Bienvenue sur JurisPedia! Vous êtes invités à créer un compte et à contribuer après avoir confirmé votre adresse de courriel. Dès lors, vous pouvez ajouter un article en commençant par lui donner un titre en renseignant ce champ:

Les lecteurs et contributeurs ne doivent pas oublier de consulter les avertissements juridiques. Il y a actuellement 3 533 articles en construction permanente...

Loi pour la confiance dans l'économie numérique (fr) : Différence entre versions

Un article de JurisPedia, le droit partagé.
Aller à : Navigation, Rechercher
(Nouvelle page : * Désignation courte : Loi pour la confiance dans l’économie numérique * Titre : Loi nº 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique * Code : NOR EC...)
 
 
(51 révisions intermédiaires par 8 utilisateurs sont masquées)
Ligne 1 : Ligne 1 :
* Désignation courte : Loi pour la confiance dans l’économie numérique
+
{{ébauche (fr)}}
* Titre : Loi nº 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique
+
[[France]] > [[Droit des réseaux (fr)|Droit des réseaux]]
* Code : NOR ECOX0200175L
+
[[Image:fr_flag.png|framed|]]
* Pays : France
+
[[Catégorie:France]][[Catégorie:Droit privé (fr)]][[Catégorie:Droit public (fr)]][[Catégorie:Propriété intellectuelle (fr)]][[Catégorie:Droit commercial (fr)]][[Catégorie:Droit des réseaux (fr)]][[Catégorie:Droit de l'informatique (fr)]][[Catégorie:Droit de l'internet (fr)]]
*Législature : XIIe législature de la Cinquième République française
+
*Gouvernement : Gouvernement Raffarin II
+
* Adoption : 13 mai 2004
+
* Promulgation : 21 juin 2004
+
* Version en vigueur : 24 janvier 2006
+
  
''Contenu initial repris [http://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_pour_la_confiance_dans_l%27%C3%A9conomie_num%C3%A9rique depuis Wikipedia] sous [http://fr.wikipedia.org/wiki/Wikip%C3%A9dia:GNU_Free_Documentation_License licence GNU Free Documentation License]
+
La ''loi n°&nbsp;2004-575 du 21&nbsp;juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique'' (LCEN ou LEN)<ref>[[JORF:ECOX0200175L|''Loi n°&nbsp;2004-575 du 21&nbsp;juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique'']]&nbsp;: [[Journal officiel (fr)|JORF]] n°&nbsp;143 du 22&nbsp;juin 2004 p.&nbsp;11168</ref>, en transposant la [[directive (eu)|directive]] sur le commerce électronique<ref>[[CELEX:32000L0031|''Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8&nbsp;juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur («&nbsp;directive sur le commerce électronique&nbsp;»)'']]</ref>, établit un droit français de l’Internet et pose des règles relatives au commerce électronique. L’apport essentiel de la LCEN est qu’elle pose un droit général de l’Internet&nbsp;: d’une part, elle définit les communications sur l'Internet en créant de nouvelles catégories légales et, d’autre part, elle établit un régime de [[Responsabilité (fr)|responsabilité]] pour ses acteurs. On peut citer également l'adoption du principe du pays d'origine, le régime de la publicité par voie électronique, le régime du commerce électronique et l'intervention des collectivités dans les réseaux de communications électroniques.
  
La '''loi pour la confiance dans l'economie numérique''', aussi appelée '''LCEN''' ou '''LEN''', est la transposition de la directive 2000/31/CE. La transposition aurait du être effective le 17 janvier 2002 mais ne l'aura été que le 21 juin 2004.
+
Les débats concernant la LCEN ont été particulièrement vifs, et ce depuis le dépôt du projet de loi pour la société de l'information (LSI) sous le gouvernement Jospin. Les internautes se sont inquiétés de voir les communications sur l'internet qualifiées de [[Communication audiovisuelle (fr)|communications audiovisuelles]], qui seraient soumises au [[Conseil supérieur de l’audiovisuel (fr)|Conseil supérieur de l'audiovisuel]]. Les élus de l’[[Assemblée nationale (fr)|Assemblée nationale]] ont fait introduire dans la LCEN des mesures relatives à l’aménagement du territoire, afin d’éviter l’«&nbsp;écrémage&nbsp;». Ensuite, les mesures relatives à la lutte contre la piraterie en ligne ont fait réagir beaucoup d’internautes<ref>V. notamment http://www.iris.sgdg.org/</ref>. Pour finir, le [[Conseil constitutionnel (fr)|Conseil constitutionnel]] a rendu une décision censurant certaines dispositions de la LCEN<ref>Conseil constitutionnel, ''[http://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2004/2004496/2004496dc.htm décision n°&nbsp;2004-496 DC du 10&nbsp;juin 2004 sur la loi pour la confiance dans l’économie numérique]''</ref> relatives à la prescription des infractions de presse, mais affirmant la position du juge constitutionnel par rapport à la nécessité de transposer le [[droit communautaire (eu)|droit communautaire]].
  
Le Journal Officiel des Communautés Européennes indique la transposition de la "Directive relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du [[commerce électronique]], dans le marché intérieur". Elle visait à promouvoir le [[commerce électronique]] au sein de l'Union Européenne, suivant en cela la logique des traités dont le crédo est "un espace sans frontière intérieure dans lequel la libre circulation des marchandises et des services ainsi que la liberté d'établissement sont assurées" tel que préconisé par l'article 14-2 du Traité instituant la Communauté Européenne.
+
La LCEN est au centre d’intérêts multiples et a fait l’objet de vives critiques. On peut malgré tout estimer le résultat satisfaisant. Au moins cette [[Loi (fr)|loi]] est-elle venue enfin transposer la directive sur le commerce électronique et apporter une réponse à des questions anciennes. Un rapport d'information sur l'application de la LCEN<ref>[http://www.assemblee-nationale.fr/13/rap-info/i0627.asp J. Dionis du Séjour et C. Erhel, Rapport d'information sur la mise en application de la loi n°&nbsp;2004-575 du 21&nbsp;juin 2004], présenté le 16&nbsp;avril 2008</ref> confirme cette impression, en affirmant cependant qu'une adaptation du statut de l'hébergeur serait nécessaire. Ce rapport établit que dans la couverture du territoire, des zones blanches demeurent. Manquent encore cinq décrets d'application.
  
