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Condition de validité de l'acte administratif relatives au but de l'acte (fr)

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Acte administratif unilatéral > Conditions de validité de la décision exécutoire
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Le but de l'acte

Définition

Il existe une légalité matérielle de l'acte administratif fondé sur le but. L'administration n'est pas libre dans le choix des buts qu'elle doit poursuivre. Ceux-ci sont définis par le droit : ils doivent toujours avoir la qualité de but d'intérêt général. Un acte administratif qui méconnaît cet aspect de la légalité serait illégal dans son but et sera entaché de détournement de pouvoir. La jurisprudence a admis très tôt ce cas d'illégalité. On dira qu'il y a illégalité quant au but ou détournement de pouvoir lorsqu'une autorité administrative a accompli un acte dans un but autre que celui qui était défini par le droit.

On aperçoit l'originalité de cette forme d'illégalité. Pour établir le détournement de pouvoir, il faudra rechercher l'intention de l'auteur de l'acte. Il faudra faire apparaître ses mobiles psychologiques. Nous avons vu que le contrôle de la légalité matérielle quant aux motifs restait en général un contrôle objectif, les objectifs étant les éléments antérieurs et objectifs qui avaient déterminé l'acte. Le but a au contraire un caractère subjectif. Il est le résultat qui a été voulu par l'auteur de l'acte. Le contrôle du but se situe ainsi nécessairement dans un domaine subjectif. Il met en cause la psychologie de l'auteur de l'acte.

Le contrôle exercé par le juge en matière de but sera donc aussi le plus subtil et le plus profond. Il conduira à pénétrer dans les intentions profondes de l'administration et à dégager les buts légaux qui s'imposaient à elle. Il consiste, comme le disait Georges Vedel, à « sonder les reins et les coeurs ».

Si l'analyse qui conduit à isoler le but de l'acte paraît simple, la réalité demeure assez complexe

En pratique, on constate notamment que les éléments but et motif sont intimement liés et se confondent parfois. On s'en apercevra en empruntant un exemple à la jurisprudence. Dans l'affaire Lamy[1], l'administration avait procédé à l'expropriation d'un immeuble en vue de loger le secrétaire général de la préfecture. Le Conseil d'État a décidé qu'il y avait effectivement utilité publique eu égard aux nécessités du service incombant à ce fonctionnaire. Il a estimé que le but était légal et que l'acte n'était pas entaché d'excès de pouvoir. Mais le logement du secrétaire de préfecture était aussi le motif de l'expropriation et on pouvait dire que le motif était lui aussi légal.

Il apparaît donc que l'illégalité quant aux motifs et que l'illégalité quant aux mobiles sont très proches l'une de l'autre. C'est important parce que la technique du détournement de pouvoir a été utilisée à une époque où le juge ne contrôlait pas les motifs. Aujourd'hui, le juge fait donc moins souvent appel au détournement de pouvoir.

Le détournement de pouvoir

La typologie

Le détournement de pouvoir revêt différents aspects qui tiennent à la variété des règles de but.

La poursuite d'un but étranger à l'intérêt général

Il existe une règle générale qui veut que l'administration poursuive toujours un but d'intérêt public. La recherche de l'intérêt général est une obligation constante pour toute autorité administrative. Un acte administratif qui fait apparaître la recherche d'un but étranger à l'intérêt public est donc entaché d'un détournement de pouvoir. Une jurisprudence abondante et souvent pittoresque illustre cette règle.

1- Les arrêts annulent ainsi pour détournement de pouvoir les décisions qui ont eu pour but un intérêt personnel. Dans l'arrêt Rault[2], il s'agissait de la décision d'un maire d'une commune interdisant le fonctionnement d'un dancing en vue de protéger la clientèle qu'il possédait en qualité de propriétaire d'un bistro.

2- Ce peut être aussi l'intérêt d'un tiers. Dans l'arrêt Delle Soulier [3], il s'agissait de la création d'un poste administratif afin de procurer un emploi à la Delle Soulier.

3- Les décisions reposant sur des motifs politiques sont très souvent considérées comme entachées de détournement de pouvoir. Dans l'arrêt Société L'éveil de Contre[4], il s'agissait du refus du maire inspiré par des mobiles politiques de laisser défiler un cortège.

La poursuite d'un but d'intérêt public mais autre que le but légal

Les règles qui définissent les compétences des autorités administratives précisent aussi les buts particuliers d'intérêt public en vue desquels les compétences doivent être exercées (exemple : ordre public, santé publique, environnement, esthétique). Il y a illégalité quant aux buts lorsqu'un agent public a méconnu le but particulier qui lui était imposé par le droit.

