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Jeux de hasard sur l'internet (fr)

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Les jeux de cercle, paris sportifs ou autres loteries - que l’on peut regrouper sous le nom générique de jeux de hasard - présentent nombre de facettes sombres qui, indubitablement, obligent à les réglementer ou, a minima, à les réguler fortement. Ainsi, les risques de dépendance s’y rattachant se révèlent élevés pour une marge forte des utilisateurs et le crime organisé s‘y implante ardemment ; mais ce marché de services - puisque c’en est un - est également une source de revenus substantielle pour les États qui le taxent[1]. À l’instar des législations en vigueur sur le tabac, il n’est donc pas étrange de voir ces pratiques autorisées mais fortement encadrées et imposées, sans respect du principe communautaire de libre prestation de services.

Depuis une dizaine d’années, les jeux de hasard se développent plus spécifiquement sur les réseaux de communication au public en ligne - soit l'internet - remettant en cause les régimes juridiques jusqu’alors en place dans les États membres de l‘Union européenne. C’est pourquoi il est aujourd’hui opportun de trancher, à l’aune des recommandations de la Commission européenne et de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, entre le maintien d’un certain protectionnisme et une libéralisation plus intense, cette dernière devenant de plus en plus inéluctable du fait de l’apparition d’opérateurs en ligne proposant des services de jeux depuis les Bermudes ou - pire - depuis Malte ou Chypre, pays membres depuis 2004 et donc assujettis au droit européen. Les conséquences économiques et fiscales afférentes aux réponses apportées se révèlent évidemment substantielles.

Cette problématique revêt donc une portée et une étendue communautaires avant de présenter une dimension nationale. C’est pourquoi il s’agira de s’épancher sur ces premières avant de traiter le cas français, notamment à travers la récente loi du 12 mai 2010 sur les jeux de hasard en ligne[2].

Sommaire

Partie 1 / Du point de vue européen, une libéralisation des jeux de hasard en ligne à limiter pour des motifs d’intérêt général.

Chapitre 1 / La libéralisation de la jurisprudence de la CJCE à travers les principes de cohérence et de non-discrimination.

Section 1 / Considérations générales.

A / L’applicabilité aux jeux de hasard des dispositions relatives aux services.

En droit de l' Union européenne, les textes applicables aux services sont les articles 56 et suivants du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (ci-après TFUE, anciennement les articles 49 et suivants du traité instituant la Communauté européenne). Le service y est défini comme une prestation fournie contre rémunération, qu'elle soit ou non temporaire, et y est exigée la suppression de toutes restrictions à ces services lorsqu'elles seraient de nature à prohiber, gêner ou à rendre moins attrayantes les activités d'un prestataire établi dans un autre État membre[3]. Par ailleurs, l'article 52 du Traité instituant la Communauté Européenne (TCE) prévoyait la libéralisation des services par voie de directives. Ainsi, deux d’entre elles furent adoptées en 2000 et 2006 afin de réglementer « le commerce électronique » et « les services »[4] dans le marché intérieur. Cependant, ces deux textes ne disent mot des jeux de hasard - ceux-ci consistant en des aspects trop particuliers pour être traités - et la clause du «  marché intérieur » qui y est établie, permettant à un prestataire de choisir de se conformer à la loi d‘origine du service, ne peut donc pas s‘appliquer.

Or, selon une jurisprudence constante et inamovible de la Cour de justice de l'Union européenne (ancienne Cour de justice des Communautés européennes, ci-après CJUE ou CJCE), les jeux d’argent doivent bel et bien être assimilés à des prestations de services et relever de l’article 56 du TFUE, lequel traite du principe de liberté s’y rattachant[5]. Il revenait donc à la Cour d’établir le cadre juridique applicable au niveau européen à ces services particuliers en jugeant de la conformité des réglementations nationales par rapport aux articles 56 et suivants, soit à la libre prestation de services, mais aussi au principe de libre établissement.

B / La jurisprudence classique : des possibles restrictions à la libre prestation de service.

À l’instar de toute liberté, les articles 51 et 52 du TFUE avertissent qu’il ne saurait être question d’absolutisme et que des limites peuvent y être assorties. En conséquent, « l’exercice de l’ autorité publique » ainsi que « des raisons d’ ordre public » sont susceptibles de justifier des réglementations portant atteinte aux principes.

La Cour de Justice joua un rôle considérable dans l’élaboration de ces entraves en établissant sa théorie des raisons impérieuses d'intérêt général», tout d’abord au sujet de la libre circulation des marchandises [6], et aujourd’hui à propos des contentieux sur la libre prestation de services. Ces dernières, à condition d’être proportionnées et de ne pas être soutenues par des motivations économiques, fournissent aux États un cadre jurisprudentiel au sein duquel il est possible de restreindre fortement l’exercice de certaines libertés, au nombre desquelles celle rattachée aux prestations de service.

