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Application de la loi pénale dans le temps (fr)

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France > Droit pénal (fr) > Droit pénal général > Élément légal
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En principe, une règle de droit pénal entre en vigueur à la date qu'elle fixe ou, à défaut, un jour après sa publication au Journal Officiel. Ex: les lois instituant le Code pénal ne sont entrées en vigueur en 1994, alors qu'elles ont été publiées en juillet 1992.

L'abrogation d'une règle pénale peut être expresse. la loi ancienne cesse alors d'être en vigueur. L'abrogation peut être tacite. Une loi peut être abrogée à l'expiration du délai qu'elle s'est fixée (loi temporaire).

Le conflit de loi dans le temps

Une loi nouvelle s'applique-t-elle à toutes les situations juridiques, où celles-ci demeurent régies par la loi ancienne ? Le même problème se pose en droit pénal.

Une première solution est certaine : le principe de l'application immédiate de la loi nouvelle, qui signifie qu'une loi nouvelle s'applique à tous les actes accomplis après son entrée en vigueur. Cette question ne sera envisagée qu'au sujet des règles pénales de fond (qui incriminent les infractions et fixent les peines, par opposition aux règles pénales de forme, qui ont trait à la procédure).

Il y a une solution de principe: la non-rétroactivité de la loi nouvelle. Il y a des exceptions à ce principe ; dans certains cas, la loi ancienne survit.

La non-rétroactivité de la loi pénale nouvelle

Le (nouveau) Code pénal n'est pas applicable à des actes commis avant son entrée en vigueur. Il y a alors survie de la loi ancienne, même si ces infractions donnent lieu à un procès après l'entrée en vigueur de la loi nouvelle. « Seuls sont punissables les faits constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont été commis. Peuvent seules être prononcées les peines légalement applicables à la même date. Toutefois, les dispositions nouvelles s'appliquent aux infractions commises avant leur entrée en vigueur et n'ayant pas donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée lorsqu'elles sont moins sévères que les dispositions anciennes » art. 112-1. Ce principe est même aujourd'hui un principe constitutionnel. « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée » art. 8 Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen. Le préambule de la Constitution renvoie à celui de la Constitution de 1946, qui, lui-même, renvoie à la Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen. Cela a été affirmé dans un arrêt du Conseil constitutionnel du 16 juillet 1971[1].

Justification du principe

Le principe de la non-rétroactivité de la loi dans le temps est une conséquence du principe de légalité. Si une loi nouvelle rétroagit, on pourrait faire d'un acte une infraction alors qu'au moment où il a été commis, il n'était visé par aucun texte.

Ce principe a été critiqué, comme le principe de légalité, mais il a été maintenu. Se pose une question particulière : celle de savoir le moment de commission exact d'un acte. La date de commission d'une infraction peut varier selon plusieurs facteurs. Ce principe connaît des exceptions.

Les exceptions au principe de non-rétroactivité

Il faut envisager l'hypothèse où une nouvelle loi s'applique, non seulement aux actes accomplis après son entrée en vigueur, mais également aux actes accomplis avant. Ces exceptions étaient au nombre de quatre. Certaines d'entre elles ont peut-être disparu.

Application immédiate d'une loi ou d'un règlement déclaré expressément rétroactif

Ex: une loi de 1918 punit de la peine de confiscation des sommes perçues ceux qui auraient accompli des actes d'espionnage ou de trahison depuis le début de la guerre. Ex: une ordonnance de 1944 a créé l'infraction d'indignité nationale à l'encontre de tous ceux qui avaient collaboré avec l'ennemi depuis le 18 juin 1940.

Cette première exception ne peut plus être adoptée aujourd'hui, puisque le Conseil constitutionnel a affirmé l'inconstitutionnalité d'une loi rétroactive. Même si une loi rétroactive n'était pas déférée au Conseil constitutionnel, les tribunaux répressifs ne pourraient pas l'appliquer à cause des traités internationaux auxquels la France est partie (le traité international prime sur la loi nationale).

