champ d'application était beaucoup plus vaste que celui du code proprement dit.
  
  Autre difficulté posée par le projet de code déposé en 1993, il possédait quelques imperfections mineures mais très lacunaires :
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* Le régime des agences de presse figurait dans le livre consacré à l'écrit. Or, une part importante de l'activité de ces organismes s'exerce dans le domaine audiovisuel.
  
  Autre difficulté posée par le projet de code déposé en 1993, il possédait quelques imperfections mineures mais très lacunaires :
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* Le livre III consacré à l'audiovisuel omettait des dispositions techniques relatives notamment à l'installation des antennes de réception pour la télévision.
  
• Les dispositions concernant l'affichage et la publicité avaient été insérées dans le livre Ier, qui contient les règles applicables à l'ensemble des moyens de communication. Or, l'affichage est en fait un mode de communication spécifique, auquel il convient de réserver un livre particulier, à l'égal de ce qui est prévu pour l'écrit, l'audiovisuel ou le cinéma.
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* Le [[Code (fr)|Code]] ne comporte aucune disposition concernant les territoires d’outre-mer et la collectivité territoriale de Mayotte. Cela conduisait à ne pas abroger complètement les textes codifiés puisqu'il était nécessaire de les maintenir en vigueur en tant qu'ils restaient applicables outre-mer.
  
• La présence dans le livre Ier de dispositions relatives à l'emploi de la langue française était également problématique, dans la mesure où le champ d'application était beaucoup plus vaste que celui du code proprement dit.
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==Le projet de 1996==
  
Le régime des agences de presse figurait dans le livre consacré à l'écrit. Or, une part importante de l'activité de ces organismes s'exerce dans le domaine audiovisuel.
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Le 30  octobre 1996, le gouvernement dépose au bureau du [[Sénat (fr)|Sénat]] un second projet de loi portant sur le code de la communication et du cinéma. Le projet de [[Code (fr)|Code]] reprenait pour l’essentiel le plan de 1993 en codifiant également les dispositions relatives à l’outre mer. Comme en 1993, le projet de code n’a jamais été inscrit à l’ordre du jour. Cette fois, le projet n’a pas été « examiné, sans doute en raison de la grande sensibilité politique des matières qu’il traite, de l’instabilité chronique du droit de l’audiovisuel et à l’inverse du caractère symbolique de la grande loi de 1881 sur la presse à laquelle les milieux intéressés demeurent très attachés malgré les modifications profondes et nombreuses qu’elle a subies en un siècle ».  
  
• Le livre III consacré à l'audiovisuel omettait des dispositions techniques relatives notamment à l'installation des antennes de réception pour la télévision.
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Plusieurs remarques méritent cependant d’être faites sur ce projet de [[Code (fr)|Code]] :
  
Le code ne comporte aucune disposition concernant les territoires d’outre-mer et la collectivité territoriale de Mayotte. Cela conduisait à ne pas abroger complètement les textes codifiés puisqu'il était nécessaire de les maintenir en vigueur en tant qu'ils restaient applicables outre-mer.  
+
* Le choix avait été fait d’une codification à droit constant. Ce projet était suiveur par rapport à un nombre significatif de codes (civil, pénal, procédure pénal, santé publique, consommation, travail, Code générale des impôts, Code générale des collectivités territoriales). Cela traduit la richesse mais aussi l’imprécision de la notion de communication présente dans de nombreux domaines.  
  
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* Le projet de 96 développait le droit selon trois axes :
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** assujettissement des nouveaux moyens d’expression à un droit spécifique,
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** développement des mesures préventives,
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** multiplication des infractions de presse en dehors de la loi de 1881.
  
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* Seuls deux thèmes ont fait l’objet de fortes hésitations et finalement d’une exclusion du périmètre du projet de [[Code (fr)|Code]] :
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** La loi n°94-665 du 4 aout 1994 relative à l’emploi de la langue française<ref>[[JORF:MCCX9400007L|''Loi n°94-665 du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française'']], [[Journal officiel (fr)|JORF]] n°180 du 5 août 1994 page 11392</ref> au motif que les dispositions de cette loi concernant bien davantage le droit de la consommation, le droit du travail et le droit des affaires, plutôt que le droit de la communication proprement dit.
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** Le [[gouvernement (fr)|gouvernement]] a exclu les dispositions relatives à la publicité déjà codifiées dans le [[Code de la consommation (fr)|Code de la consommation]], le [[Code de la santé publique (fr)|Code de la santé publique]] et le code des débits de boissons alors en vigueur.
  
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=Le projet de 2006=
  
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==Le rapport du Conseil d'État==
  
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Le [[Conseil d'État (fr)|Conseil d'État]], sur la demande du Premier Ministre a préparé un rapport sur l’opportunité de reprendre ce travail de codification du droit de la communication, après les deux tentatives infructueuses de 1993 et 1996. À cet effet, la plus haute juridiction administrative a procédé à un inventaire méthodique de ce droit, en rapide évolution. Ce rapport, après de longs développements sur la notion de « communication », présente un inventaire complet et méthodique de l'ensemble des éléments relevant du droit de la communication. Au-delà du droit des médias, construit autour de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse et dont le champ est délimité par le critère de publication, l’inventaire a pour fil directeur le parcours de l’information. Il touche également le droit des communications électroniques, le droit de la protection du secret et des informations relatives aux personnes, ainsi que le droit de l'information dans son rapport à la décision publique (accès aux documents administratifs et diffusion des données publiques).
  
==Une compétence dévolue à des organismes privés : l’ICANN, l’AFNIC et les bureaux d’enregistrement==
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L'étude fait trois préconisations :  
  
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• Avoir, a minima, une codification autour du droit des médias (presse écrite, télévision et audiovisuelle).
  
Le Domain Name System (DNS) – « système de nommage » - a été établi en 1984 avec l’apparition de noms de domaine en extension <.com>, <.org> et <.edu>. Deux ans plus tard, ce sera le tour de l’extension en <.fr>.
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• Mettre en commun le droit des médias avec le droit des communications électronique dans le cadre de la codification de façon à refléter la convergence numérique (avoir dans un même code, le droit des médias, la LCEN et le Code des postes et communications électroniques expurgé de sa partie "postale").
  
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• Développer un portail numérique destiné à améliorer, hors de toute codification formelle, l'accessibilité et l'intelligibilité de ce droit de la communication. La création d’un tel portail internet serait une démarche différente d’une entreprise de codification elle en serait un complément utile et non une alternative.
  
En 1993, la société américaine de droit privé, [http://www.networksolutions.com/| Network Solutions Inc.], remporte le contrat avec la National Science Foundation pour l’enregistrement des noms de domaine. Cette société de droit privé va, pendant plus de cinq ans, attribuer seule des noms de domaine pour certaines des extensions gTLD, notamment le <.com>.
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==Les objectifs de codification==
  
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Les objectifs de cette codification sont doubles :
  
Cette situation de monopole privé, ainsi que l’insuffisance du système de nommage vis-à-vis des modalités d’attribution des noms de domaine va aboutir à la création en 1998 de l’[[Internet Corporation of Assigned Names and Numbers]] (ICANN)<ref>[http://www.icann.org/tr/french.html|  Voir le site le l'ICANN]</ref>, qui pour le coup, est un organisme privé à but non lucratif.  
+
* Rapprocher des dispositions connexes dispersées mais appelées à évoluer, sous l’influence des évolutions des modes d’information et de la convergence numérique, qu’il s’agisse notamment de l’accès à l’information, de certaines dispositions afférentes au droit d’auteur et aux droits voisins ou à la mémoire de l’information.
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* Contribuer à la clarté et l’intelligibilité du droit en vigueur au delà des dispositions codifiées en favorisant une vision d’ensemble de celui-ci propice aux simplifications et mises à jour.  
  
L’ICANN sera donc chargée de gérer le système de nommage des noms de domaine de premier niveau pour les codes génériques (gTLD) et les codes nationaux (ccTLD), parmi d’autres fonctions comme allouer l’espace des adresses IP.  
+
Il est intéressant de noter que les projets de codification du droit de la communication ne souhaitent pas intégrer les dispositions relatives au droit de la propriété intellectuelle. Est-ce dû au fait qu’un code existe déjà en la matière, ou cela signifie-t-il que ce n’est pas de la « communication » ? La question reste entière, même si ses conséquences pratiques n’ont que peu d’importance.
In fine, l’ICANN a un rôle de superviseur et de coordinateur des antennes nationales pour assurer une bonne gestion du DNS, afin de garantir la « résolution universelle », que chaque internaute puisse trouver toutes les adresses viables.  
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==La démarche utilisée==
  
Le 1er janvier de cette même année 1998, l’[[Association française pour le nommage internet en coopération (fr)|Association française pour le nommage internet en coopération]] (AFNIC)<ref>[http://www.afnic.fr/ Voir le site de l'AFNIC]</ref> commence à occuper ses fonctions, suite à sa création en décembre 1997 par une intention commune de l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria) et de l’[[État (fr)|État]].
+
===Les scénarios proposés par le Conseil d'État===
  
Le Préambule de la Charte de l’AFNIC, en sa version du 30 mars 2009, présente la fonction de cette association, régie par les dispositions de la loi du 1er juillet 1901, de la manière suivante : « est chargée d'attribuer et de gérer les noms de domaine, au sein des zones de nommage correspondant au territoire national qui lui ont été déléguées ».
+
En ce qui concerne la démarche de codification proprement dite, le [[Conseil d'État (fr)|Conseil d'État]] a étudié quatre scénarios, ne recommandant toutefois que les deux premiers :  
  
L’AFNIC a reçu l’aval de l’ICANN pour accomplir cette fonction et elle admet son état de dépendance technique envers cette dernière.  
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* Un scénario rassemblant les dispositions afférentes aux médias dont le volet audiovisuel fait l’objet d’une attente clairement manifestée
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* Un scénario élargi aux communications électronique et rapprochant utilement les dispositions sur l’information numérique des textes sur les médias
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* Un scénario proposant d’ajouter aux précédents les textes relatifs à la protection des données personnelles.
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* Un ou des scénarios, sur le principe du code pilote et du code suiveur, offrant des liens avec le droit de la propriété intellectuelle, mais aussi avec les dispositions relatives à l’accès aux archives publiques et aux documents administratifs ainsi qu’à la réutilisation des informations publiques.  
  