Dès 1994, la CJCE conclut que la prévention de la criminalité et la lutte contre la fraude justifiaient de mettre un frein au dit principe [7]. Ainsi, dans cette affaire la « protection des consommateurs et de l'ordre social » s’avérait être un motif suffisant. En outre, la théorie des raisons impérieuses d’intérêt général permit de justifier qu’un État membre interdisse toute loterie sur son territoire, réservasse le droit d’exploiter les jeux de hasard à un seul organisme ou instituasse un régime d’autorisation préalable afin qu’une pluralité d’opérateurs proposent de tels jeux [8].

Section 2 / Une libéralisation de la jurisprudence en deux temps.

A / L’arrêt Gambelli du 6 novembre 2003 : le premier pas vers la libéralisation.

L’arrêt Gambelli du 6 novembre 2003 [9] constitue une fracture dans cette tendance protectionniste. Ici, l’Etat italien reprochait à un gérant de centres de transmission de données par Internet de collecter des paris sportifs sur le sol romain au profit de bookmakers anglais, ce qui enfreignait la réglementation soumettant de telles opérations à l’attribution d’une autorisation de police administrative. Cependant, tant l'activité du bookmaker en Angleterre que celle de la collecte et de la transmission de données stricto sensu en Italie étaient respectueuses des législations locales. L’ambiguïté provenait en premier lieu de la divergence entre les législations nationales sur le jeu et de l’opposition de celles-ci à travers un réseau informatique. Dès lors, la législation italienne empêchait un prestataire de services anglais d'exercer et de s’établir en Italie. C’est pourquoi le tribunal italien demandait à la CJCE si la législation en cause pouvait être conforme au droit d'établissement et à la liberté de prestation de services.

La Cour répondit que la réglementation italienne limitant, sous peine de sanctions pénales, l’exercice d’activités liées à l’argent et au hasard constituait une atteinte auxdits principes inscrits aux articles 43 et 49 du TCE. Certes, elle admettait que la réduction des occasions de jouer pouvait constituer un motif pertinent et suffisent, mais elle infligeait un camouflet à l’Italie en raison du fait que, parallèlement, une politique de forte expansion des jeux était conduite : « dans la mesure où les autorités d'un État membre incitent et encouragent les consommateurs à participer aux loteries, jeux de hasard ou aux jeux de paris afin que le Trésor public en retire des bénéfices sur le plan financier, les autorités de cet État ne sauraient invoquer l'ordre public social tenant à la nécessité de réduire les occasions de jeu pour justifier des mesures telles que celles au principal ». Cette attitude schizophrénique devait être condamnée. Enfin, les sanctions pénales étaient exagérément élevées et donc disproportionnées au regard du but affiché, tandis que les concessions de jeux étaient réservées aux opérateurs locaux.

Protection des consommateurs et accroissement des recettes publiques étaient donc inconciliables et cette législation incohérente et discriminatoire aux yeux des juges européens.

B / L’arrêt Placanica du 6 mars 2007 : une libéralisation confortée [10].

Plus récemment, dans l’arrêt Placanica du 6 mars 2007, la Cour approfondissait son résonnement en considérant cette fois que ces atteintes restaient justifiées alors même que, parallèlement, les pouvoirs publics poursuivaient une politique expansive dans le domaine des jeux de hasard (en autorisant leur publicité ou en permettant à de nouvelles formes de jeux de voir le jour). Ces actions permettaient, au sens des juges communautaires, de détourner les amateurs des formes de jeu illégales, notamment sur Internet [11].

Cependant, en l’espèce la législation italienne écartait du marché les sociétés de capitaux et un bookmaker anglais - qui n’avait pu participer à l’appel d'offres - fut condamné pour avoir contourné l‘interdiction en opérant à travers un écran constitué par des centres de transmission gérés par des indépendants [12]. La Cour estima que cette discrimination était illicite car allant au-delà de ce qui était nécessaire pour atteindre l’objectif invoqué et offrit la possibilité à ces opérateurs d’exercer leur activité nonobstant l’absence de concession légale, sans possibilité de les placer sous le coup des infractions pénales prévues.

On eut pu penser qu’il s’agissait là d’une [[jurisprudence (eu)[jurisprudence communautaire]] bien établie [13]. Si un système relativement ouvert était condamné pour sa trop grande sélectivité, il aurait dû en être de même, a fortiori, pour les systèmes monopolistiques. Aussi la Commission européenne le crut et s’empressa, le 27 juin 2007, de mettre en demeure plusieurs états - dont la France - de « prendre des mesures pour lever les obstacles à la prestation de services de paris sportifs » [14]. En réalité, cette voie vers la libéralisation ne fut plus empruntée par la CJCE que modérément, comme en témoignent les arrêts les plus récents de la Cour.