Les rapporteurs de la LCEN furent Jean Dionis du Séjour à l'Assemblée nationale et Pierre Hérisson ainsi que [[Bruno Sido]] au Sénat.
+
== Le principe du pays d'origine ==
  
== Polémique ==
+
Dans un espace dématérialisé, la question de savoir quel est le droit applicable pour trancher un éventuel conflit est déterminante. La [[directive (eu)|directive]] sur le commerce électronique pose le principe du pays d'origine, ce qui signifie que, à l'intérieur du territoire de l'[[Union européenne (eu)|Union européenne]], le droit applicable est celui du pays dans lequel est établi le prestataire de service. Ce principe est désormais inscrit à l’art.&nbsp;14 de la LCEN.
  
Cependant, la transposition de la directive prit du retard d'une part du fait d'une habitude française dans ce domaine, et d'autre part en raison des oppositions virulentes qu'elle fit naître de la part des acteurs de l'[[internet]].
+
== Définition des communications sur Internet ==
  
Les [[fournisseurs d'accès à Internet|fournisseurs d'accès à internet]] s'inquiétèrent rapidement de la rédaction du texte initial, exigeant de leur part une vérification a priori (avant la mise en ligne) de la licéité de tous les comptes hébergés par leurs soins. Mesure techniquement difficile à mettre en place, mais pourtant rendue obligatoire par la loi en préparation. Les fournisseurs d'[[accès à internet]] menacèrent alors pour mieux se faire entendre, et pour souligner le caractère incongru de la loi telle qu'elle était rédigée, de suspendre toutes les pages personnelles qu'ils hébergeaient.
+
La LCEN a créé de nouvelles catégories légales, tranchant ainsi la question de la qualification des services sur Internet.
  
A noter que vint s'immiscer aussi dans le débat la question de la correspondance privée pour le courrier électronique. En effet, soucieux que les échanges de fichiers (vidéos et audios) protégés par le droit d'auteur se soient accrus entre internautes, les rédacteurs du texte insistèrent pour que les messages électroniques puissent échapper à la notion de correspondance privée, afin de pouvoir surveiller et le cas échéant filtrer tout contenu illicite.
+
Les [[Service télématique (fr)|services télématiques]], définis par l’''[[arrêté (fr)|arrêté]] du 22&nbsp;décembre 1981''<ref>J.O. du 17&nbsp;janvier 1982.</ref>, étaient conçus comme faisant partie de la communication audiovisuelle et réglementés comme tels. Cette réglementation semblait devoir s’appliquer aux services sur Internet<ref>Huet, Jérôme, ''[http://www.cejem.com/article.php3?id_article=166 La loi sur la confiance dans l’économie numérique redéfinit les modalités d’utilisation de l’Internet]'', dimanche 5&nbsp;décembre 2004</ref>, ce qui avait provoqué une forte réaction de la part des internautes.
  
Les objurgations des fournisseurs d'accès mais aussi l'ire des organisations de défense de la liberté de la presse et des [[libertés individuelles]] telles que La [[Ligue des Droits de l'Homme]], [[Reporters sans frontières]] et la [[Ligue Odebi]] qui s'opposaient à plusieurs dispositions de la loi, obligèrent le gouvernement à reculer sur le très contesté article 6.
+
La LCEN a renommé la notion de communication audiovisuelle en [[Communication au public par voie électronique (fr)|«&nbsp;communication au public par voie électronique&nbsp;»]] et modifie l’art.&nbsp;1<SUP>er</SUP> de la loi n°&nbsp;86-106<ref>Huet, Jérôme, ''op. cit.''</ref> du 30&nbsp;septembre 1986 en affirmant la liberté de la communication au public par voie électronique, sous condition de respecter certaines limites énumérées au deuxième alinéa&nbsp;: le respect de la dignité de la personne humaine, de la liberté et de la propriété d’autrui, du caractère pluraliste des courants de pensée et d’opinion, la sauvegarde de l’[[ordre public (fr)|ordre public]], les besoins de la défense nationale, les exigences de [[service public (fr)|service public]], les contraintes techniques inhérentes aux moyens de communication et la nécessité pour les services audiovisuels, de développer la production audiovisuelle.
  
==Responsabilité des hébergeurs==
+
La notion de communication au public par voie électronique englobe les communications audiovisuelles d’une part et les [[Communication au public en ligne (fr)|communications au public en ligne]] d’autre part. Les communications audiovisuelles demeurent définies par la loi de 1986. Quant aux communications au public en ligne, elles sont définies par l’art. IV al.&nbsp;4 de la LCEN comme «&nbsp;toute transmission, sur demande individuelle, de données numériques n’ayant pas un caractère de correspondance privée, par un procédé de communication électronique permettant un échange réciproque d’informations entre l’émetteur et le récepteur&nbsp;». Avec cette définition de la communication au public en ligne «&nbsp;le divorce entre le multimédia et l’audiovisuel&nbsp;»<ref>J. Huet, ''op. cit.''</ref> est consacré.
L'article 6, l'un des principaux (si ce n'est le principal) objet de discorde entre les acteurs de l'Internet et le législateur fut remanié de façon à proposer une responsabilité allégée et a posteriori.
+
  
Est disposé l'article de la manière suivante:''les personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d'écrits, d'images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services ne peuvent pas voir leur responsabilité civile engagée du fait des activités ou des informations stockées à la demande d'un destinataire de ces services si elles n'avaient pas effectivement connaissance de leur caractère illicite ou de faits et circonstances faisant apparaître ce caractère ou si, dès le moment où elles en ont eu cette connaissance, elles ont agi promptement pour retirer ces données ou en rendre l'accès impossible.''
+
Le caractère public et le caractère d’interactivité de la communication au public en ligne tranchent notamment avec le [[Courrier électronique (fr)|courrier électronique]]<ref>J. Huet, ''op. cit.''</ref>, défini à l’art.&nbsp;4 de la LCEN. Cependant, le courrier électronique n’a pas nécessairement de caractère privé. Saisi sur ce point, le [[Conseil constitutionnel (fr)|Conseil constitutionnel]], constatant que cet article ne faisait que définir un procédé technique, a estimé qu’«&nbsp;il appartiendra à l’autorité juridictionnelle compétente de se prononcer sur [la] qualification&nbsp;» de correspondance privée du courrier électronique<ref>Conseil constitutionnel, [http://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2004/2004496/2004496dc.htm décision n°&nbsp;2004-496 DC du 10&nbsp;juin 2004 sur la loi pour la confiance dans l’économie numérique], point&nbsp;3.</ref>.
  