Dans la suite du Préambule, il est précisé que :  «L’AFNIC a la qualité d'office d’enregistrement et exerce sa mission en application des dispositions des articles [[CPOSTEfr:L45|L.45 ]] et [[CPOSTEfr:R20-44-34|R.20-44-34]] et suivants du [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|Code des postes et des communications électroniques]] » et du fait de cette qualité, elle élabore « un ensemble de règles relatives à l'enregistrement et à la maintenance des noms de domaine qu'elle administre », règles contenues dans sa Charte.
 
  
 +
Si les deux premiers scénarios ont aux yeux du [[Conseil d'État (fr)|Conseil d'État]] la cohérence nécessaire à la constitution d’un code, les deux autres en revanche n’ont pas paru pertinents du fait que le droit de la protection des données est trop éclaté ce qui nécessite une trop grande importance des dispositions suiveuses. De plus, ces scénarios auraient pour effet de générer un périmètre restreint du Code. Concernant l’adjonction de liens relatifs aux autres droits de l’information, la plupart de ces dispositions étant déjà codifiées, un simple renvoi suffirait.
  
Or, malgré cette mission qui est reconnue à l’AFNIC, il faut appréhender qu’ : « aucune demande d’opération relative à un nom de domaine ne peut être adressée directement à l'AFNIC », mais à « un bureau d’enregistrement, qui agit comme interface entre le demandeur ou le titulaire et l'AFNIC », selon l’article 9 de la dite Charte.
 
  
Ces bureaux d’enregistrement, ou « registars » en anglais, sont des sociétés qui ont passé un contrat avec l’AFNIC, sans pour autant être labellisées par elle, leur permettant d’enregistrer les noms de domaine en <.fr> et <.re>.
+
===Méthodes de codification===
  
Il existe environ 1000 bureaux d’enregistrement en situation contractuelle avec l’AFNIC.
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La méthode de [[codification (fr)|codification]] par [[ordonnance (fr)|ordonnance]] permet de contourner l’encombrement du calendrier parlementaire. Le processus de codification peut se faire selon deux méthodes différentes : 
  
  
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* La codification à droit constant
  
==La procédure d’attribution des nom de domaine==
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Cette codification consiste à reprendre tout le droit existant et le répartir dans un code structuré. Cette méthode est en soi réformatrice, car elle permet d’améliorer la cohérence rédactionnelle des textes, d’harmoniser l’état du droit et d’assurer le respect de la hiérarchie des normes, selon la finalité qui lui a été assignée.
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Le champ de l’habilitation à droit constant comprend donc nécessairement les réformes de fond nécessaires à la mise en conformité des dispositions en vigueur avec la constitution et le droit international ou communautaire.
  
  
===La recherche d’antériorité===
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* La codification évolutive
  
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Il s’agit ici de profiter de cette codification pour réviser ou réformer le droit de la communication. Cette méthode avait été envisagée au cours des précédentes tentatives de codification, mais la question de son opportunité dans la codification actuelle demeure, car la codification à droit constant est actuellement la méthode la plus utilisée pour la production de codes.
  
La première étape à observer dans cette procédure d’attribution est celle de la recherche d’antériorité, qui aura pour but de vérifier la disponibilité du nom de domaine, étant logique que deux noms de domaine ne doivent pas être identiques.
 
  
Et pour vérifier la disponibilité du nom de domaine souhaité par le déposant, ce dernier devra consulter la base de données appelée «&nbsp;''[http://www.afnic.fr/outils/whois| Whois]''&nbsp;» ; qui est accessible par exemple sur le site de l’AFNIC.
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=Les difficultés de la codification=
Cette base de données est définie par la Charte, comme étant un : « service de recherche fourni par les registres permettant d'obtenir des informations administratives et techniques sur un nom de domaine ou sur une adresse IP ».
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==Problème relatif au périmètre de code==
  
Une fois la disponibilité avérée, le nom de domaine choisi pourra être enregistré auprès d’un bureau d’enregistrement, conformément à des dispositions contractuelles ayant pour objet le respect des principes directeurs d’attribution des noms de domaine.  
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L’un des premiers problèmes du code est d’en définir le périmètre précis. En effet, cette codification est destinée à des usages et des catégories d’usagers très différents dont les attentes ne sont pas homogènes : les administrations, les professionnels du droit, les professionnels de la communication, les acteurs de la communication notamment ceux issus du monde de l’interne et enfin l’internaute/consommateur/citoyen.  
  
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D’autres interrogations portent sur la création d’un code communautaire des médias et des communications électroniques rassemblant la directive TVSF et les six directives du paquet Telecom qui mettraient en péril toute codification antérieure. Certains auteurs prônent l’attente de la stabilité du cadre communautaire du droit de la communication avant de s’engager dans sa codification.
  
  
===« Premier arrivé, premier servi » : règle pilote des principes directeurs d’attribution des noms de domaine===
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==Problème relatif à la codification==
  
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Le problème fondamental concernant la codification du droit des communications vient de la forte dispersion des sources. L’état des lieux est difficile à faire, compte tenu de l'éparpillement des textes en de multiples dispositions disséminées dans le code pénal, la loi du 29 juillet 1881, la loi du 30 septembre 1986, etc. L’élaboration d’un code de la communication permet d’éviter cette dispersion, mais elle n’est pas encore accomplie.
  
Les principes directeurs d’attribution des noms de domaine ont été initialement crées par l’ICANN en 1999, qui a élaboré des principes généraux peu contraignants, appelés principes UDRP pour « Uniform policy dispute resolution ».  
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Autre problème relatif à la codification, le droit de la communication est marqué par l’importance des disproportions réglementaires prises par des autorités administratives indépendantes (CSA, CNIL, ARCEP) ou par d’autres autorités (CNC). Le droit de la communication apparaît de plus comme un droit déjà en partie codifié.
  
En effet, le principe « premier arrivé, premier servi » qui est la règle « première » en matière d’attribution des noms de domaine ne peut pas être plus libertaire.
 
Cette règle trouve sa légitimité dans le fait d’être un principe de droit international qui a vocation à s’appliquer dans la gestion des ressources rares.
 
Et la singularité d’un nom de domaine en fait sa rareté.
 
  
Ensuite, il est simplement demandé au déposant du nom de domaine « une sorte de déclaration sur l’honneur » <ref> TARDIEU-GUIGUES, E., « L’article R.20-44-45 du décret du 6 février 2007 (…)arrêt « Sunshine », ''RLDI'', 2009/50, n°1657, p.64 </ref> vu qu’il doit garantir, sans vérification de la part des bureaux d’enregistrement, certains impératifs.
+
=L'existence d'un "faux code de la communication"=
  
L’article 2 de ces principes<ref>[http://www.wipo.int/export/sites/www/amc/fr/docs/icannpolicy.pdf Voir en ligne] </ref> prévoit par exemple qu’il incombe au déposant « de déterminer si votre enregistrement de nom de domaine porte en quelque manière que ce soit atteinte aux droits d’autrui » ou que le déposant affirme et garantit que ce dit enregistrement n’est pas fait « à des fins illicites ».  
+
En marge de ce travail imposant de codification,  des avancées ont malgré tout été faites notamment la publication par les éditions Dalloz (sous la direction de J. Huet et H. Maisl) de la 1ère édition du « Code de la communication 2000 ». Ce [[Code (fr)|Code]], sans opérer de modifications substantielles du droit de la communication, palie le problème de la dispersion en rassemblant de nombreux textes épars. Ce mérite est d'autant plus grand que l'ouvrage regroupe les dispositions régissant non seulement les médias et les infrastructures de communication, mais également l'information (données publiques, publicité, vie privée, présomption d'innocence...).  
  
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Toutefois, il est nécessaire de rappeler qu'il ne s'agit pas d'un travail de codification officiel mais bien d'un faux code, à savoir une compilation de textes non codifiés.
  
Face à la largesse de ces principes UDRP, appliqués comme « base » par les « antennes nationales de l’ICANN », ces dernières ont souhaité user de leur possibilité d’élaborer une charte d’attribution des noms de domaine, afin d’appliquer à leur domaine national des règles plus intelligibles et précises, donc a priori plus contraignantes.
+
=Voir aussi=
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{{moteur (fr)|codification "droit de la communication"}}
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=Liens externes=
  
Pour le domaine <.fr>, l’AFNIC ne s’est pas fait prier et a crée sa charte de nommage, ou plutôt ses chartes de nommage successives.  
+
*[http://www.industrie.gouv.fr/enjeux/pdf/PJL_expose.pdf Travaux préparatoires sur le projet de loi relatif aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle]
Ainsi, l’article 14 de la charte, version en vigueur, énonce que : « Le demandeur choisit librement le ou les terme(s) qu'il souhaite utiliser à titre de nom de domaine et est seul responsable de son choix. Il lui appartient et à lui seul de s'assurer que le terme qu'il souhaite utiliser à titre de nom de domaine, sans que cette liste ne soit exhaustive : (…) 3) ne porte pas atteinte aux règles de la concurrence et du comportement loyal en matière commerciale ; 4) ne porte pas atteinte aux droits des tiers, en particulier : - n’est pas identique ou susceptible d’être confondu avec un nom sur lequel est conféré un droit de propriété intellectuelle français ou communautaire (propriété littéraire et artistique et/ou propriété industrielle), - n’est pas identique au nom patronymique d'une personne, sauf si le demandeur a un droit ou un intérêt légitime à faire valoir sur ce nom et agit de bonne foi (…) ».
+
  
Dés lors, le déposant d’un nom de domaine en <.fr> ou <.re>, est mieux informé sur les droits que le nom enregistré ne doit pas porter atteinte, tel que le droit de propriété intellectuelle ; alors que les principes UDRP visent les « droits d’autrui » en général.
+
=Sources=
  
 +
*Inventaire méthodique et codification du droit de la communication, Conseil d’Etat, 2006.
  