1- Il arrive que les textes définissent expressément le but qui doit être recherché dans certaines circonstances. Le Conseil d'État recherche alors si l'acte a été pris conformément au but légal prévu et non dans un autre but, même d'intérêt public, comme par exemple l'intérêt financier[5]. Dans l'arrêt Beaugé[6], le maire de Biarritz avait interdit aux baigneurs de se dévêtir et de se rhabiller ailleurs que dans les établissements de bains de la commune.

2- Le but légal n'est pas toujours défini par les textes. Il arrive également que les buts soient indiqués de manière incertaine et vague. C'est le cas par exemple de la législation qui réglemente l'expropriation en vue de l'utilité publique. Une jurisprudence abondante a dû préciser s'il y avait eu ou non dans les faits un but d'utilité publique.

Mais il arrive aussi que le juge adopte une attitude analogue à celle que nous avons rencontré dans le contrôle des motifs. Le juge fait alors apparaître le but légal recherché en se livrant parfois à une interprétation audacieuse des textes. Il tient compte de tous les détails de rédaction des travaux préparatoires, voire même de considérations historiques. Les historiens du droit trouvent ici une place importante[7].

Le détournement de procédure

On peut enfin se demander s'il n'existe pas une forme originale de détournement de pouvoir qui serait le détournement de procédure. Il se trouve en effet que dans certaines circonstances, un seul et même résultat peut être atteint par deux procédures légalement organisées mais différant dans leur régime juridique. Pour des raisons d'opportunité, l'administration décide d'utiliser celle de ces procédures qui présente pour elle des avantages.

L'administration préfère ainsi recourir à la réquisition d'un terrain dont elle n'aura l'usage que temporairement et qu'elle pourra rendre quand elle n'en aura plus besoin. Dans un tel cas, la réquisition a été utilisée dans un but qui n'est pas le but légal mais qui est en réalité celui de l'expropriation[8]. Il en est de même lorsque l'administration emploie la procédure de l'alignement à la place de la procédure d'expropriation[9]. On voit encore un détournement de procédure lorsque l'administration utilise une mesure à caractère hiérarchique à la place d'une mesure disciplinaire[10] ou bien encore lorsque l'administration utilise ses pouvoirs de police judiciaire à la place de ses pouvoirs de police administrative car le juge administratif est alors incompétent[11].

La plupart des auteurs font état de ce détournement de procédure. En réalité, il ne semble pas que nous soyons là en face d'une variété vraiment autonome de détournement de pouvoir. Dans tous les exemples, il y a toujours détournement de pouvoir en ce sens qu'il y a eu usage par l'administration de pouvoir dans un but qui n'était pas le but légal. Il se trouve seulement que pour atteindre ce but, l'administration a utilisé une autre procédure.

La recherche du détournement de pouvoir par le juge

La preuve du détournement de pouvoir

Dans la pratique, il est souvent difficile d'établir l'illégalité quant aux buts. On doit dégager en effet l'intention secrète de l'auteur. Et celui-ci n'a pas toujours donné des indications utilisables.

1- On dit traditionnellement que la preuve du détournement de pouvoir doit apparaître dans le dossier. Le juge ne devrait établir le détournement de pouvoir qu'en se référant aux preuves écrites du dossier. Le Conseil d'État a même été jusqu'à admettre que la preuve doit se dégager de l'acte[12].

2- Pourtant, on a vu se dégager en ce domaine une évolution jurisprudentielle remarquable. Il apparaît dans de nombreux arrêts que le détournement de pouvoir été établi par des preuves indirectes[13]. Un refus de licence pour la création d'une officine pharmaceutique a été entaché de détournement de pouvoir dès lors que d'autres licences ont été accordées ultérieurement et que les besoins de la population n'avaient pas changé.

Il semble même que dans la jurisprudence plus récente, le Conseil d'État se contente d'un « faisceau de présomptions »[14]. Il était reproché au directeur du comité d'organisation de l'industrie du cuir d'avoir édicté des dispositions qui favorisaient les acheteurs de peaux et cuirs et poils au détriment des collecteurs et des producteurs. Le Conseil d'État établit le détournement pouvoir en constatant l'existence d'un « faisceau de présomptions étonnantes »[15]. Le plaignant était directeur du théâtre national et avait mis au répertoire Caligula de Camus. En réponse, de Gaulle a modifié l'âge de la retraite, ce qui a été annulé. La preuve est ici très indirecte.