Il consacre de fait une responsabilité civile uniquement dans le cas d'une connaissance avérée par le prestataire de service de la présence d'informations illicites au regard de la loi. De plus, un autre garde-fou a été mis en place: la procédure relativement contraignante en matière de notification de contenu illicite:
+
La [[communication électronique (fr)|communication électronique]], mentionnée dans la définition des services de communication au public en ligne, remplace la notion de [[Télécommunication (fr)|télécommunication]]. Cette substitution est parachevée par la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle<ref>[[JORF:ECOX0300083L|''Loi n°&nbsp;2004-669 du 9&nbsp;juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle'']], J.O. n°&nbsp;159 du 10&nbsp;juillet 2004, p.&nbsp;12483.</ref>, transposant le «&nbsp;paquet télécom&nbsp;», qui renomme même le Code des postes et télécommunications en [[Code des postes et des communications électroniques (fr)|«&nbsp;Code des postes et des communications électroniques&nbsp;»]].
La connaissance des faits litigieux est présumée acquise par les personnes désignées au 2 lorsqu'il leur est notifié les éléments suivants :
+
''
+
* la date de la notification ;
+
* si le notifiant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ; si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l'organe qui la représente légalement ;
+
* les nom et domicile du destinataire ou, s'il s'agit d'une personne morale, sa dénomination et son siège social ;
+
* la description des faits litigieux et leur localisation précise ;
+
* les motifs pour lesquels le contenu doit être retiré, comprenant la mention des dispositions légales et des justifications de faits ;
+
* la copie de la correspondance adressée à l'auteur ou à l'éditeur des informations ou activités litigieuses demandant leur interruption, leur retrait ou leur modification, ou la justification de ce que l'auteur ou l'éditeur n'a pu être contacté.''
+
  
Sans omettre ce point particulier: ''le fait, pour toute personne, de présenter aux personnes mentionnées au 2 un contenu ou une activité comme étant illicite dans le but d'en obtenir le retrait ou d'en faire cesser la diffusion, alors qu'elle sait cette information inexacte, est puni d'une peine d'un an d'emprisonnement et de 15 000 Euros d'amende.''<ref>Point 4 de l'article 6</ref>
+
La nature juridique des communications sur Internet étant précisée, le législateur s’est ensuite penché sur la responsabilité des acteurs de l’Internet.
  
Ainsi la lourdeur de la procédure ainsi qu'une infraction prévue pour fausse notification allègent considérablement le risque de responsabilité des hébergeurs en la matière.
+
== Définition des responsabilités des acteurs de l'Internet ==
  
==Correspondance privée==
+
La LCEN a, d’une part, transposé fidèlement la directive européenne sur le commerce électronique en ce qui concerne la responsabilité des prestataires techniques et, d’autre part, déterminé le régime de responsabilité pour les contenus publiés sur Internet.
L'article 1 définit ce qu'est le « [[courrier électronique]] » : « ''On entend par courrier électronique tout message, sous forme de texte, de voix, de son ou d'image, envoyé par un réseau public de communication, stocké sur un serveur du réseau ou dans l'équipement terminal du destinataire, jusqu'à ce que ce dernier le récupère'' ». La question du caractère de correspondance privée de ce moyen de communication n'est pas abordée.
+
  
Dans sa décision 2004-496, le Conseil Constitutionnel n'a pas permis de régler le problème : il indique que « ''considérant que cette disposition [l'article 1 de la LCEN] se borne à définir un procédé technique ; qu'elle ne saurait affecter le régime juridique de la correspondance privée ; qu'en cas de contestation sur le caractère privé d'un courrier électronique, il appartiendra à l'autorité juridictionnelle compétente de se prononcer sur sa qualification'' ».
+
Tandis que la loi du 1<SUP>er</SUP>&nbsp;août 2000<ref>[[JORF:MCCX9800149L|Loi n°&nbsp;2000-719 du 1<SUP>er</SUP>&nbsp;août 2000 modifiant la loi n°&nbsp;86-1067 du 30&nbsp;septembre 1986 relative à la liberté de communication, J.O n°&nbsp;177 du 2&nbsp;août 2000]], p.&nbsp;11903.</ref> n’imposait aux hébergeurs de retirer des contenus illicites que sur [[injonction (fr)|injonction]] d’un [[juge (fr)|juge]], c’est-à-dire rarement, la [[CELEX:32000L0031|directive sur le commerce électronique]] pose le principe de l’absence d’obligation générale de surveillance des contenus par les prestataires techniques.
  
En définitive, il revient aux juridictions de définir exactement quel est le statut juridique du courriel électronique.
+
La question de la responsabilité pour les contenus illicites avait fait l’objet de vifs débats car il fallait conjuguer deux impératifs. D’une part, soumettre les prestataires techniques à une trop lourde responsabilité les aurait conduit à censurer tout ce qui, dans le doute, pourrait faire engager leur responsabilité, et donc à exercer une justice privée. D’autre part, il semblait clair qu’il fallait que quelqu’un soit responsable du retrait le plus rapide possible de contenus illicites.
  
Ce sont les deux ordres de juridictions qui ont la charge désormais de se saisir de ce problème en le clarifiant au sein d'une décision.
+
La LCEN établit un régime situé entre ces deux extrêmes. Elle proclame le principe de l’absence d’obligation pour les prestataires techniques de surveiller les contenus qu’ils stockent ou acheminent (art.&nbsp;6&nbsp;I n°&nbsp;7, art.&nbsp;9 LCEN), mais impose cependant aux hébergeurs de retirer promptement les contenus illicites à partir du moment où ils en ont eu une connaissance effective<ref>Voir à ce sujet ''[http://maitre.eolas.free.fr/journal/index.php?2007/03/26/584-sncf-lcen-et-responsabilite-de-l-hebergeur SNCF, LCEN et responsabilité de l'hébergeur]'', blogue de maître Eolas, 26&nbsp;mars 2007</ref>.
  