Application immédiate d'une loi nouvelle instituant des mesures de sûreté

Bien que ce soit discuté, il existe deux sortes de règle pénale : les peines proprement dites et les mesures de sûreté (= mesure de police ou de sécurité : (suspension de permis, mise en liberté surveillée, etc.). Dans un arrêt rendu par l'assemblée plénière[2], la cour de cassation a considéré que la suspension du permis de conduire constituait une peine complémentaire, et non une mesure de sûreté. Il y a par conséquent application du principe de non rétroactivité de la loi pénale plus sévère. Les mesures de sûreté ont essentiellement pour but d'éviter que de nouvelles infractions soient commises. La jurisprudence de la chambre criminelle a souvent décidé qu'une loi nouvelle créant une mesure de sécurité rétroagit. Ex: une ordonnance de 1945 sur la délinquance juvénile crée diverses mesures éducatives à l'égard des jeunes délinquants. La Cour de cassation a estimé que cette loi était rétroactive. Par exemple, une loi du 21 juillet 1994, laquelle prévoit l'incapacité d'exercer la profession d'agent immobilier par les personnes qui ont été condamnées pour certaines infractions est applicable, même à des infractions commises avant le 21 juillet 1994 parce qu'il s'agit d'une mesure de sûreté[3]. Certains auteurs estiment que, dans le (nouveau) Code pénal, il n'y a que des peines.

L'application immédiate d'une loi interprétative

Évidemment, une loi interprétative fait corps avec la loi interprétée et s'applique aux mêmes actes que ceux visés par la loi nouvelle. La loi interprétative s'applique aux actes commis entre son entrée en vigueur et celle de la loi pénale.

L'application immédiate d'une loi pénale nouvelle plus douce que la loi ancienne

L'application immédiate d'une loi pénale plus douce que la loi ancienne est l'exception la plus importante au principe de non-rétroactivité de la loi pénale. On l'appelle le principe de la rétroactivité in mitius. Une loi nouvelle est plus douce que la loi ancienne ; elle s'applique rétroactivement à des actes accomplis avant son entrée en vigueur. Ce principe a été inventé par la jurisprudence et est maintenant affirmé à l'art. 112-1 al. 3 du Code pénal. Cette exception est une faveur pour la personne poursuivie. La raison en est que la société n'a plus intérêt à appliquer une peine plus sévère. Le législateur estime que l'ancienne peine n'est plus nécessaire à la société.

La rétroactivité in mitius pose deux problèmes : quand peut-on dire qu'une loi est plus douce que la loi ancienne ? Quel est le domaine de la rétroactivité in mitius ?

La notion de loi plus douce

Il s'agit de comparer la loi ancienne et la loi nouvelle. Il faut distinguer deux hypothèses, selon que la loi nouvelle est simple ou complexe.

La loi nouvelle simple

La loi nouvelle est simple lorsqu'elle ne modifie la loi ancienne que sur un seul point. La comparaison est alors facile. Est une loi plus douce une loi qui supprime une infraction, qui diminue la peine, qui supprime une circonstance aggravante, qui cesse d'incriminer la tentative, la complicité, etc.

La loi nouvelle est une loi complexe

La loi nouvelle est une loi complexe, c'est-à-dire une loi qui modifie la loi ancienne sur deux points et en des sens opposés : sur un point, la loi nouvelle est plus douce, mais sur un autre point, elle est plus sévère. Sur cette hypothèse, la jurisprudence parle simplement de peine plus douce. Elle a donc dû fixer des règles. Elle a fait une distinction entre deux hypothèses.

Les dispositions de la loi nouvelle sont divisibles

Les dispositions de la loi nouvelle sont divisibles lorsque ces deux dispositions concernent des personnes ou ont des objets différents. Chacune des dispositions s'applique selon son caractère propre. Ex: une loi de 1891 crée le sursis, ignoré par la loi ancienne, et la récidive, qui est une cause d'aggravation de la peine à l'encontre de l'individu qui avait déjà été condamné pour une infraction. Les deux dispositions ont des objets différents. La disposition créant le sursis est rétroactive, tandis que l'autre ne rétroagit pas. Ex: une loi de 1958 sur le délit de banqueroute (lorsqu'un commerçant cesse ses paiements de manière frauduleuse) contenait deux dispositions, l'une qui diminuait la peine applicable aux délinquants, l'autre incriminant le complice du commerçant. La Cour de cassation a décidé que la disposition diminuant la peine du délinquant rétroagissait, tandis que l'autre, plus sévère, non.