La pluralité des buts

Une difficulté apparaît dans l'hypothèse où on aperçoit une pluralité de buts poursuivis par l'administration. Que faire quand l'administration invoque plusieurs buts, dont certains valides et d'autres irréguliers? Il est certain qu'il y a détournement de pouvoir et annulation lorsque le but illégal poursuivi a été le but principal et déterminant de la décision[16].

Les problèmes posés par le détournement de pouvoir

Les rapports entre détournement de pouvoir et moralité

Nous rencontrons ici un problème très classique soulevé par Maurice Hauriou à l'occasion du contrôle de légalité quant aux buts. Faut-il dire qu'en sanctionnant les détournements de pouvoir de l'administration, le juge administratif effectue seulement un pur contrôle de légalité et qu'il porte en fait un jugement de valeur sur cet acte ?

Hauriou estimait que dans le contrôle de l'acte, le juge n'obligeait pas l'administration à respecter seulement la légalité mais surtout à respecter une moralité administrative une déontologie. Il pensait en effet que le détournement de pouvoir ne pouvait être enfermé dans le simple cadre de la légalité car il présentait un aspect de « police juridique ». Hauriou croyait à l'existence d'une morale intérieure de l'administration qui imposait aux administrateurs des règle propres qui dépassaient la légalité. Cette idée se vérifiait surtout dans le détournement de pouvoir.

Quoi qu'il en soit, cette idée d'une morale administrative qui imprégnerait la jurisprudence n'est pas entièrement admise par la plupart des auteurs administratifs. André de Laubadère estimait que la thèse d'Hauriou traduit une confusion entre la morale et le droit et que le détournement de pouvoir ne se limite pas aux seuls cas où l'autorité administrative a agi de façon immorale.

Le doyen Vedel sans écarter complètement l'idée de moralité, remarque que le détournement de pouvoir reste une violation de la légalité.

Le déclin du détournement de pouvoir

1- On parle volontiers aujourd'hui d'un déclin de l'illégalité quant aux buts. Nous avons déjà dit que dans la pratique, les notions de motif et de but restaient très proches et que dans la pratique, les notions de motif et de but restaient très proches et que dans ce cas, le juge utilise de préférence le contrôle des motifs, ce qui entraîne un certain déclin du détournement de pouvoir. On doit bien reconnaître que dans certains cas, le détournement de pouvoir s'avère être une technique insuffisamment efficace.

2- Mais ce déclin comporte des limites qui interdisent d'y voir un phénomène permanent. Il faut en effet se rendre compte que le détournement de pouvoir reste dans de nombreuses hypothèses une technique juridique irremplaçable. On peut se reporter par exemple à l'affaire Delle Soulier. L'acte de création d'emploi avait été décidé par l'autorité administrative compétente, pris dans les formes légales, dans un domaine relevant du pouvoir discrétionnaire. Seule le détournement de pouvoir permettait de prononcer l'illégalité. Il fallait bien se livrer à l'analyse de l'état d'âme de l'administrateur. C'est une technique irremplaçable parce que sans cela, on ne peut rien faire contre ces actes légaux dans les formes. La technique du détournement de pouvoir est consacrée dans l'Union européenne.

Liens externes

Notes et références

  1. Conseil d'État 28 juillet 1952 Lamy : Rec. p. 415
  2. Conseil d'État 14 mars 1934 Delle Rault : Rec. p. 337
  3. Conseil d'État du 5 mars 1954 Delle Soulier : Rec. p. 139
  4. Conseil d'État 23 décembre 1932 Société L'éveil de Contre : Rec. p. 1124
  5. Conseil d'État 26 novembre 1875 Pariset
  6. Conseil d'État 4 juillet 1924 Beaugé : Rec. p.  641
  7. Conseil d'État 19 juin 1964 Société des pétroles Shell-Bert : RDP 1964 p. 1019
  8. Conseil d'État 4 juillet 1947 Navellot : p. 299
  9. Conseil d'État 14 février 1902 Lalaque : Sirey 1903 III p. 97
  10. Conseil d'État 23 juillet 1909 Commune de Cotignac : Rec. p. 727
  11. Conseil d'État 24 juin 1960 Société Frampar
  12. Conseil d'État 16 novembre 1900 Maugras : Rec. p. 617
  13. Conseil d'État 2 février 1957 Castaing : p. 78
  14. Conseil d'État 28 mars 1945 Devouge : Gaz. Pal. 1945 I p. 124
  15. Conseil d'État 13 juillet 1962 Bréart de Boisanger : Dalloz 1962 p. 664
  16. Conseil d'État 3 janvier 1947 Consorts de Tricornot : Rec. p. 9