==Publicité par voie électronique==
+
Par exception, l’art.&nbsp;6&nbsp;I n°&nbsp;7 de la LCEN impose toutefois aux hébergeurs de participer à la répression de l’apologie des [[Crime contre l'humanité (fr)|crimes contre l’humanité]], de l’[[Incitation à la haine raciale (fr)|incitation à haine raciale]] et de la pornographie enfantine en mettant un place un dispositif de signalement de ces infractions, en informant les autorités compétentes et en rendant publics les moyens qu’ils consacrent à la lutte contre ces infractions<ref>Voir par exemple pour les fournisseurs d’accès membres de l’Association des fournisseurs d’accès et de services Internet (AFA) http://www.pointdecontact.net.</ref>.
L'article 22 (codifié dorénavant dans le ''Code des Postes et Communications Electroniques'', article L 34-5) introduit la notion d' ''opt-in'' en matière de publicité électronique : « ''Est interdite la prospection directe au moyen d'un automate d'appel, d'un télécopieur ou d'un courrier électronique utilisant, sous quelque forme que ce soit, les coordonnées d'une personne physique qui n'a pas exprimé son consentement préalable à recevoir des prospections directes par ce moyen.'' »
+
  
Seule la personne physique est mentionnée, et non la personne morale. ''A contrario'', il est admis que l' ''opt-out'' soit la norme pour toute prospection publicitaire à l'égard d'administrations ou d'entreprises.
+
Pour éviter des dénonciations qui prétendraient qu’un contenu est illicite, l’art.&nbsp;6&nbsp;I n°&nbsp;5 de la LCEN impose à la personne qui informe un hébergeur de l’illicéité d’un contenu de communiquer des informations sur elle, sur l’illicéité du contenu et sur la procédure contre l’auteur ou l’éditeur de ce contenu. L’art.&nbsp;6&nbsp;I n°&nbsp;4 sanctionne pénalement le fait de présenter sciemment comme illicite un contenu licite.
  
Le législateur prévoit pour le prospecteur l'obligation d'indiquer ses coordonnées pour que le destinataire puisse faire cesser la prospection : « ''Dans tous les cas, il est interdit d'émettre, à des fins de prospection directe, des messages au moyen d'automates d'appel, télécopieurs et courriers électroniques, sans indiquer de coordonnées valables auxquelles le destinataire puisse utilement transmettre une demande tendant à obtenir que ces communications cessent sans frais autres que ceux liés à la transmission de celle-ci. Il est également interdit de dissimuler l'identité de la personne pour le compte de laquelle la communication est émise et de mentionner un objet sans rapport avec la prestation ou le service proposé.'' »
+
Le [[Conseil constitutionnel (fr)|Conseil constitutionnel]], saisi de la question de la responsabilité des hébergeurs, a émis une réserve d’interprétation en estimant que la responsabilité d’un hébergeur pouvait être engagée si, prévenu de l’illicéité de certaines informations, il n’avait pas agi promptement pour les rendre inaccessibles, alors que ces informations présentent manifestement un caractère illicite ou que leur retrait a été ordonné par un juge<ref>Conseil constitutionnel, décision n°&nbsp;2004-496, point&nbsp;9.</ref>. Un contenu est manifestement illicite lorsqu’il incite à la haine raciale ou lorsqu’il s’agit d’images pédo-pornographiques<ref>Forum des droits sur l’Internet, Recommandation ''[http://www.foruminternet.org/recommandations/lire.phtml?id=844 Les enfants du Net II&nbsp;: Pédo-pornographie et pédophilie sur l’internet]'', 25&nbsp;janvier 2005, p.&nbsp;32, n.&nbsp;67, citant E. Dumout, J. Thorel, ''LCEN&nbsp;: le Conseil constitutionnel censure l’amendement Devedjian'', ZDNet, 15&nbsp;juin 2004.</ref>.
  
En cas d'infraction à cet article, la [[Commission nationale de l'informatique et des libertés|CNIL]] est déclarée compétente pour recevoir les plaintes et constater les infractions.
+
Les autres prestataires techniques ne sont responsables du contenu qu’ils acheminent que lorsqu’ils sont à l’origine de la transmission litigieuse ou qu’ils sélectionnent le destinataire de la transmission ou modifient le contenu ([[CPOSTEfr:L32-3-3|article L&nbsp;32-3-3]] du [[Code des postes et communications électroniques (fr)|Code des postes et communications électroniques]]).
  
==Notion de « commerçant électronique »==
+
Si les prestataires techniques ne sont pas tenus d’une obligation générale de surveillance des contenus, ils sont obligés par l’art.&nbsp;6&nbsp;II de la LCEN de conserver les données de « quiconque a contribué à la création de contenu d’un service de communication au public en ligne » aux fins d’identification des auteurs de contenus illicites. La durée et les modalités de conservation de ces données sont établies par le décret en [[Conseil d'État (fr)|Conseil d'État]] pris après avis de la [[CNIL (fr)|CNIL]]. <ref>[[JORF:JD|Décret n°&nbsp;2006-358 du 24&nbsp;mars 2006 relatif à la conservation des données des communications électroniques]], JO du 26&nbsp;mars 2006, p.&nbsp;4609, pris après la [[http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnDocument?base=CNIL&nod=MCP05110254A délibération n°&nbsp;2005-254 du 10&nbsp;novembre 2005 portant avis sur un projet de décret relatif à la conservation des données de communications électroniques et modifiant le code des postes et des communications électroniques]</ref> Cette durée est un an à compter de l'enregistrement<ref>Art.&nbsp;[[CPOSTEfr:R10-13|R&nbsp;10-13&nbsp;I]], Code des postes et télécommunications</ref>, comme l'avait laissé prévoir loi sur la sécurité quotidienne du 15&nbsp;novembre 2001<ref>[[JORF:INTX0100032L|Loi n°&nbsp;2001-1062 du 15&nbsp;novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne]], J.O. n°&nbsp;266 du 16&nbsp;novembre 2001, p.&nbsp;18215.</ref> aux termes de laquelle la conservation de ces données ne peut excéder un an et qu’elle ne peut porter sur le contenu des contributions<ref>Sur ce point, voir L. Thoumyre, ''[http://www.forumInternet.org/en/forums/read.php?f=4&i=2&t=2 AFA&nbsp;— contribution de M. J.-C. Le Toquin]''&nbsp;; voir également Forum des droits sur l’Internet, ''[http://www.forumInternet.org/actualites/lire.phtml?id=868 Entreprise&nbsp;: accès tu fourniras, données du conserveras]''.</ref>. La LCEN apporte toutefois une modification importante puisque ces données ne pourront plus être communiquées qu’à un [[Juge (fr)|juge]].
La LCEN donne une définition assez proche de la directive quant à cette notion: « ''Le [[commerce électronique]] est l'activité économique par laquelle une personne propose ou assure à distance et par voie électronique la fourniture de biens ou de services.'' »
+
  
Cette définition impliquant de facto des obligations contenues dans l'article 19:
+
Les obligations pesant sur les prestataires de service permettent de mettre face à ses responsabilités l’auteur de contenus illicites. La LCEN détermine également le régime de responsabilité des personnes participant à une activité éditoriale sur Internet.
  