Or, malgré les efforts de précision opérés par l’AFNIC, la règle « premier arrivé, premier servi » qui a pour revers d’exclure tout enregistrement d’un nom de domaine identique à un préexistant, a entrainé le développement des pratiques de « cybersquatting » et de « [[typosquatting (fr)| typosquatting ]]; et parfois, alors même que la « déclaration sur l’honneur » ai été respectée par le déposant.
+
*Revue de science criminelle 2000 p59. Jacques Françillon, Professeur à la Faculté de droit Jean-Monnet de l’Université de Paris XI
  
 +
*La codification du droit de la communication en projet ; Publiée le 25 fév 2007 : Par Didier FROCHOT
  
 +
*Etude E. Derieux, Le projet de loi portant code de la communication et du cinéma, JCP 1997.I.4007.
  
=La notion de « typosquatting »=
+
*Ass. nat. n° 1187, et doc. Sénat n° 392 ; Rapport D. Malthus, Commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale.
  
 +
*Ass. nat. n° 1079, p. 20 ; Rapport C. Lazerges, Commission des lois de l'Assemblée nationale,
  
==Une notion dans le sillage du « cybersquatting »==
+
*Ass. nat. n° 1468, et Rapport C. Jolibois, Commission des lois du Sénat, doc. Sénat n° 419.
  
 
Par un avis publié au [[Journal officiel (fr)|Journal officiel]] le 17 avril 2008, la [[Commission générale de terminologie et de néologie (fr)|Commission générale de terminologie et de néologie]] a crée le terme de « cybersquat », inspiré de son équivalent anglais « cybersquatting », répondant à sa mission d’enrichissement de la langue française.
 
 
La commission en a donné la définition suivante : «&nbsp;''Pratique consistant à accaparer, en le déposant, un nom de domaine reprenant ou évoquant une marque, un nom commercial, un patronyme ou toute autre dénomination, afin de tirer un profit matériel ou moral de sa notoriété présente ou à venir''&nbsp;».
 
Elle ajoute que cette pratique «&nbsp;''consiste par exemple à déposer des noms en très grand nombre dans l'espoir de revendre certains d'entre eux''&nbsp;».
 
 
En effet, de nombreux noms de domaine correspondant à des marques et autres signes distinctifs antérieurs ont été enregistrés au détriment, voire à l’insu de leurs légitimes titulaires. Dès lors, du fait de la règle, bien connue désormais, « premier arrivé, premier servi », les entreprises victimes se sont vues refuser par les organismes gestionnaires, l’emploi de leur propre marque ou autre signes, en tant que nom de domaine pour leur site professionnel. S’en est suivi alors de véritable opération de chantage entre les détenteurs des noms de domaine « frauduleux » et les titulaires légitimes, les forçant à payer le prix fort dans le seul espoir de retrouver cette juste possession.
 
 
Ainsi, le nom de domaine <.business.com> a pu être revendu à 7,5 millions de dollars ou encore celui de <.MP3audiobooks.com> à 8 millions de dollars.
 
 
Et on peut noter que la commission générale de terminologie et de néologie fait enter dans cette notion de « cybersquat » celle de « typosquat », car elle indique que : « des variantes orthographiques d'une même dénomination : on parlera dans ce cas de « typosquat » (en anglais : typosquatting) »  peuvent aussi être déposées dans l’espoir d’être revendu.
 
Le « typosquat » serait donc dérivé, une acception de la notion de « cybersquat ».
 
 
 
 
==Le « typosquatting »  stricto sensu==
 
 
 
Grâce à la procédure de règlement des litiges de l’[[Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (int)|Organisation mondiale de la propriété intellectuelle]] (OMPI), essentiellement, les noms de domaine qui avaient été « cybersquattés » ont été récupéré par la majorité des titulaires légitimes de marques et dénominations sociales renommées, ce qui a mis un frein à cette pratique parasitaire.
 
Néanmoins, ceci n’a pas arrêté la malveillance des « cybersquatteurs », qui ont diversifié leur pratique en enregistrant des noms de domaine notoires avec des fautes d’orthographes ; d’où l’avènement du « typosquatting ».
 
 
Le « typosquatting » serait donc une pratique consistant : « à enregistrer un nom de domaine typographiquement proche d’une marque ou d’une dénomination sociale dans le but de créer une confusion » <ref> Christiane Féral-Schuhl, ''Cyberdroit, le droit l’épreuve de l’Internet'', Dalloz-Dunod, 5e éd., 2008, 1000 p., p.566 </ref>. 
 
Et cette confusion aurait pour but de détourner l’internaute du site initialement cherché, pour le diriger accidentellement, c’est-à-dire par une faute de frappe, sur un autre qui propose des services similaires.
 
L’exemple souvent cité par les juristes pour illustrer cette pratique de « typosquat » est celui de <rueducommerce.com>, qui a été « typosquatté » en <rueducommerc.com> et <rueducommrece.com>.
 
Ici, l’on voit bien que l’oublie ou l’inversion de lettres peuvent arriver aisément quand on tape le nom de domaine, d’où l’intérêt du « typosquatting » pour dévier une clientèle de sites de sociétés connues et donc économiquement puissante.
 
 
Néanmoins, il n’y a pas que des gens mal intentionnés et en quête d’argent facile qui ont recours au « typosquatting », il peut s’agir des entreprises elles-mêmes afin de se prémunir des dommages liés à  cette pratique.
 
 
Pour d’autres exemples de typosquatting, lire l’article de Jean-Frédéric Carter,  «&nbsp;Vers une nouvelle affaire de typosquatting en fr. ?&nbsp;»<ref>Carter, Jean-Frédéric,  «&nbsp;[http://www.droit-ntic.com/news/afficher.php?id=317 Vers une nouvelle affaire de typosquatting en fr. ?]&nbsp;», ''[http://www.droit-tic.com Droit-TIC]'', 24 août 2005</ref>.
 
 
 
==Vers le « Grabbing »==
 
 
 
Le « Grabbing » ou « gang name » est une « pratique proche du typosquatting », selon  Christiane Féral-Schuhl. Car au lieu d’enregistrer des noms de domaine avec une simple modification orthographique pour entraîner une erreur, là, la confusion va être plus redoutable, du fait qu’un nom de domaine correspondant à des marques de grande renommée va être enregistré en y ajoutant un mot qui peut être totalement assimilable à ces dernières. Ainsi, l’enregistrement du nom de domaine <lancomeparis.com> parasite celui de <lancome.com> ; même schéma pour <lorealparis.com> par rapport à <loreal.com>.
 
Et cette pratique s’est développée, toujours dans le but de revendre à ces grosses multinationales les noms de domaine en question, à des prix exorbitants.
 
 
 
=Le contentieux du « typosquatting »=
 
 
==Le contentieux extra-judiciaire==
 
 
===La procédure de règlement alternatif des litiges à l’aune des principes directeurs d’attribution des noms de domaine===
 
 
 
En 1999, suite à l’élaboration des principes UDRP, l’ICANN a mis au point une procédure de règlement alternatif des litiges, tranchant le différend par référence à ces derniers.
 
L’ICANN ne s’occupe pas directement de cette tâche, mais l’a déléguée à des organes désignés par elle, tels que l’Institute For Dispute Resolution (CPR), l’Asian Domain Name Dispute Resolution Centre (ADNDCR) ou encore l’[[Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (int)|Organisation mondiale de la propriété intellectuelle]] (OMPI)<ref>[http://www.wipo.int/portal/index.html.fr Voir le site]</ref>.
 
 
Cette « procédure administrative obligatoire », d’après l’article 4 des dits principes, permet au titulaire d’une marque exclusivement, de s’opposer à l’attribution d’un nom de domaine, en y déposant une plainte.
 
Cette plainte peut être rejetée notamment si le déposant du nom de domaine prouve être de bonne foi ou qu’il en fait un usage non commercial et loyal, sans créer de confusion possible, telle que le prévoit les principes UDRP.
 
Dés lors, certains titulaires de marque, même de renommée, ont vu leurs plaintes éconduites, car les instances de règlement alternatif des litiges règlent l’affaire relativement aux principes et non sur le fondement d’un droit des marques, pouvant ne pas être semblable d’un pays à l’autre.
 
 
Cette procédure est dite « obligatoire » car une personne qui souhaite se voir attribuer un nom de domaine doit y adhérer impérativement.
 
 
De plus, elle est dite « administrative », du fait qu’elle ne relève pas d’une procédure d’arbitrage et encore moins d’une procédure judiciaire. Par conséquent, le plaignant qui n’aurait pas eu gain de cause devant l’organisme administratif, pourra former une action devant la juridiction judiciaire de son pays, statuant cette fois-ci relativement au droit positif national et notamment par rapport au droit des marques. Il y a donc un cumul de la procédure administrative avec celle juridictionnelle, sachant que la dernière l’emporte en cas de « contradiction ».
 
 
 
 
Quant à l’AFNIC, cette dernière a façonné une procédure de règlement alternatif des litiges qui diffère de celle de l’ICANN, car il existe deux procédures distinctes et que le champ d’application de ces procédures est plus étendu.
 
 
En effet, on rencontre une procédure de règlement alternatif des litiges  dite « par recommandation en ligne » gérée par le Centre de médiation et d’arbitrage de Paris et une autre dite « par décision technique » administrée par le [[Centre d'arbitrage et de médiation de l'OMPI (fr)| Centre d'arbitrage et de médiation de l'OMPI]].
 
 
Quant au champ d’application, l’instance de règlement ne traite pas uniquement des conflits entre un nom de domaine et une marque, mais aussi entre le dit nom et les autres signes distinctifs et droits visés à l’article 14 de la charte de l’AFNIC , version en vigueur.
 
Et dans la même logique que les principes URDP, la plainte pourra être rejetée si le déposant du nom de domaine contesté prouve sa bonne foi, ou qu’il a un intérêt  légitime à l’exploitation du nom litigieux, conformément à la charte de l’AFNIC.
 
Et de la même façon que pour la procédure de l’ICANN, c’est une procédure « obligatoire » (par adhésion impérative) et « administrative », l’instance réglant le différend en se référant à la charte de l’AFNIC en vigueur et non par rapport au droit positif sur le territoire national ; le cumul et la primauté de la décision judicaire étant toujours de mise.
 
