Validité et opposabilité de l'acte administratif (fr)
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Point de départ des effets de la décision exécutoire
Il est essentiel de savoir à partir de quel moment l'acte administratif produit ses effets juridiques. On songe immédiatement au rôle de l'élément déclaration de volonté. On dira que l'acte administratif entre en vigueur à partir de son émission par l'autorité administrative compétente.
Toutefois, il faut aussi envisager les conséquences de l'acte par rapport aux tiers qui doivent avoir été informés de son existence. On rencontre ainsi une distinction très logique entre validité et opposabilité. L'acte produit effet dès son émission mais il n'est opposable aux tiers qu'après avoir donné lieu à publication. Il en va ainsi, par exemple, du décret présidentiel de mai 2006 amnistiant un ancien champion olympique (v. Amnistie et Acte de gouvernement).
Sommaire
La jurisprudence reconnaît en effet la validité d'un acte administratif non publié
Elle décide qu'un tel acte, s'il n'est pas opposable aux tiers, produit à l'égard de l'administration. Le principe en a été posé dans l'arrêt du Conseil d'État 18 juillet 1913 Syndicat national des chemins de fer de France et des colonies : Sirey 1914 III p. 1, arrêt rendu au sujet d'un arrêté ministériel convoquant pour une période militaire les cheminots en grève, alors que le décret sur lequel reposait l'acte n'avait pas été publié. Le Conseil d'État a reconnu la régularité de l'arrêté mais en spécifiant que cet acte ne produisait effet à l'égard des cheminots qu'après sa publication.
La publicité décide de l'effet de l'acte administratif à l'égard des tiers
La publicité est réalisée soit par la publication (insertion au Journal officiel, affichage ou insertion dans les recueils administratifs officiels), soit par notification individuelle. En principe, les mesures générales donnent plutôt lieu à publication, tandis que les mesures individuelles font plutôt l'objet de notifications.
Cette règle reste relative pour le Conseil d'État, qui tient compte des conditions de fait (Conseil d'État 22 janvier 1934 Veuve Lacoste : Rec. p. 66, Conseil d'État 22 juillet 1938 Dame Poujade : Rec. p. 711). Dans cette affaire, le Conseil d'État a affirmé qu'un acte administratif réglementaire ne pouvait faire naître des droits au profit des tiers qu'à partir de sa publication. Toutefois, le Conseil d'État avait admis aussi que des actes administratifs individuels pouvaient bénéficier à des tiers avant leur notification à partir de leur signature (Conseil d'État 19 décembre 1952 Delle Mattei : Sirey 1953 III p. 38).
L'art. 1er du Code civil, modifié par l'Ordonnance nº 2004-164 du 20 février 2004, confirme partiellement cette jurisprudence. Depuis le 1er juin 2004, les actes administratifs dont une loi prévoit la publication au Journal officiel
- « (...) entrent en vigueur à la date qu'ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication. Toutefois, l'entrée en vigueur de celles de leurs dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures.
- En cas d'urgence, entrent en vigueur dès leur publication (...) les actes administratifs pour lesquels le Gouvernement l'ordonne par une disposition spéciale ».
À la question de la publicité, se rattache celle de l'accès aux documents administratifs. Ce problème est réglé par les loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés (modifiée par une Loi n° 2004-801 du 6 août 2004) et du loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, lois qui reconnaissent à tous les administrés un droit de libre accès aux documents administratif de caractère non nominatif et en réservant toutefois certains domaines comme le domaine médical et la défense nationale. En cas de refus de l'administration, les requérants peuvent saisir la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA). Si la CADA rend une décision non satisfaisante, on peut saisir le juge administratif (Conseil d'État 8 avril 1987 Ullmo : Rec. p. 143).
Règles spécifiques à la publication sous forme électronique
La publication du Journal officiel sous forme électronique connaît des règles spécifiques concernant les actes publiés et concernant les effets produits par ces actes.
Les actes publiés sous forme électronique
D'une part, certains actes sont exclus de la publication sous forme électronique, d'autre part, certains actes sont exclusivement publiés sous forme électronique.
Selon l'art. 1er du Code civil, l'obligation de publication ne concerne pas les actes individuels, afin de protéger les personnes de l'utilisation qui pourrait être faite de ses données à caractère personnel. L'art. 4 de l'ordonnance n° 2004-164 du 20 février 2004 relative aux modalités et effets de la publication des lois et de certains actes administratifs prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés définit les actes individuels, notamment relatifs à l'état et à la nationalité des personnes, qui, en l'état des techniques disponibles, ne doivent pas faire l'objet d'une publication sous forme électronique. Le décret n° 2004-459 du 28 mai 2004 fixant les catégories d'actes individuels ne pouvant faire l'objet d'une publication sous forme électronique au Journal officiel de la République française exclut de la publication sous forme électronique les actes suivants :
- Décrets portant changement de nom pris sur le fondement de l'article 61 du code civil ;
- Décrets d'acquisition de la nationalité française pris sur le fondement de l'article 21-14-1 du code civil ;
- Décrets de naturalisation pris sur le fondement de l'article 21-15 du code civil ;
- Décrets de réintégration dans la nationalité française pris sur le fondement de l'article 24-1 du code civil ;
- Décrets de perte de la nationalité française pris sur le fondement des articles 23-4, 23-7 ou 23-8 du code civil ;
- Décrets de déchéance de la nationalité française pris sur le fondement de l'article 25 du code civil ;
- Décrets de francisation de nom ou de prénoms, ou d'attribution de prénom pris sur le fondement de la loi n° 72-964 du 25 octobre 1972 susvisée ;
- Décrets rapportant un décret appartenant à une des catégories précédentes.