Les dispositions nouvelles sont indivisibles

En ce cas, il est donc nécessaire de qualifier la loi nouvelle de manière globale, c'est-à-dire de la considérer comme globalement plus douce ou globalement plus sévère que la loi ancienne. Le principe dégagé par la jurisprudence est que la loi doit être qualifiée globalement en fonction de sa disposition dominante. Si la disposition dominante est plus sévère, la loi est globalement qualifiée de plus sévère. Reste à identifier la disposition dominante. Il y a plusieurs hypothèses.

Une disposition modifie les éléments constitutifs de l'infraction, tandis que l'autre modifie le montant de la peine. La disposition dominante est celle qui modifie les éléments constitutifs de l'infraction. Ex: l'infraction consistant pour le ministre d'un culte à célébrer le mariage religieux avant le mariage civil était considérée sous l'ancien Code pénal comme commise dès la première célébration et il était prévu une peine de 6 000 F d'amende. Le Code pénal considère que l'infraction n'est constituée que si l'officier du culte a procédé à deux célébrations, mais prévoit une peine de 7 500 € et six mois d'emprisonnement. La disposition dominante est celle qui modifie les éléments constitutifs; la loi est donc qualifiée de globalement plus douce.

La loi nouvelle modifie la loi ancienne que sur la peine mais en des sens différents. La disposition relative à l'emprisonnement est dominante par rapport à la disposition concernant une autre peine. Autre règle, une disposition relative à l'amende est dominante par rapport à la disposition concernant une autre peine (ex: suspension du permis de conduire).

Une loi nouvelle modifie le montant de la peine et permet ou interdit le sursis. La disposition modifiant le montant de la peine est dominante.

Le domaine de la rétroactivité in mitius

Une loi nouvelle plus douce rétroagit-elle dans tous les cas (rétroactivité absolue) ? Il faut envisager le problème sous plusieurs angles.

Quant aux infractions, la rétroactivité in mitius joue, quelle que soit l'infraction. Quant aux peines, la jurisprudence est libérale. Une loi nouvelle plus douce peut-elle exclure une rétroactivité in mitius ? Logiquement, une loi ne devrait pas écarter la rétroactivité in mitius parce que, d'une part, le principe de la rétroactivité est un principe constitutionnel. D'après l'art. 8 de la Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen, si le législateur adopte une loi nouvelle plus douce, c'est que la loi ancienne n'est plus nécessaire à la défense de la société.

Les lois temporaires

La loi temporaire est suivie, après le délai qu'elle a fixé, d'une situation plus douce. Cette situation nouvelle plus douce rétroagit, selon la Cour de cassation. Ex: Une loi de 1919 punissait d'une sanction pénale le bailleur d'un immeuble qui augmentait le loyer pendant le bail et prévoyait expressément qu'elle aurait une durée de cinq ans. En l'espèce, un bailleur contrevenant était jugé pour cette infraction après la fin du délai fixé par la loi. La Cour de cassation a décidé que la rétroactivité in mitius devait s'appliquer. Cette position a été très critiqué par la doctrine parce qu'elle incite les délinquants à faire traîner le procès au-delà du délai fixé par la loi. C'est critiquable parce que la longueur de la procédure est quelquefois plus longue que le délai fixé par la loi.

L'application d'une loi pénale plus douce en cours de procès

La rétroactivité in mitius s'applique, quelle que soit la phase du procès pénal à laquelle la loi pénale plus douce entre en vigueur : première instance, instance d'appel, examen du pourvoi en cassation ou instance de cassation[4]. La solution s'explique par le fait qu'en matière pénale, un pourvoi en cassation est suspensif, contrairement aux pourvois dont l'objet est régi par d'autres branches du droit.

En revanche, une loi nouvelle plus douce n'est pas applicable si elle entre en vigueur après le jugement définitif d'une infraction ou si les délais de recours ont expiré. C'est ce qu'affirment la Cour de cassation et le Code pénal à l'art. 112-1 al. 1er.

Notes et références

  1. Décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971
  2. Cass Ass. plén. 22 novembre 2002 : Bull. civ. 2002, n° 2, p. 9 ; JCP 2003 II N° 10 042
  3. Crim. 26 novembre 1997 : Bull. crim. n° 404
  4. Crim. 16 mars 1994 n° 93-83859

Voir aussi