 
On peut ainsi noter que l’OMPI, dans le cadre de cette procédure, a pu être saisie à plusieurs reprises pour trancher des cas de « typosquatting ».
 
Ainsi, la compagnie aérienne Air France, victime de l’enregistrement du nom de domaine <arifrance.com>, s’est vue transférer le nom litigieux par décision de l’[[Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (int)|OMPI]] du 22 juillet 2003<ref>[http://www.wipo.int/amc/en/domains/decisions/html/2003/d2003-0417.html  WIPO Arbitration and Mediation Center, ''Société Air France'' v. ''Alvaro Collazo'', Case No. D2003-0417] </ref> .
 
 
La plupart du temps, l’OMPI donne raison aux plaignants et transfert à ces derniers le nom de domaine contesté.
 
 
Ce qui fut le cas notamment pour les noms de domaine <axabanqu.fr>, <credit-mutu.fr> et <credit-mutul.fr>, transférés aux sociétés plaignantes Axa et Crédit Mutuel, par décision de l’OMPI.
 
S’agissant de l’affaire Axa du 26 février 2007 <ref>[http://www.wipo.int/amc/en/domains/decisions/html/2006/dfr2006-0016.html Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI, Décision de l'expert, ''AXA'' c. ''Mathias Baumgartner'', 26 février 2007, Litige n° DFR 2006-0016]</ref>, l’expert avait pu constaté qu’il était : « incontestable que le nom de domaine litigieux imite et usurpe les droits antérieurs détenus par le Requérant, la seule suppression de la lettre “e” à la fin du nom de domaine <axabanqu.fr> n’altérant en rien le risque de confusion engendré à raison de l’imitation des marques antérieures et de l’usurpation de la dénomination sociale, nom commercial, enseigne et noms de domaine antérieurs », comme il était incontestable « comme cela a été relevé par de nombreux autres experts, qu’il s’agit là d’un cas de “typosquatting” classique ayant pour objet de profiter d’une erreur de frappe de l’internaute pour détourner celui-ci vers un site Internet distinct, et ce généralement à titre lucratif ».
 
De ce fait, l’expert ne pouvait qu’établir la violation des droits du requérant par l’enregistrement du nom de domaine « frauduleux ».
 
 
 
===La procédure « PREDEC » de l’AFNIC : le règlement alternatif des litiges à l’aune des règles du décret du 6 février 2007===
 
 
 
Le 22 juillet 2008, l’AFNIC a mis en place une procédure particulière de résolution des litiges, dite procédure « PREDEC », afin de faire cesser promptement des violations manifestes du décret du 6 février 2007, qui est le texte établissant le cadre juridique national de l’attribution des noms de domaine en extension <.fr> (voir supra).
 
Il s’agit ici d’une procédure singulière, car sur différents aspects, elle s’éloigne des procédures « classiques » de règlement alternatif des litiges des noms de domaine.
 
En effet, cette procédure a un fondement réglementaire et non contractuel.
 
Ensuite, l’AFNIC rend elle-même la décision, alors qu’habituellement, par souci d’impartialité, le règlement alternatif des litiges de noms de domaine en <.fr>  - mais également pour les autres extensions - est confié à des organismes tiers, tel que le Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI. Or, ces procédures vues en amont ne disparaissent pas au profit de celle-là ; il y aurait un cumul.
 
Enfin, le coût de la procédure « PREDEC » est faible relativement à celle de ses homologues.
 
 
Un an après la première décision « PREDEC » rendue le 29 septembre 2008 - suivie par 72 autres – l’auteur Cedric Manara <ref> MANARA, C., « La nouvelle « jurispedec » : un an de procédure de résolutions des cas de violations manifestes du décret du 6 février 2007 », RLDI, 2009/53, n°1774, p.61-63 </ref> en a fait un premier bilan.
 
Il en ressort plusieurs enseignements, notamment que : l’AFNIC accepte de trancher à nouveau un litige entre les mêmes parties et à propos d’un même nom de domaine ; la majorité des procédures sont engagées sur la base d’un droit de marque (55 décisions) et dans ces hypothèses, la violation manifeste des dispositions du décret est retenue lorsque le nom de domaine identique ou très proche de la marque – donc « typosquatting » - est utilisé comme lien renvoyant à des sites concurrents de la marque - c’est le cas du « parking » - ; la procédure ne peut être engagée que pour protéger des droits antérieurs à l’enregistrement du nom de domaine ; a priori, l’AFNIC devrait trancher des litiges concernant seulement les noms de domaine crées après le 22 juillet 2008 - le rappelant dans une décision – alors que la moitié de ses décisions ont été rendues à propos de noms crées ou renouvelés après cette date.
 
 
Or, selon cet auteur, l’essentiel à retenir de cette première année de « jurispredec », est que : « pour la défense d’une marque, le fait d’engager la procédure peut suffire à faire plier le défendeur dans un cas sur cinq. (…) Les critères d’appréciation de l’organe décisionnaire manquent encore de netteté ».
 
Enfin, il soulève la question de la légitimité de l’AFNIC à conduire cette procédure, le décret du 6 février 2007 confiant ce rôle aux « offices d’enregistrement ».
 
 
 
 
===La procédure de règlement des différends des offices d’enregistrement ?===
 
 
 
Le [[décret (fr)|décret]] du 6 février 2007 prévoit que des offices d’enregistrement, personnes morales de droit privé, auront pour mission de collecter « en tant que de besoin auprès des bureaux d'enregistrement » et de conserver « les données de toute nature nécessaires à l'identification des personnes morales ou physiques titulaires de noms de domaine », qui seront confinées dans une base de donnée respectueuse de la loi du 6 janvier 1978 dite « fichiers et libertés »<ref>''[http://www.legifrance.gouv.fr/texteconsolide/PPEAU.htm ''Loi n° 78-17 du 6 Janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés''], [[Journal officiel (fr)|JORF]] du 7 janvier 1978 page 227</ref>.
 
 
Il faut donc bien différencier ces offices d’enregistrement, qui sont « chargées d'attribuer et de gérer les noms de domaine », des bureaux d’enregistrement (vues infra) qui « fournissent des services d'enregistrement de nom de domaine » et qui sont liés contractuellement avec les dites offices, selon l’article [[CPOSTEfr:R20-44-34|R.20-44-34 ]] du [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|Code des postes et des communications électroniques]] (CPCE).
 
 
Le dit Code poursuit à l’article suivant que : « chaque office est choisi, après consultation publique, par arrêté du ministre chargé des communications électroniques ». Or, l’appel à candidature de ces offices pour le <.fr> a été publié au [[Journal officiel (fr)|Journal officiel]] le 15 janvier 2009, ce qui fait qu’à ce jour, le ministre chargé des communications électroniques n’en a toujours pas désigné une.
 
 
Mais malgré cette inexistence temporaire, il faut considérer que ces offices d’enregistrement auront la possibilité de recourir à une procédure de règlement des litiges, afin de permettre à des personnes qui auront un intérêt, de contester l’enregistrement effectif de noms de domaine litigieux.
 
 
En effet, l’article [[CPOSTEfr:R20-44-36|R20-44-36 ]] du [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|CPCE]] prévoit que : « La désignation d'un office peut être assortie de prescriptions portant notamment sur : (…)- la mise en place de procédures de règlement des différends ».  Ce qui signifie que ce sera le ministre chargé des communications électroniques qui donnera ses « prescriptions » quant au déroulement de cette procédure.
 
Ainsi, un organisme qui gère l’attribution des noms de domaine se verra confier également la mission de régler les conflits d’attribution, alors que dans le cadre de l’ICANN ou de l’AFNIC (avant 2008), ces dernières étaient neutres, déléguant la procédure de règlement alternatif des litiges à des instances telles que l’OMPI.
 
« Seront-ils à la fois juges et parties ? », comme l’énonce justement Emilie Tardieu-Guigues.
 
 
Néanmoins, ce texte est tellement lacunaire quant au rôle joué par les offices dans cette procédure, qu’il y a de fortes chances qu’à terme, cela aboutisse à une « passivité » <ref> SARDAIN, F., « Le nouveau régime d’attribution des noms de domaine français », ''Comm. Com. électr.'' 2007, étude 8 </ref> de ces dites offices.
 
 
Mais, alors que l’on constate l’efficacité de la procédure de règlement alternatif des litiges de l’OMPI et la possibilité de recourir au juge judiciaire, cette « passivité » serait-elle dommageable ?
 
 
==Le contentieux judiciaire==
 
 
 
Face à un acte de « typosquatting », la partie lésée a la possibilité d’intenter une action en justice sur la base de plusieurs fondements.
 
 
En effet, le titulaire d’une marque pourra intenter une [[action en contrefaçon (fr)|action en contrefaçon]] dirigée contre le « typosquatteur », ayant enregistré un nom de domaine quasi-identique à la dite marque, soit une imitation quasi-servile.
 
Cependant, dans l’hypothèse où l’acte de [[contrefaçon (fr)|contrefaçon]] ne serait pas avéré ou qu’il ne s’agirait pas d’une marque qui a été « typosquattée », mais simplement un signe distinctif non rattaché à un droit de propriété, tel qu’une dénomination sociale, le demandeur pourra recourir à deux actions, qui ne sont pas exclusives l’une de l’autre, à savoir une action en concurrence déloyale et celle fondée sur un acte parasitaire.
 
 
Ce sont donc trois actions complémentaires, auxquelles la partie lésée peut avoir recours et qui auront des chances d’aboutir, à l’aune des éléments factuels et de l’appréciation souveraine des [[juge (fr)|juges]] du fond.
 
 
 
===L’action en contrefaçon===
 
 
 
Cette action « vise à faire constater l’infraction, cesser le trouble et obtenir réparation du préjudice subi du fait de l’atteinte à l’image de marque et de l’indisponibilité du nom de domaine. Ce préjudice peut s’analyser comme une perte de chance de contacter des clients sur l’internet et donc, comme une perte financière subie » <ref>Féral-Schuhl, Christiane, ''Cyberdroit, le droit l’épreuve de l’Internet'', Dalloz-Dunod, 5e éd., 2008, 1000 p., p.572 </ref>.
 