- Les demandes de changement de nom ;
- Les annonces judiciaires et légales mentionnant les condamnations pénales.
Sont publiés exclusivement sous forme électronique les « décisions individuelles et l'ensemble des autres actes dépourvus de valeur réglementaire, y compris les avis et propositions, dont une loi ou un décret prévoit la publication au Journal officiel » lorsqu'ils relèvent :
- de l'organisation administrative de l'État, en particulier de l'organisation des administrations centrales, de l'organisation des services déconcentrés de l'État, ainsi que ceux des délégations de signature au sein des services de l'État et de ses établissements publics ;
- des fonctionnaires et agents publics, des magistrats et des militaires ;
- Le budget de l'État, notamment les décrets et arrêtés portant répartition, ouverture, annulation, virement ou transfert de crédits, ceux relatifs aux fonds de concours, aux postes comptables du Trésor public et aux régies d'avances, ainsi que les instructions budgétaires et comptables ».
Sont également publiés exclusivement sous forme électronique les décisions individuelles et l'ensemble des autres actes dépourvus de valeur réglementaire, y compris les avis et propositions, dont une loi ou un décret prévoit la publication au Journal officiel émanant d'autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes dotées de la personnalité morale, autres que ceux qui intéressent la généralité des citoyens (art. 2 décret n° 2004-617 du 29 juin 2004 relatif aux modalités et effets de la publication sous forme électronique de certains actes administratifs au Journal officiel de la République française).
Les effets des actes publiés sous forme électronique
Le principe est posé par l'art. 1er du Code civil : lorsqu'ils sont publiés au Journal officiel de la République française, les actes administratifs entrent en vigueur à la date qu'ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication. Il est prévu que la seule publication au Journal officiel sous forme électronique de certains actes les fasse entrer en vigueur et fasse courir les délais de recours envers les tiers.
La publication sous forme électronique de certains acte suffit à leur entrée en vigueur. L'art. 1er du décret n° 2004-617 du 29 juin 2004 relatif aux modalités et effets de la publication sous forme électronique de certains actes administratifs au Journal officiel de la République française prévoit ce régime pour :
- Les actes réglementaires, autres que les ordonnances, qui sont relatifs à l'organisation administrative de l'État, en particulier les décrets se rapportant à l'organisation des administrations centrales, les actes relatifs à l'organisation des services déconcentrés de l'État, ainsi que ceux portant délégation de signature au sein des services de l'État et de ses établissements publics ;
- Les actes réglementaires, autres que les ordonnances, relatifs aux fonctionnaires et agents publics, aux magistrats et aux militaires ;
- Les actes réglementaires, autres que les ordonnances, relatifs au budget de l'État, notamment les décrets et arrêtés portant répartition, ouverture, annulation, virement ou transfert de crédits, ceux relatifs aux fonds de concours, aux postes comptables du Trésor public et aux régies d'avances, ainsi que les instructions budgétaires et comptables ;
- Les décisions individuelles prises par le ministre chargé de l'économie dans le domaine de la concurrence ;
- Les actes réglementaires des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes dotées de la personnalité morale, autres que ceux qui intéressent la généralité des citoyens.
La publication sous forme électronique de certaines décisions individuelles fait courir les délais de recours. . L'art. R 421-1 du Code de justice administrative prévoit :
- « La publication, sous forme électronique, au Journal officiel de la République française fait courir le délai du recours ouvert aux tiers contre les décisions individuelles :
- Relatives au recrutement et à la situation des fonctionnaires et agents publics, des magistrats ou des militaires ;
- Concernant la désignation, soit par voie d'élection, soit par nomination, des membres des organismes consultatifs mentionnés à l'article 12 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
- Prises par le ministre chargé de l'économie dans le domaine de la concurrence ;
- Emanant d'autorités administratives indépendantes ou d'autorités publiques indépendantes dotées de la personnalité morale ».
Liens externes
- loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés
- loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public
- Loi n° 2004-801 du 6 août 2004 relative à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés
- Conseil d'État 8 avril 1987 Ullmo : Rec. p. 143
- Site du Journal officiel authentique
- Sur la publication d’acte administratif sur Intranet : computation des délais de recours, Stéphane Cottin, 2006
- Dématérialisation totale de certains actes, rafj.org, 30 juin 2004
- Censure du Journal Officiel !..., M. LOUIS LEVY, jeudi 12 janvier 2006