« ''Sans préjudice des autres obligations d'information prévues par les textes législatifs et réglementaires en vigueur, toute personne qui exerce l'activité définie à l'article 14 est tenue d'assurer à ceux à qui est destinée la fourniture de biens ou la prestation de services un accès facile, direct et permanent utilisant un standard ouvert aux informations suivantes :
+
Les règles relatives à la responsabilité, définies par la ''loi sur la liberté de la presse de 1881''<ref>[http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000877119 Loi du 29 juillet 1881, ''Loi sur la liberté de la presse''], [[journal officiel (fr)|JORF]] du 30 juillet 1881 page 4201</ref>, au départ applicables aux communications audiovisuelles, ont été étendues aux communications au public par voie électronique et, par conséquent, aux communications au public en ligne. Il s’agit d’une responsabilité en cascade, déterminée par l’art.&nbsp;93-3 de la loi de 1982.
  
* S'il s'agit d'une [[personne physique]], ses nom et prénoms et, s'il s'agit d'une [[personne morale]], sa raison sociale ;
+
Cette responsabilité sanctionne le manquement aux obligations énoncées, d’une part par la loi de 1881 et, d’autre part, par l’art.&nbsp;6&nbsp;III de la LCEN. L’éditeur d’un service de communication au public en ligne doit mentionner ses nom et adresse, le nom du directeur ou du codirecteur de la publication et, le cas échéant celui du responsable de la rédaction, ainsi que le nom et l’adresse de son hébergeur.
* L'adresse où elle est établie, son adresse de courrier électronique, ainsi que son numéro de téléphone ;
+
* Si elle est assujettie aux formalités d'inscription au [[registre du commerce]] et des sociétés ou au [[répertoire des métiers]], le numéro de son inscription, son capital social et l'adresse de son [[siège social]] ;
+
* Si elle est assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée et identifiée par un numéro individuel en application de l'article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d'identification ;
+
* Si son activité est soumise à un régime d'autorisation, le nom et l'adresse de l'autorité ayant délivré celle-ci ;
+
* Si elle est membre d'une profession réglementée, la référence aux règles professionnelles applicables, son titre professionnel, l'État membre dans lequel il a été octroyé ainsi que le nom de l'ordre ou de l'organisme professionnel auprès duquel elle est inscrite.'' »
+
  
==Intervention des collectivités dans les infrastructures de communications électroniques==
+
Conformément au droit de la presse, toute personne nommée ou désignée a un droit de réponse. Ce droit de réponse n’est pas celui énoncé à l’art.&nbsp;6 de la loi de 1982 relative à la communication audiovisuelle. Aux termes de l’art.&nbsp;6&nbsp;IV de la LCEN, ce droit de réponse est exercé gratuitement auprès du directeur du service de communication au public en ligne, qui est obligé de le publier dans les trois jours.
La LCEN a accru les facultés d'intervention des collectivités territoriales en matière d'établissement de réseaux de communications électroniques en leur permettant d'établir et d'exploiter des réseaux de communications électroniques<ref>[http://extranet.ant.cete-ouest.equipement.gouv.fr/article.php3?id_article=32 Montages contractuels possibles pour une collectivité], [http://extranet.ant.cete-ouest.equipement.gouv.fr/article.php3?id_article=137 Déléguer un service public haut débit]</ref>. Ces compétences nouvelles sont codifiées à l'article L 1425-1<ref>[http://extranet.ant.cete-ouest.equipement.gouv.fr/article.php3?id_article=31 L'article L1425-1 du CGCT]</ref> du [[Code général des collectivités territoriales]].
+
  
== Références et notes==
+
La LCEN prévoyait au départ de que la responsabilité de l’éditeur se prescrivait par trois mois après que le texte litigieux ait été accessible au public, mais le [[Conseil constitutionnel (fr)|Conseil constitutionnel]] a jugé inconstitutionnel le fait de pouvoir engager la responsabilité de l’éditeur d’une publication en ligne pendant un délai qui serait aléatoire et plus long que celui de la presse papier<ref>Conseil constitutionnel, décision n°&nbsp;2004-496, point&nbsp;14.</ref>. Le point de départ du délai de droit de réponse reste donc celui de la publication.
 +
 
 +
== Intervention des collectivités dans les réseaux de communications électroniques ==
 +
 
 +
Anticipant sur le programme législatif du [[Gouvernement (fr)|gouvernement]] concernant la transposition du «&nbsp;paquet télécom&nbsp;», les députés ont souhaité prendre position dans un débat opposant l'opérateur historique et les [[Collectivité territoriale (fr)|collectivités territoriales]]. Celles-ci s’étaient opposées à l’opérateur historique car elles voulaient procéder elles-même à l’installation de la fibre noire afin de développer plus rapidement internet sur leur territoire. Leur dynamisme avait été freiné par une décision du [[Tribunal administratif (fr)|tribunal administratif]] de Nancy<ref>TA Nancy, 18&nbsp;mars 1999, Communauté urbaine du Grand Nancy, J.-Cl., Lettre droit public des affaires, mai et juin 1999&nbsp;; Y. Laidié, ''Libéralisation des télécommunications et aménagement du territoire&nbsp;: les collectivités locales entre Charybde et Scylla'', D. 1999, jurispr., p.&nbsp;617&nbsp;; confirmé par l’avis du [[Conseil d’État (fr)|Conseil d’État]] du 5&nbsp;novembre 2002. À noter le jour de la [[Publication (fr)|publication]] de la LCEN l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy [http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnDocument?base=JADE&nod=J5XCX2004X06X000009901248 24&nbsp;juin 2004 ''Communauté urbaine du Grand Nancy''] rejetant l'appel interjeté contre la décision du tribunal administratif de Nancy.</ref>. Ces dispositions tenaient particulièrement à cœur aux députés car, au cours des débats parlementaires, elles avaient été placées en tête de la loi, puis ont été repoussées en fin de texte après intervention de la [[Commission mixte paritaire (fr)|commission mixte paritaire]].
 +
 
 +
La LCEN a accru les facultés d'intervention des [[collectivité territoriale (fr)|collectivités territoriales]] en matière d'aménagement numérique<ref>[http://fr.wikipedia.org/wiki/Am%C3%A9nagement_num%C3%A9rique Article « Aménagement numérique » sur Wikipedia]</ref> de leurs territoires, en élargissant leurs compétences pour l'établissement de réseaux de communications électroniques. La LCEN leur permet ainsi d'établir et d'exploiter des réseaux de communications électroniques<ref>[http://extranet.ant.cete-ouest.equipement.gouv.fr/article.php3?id_article=32 Montages contractuels possibles pour une collectivité], [http://extranet.ant.cete-ouest.equipement.gouv.fr/article.php3?id_article=137 Déléguer un service public haut débit]</ref>. Ces compétences nouvelles sont codifiées à l'[[CGCTfr:L1425-1|article L 1425-1]]<ref>[http://extranet.ant.cete-ouest.equipement.gouv.fr/article.php3?id_article=31 L'article L1425-1 du CGCT - Explications]</ref> du [[Code général des collectivités territoriales (fr)|Code général des collectivités territoriales]].
 +
 