 
 
====L’action en référé====
 
 
 
Le titulaire de la marque, victime de « typosquatting », qui voudrait faire rapidement stopper l’atteinte, « peut saisir en référé la juridiction civile compétente », selon l’article [[CPIfr:L716-6| L.716-6]] du [[Code de la propriété intellectuelle (fr)|Code de la propriété intellectuelle]] (CPI). Cette action sera engagée à l’encontre de l’éditeur du site au nom de domaine litigieux.
 
 
En plus de sa rapidité, un des intérêts de cette action en référé, est que le titulaire de la marque n’aura pas besoin de prouver la caractérisation de l’infraction de contrefaçon – pas avant l’action au fond du moins – mais devra juste apporter la preuve de sa qualité de titulaire de la marque et d’une atteinte vraisemblable ou imminente à ses droits.
 
 
Et si le demandeur apporte les preuves requises, le [[juge (fr)|juge]] en [[référé (fr)|référé]] pourra « ordonner, au besoin sous astreinte, à l'encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d'actes argués de contrefaçon », d’après le dit article du [[Code de la propriété intellectuelle (fr)|CPI]].
 
Dès lors, à l’aune de cette rédaction qui vise « des intermédiaires dont il utilise les services », il serait donc possible d’intenter une action en référé contre le bureau d’enregistrement et qu’à ce titre, le juge puisse ordonner au registar de geler le nom de domaine litigieux, de le radier, voire de le transférer au titulaire de la marque.
 
 
 
De plus, une personne titulaire d’une [[marque notoire (fr)| marque notoire ]] peut être « fondée à agir sur le fondement de l’article [[CPIfr:L713-5| L.713-5]] du [[Code la propriété intellectuelle]] », comme a pu l’énoncer le juge des référés du [[Tribunal de grande instance (fr)|Tribunal de grande instance]] de Paris, dans son [[ordonnance (fr)|ordonnance]] du 10 avril 2006, dans l’affaire Rue du commerce<ref>[http://www.juriscom.net/documents/tgiparis20060410.pdf TGI Paris, référé, 10 avril 2006, Sté Rue du Commerce c/ Sté Brainfire Group et Sté Moniker Online Service Inc], accessible sur ''[http://juriscom.net juriscom.net]''</ref>.
 
Le [[juge (fr)|juge]] a donc pu constater que « l’utilisation frauduleuse des marques constitue un trouble manifestement illicite constitutif des pouvoir du juge des référés ; qu’il sera fait droit à la mesure de transfert des noms de domaine contrefaisant », <rueducommerc.com> et <rueducommrece.com> à la société demanderesse.
 
Mais ce qui est également notable dans cette affaire, c’est que : « si la présente décision est donc des plus classiques » car « il s’agit d’une nouvelle condamnation par les juges de la pratique de cybersquatting ou plus précisément de typosquatting, (…)l’est moins en revanche la condamnation solidaire de la société défenderesse, titulaire des dits noms de domaine et de l’unité d’enregistrement accréditée auprès de l’ICANN »<ref> «&nbsp;TGI Paris, réf.,10 avril 2006, Sté Rue du commerce&nbsp;», ''RLDI'', mai 2006/16, n°467, p.30, obs. Costes </ref>.
 
 
Les bureaux d’enregistrement des noms de domaine (registars) doivent se méfier désormais, car attribuer des noms de domaine « frauduleux » d’une marque notoire, ça peut coûter cher. 
 
 
Une action au fond doit être consécutive d’une action en [[référé (fr)|référé]].
 
 
 
====L’action au fond====
 
 
 
Pour obtenir réparation du préjudice du à l’enregistrement d’un nom de domaine contrefaisant, le titulaire de la marque - qui détient « un droit de propriété sur cette marque pour les produits et services qu'il a désignés » selon l’article [[CPIfr:L713-1| L.713-1]] du [[Code de la propriété intellectuelle (fr)|CPI]] – doit avoir subi un acte de contrefaçon.
 
 
La [[contrefaçon (fr)|contrefaçon]], selon l’article [[CPIfr:L716-1|L.716-1]] du [[Code de la propriété intellectuelle (fr)|CPI]], est « l'atteinte portée au droit du propriétaire de la marque » ; cette atteinte étant constituée par la « violation des interdictions prévues aux articles [[CPIfr:L713-2|L.713-2]], [[CPIfr:L713-3| L.713-3]] et [[CPIfr:L713-4|L.713-4]]», soit la reproduction, l’usage ou l’apposition de la marque sans l’autorisation du propriétaire de cette dernière.
 
 
De plus, en application du principe de spécialité qui régit le droit des marques, la [[contrefaçon (fr)| contrefaçon]] est caractérisée si l’usage ou la reproduction illicite de la marque est rattachée à des produits et services similaires à ceux de la marque contrefaite.
 
Par conséquent, l’enregistrement d’un nom de domaine avec un radical identique à une marque antérieure et qui désigne un site de produits et services également identiques, constitue un acte de contrefaçon, car il s’agit d’un usage de la marque sans l’autorisation du propriétaire et il y aurait même un acte de reproduction sur le site internet.
 
De ce fait, la pratique de « cybersquatting » est facilement qualifiable de contrefaçon, si le principe de spécialité est respecté, car l’imitation de la marque est servile et le risque de confusion immédiat.
 
 
 
Mais s’agissant d’un acte de « typosquatting », la marque n’étant pas enregistrée en un nom de domaine strictement similaire, mais avec une faute d’orthographe, la déduction de la contrefaçon ne se fait pas immédiatement.
 
Il faut donc recourir au principe prétorien bien établi en matière de [[contrefaçon (fr)|contrefaçon]], à savoir que l’acte de contrefaçon se détermine par rapport aux ressemblances et non par rapport aux différences.
 
 
Dés lors, si le nom de domaine est une imitation quasi-servile de la marque, car on constate une ressemblance manifeste entre les deux, plutôt que seulement quelques différences et qu’il y a donc un risque de confusion, la contrefaçon existe.
 
 
Le [[jugement (fr)|jugement]] du [[Tribunal de grande instance (fr)|Tribunal de grande instance]] de Nanterre du 17 novembre 2005<ref>[http://www.droit-tic.com/juris/aff.php?id_juris=75 ''TGI Nanterre, 17 nov. 2005, Free / Eurodns'']</ref> peut parfaitement illustrer un acte de [[contrefaçon (fr)|contrefaçon]], dans le cadre d’une pratique de « typosquatting ».
 
Il s’agissait d’une affaire opposant la société Free, propriétaire de la marque, de la dénomination sociale, du nom commercial et du nom de domaine en <.fr>, éponymes, à la société Eurodns et son représentant français, qui avait réservé et mis en vente des noms de domaine en extension <.fr> typographiquement proches de celui de free, également pour des services de télécommunication.
 
 
Ainsi, les juges du fond ont fait la démonstration de l’existence de la contrefaçon de la manière suivante :
 
« Attendu que l’emploi du nom de domaine litigieux, qui permet de se connecter à un service télématique sur lequel des messages sont reçus, diffusés et stockés et d’accéder à des pages internet de publicité, d’information en matière de télécommunication et de messagerie, constitue une contrefaçon par imitation des marques protégées "Free" en raison du risque de confusion qu’il crée dans l’esprit des internautes qui feront un rapprochement dans le secteur des télécommunications entre le signe "Free" et "www.free" ; que le risque de confusion est le même établi en ce qui concerne le nom de domaine "freee.fr" alors que l’adjonction d’une troisième lettre "e" ne modifie pas sa ressemblance phonétique ni son aspect visuel avec les signes invoqués et les deux noms de domaine "freeadsl" et "adslfree" dans la mesure où ils associent le signe "free" au terme "adsl", le rattachant sans aucune ambiguïté au domaine de l’internet et de l’adsl dans lequel le signe "free" est protégé et exploité ».
 
 
 
===L’action en concurrence déloyale===
 
 
 
Ce type d’action peut être fondée s’il existe entre les parties – en l’occurrence, le titulaire d’une marque ou d’un autre signe distinctif et le titulaire du nom de domaine orthographiquement modifié – une situation de concurrence réelle, c’est-à-dire que leurs activités respectives soient proches.
 
 
Ainsi, dans une espèce opposant deux sociétés concurrentes au titre de l’exploitation de site internet de commerce électronique de pneumatiques adressé notamment à une clientèle française, la [[Cour d’appel (fr)|Cour d’appel]] de Lyon, dans un arrêt du 31 janvier 2008 a confirmé « le caractère déloyal des actes litigieux en soulignant la mauvaise foi de la société concurrente », qui avait enregistré les noms de domaine « pneuonline », « pneusonline » et « pneu-online » en extensions <.com>, <.fr> et <.de> notamment et « qui avait connaissance du nom de domaine exploité par les sociétés Pneus-Online et ne pouvait ignorer le risque de confusion généré ainsi, alors qu’elle avait en outre faussé le jeu de la concurrence en appliquant un taux de TVA distinct du taux en vigueur en France » <ref> CA Lyon, 3eciv., 31 janv. 2008, 06/05922, ''Gazette Palais'', 24 juill. 2008, n°206, p.36 </ref> ; la société malveillante ayant son siège en Allemagne.
 
 
===Le parasitisme===
 
 
Un agissement parasitaire consiste en « l’usurpation de la notoriété d’une marque, de la dénomination sociale d’une entreprise, ou encore d’un détournement de clientèle » <ref> Christiane Féral-Schuhl, Cyberdroit, le droit l’épreuve de l’Internet, Dalloz-Dunod, 5e éd., 2008, 1000 p., p.573 </ref>.
 
Mais au-delà de l’appropriation d’une réputation, l’acte parasitaire pouvant exister en dehors de cette réalité, le [[parasitisme (fr)|parasitisme]] est caractérisé par le fait de profiter des investissements réalisés par un tiers, de son travail, tel que son travail intellectuel.
 
 
Cependant, dans le cas du « typosquatting », c’est bien l’usurpation de la notoriété d’une dénomination sociale ou d’une marque, renommées, qui est recherchée ; en plus du profit des investissements. Par conséquent, le juge est souvent amené à constater l’existence d’agissements parasitaires dans ces espèces.
 
 
Ainsi, dans l’affaire « Darty vs AFX » jugée par le [http://oami.europa.eu/pdf/natcourt/TGIP-Darty-AFX.pdf| Tribunal de grande instance de Paris le 18 octobre 2006], ce dernier a estimé que le fait que la société AFX CONSULTING ait réservé le nom de domaine <darti.fr> et l’exploite dans le but de renvoyer à des sites concurrents de la société « Darty », constituait des « actes de parasitisme, la société AFX CONSULTING profitant indûment de la notoriété et des investissements publicitaires de la société ETABLISSEMENTS DARTY & FILS pour valoriser du fait de son pouvoir de nuisance le signe critiqué dont elle est titulaire ».
 
De plus, on peut juste signaler que dans cette espèce, le [[juge (fr)|juge]] a également constaté la contrefaçon de la marque « darty », par imitation quasi-servile, mais n’a pas retenu le moyen de la [[concurrence déloyale (fr)|concurrence déloyale]] au motif que la société AFX consulting n’était pas concurrente à celle de DARTY.
 
 
 
 
 
=La tentative de stabilisation du contentieux par l’adoption de législations nationales=
 
 
==La loi belge du 26 juin 2003 relative à l’enregistrement abusif des noms de domaine==
 
 
Face au développement des pratiques de « cybersquatting » et a fortiori de « typosquatting », les autorités belges ont senti le besoin d’adopter une loi spécifique.
 
En effet, selon le Ministre de l’Economie belge, la circonstance que le cybersquatting  « (…) se situe à la frontière du droit de la propriété industrielle, des lois coordonnées sur les sociétés commerciales, du droit de la concurrence, des principes généraux relatifs aux pratiques honnêtes en matière commerciale et du droit civil (…) justifie qu’il fasse l’objet d’une loi particulière ».
 
 
Dés lors, a été édicté la [http://www.droit-technologie.org/legislation-152/loi-sur-l-enregistrement-abusif-de-noms-de-domaine.html| loi du 26 juin 2003 relative à l’enregistrement abusif des noms de domaine], qui selon son intitulé, a pour but de réprimer l’enregistrement abusif des noms de domaine.
 
La dite loi définit la notion d’ « enregistrement abusif des noms de domaine », comme « le fait de faire enregistrer, par une instance agréée officiellement à cet effet, par le truchement ou non d'un intermédiaire, sans avoir ni droit ni intérêt légitime à l'égard de celui-ci et dans le but de nuire à un tiers ou d'en tirer indûment profit, un nom de domaine qui soit est identique, soit ressemble au point de créer un risque de confusion, notamment, à une marque, à une indication géographique ou une appellation d'origine, à un nom commercial, à une œuvre originale, à une dénomination sociale ou dénomination d'une association, à un nom patronymique ou à un nom d'entité géographique appartenant à autrui ». 
 
 
Pour atteindre ce dessein, la loi du 26 juin 2003 a mis en place une procédure en cessation spécifique devant les tribunaux belges, qui a produit une jurisprudence fixe ; mais certains commentateurs regrettent l’établissement de cette loi spéciale qui lutte contre une pratique ponctuelle.
 
 
 
==La loi française du 9 juillet 2004 et son décret d’application du 6 février 2007 : un décret source d’ambigüités et donc d’inefficacité ==
 
 
 
La loi du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle a érigé, pour la première fois, un cadre juridique de l’attribution des noms de domaine en extension <.fr>, prévoyant de ce fait, la désignation d’offices d’enregistrement (vues en infra) par le ministre en charge des Communications électroniques.
 
Ce texte a été codifié à l’article [[CPOSTEfr : L45| L.45]] du [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|CPCE]], mais étant d’une portée restreinte, un décret pris en [[Conseil d’État (fr)|Conseil d’État]], est venu préciser les conditions d’application dudit texte.
 
Ainsi, trois ans plus tard, a été enfin édicté le décret du 6 février 2007.
 
 
Ce décret d’application apporte les précisions attendues, sur les conditions de désignation et les obligations des offices d’enregistrement, mais surtout, sur les principes qui doivent régir l’attribution des noms de domaine. Ces règles sont contenues aux articles [[CPOSTEfr:R20-44-34| R.20-44-34]] à [[CPOSTEfr : R20-44-51| R.20-44-51]] du [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|CPCE]].
 
Or, certaines de ces dispositions soulèvent des interrogations quant à leur pertinence et quant à l’interprétation qui doit en être faite, et notamment qui a été faite par la jurisprudence récente.
 
 
===La nouvelle prérogative des offices d’enregistrement de blocage de suppression ou de transfert d’un nom de domaine inéligible à l’enregistrement : une obscurité éclaircie=== 
 
 
 
====Une compétence ambiguë====
 
 
 
Dans le système préalable au décret, un nom de domaine était attribué en application de la règle « premier arrivé, premier servi » - soit à l’aune des règles de la charte de nommage – sans que soit vérifié la véracité de la « déclaration sur l’honneur » du déposant, c’est-à-dire sans que l’AFNIC doive s’assurer qu’un droit de propriété intellectuelle d’un tiers, par exemple, n’ait été atteint par le dit nom déposé.
 
Mais, avec l’avènement du décret du 6 février 2007, il est désormais interdit le dépôt d’un nom de domaine qui transgresse les règles prévues aux articles [[CPOSTEfr:R20-44-44|R.20-44-44]] (atteinte à la [[République (fr)|République française]]), [[CPOSTEfr:R20-44-45|R.20-44-45]] (atteinte au droit de propriété intellectuelle) ou [[CPOSTEfr:R20-44-46|R.20-44-46]] (atteinte à un [[nom patronymique (fr)|nom patronymique]]) du [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|CPCE]].
 
Par conséquent, les offices d’enregistrement, [[personne morale de droit privé (fr)|personnes morales de droit privé]] (!), vont avoir l’obligation de contrôler et de vérifier, au moment de l’enregistrement du nom de domaine, si les informations données par le déposant sont exactes et donc si l’enregistrement n’est pas attentatoire à un droit antérieur d’une tierce personne.
 
En effet, l’[[CPOSTEfr :R20-44-49|article R.20-44-49]] du [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|CPCE]] dispose que : « Les offices peuvent supprimer ou transférer des noms de domaine de leur propre initiative lorsque le titulaire ne répond pas aux critères d’éligibilité (…) ».
 
Et comme le relève pertinemment Élisabeth Tardieu-Guigues : « ce décret implique que les offices auront à « juger » de la licéité ou de la non-licéité des noms de domaine demandés (…) On peut se demander s’il n’ y a pas un risque d’arbitraire dans leurs vérifications et décisions, alors que l’on sait combien la vérification de l’existence de la contrefaçon n’est pas simple. Les offices vont devoir apprécier les intérêts en présence, ce qui leur octroie de fait un quasi pouvoir juridictionnel » <ref>Tardieu-Guigues, Élisabeth, « L’article R.20-44-45 du décret du 6 février 2007 (…) arrêt « Sunshine », ''RLDI'', 2009/50, n°1657, p.66 </ref>.
 
 
 
====La première réponse jurisprudentielle====
 
 
« Dans un [[jugement (fr)|jugement]] du 26 août 2009, le [[Tribunal de grande instance (fr)|Tribunal de grande instance]] de Paris sollicité par les titulaires de marques vient de prendre position sur l’étendue des obligations légales mises à la charge des offices et bureaux d’enregistrement par le décret du 6 février 2007, et dans le même temps, sur leur responsabilité en matière de droit des marques » <ref> TARDIEU-GUIGUES, E., « De nouveaux conflits générés par le décret du 6 février 2007 », RLDI, 2009/53, n°1751, p.35 </ref>.
 
En effet, des titulaires de marques, ayant constaté la violation de ces dernières par l’enregistrement de noms de domaine en <.fr>, assignent le bureau d’enregistrement EuroDNS et l’AFNIC, sur le fondement des articles [[CPOSTEfr : L.45| L.45]], [[CPOSTEfr : R20-44-45|R.20-44-45]] et [[CPOSTEfr:R20-44-49|R.20-44-49]] du [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|CPCE]], en [[responsabilité civile (fr)|responsabilité civile]] sur la base des articles [[CCfr :1382|1382]] du [[Code civil (fr)|Code civil]] et [[CPIfr:L713-5| L.713-5]]  du [[Code de la propriété intellectuelle (fr)|CPI]].
 
On peut noter que l’[[CPOSTEfr:R20-44-49|article R.20-44-49]] du [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|CPCE]] ne vise que « les offices d’enregistrement ». Or, le juge considère que le bureau d'enregistrement est également soumis aux dispositions du présent code, car le contrat le liant avec l'office stipule qu'elle doit respecter les principes dudit décret.
 
 
Ainsi, le Tribunal a pu juger, mettant fin a priori aux divergences d’interprétations des articles du [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|CPCE]] concernés, qu’il n’était pas imposé à l’office - soit l’AFNIC - ni au bureau d’enregistrement – en l’espèce EuroDNS – la vérification « a priori » de la validité de la demande d’enregistrement d’un nom de domaine, c’est-à-dire de l’absence de violation de droits de tiers antérieurs. La seule vérification opérée par ces organismes est celle de l’antériorité.
 
Dès lors, pour engager leur responsabilité, il faut que, suite à la notification à ces organismes d’enregistrement d’une atteinte par l’attribution d’un nom de domaine aux droits antérieurs de tierces personnes, les dits organismes ne prennent pas les mesures requises, de blocage de suppression ou de transfert. C’est leur inaction a posteriori qui peut conduire à la mise en œuvre de leur responsabilité.
 
On constate alors, un mimétisme avec le régime de responsabilité des prestataires techniques des services de communication au public en ligne, prévu par les dispositions de la ''[[loi pour la confiance dans l'économie numérique (fr)|loi pour la confiance dans l'économie numérique]]'' du 21 juin 2004 dite « LCEN »<ref>[[JORF:ECOX0200175L|''Loi n°&nbsp;2004-575 du 21&nbsp;juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique'']]&nbsp;: [[Journal officiel (fr)|JORF]] n°&nbsp;143 du 22&nbsp;juin 2004 p.&nbsp;11168</ref>. Les spécificités de l’internet entraîne des régimes de responsabilité limitée.
 