 +
== Voir aussi ==
 +
 
 +
* [[Responsabilité de l'hébergeur de contenus sur l'Internet (fr)]]
 +
 
 +
== Liens externes ==
 +
 
 +
{{moteur (fr)|Loi pour la confiance dans l'économie numérique}}
 +
* [[JORF:ECOX0200175L|J.O. n° 143 du 22 juin 2004 page 11168]], [http://www.legifrance.gouv.fr/texteconsolide/PCEBX.htm version à jour]
 +
* [http://www.assemblee-nationale.fr/12/dossiers/economie_numerique.asp Dossier législatif de l'Assemblée nationale]
 +
* [http://www.senat.fr/dossierleg/pjl02-195.html Dossier législatif du Sénat]
 +
* [http://www.assemblee-nationale.fr/13/rap-info/i0627.asp J. Dionis du Séjour et C. Erhel, Rapport d'information sur la mise en application de la loi n°&nbsp;2004-575 du 21&nbsp;juin 2004], présenté le 16&nbsp;avril 2008 pour la confiance dans l’économie numérique
 +
* [[Conseil constitutionnel (fr)|Conseil constitutionnel]], [http://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2004/2004496/2004496dc.htm décision n°&nbsp;2004-496 DC du 10&nbsp;juin 2004 sur la loi pour la confiance dans l’économie numérique]
 +
 
 +
== Bibliographie ==
 +
* Forum des droits sur l’Internet, ''[http://www.forumInternet.org/actualites/lire.phtml?id=868 Entreprise&nbsp;: accès tu fourniras, données du conserveras]''
 +
* Forum des droits sur l’Internet, Recommandation ''[http://www.forumInternet.org/recommandations/lire.phtml?id=844 Les enfants du Net II&nbsp;: Pédo-pornographie et pédophilie sur l’intenet]'', 25&nbsp;janvier 2005, p.&nbsp;32.
 +
* J. Huet, ''[http://www.cejem.com/article.php3?id_article=166 La loi sur la confiance dans l’économie numérique redéfinit les modalités d’utilisation de l’Internet]'', dimanche 5&nbsp;décembre 2004
 +
* Y. Laidié, ''Libéralisation des télécommunications et aménagement du territoire&nbsp;: les collectivités locales entre Charybde et Scylla'', D. 1999, jurispr., p.&nbsp;617
 +
* P. Matringe, ''Le nouveau droit français de l'internet'', [http://jusdata.org JusData], mai 2005
 +
* Y.-E. Scaramozzino, ''[http://www.scaraye.com/article.php?rub=1&sr=39&a=184 Entreprises&nbsp;: obligation de stockage et de communication des données personnelles]''
 +
* L. Thoumyre, [http://www.forumInternet.org/en/forums/read.php?f=4&i=2&t=2 AFA&nbsp;— contribution de M. J.-C. Le Toquin]
 +
 
 +
== Références ==
 
<references/>
 
<references/>
* Textes officiels
+
 
** [http://www.legifrance.gouv.fr/texteconsolide/PCEBX.htm Texte de la loi sur Légifrance] (version à jour)
+
 
** [http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnTexteDeJorf?numjo=ECOX0200175L Texte d'origine]
+
[[de:Gesetz über das Vertrauen in die digitale Wirtschaft (fr)]]
** [http://www.assemblee-nationale.fr/12/dossiers/economie_numerique.asp Dossier législatif de l'Assemblée nationale]
+
** [http://www.senat.fr/dossierleg/pjl02-195.html Dossier législatif du Sénat]
+

Version actuelle en date du 2 décembre 2012 à 23:05


Cet article est une ébauche relative au droit français, vous pouvez partager vos connaissances juridiques en le modifiant, vous pouvez également faire une recherche dans le moteur...'
'
Recherche en droit français Fr flag.png
Google Custom Search

France > Droit des réseaux 
Fr flag.png

La loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN ou LEN)[1], en transposant la directive sur le commerce électronique[2], établit un droit français de l’Internet et pose des règles relatives au commerce électronique. L’apport essentiel de la LCEN est qu’elle pose un droit général de l’Internet : d’une part, elle définit les communications sur l'Internet en créant de nouvelles catégories légales et, d’autre part, elle établit un régime de responsabilité pour ses acteurs. On peut citer également l'adoption du principe du pays d'origine, le régime de la publicité par voie électronique, le régime du commerce électronique et l'intervention des collectivités dans les réseaux de communications électroniques.

Les débats concernant la LCEN ont été particulièrement vifs, et ce depuis le dépôt du projet de loi pour la société de l'information (LSI) sous le gouvernement Jospin. Les internautes se sont inquiétés de voir les communications sur l'internet qualifiées de communications audiovisuelles, qui seraient soumises au Conseil supérieur de l'audiovisuel. Les élus de l’Assemblée nationale ont fait introduire dans la LCEN des mesures relatives à l’aménagement du territoire, afin d’éviter l’« écrémage ». Ensuite, les mesures relatives à la lutte contre la piraterie en ligne ont fait réagir beaucoup d’internautes[3]. Pour finir, le Conseil constitutionnel a rendu une décision censurant certaines dispositions de la LCEN[4] relatives à la prescription des infractions de presse, mais affirmant la position du juge constitutionnel par rapport à la nécessité de transposer le droit communautaire.

La LCEN est au centre d’intérêts multiples et a fait l’objet de vives critiques. On peut malgré tout estimer le résultat satisfaisant. Au moins cette loi est-elle venue enfin transposer la directive sur le commerce électronique et apporter une réponse à des questions anciennes. Un rapport d'information sur l'application de la LCEN[5] confirme cette impression, en affirmant cependant qu'une adaptation du statut de l'hébergeur serait nécessaire. Ce rapport établit que dans la couverture du territoire, des zones blanches demeurent. Manquent encore cinq décrets d'application.

Le principe du pays d'origine

Dans un espace dématérialisé, la question de savoir quel est le droit applicable pour trancher un éventuel conflit est déterminante. La directive sur le commerce électronique pose le principe du pays d'origine, ce qui signifie que, à l'intérieur du territoire de l'Union européenne, le droit applicable est celui du pays dans lequel est établi le prestataire de service. Ce principe est désormais inscrit à l’art. 14 de la LCEN.