 
En l’occurrence, la responsabilité de l’AFNIC et de EuroDNS ne sont donc pas retenues, mais cela n’a pas empêché que le juge ordonne sous astreinte audit bureau d’enregistrement de transférer le nom de domaine au titulaire de la [[marque (fr)|marque]], eu égard au risque de confusion manifeste du nom avec la marque renommée.
 
 
===L’incertitude temporaire de la non-rétroactivité du décret ?===
 
 
Dans l’arrêt dit « Sunshine », du 16 janvier 2008, la [[Cour d’appel (fr)|Cour d’appel]] de Paris n’a pas respecté le principe de la non-rétroactivité de la loi nouvelle, qui s’applique pourtant aux textes réglementaires, car elle a retenu l’application de l’[[CPOSTEfr :R20-44-45|article R.20-44-45]] du [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|CPCE]] alors que le nom de domaine avait été enregistré précédemment à la parution du [[décret (fr)|décret]]. Cette attitude est très critiquable.
 
Heureusement, la [[Cour de cassation (fr)|Cour de cassation]], dans son arrêt du 9 juin 2009<ref>[http://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_commerciale_financiere_economique_574/9_juin_12961.html Cour de cassation, chambre commerciale, Audience publique du mardi 9 juin 2009, N° de pourvoi: 08-12904], [http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000020746403 voir aussi] sur [[legifrance]]</ref>, est venue remettre de l’ordre, en cassant l’arrêt d’appel.
 
''A priori'', la [[rétroactivité (fr)|non-rétroactivité]] du décret du 6 février 2007 est donc consacrée ; ce qui n’aurait pas du être.
 
 
===L’article R.20-44-45 du CPCE : un article ambigu, à interprétation juridictionnelle singulière===
 
 
 
====La problématique de l’invocabilité par les justiciables de cet article====
 
 
L’[[CPOSTEfr :R20-44-45|article R.20-44-45]] du [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|CPCE]] est placé dans une section dudit [[Code (fr)|Code]], définissant les principes généraux qui doivent être respectés lors de l’attribution des noms de domaine en extension <.fr>.
 
« On peut donc en déduire que cette disposition est destinée aux offices d’enregistrement (…) qu’elle a vocation à guider lors de la rédaction (…) leur « charte de nommage » » <ref> BOUVEL, A., SARDAIN., F., « Actualité des noms de domaine : le droit tenté par la diversité », Propr. Intell., juillet 2009/n°32, p.218 </ref>.
 
Or, ce n’est pas l’interprétation retenue par les juges dans l’arrêt « Sunshine » précité. On peut donc en conclure que cet article peut-être invoqué par un justiciable.
 
 
 
====La problématique inapplication du droit des marques au profit du décret====
 
 
L’[[CPOSTEfr :R20-44-45|article R.20-44-45]] du [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|CPCE]] prévoit qu' : «&nbsp;''un nom identique ou susceptible d'être confondu avec un nom sur lequel est conféré un droit de propriété intellectuelle par les règles nationales ou communautaires ou par le présent code ne peut être choisi pour un nom de domaine, sauf si le demandeur a un droit ou un intérêt légitime à faire valoir sur ce nom et agit de bonne foi''&nbsp;».
 
 
 
*Le principe de spécialité du droit des marques éludé
 
 
Dans l’arrêt « Sunshine » - où la marque « sunshine » a été « cybersquatté », par l’enregistrement d’un nom de domaine identique, mais qui ne concernait pas la même activité que celle de la marque- la Cour d’appel de Paris a fait une interprétation restrictive, voire littérale, de l’[[CPOSTEfr :R20-44-45|article R.20-44-45]] du [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|CPCE]], étant donné qu’elle ne retient pas le principe de spécialité qui a cours en droit des marques, n’étant pas inscrit dans ledit article. La Cour n’a pas statué à l’aune du droit des marques, mais en suivant la lettre du décret. Alors que : « l’examen du seul nom de domaine ne permet pas de savoir s’il y atteinte au droit de marque, en effet, il faut examiner le contenu du site »<ref> TARDIEU-GUIGUES, E., « L’article R.20-44-45 du décret du 6 février 2007 (…) arrêt « Sunshine », RLDI, 2009/50, n°1657, p.68 </ref>.
 
Or, cette interprétation peut-être cohérente, si on considère que le titulaire de la marque subit un important préjudice du fait du « cybersquatting » ou du « typosquatting » et donc, qu’il est nécessaire que la réparation soit assurée ; bien que cela risque d’alourdir le contentieux déjà massif des noms de domaine.
 
Néanmoins, il s’agit d’un arrêt isolé. Donc, une décision ultérieure pourrait très bien statuer en appliquant le principe de spécialité, lors de l’examen de l’atteinte de la marque par le nom de domaine identique ou quasi-identique.
 
 
 
*L’inexistence des principes de la légitimité et de la bonne foi en droit des marques, ici employés
 
 
L’[[CPOSTEfr :R20-44-45|article R.20-44-45]] du [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|CPCE]] permet au titulaire d’un nom de domaine d’enregistrer ou de conserver ce nom, ce dernier s’opposant à un droit de propriété intellectuelle, au motif qu’il a « un droit ou un intérêt légitime à faire valoir sur ce nom et agit de bonne foi ».
 
Ici, un principe de nature conventionnelle, inspiré des principes UDRP et plus spécifiquement de ceux de la charte de l’AFNIC, a été transposé dans le décret. Faut-il s’en outrager ?
 
Oui, si on considère que c’est un principe « à valeur contractuelle », qui ne devrait pas faire foi devant une instance judiciaire et encore moins avoir une valeur normative.
 
Cependant, n’est-ce pas opportun et respectueux de la liberté de commerce et de l’industrie, étant donné que le titulaire d’un nom de domaine a un « droit » sur ce nom, mais certes pas un droit privatif.
 
 
==La loi de l’État de New York du 16 mars 2007==
 
 
Il s’agit d’une [[loi (us ny)|loi]] exclusivement « anti-cybersquatting »<ref>incluse dans le [[Code (us ny)|Code de New York]], [http://public.leginfo.state.ny.us/menugetf.cgi?COMMONQUERY=LAWS N.Y. GBS. Article 9-C] ([http://codes.lp.findlaw.com/nycode/GBS/9-C voir également ici], plus accessible, sur [[findlaw]])</ref>, mais cela n’empêche pas de la mentionner, car elle reste un exemple intéressant.
 
Ainsi, cette loi interdit l’enregistrement d’un nom de domaine identique à celui d’une [[personne légale (us ny)|personne morale]] ou physique, sans son autorisation et ceci dans un but de malveillance, car il cherche à en tirer profit.
 
Il est prévu une [[amende (us ny)|amende]] pouvant atteindre un montant de 1000 dollars par jour, de commission de l’infraction. Et le [[Gouverneur (us)|Gouverneur]] de l’[[État fédéré (us)|État]] de [[New York]] a la possibilité de déposséder le « cybersquatteur » du nom de domaine litigieux.
 
 
=Voir aussi=
 
{{moteur (fr)|typosquattage OR typosquatting}}
 
 
=Liens externes=
 
 
=Notes et références=
 
=Notes et références=
<references/>
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<references />

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Plusieurs chantiers ont été lancés au cours de ces vingt dernières années dans le but de parvenir à une codification du droit de la communication. L’objectif était et demeure de répondre aux attentes d’une plus grande accessibilité et d’une meilleure intelligibilité du droit de la communication. Dans cette optique, l'Assemblée générale du Conseil d'État a examiné en 2006 une étude commandée par le Premier ministre destinée à analyser l'opportunité de reprendre, après deux projets de lois rejetés en 1993 et 1996, le travail de codification du droit de la communication.


Les tentatives ratées de codification

Le projet de 1993

Le premier projet de codification date de 1993. Mais il n'avait pu être inscrit à l'ordre du jour des débats parlementaires en raison notamment des réticences de parlementaires de la majorité à adopter à droit constant des dispositions du droit de l’audiovisuel qu’ils avaient combattues lors de la précédente législature. De plus, ce projet est rapidement devenu obsolète en raison des modifications législatives qui sont intervenues depuis dans le domaine de la communication (notamment, en ce qui concerne l'audiovisuel, les lois n° 94-88 du 1er février 1994[1] et n° 96-659 du 26 juillet 1996 portant réglementation des télécommunications[2] et, en ce qui concerne le cinéma, la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement du commerce et de l'artisanat[3]). À cela s’est rajoutée la modification des Codes existants notamment le nouveau Code pénal et l'évolution du Code général des impôts.

Autre difficulté posée par le projet de Code déposé en 1993, il possédait quelques imperfections mineures mais très lacunaires :

  • Les dispositions concernant l'affichage et la publicité avaient été insérées dans le livre Ier, qui contient les règles applicables à l'ensemble des moyens de communication. Or, l'affichage est en fait un mode de communication spécifique, auquel il convient de réserver un livre particulier, à l'égal de ce qui est prévu pour l'écrit, l'audiovisuel ou le cinéma.
  • La présence dans le livre Ier de dispositions relatives à l'emploi de la langue française était également problématique, dans la mesure où le champ d'application était beaucoup plus vaste que celui du code proprement dit.
  • Le régime des agences de presse figurait dans le livre consacré à l'écrit. Or, une part importante de l'activité de ces organismes s'exerce dans le domaine audiovisuel.
  • Le livre III consacré à l'audiovisuel omettait des dispositions techniques relatives notamment à l'installation des antennes de réception pour la télévision.
  • Le Code ne comporte aucune disposition concernant les territoires d’outre-mer et la collectivité territoriale de Mayotte. Cela conduisait à ne pas abroger complètement les textes codifiés puisqu'il était nécessaire de les maintenir en vigueur en tant qu'ils restaient applicables outre-mer.

Le projet de 1996

Le 30 octobre 1996, le gouvernement dépose au bureau du Sénat un second projet de loi portant sur le code de la communication et du cinéma. Le projet de Code reprenait pour l’essentiel le plan de 1993 en codifiant également les dispositions relatives à l’outre mer. Comme en 1993, le projet de code n’a jamais été inscrit à l’ordre du jour. Cette fois, le projet n’a pas été « examiné, sans doute en raison de la grande sensibilité politique des matières qu’il traite, de l’instabilité chronique du droit de l’audiovisuel et à l’inverse du caractère symbolique de la grande loi de 1881 sur la presse à laquelle les milieux intéressés demeurent très attachés malgré les modifications profondes et nombreuses qu’elle a subies en un siècle ».

Plusieurs remarques méritent cependant d’être faites sur ce projet de Code :

  • Le choix avait été fait d’une codification à droit constant. Ce projet était suiveur par rapport à un nombre significatif de codes (civil, pénal, procédure pénal, santé publique, consommation, travail, Code générale des impôts, Code générale des collectivités territoriales). Cela traduit la richesse mais aussi l’imprécision de la notion de communication présente dans de nombreux domaines.
  • Le projet de 96 développait le droit selon trois axes :
    • assujettissement des nouveaux moyens d’expression à un droit spécifique,
    • développement des mesures préventives,
    • multiplication des infractions de presse en dehors de la loi de 1881.
  • Seuls deux thèmes ont fait l’objet de fortes hésitations et finalement d’une exclusion du périmètre du projet de Code :
    • La loi n°94-665 du 4 aout 1994 relative à l’emploi de la langue française[4] au motif que les dispositions de cette loi concernant bien davantage le droit de la consommation, le droit du travail et le droit des affaires, plutôt que le droit de la communication proprement dit.
    • Le gouvernement a exclu les dispositions relatives à la publicité déjà codifiées dans le Code de la consommation, le Code de la santé publique et le code des débits de boissons alors en vigueur.

Le projet de 2006

Le rapport du Conseil d'État

Le Conseil d'État, sur la demande du Premier Ministre a préparé un rapport sur l’opportunité de reprendre ce travail de codification du droit de la communication, après les deux tentatives infructueuses de 1993 et 1996. À cet effet, la plus haute juridiction administrative a procédé à un inventaire méthodique de ce droit, en rapide évolution. Ce rapport, après de longs développements sur la notion de « communication », présente un inventaire complet et méthodique de l'ensemble des éléments relevant du droit de la communication. Au-delà du droit des médias, construit autour de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse et dont le champ est délimité par le critère de publication, l’inventaire a pour fil directeur le parcours de l’information. Il touche également le droit des communications électroniques, le droit de la protection du secret et des informations relatives aux personnes, ainsi que le droit de l'information dans son rapport à la décision publique (accès aux documents administratifs et diffusion des données publiques).

L'étude fait trois préconisations :

• Avoir, a minima, une codification autour du droit des médias (presse écrite, télévision et audiovisuelle).

• Mettre en commun le droit des médias avec le droit des communications électronique dans le cadre de la codification de façon à refléter la convergence numérique (avoir dans un même code, le droit des médias, la LCEN et le Code des postes et communications électroniques expurgé de sa partie "postale").

• Développer un portail numérique destiné à améliorer, hors de toute codification formelle, l'accessibilité et l'intelligibilité de ce droit de la communication. La création d’un tel portail internet serait une démarche différente d’une entreprise de codification elle en serait un complément utile et non une alternative.

Les objectifs de codification

Les objectifs de cette codification sont doubles :

  • Rapprocher des dispositions connexes dispersées mais appelées à évoluer, sous l’influence des évolutions des modes d’information et de la convergence numérique, qu’il s’agisse notamment de l’accès à l’information, de certaines dispositions afférentes au droit d’auteur et aux droits voisins ou à la mémoire de l’information.
  • Contribuer à la clarté et l’intelligibilité du droit en vigueur au delà des dispositions codifiées en favorisant une vision d’ensemble de celui-ci propice aux simplifications et mises à jour.

Il est intéressant de noter que les projets de codification du droit de la communication ne souhaitent pas intégrer les dispositions relatives au droit de la propriété intellectuelle. Est-ce dû au fait qu’un code existe déjà en la matière, ou cela signifie-t-il que ce n’est pas de la « communication » ? La question reste entière, même si ses conséquences pratiques n’ont que peu d’importance.

La démarche utilisée

Les scénarios proposés par le Conseil d'État

En ce qui concerne la démarche de codification proprement dite, le Conseil d'État a étudié quatre scénarios, ne recommandant toutefois que les deux premiers :

  • Un scénario rassemblant les dispositions afférentes aux médias dont le volet audiovisuel fait l’objet d’une attente clairement manifestée
  • Un scénario élargi aux communications électronique et rapprochant utilement les dispositions sur l’information numérique des textes sur les médias
  • Un scénario proposant d’ajouter aux précédents les textes relatifs à la protection des données personnelles.
  • Un ou des scénarios, sur le principe du code pilote et du code suiveur, offrant des liens avec le droit de la propriété intellectuelle, mais aussi avec les dispositions relatives à l’accès aux archives publiques et aux documents administratifs ainsi qu’à la réutilisation des informations publiques.


Si les deux premiers scénarios ont aux yeux du Conseil d'État la cohérence nécessaire à la constitution d’un code, les deux autres en revanche n’ont pas paru pertinents du fait que le droit de la protection des données est trop éclaté ce qui nécessite une trop grande importance des dispositions suiveuses. De plus, ces scénarios auraient pour effet de générer un périmètre restreint du Code. Concernant l’adjonction de liens relatifs aux autres droits de l’information, la plupart de ces dispositions étant déjà codifiées, un simple renvoi suffirait.


Méthodes de codification

La méthode de codification par ordonnance permet de contourner l’encombrement du calendrier parlementaire. Le processus de codification peut se faire selon deux méthodes différentes :


  • La codification à droit constant

Cette codification consiste à reprendre tout le droit existant et le répartir dans un code structuré. Cette méthode est en soi réformatrice, car elle permet d’améliorer la cohérence rédactionnelle des textes, d’harmoniser l’état du droit et d’assurer le respect de la hiérarchie des normes, selon la finalité qui lui a été assignée. Le champ de l’habilitation à droit constant comprend donc nécessairement les réformes de fond nécessaires à la mise en conformité des dispositions en vigueur avec la constitution et le droit international ou communautaire.


  • La codification évolutive

Il s’agit ici de profiter de cette codification pour réviser ou réformer le droit de la communication. Cette méthode avait été envisagée au cours des précédentes tentatives de codification, mais la question de son opportunité dans la codification actuelle demeure, car la codification à droit constant est actuellement la méthode la plus utilisée pour la production de codes.


Les difficultés de la codification

Problème relatif au périmètre de code

L’un des premiers problèmes du code est d’en définir le périmètre précis. En effet, cette codification est destinée à des usages et des catégories d’usagers très différents dont les attentes ne sont pas homogènes : les administrations, les professionnels du droit, les professionnels de la communication, les acteurs de la communication notamment ceux issus du monde de l’interne et enfin l’internaute/consommateur/citoyen.

D’autres interrogations portent sur la création d’un code communautaire des médias et des communications électroniques rassemblant la directive TVSF et les six directives du paquet Telecom qui mettraient en péril toute codification antérieure. Certains auteurs prônent l’attente de la stabilité du cadre communautaire du droit de la communication avant de s’engager dans sa codification.


Problème relatif à la codification

Le problème fondamental concernant la codification du droit des communications vient de la forte dispersion des sources. L’état des lieux est difficile à faire, compte tenu de l'éparpillement des textes en de multiples dispositions disséminées dans le code pénal, la loi du 29 juillet 1881, la loi du 30 septembre 1986, etc. L’élaboration d’un code de la communication permet d’éviter cette dispersion, mais elle n’est pas encore accomplie.

Autre problème relatif à la codification, le droit de la communication est marqué par l’importance des disproportions réglementaires prises par des autorités administratives indépendantes (CSA, CNIL, ARCEP) ou par d’autres autorités (CNC). Le droit de la communication apparaît de plus comme un droit déjà en partie codifié.


L'existence d'un "faux code de la communication"

En marge de ce travail imposant de codification, des avancées ont malgré tout été faites notamment la publication par les éditions Dalloz (sous la direction de J. Huet et H. Maisl) de la 1ère édition du « Code de la communication 2000 ». Ce Code, sans opérer de modifications substantielles du droit de la communication, palie le problème de la dispersion en rassemblant de nombreux textes épars. Ce mérite est d'autant plus grand que l'ouvrage regroupe les dispositions régissant non seulement les médias et les infrastructures de communication, mais également l'information (données publiques, publicité, vie privée, présomption d'innocence...).

Toutefois, il est nécessaire de rappeler qu'il ne s'agit pas d'un travail de codification officiel mais bien d'un faux code, à savoir une compilation de textes non codifiés.

Voir aussi

Liens externes

Sources

  • Inventaire méthodique et codification du droit de la communication, Conseil d’Etat, 2006.
  • Revue de science criminelle 2000 p59. Jacques Françillon, Professeur à la Faculté de droit Jean-Monnet de l’Université de Paris XI
  • La codification du droit de la communication en projet ; Publiée le 25 fév 2007 : Par Didier FROCHOT
  • Etude E. Derieux, Le projet de loi portant code de la communication et du cinéma, JCP 1997.I.4007.
  • Ass. nat. n° 1187, et doc. Sénat n° 392 ; Rapport D. Malthus, Commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale.
  • Ass. nat. n° 1079, p. 20 ; Rapport C. Lazerges, Commission des lois de l'Assemblée nationale,
  • Ass. nat. n° 1468, et Rapport C. Jolibois, Commission des lois du Sénat, doc. Sénat n° 419.

Notes et références

  1. Loi n°94-88 du 1 février 1994 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, JORF n°27 du 2 février 1994 page 1800
  2. Loi n°96-659 du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications, JORF n°174 du 27 juillet 1996 page 11384
  3. Loi n°96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat, JORF n°156 du 6 juillet 1996 page 10199
  4. Loi n°94-665 du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française, JORF n°180 du 5 août 1994 page 11392