Définition des communications sur Internet

La LCEN a créé de nouvelles catégories légales, tranchant ainsi la question de la qualification des services sur Internet.

Les services télématiques, définis par l’arrêté du 22 décembre 1981[6], étaient conçus comme faisant partie de la communication audiovisuelle et réglementés comme tels. Cette réglementation semblait devoir s’appliquer aux services sur Internet[7], ce qui avait provoqué une forte réaction de la part des internautes.

La LCEN a renommé la notion de communication audiovisuelle en « communication au public par voie électronique » et modifie l’art. 1er de la loi n° 86-106[8] du 30 septembre 1986 en affirmant la liberté de la communication au public par voie électronique, sous condition de respecter certaines limites énumérées au deuxième alinéa : le respect de la dignité de la personne humaine, de la liberté et de la propriété d’autrui, du caractère pluraliste des courants de pensée et d’opinion, la sauvegarde de l’ordre public, les besoins de la défense nationale, les exigences de service public, les contraintes techniques inhérentes aux moyens de communication et la nécessité pour les services audiovisuels, de développer la production audiovisuelle.

La notion de communication au public par voie électronique englobe les communications audiovisuelles d’une part et les communications au public en ligne d’autre part. Les communications audiovisuelles demeurent définies par la loi de 1986. Quant aux communications au public en ligne, elles sont définies par l’art. IV al. 4 de la LCEN comme « toute transmission, sur demande individuelle, de données numériques n’ayant pas un caractère de correspondance privée, par un procédé de communication électronique permettant un échange réciproque d’informations entre l’émetteur et le récepteur ». Avec cette définition de la communication au public en ligne « le divorce entre le multimédia et l’audiovisuel »[9] est consacré.

Le caractère public et le caractère d’interactivité de la communication au public en ligne tranchent notamment avec le courrier électronique[10], défini à l’art. 4 de la LCEN. Cependant, le courrier électronique n’a pas nécessairement de caractère privé. Saisi sur ce point, le Conseil constitutionnel, constatant que cet article ne faisait que définir un procédé technique, a estimé qu’« il appartiendra à l’autorité juridictionnelle compétente de se prononcer sur [la] qualification » de correspondance privée du courrier électronique[11].

La communication électronique, mentionnée dans la définition des services de communication au public en ligne, remplace la notion de télécommunication. Cette substitution est parachevée par la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle[12], transposant le « paquet télécom », qui renomme même le Code des postes et télécommunications en « Code des postes et des communications électroniques ».

La nature juridique des communications sur Internet étant précisée, le législateur s’est ensuite penché sur la responsabilité des acteurs de l’Internet.

Définition des responsabilités des acteurs de l'Internet

La LCEN a, d’une part, transposé fidèlement la directive européenne sur le commerce électronique en ce qui concerne la responsabilité des prestataires techniques et, d’autre part, déterminé le régime de responsabilité pour les contenus publiés sur Internet.

Tandis que la loi du 1er août 2000[13] n’imposait aux hébergeurs de retirer des contenus illicites que sur injonction d’un juge, c’est-à-dire rarement, la directive sur le commerce électronique pose le principe de l’absence d’obligation générale de surveillance des contenus par les prestataires techniques.

La question de la responsabilité pour les contenus illicites avait fait l’objet de vifs débats car il fallait conjuguer deux impératifs. D’une part, soumettre les prestataires techniques à une trop lourde responsabilité les aurait conduit à censurer tout ce qui, dans le doute, pourrait faire engager leur responsabilité, et donc à exercer une justice privée. D’autre part, il semblait clair qu’il fallait que quelqu’un soit responsable du retrait le plus rapide possible de contenus illicites.

La LCEN établit un régime situé entre ces deux extrêmes. Elle proclame le principe de l’absence d’obligation pour les prestataires techniques de surveiller les contenus qu’ils stockent ou acheminent (art. 6 I n° 7, art. 9 LCEN), mais impose cependant aux hébergeurs de retirer promptement les contenus illicites à partir du moment où ils en ont eu une connaissance effective[14].

Par exception, l’art. 6 I n° 7 de la LCEN impose toutefois aux hébergeurs de participer à la répression de l’apologie des crimes contre l’humanité, de l’incitation à haine raciale et de la pornographie enfantine en mettant un place un dispositif de signalement de ces infractions, en informant les autorités compétentes et en rendant publics les moyens qu’ils consacrent à la lutte contre ces infractions[15].

Pour éviter des dénonciations qui prétendraient qu’un contenu est illicite, l’art. 6 I n° 5 de la LCEN impose à la personne qui informe un hébergeur de l’illicéité d’un contenu de communiquer des informations sur elle, sur l’illicéité du contenu et sur la procédure contre l’auteur ou l’éditeur de ce contenu. L’art. 6 I n° 4 sanctionne pénalement le fait de présenter sciemment comme illicite un contenu licite.

Le Conseil constitutionnel, saisi de la question de la responsabilité des hébergeurs, a émis une réserve d’interprétation en estimant que la responsabilité d’un hébergeur pouvait être engagée si, prévenu de l’illicéité de certaines informations, il n’avait pas agi promptement pour les rendre inaccessibles, alors que ces informations présentent manifestement un caractère illicite ou que leur retrait a été ordonné par un juge[16]. Un contenu est manifestement illicite lorsqu’il incite à la haine raciale ou lorsqu’il s’agit d’images pédo-pornographiques[17].

Les autres prestataires techniques ne sont responsables du contenu qu’ils acheminent que lorsqu’ils sont à l’origine de la transmission litigieuse ou qu’ils sélectionnent le destinataire de la transmission ou modifient le contenu (article L 32-3-3 du Code des postes et communications électroniques).

Si les prestataires techniques ne sont pas tenus d’une obligation générale de surveillance des contenus, ils sont obligés par l’art. 6 II de la LCEN de conserver les données de « quiconque a contribué à la création de contenu d’un service de communication au public en ligne » aux fins d’identification des auteurs de contenus illicites. La durée et les modalités de conservation de ces données sont établies par le décret en Conseil d'État pris après avis de la CNIL[18] Cette durée est un an à compter de l'enregistrement[19], comme l'avait laissé prévoir loi sur la sécurité quotidienne du 15 novembre 2001[20] aux termes de laquelle la conservation de ces données ne peut excéder un an et qu’elle ne peut porter sur le contenu des contributions[21]. La LCEN apporte toutefois une modification importante puisque ces données ne pourront plus être communiquées qu’à un juge.

Les obligations pesant sur les prestataires de service permettent de mettre face à ses responsabilités l’auteur de contenus illicites. La LCEN détermine également le régime de responsabilité des personnes participant à une activité éditoriale sur Internet.

Les règles relatives à la responsabilité, définies par la loi sur la liberté de la presse de 1881[22], au départ applicables aux communications audiovisuelles, ont été étendues aux communications au public par voie électronique et, par conséquent, aux communications au public en ligne. Il s’agit d’une responsabilité en cascade, déterminée par l’art. 93-3 de la loi de 1982.

Cette responsabilité sanctionne le manquement aux obligations énoncées, d’une part par la loi de 1881 et, d’autre part, par l’art. 6 III de la LCEN. L’éditeur d’un service de communication au public en ligne doit mentionner ses nom et adresse, le nom du directeur ou du codirecteur de la publication et, le cas échéant celui du responsable de la rédaction, ainsi que le nom et l’adresse de son hébergeur.

Conformément au droit de la presse, toute personne nommée ou désignée a un droit de réponse. Ce droit de réponse n’est pas celui énoncé à l’art. 6 de la loi de 1982 relative à la communication audiovisuelle. Aux termes de l’art. 6 IV de la LCEN, ce droit de réponse est exercé gratuitement auprès du directeur du service de communication au public en ligne, qui est obligé de le publier dans les trois jours.

La LCEN prévoyait au départ de que la responsabilité de l’éditeur se prescrivait par trois mois après que le texte litigieux ait été accessible au public, mais le Conseil constitutionnel a jugé inconstitutionnel le fait de pouvoir engager la responsabilité de l’éditeur d’une publication en ligne pendant un délai qui serait aléatoire et plus long que celui de la presse papier[23]. Le point de départ du délai de droit de réponse reste donc celui de la publication.

Intervention des collectivités dans les réseaux de communications électroniques

Anticipant sur le programme législatif du gouvernement concernant la transposition du « paquet télécom », les députés ont souhaité prendre position dans un débat opposant l'opérateur historique et les collectivités territoriales. Celles-ci s’étaient opposées à l’opérateur historique car elles voulaient procéder elles-même à l’installation de la fibre noire afin de développer plus rapidement internet sur leur territoire. Leur dynamisme avait été freiné par une décision du tribunal administratif de Nancy[24]. Ces dispositions tenaient particulièrement à cœur aux députés car, au cours des débats parlementaires, elles avaient été placées en tête de la loi, puis ont été repoussées en fin de texte après intervention de la commission mixte paritaire.

La LCEN a accru les facultés d'intervention des collectivités territoriales en matière d'aménagement numérique[25] de leurs territoires, en élargissant leurs compétences pour l'établissement de réseaux de communications électroniques. La LCEN leur permet ainsi d'établir et d'exploiter des réseaux de communications électroniques[26]. Ces compétences nouvelles sont codifiées à l'article L 1425-1[27] du Code général des collectivités territoriales.

Voir aussi

Liens externes

Bibliographie

Références

  1. Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique : JORF n° 143 du 22 juin 2004 p. 11168
  2. Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (« directive sur le commerce électronique »)
  3. V. notamment http://www.iris.sgdg.org/
  4. Conseil constitutionnel, décision n° 2004-496 DC du 10 juin 2004 sur la loi pour la confiance dans l’économie numérique
  5. J. Dionis du Séjour et C. Erhel, Rapport d'information sur la mise en application de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004, présenté le 16 avril 2008
  6. J.O. du 17 janvier 1982.
  7. Huet, Jérôme, La loi sur la confiance dans l’économie numérique redéfinit les modalités d’utilisation de l’Internet, dimanche 5 décembre 2004
  8. Huet, Jérôme, op. cit.
  9. J. Huet, op. cit.
  10. J. Huet, op. cit.
  11. Conseil constitutionnel, décision n° 2004-496 DC du 10 juin 2004 sur la loi pour la confiance dans l’économie numérique, point 3.
  12. Loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle, J.O. n° 159 du 10 juillet 2004, p. 12483.
  13. Loi n° 2000-719 du 1er août 2000 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, J.O n° 177 du 2 août 2000, p. 11903.
  14. Voir à ce sujet SNCF, LCEN et responsabilité de l'hébergeur, blogue de maître Eolas, 26 mars 2007
  15. Voir par exemple pour les fournisseurs d’accès membres de l’Association des fournisseurs d’accès et de services Internet (AFA) http://www.pointdecontact.net.
  16. Conseil constitutionnel, décision n° 2004-496, point 9.
  17. Forum des droits sur l’Internet, Recommandation Les enfants du Net II : Pédo-pornographie et pédophilie sur l’internet, 25 janvier 2005, p. 32, n. 67, citant E. Dumout, J. Thorel, LCEN : le Conseil constitutionnel censure l’amendement Devedjian, ZDNet, 15 juin 2004.
  18. Décret n° 2006-358 du 24 mars 2006 relatif à la conservation des données des communications électroniques, JO du 26 mars 2006, p. 4609, pris après la [délibération n° 2005-254 du 10 novembre 2005 portant avis sur un projet de décret relatif à la conservation des données de communications électroniques et modifiant le code des postes et des communications électroniques
  19. Art. R 10-13 I, Code des postes et télécommunications
  20. Loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, J.O. n° 266 du 16 novembre 2001, p. 18215.
  21. Sur ce point, voir L. Thoumyre, AFA — contribution de M. J.-C. Le Toquin ; voir également Forum des droits sur l’Internet, Entreprise : accès tu fourniras, données du conserveras.
  22. Loi du 29 juillet 1881, Loi sur la liberté de la presse, JORF du 30 juillet 1881 page 4201
  23. Conseil constitutionnel, décision n° 2004-496, point 14.
  24. TA Nancy, 18 mars 1999, Communauté urbaine du Grand Nancy, J.-Cl., Lettre droit public des affaires, mai et juin 1999 ; Y. Laidié, Libéralisation des télécommunications et aménagement du territoire : les collectivités locales entre Charybde et Scylla, D. 1999, jurispr., p. 617 ; confirmé par l’avis du Conseil d’État du 5 novembre 2002. À noter le jour de la publication de la LCEN l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy 24 juin 2004 Communauté urbaine du Grand Nancy rejetant l'appel interjeté contre la décision du tribunal administratif de Nancy.
  25. Article « Aménagement numérique » sur Wikipedia
  26. Montages contractuels possibles pour une collectivité, Déléguer un service public haut débit
  27. L'article L1425-1 du CGCT - Explications