Chapitre 2 / Le protectionnisme de la jurisprudence de la CJCE à travers le principe de protection des consommateurs et l’exclusion du principe de reconnaissance mutuelle.

Section 1 / L’arrêt Liga portuguesa de futebol profissional du 8 septembre 2009 : une réorientation de la jurisprudence consacrant une libéralisation limitée [15].

A / Des objectifs légitimes de lutte contre la criminalité et de protection des consommateurs.

Par l’arrêt Liga portuguesa de futebol profissional du 8 septembre 2009 [16], la haute Cour européenne établit les limites à cette libéralisation de sa jurisprudence entrevue à l’occasion des précédentes affaires intéressant l’Italie [17].

En l’espèce, était en cause la réglementation portugaise. Celle-ci prévoit en effet que les jeux de hasard et autres paris sportifs font l’objet d’un monopole attribué par l’État à Santa Casa qui est une « personne morale d’utilité publique administrative » et possède un pouvoir de sanction lui permettant de prononcer des amendes à l’encontre d’éventuels intervenants contrevenants [18]. Or, il s’avérait que la société de paris en ligne Bwin - dont les serveurs sont installés à Gibraltar et le siège social en Autriche - avait passé un accord avec la ligue portugaise de football, tant et si bien que le championnat s’appelait alors « Bwin league ». Surtout, ledit accord réservait à l’opérateur le droit de procéder à des opérations de paris en ligne portant sur ce championnat, stipulation totalement illégale par rapport au monopole institué en faveur de Santa Casa. Le contentieux qui naquit de cette situation amena la juridiction portugaise à saisir la CJCE d’une demande de décision préjudicielle.

La Cour de Luxembourg devait donc se prononcer quant à la conformité de la réglementation portugaise par rapport au principe de libre prestation des services posé alors par l’article 49 du traité CE. La législation en cause constituant incontestablement une restriction audit principe, il fallait qu’elle réponde aux deux question classiques de la non discrimination et de la proportionnalité. Après avoir relevé que l’objectif de lutte contre la criminalité et de protection des consommateurs était légitime - conformément à sa jurisprudence antérieure - la Cour admettait que le fait d’octroyer des droits exclusifs à un opérateur relevant directement des pouvoirs publics pouvait « permettre de canaliser l'exploitation des jeux dans un circuit contrôlé et être considéré comme apte à protéger les consommateurs ».

B / L’exclusion du principe de reconnaissance mutuelle.

Puis, elle considérait qu’il est permis à un État de s’opposer à un opérateur privé qui propose légalement, dans un autre État membre, des services similaires à ceux objet du monopole, malgré les conditions et contrôles existant déjà dans ce pays. Selon la Cour, cela n’équivaut pas à une « garantie suffisante de protection des consommateurs nationaux contre les risques de fraude et de criminalité, eu égard aux difficultés susceptibles d'être rencontrées, dans un tel contexte, par les autorités de l'Etat membre d'établissement pour évaluer les qualités et la probité professionnelles des opérateurs ». En vertu de cet arrêt, ce type d’opérateur devrait donc s’établir dans tous les pays au sein desquels il souhaiterait proposer ses services, le principe de reconnaissance mutuelle ne pouvant valoir pour les jeux de hasard, a fortiori lorsque développés en ligne.

Jusqu’à lors, la Cour ne s’était jamais prononcée sur ce principe qui dans le marché intérieur, joue un rôle cardinal en obligeant un État à prendre acte de l‘existence de contrôles effectués par un autre membre de l’Union sur une marchandise ou une activité. Un opérateur autorisé dans un État est donc susceptible, par l‘effet de cette autorisation, d’offrir ses services aux consommateurs résidant dans les autres États. Mais, la prise en compte des dangers pour la santé publique, de deux liés au développement du crime organisé, de l’absence d‘harmonisation communautaire des paris sur Internet et de la diversité des législations nationales empêchait l’application de ce principe. En lieu et place, pouvait entrer en jeu le principe de subsidiarité qui permet à chacun de maintenir le standard de protection qui lui semble le plus adéquat et donc de disposer d‘un large pouvoir d‘appréciation afin d’encadrer les jeux de hasard, justifiant les disparités de législations en la matière [19].

En en décidant ainsi, la Cour s’opposait à la Commission européenne qui avait, dans un avis motivé en date du 27 juin 2007, déploré que la France puisse inclure dans la catégorie des opérateurs illégaux ceux autorisés dans d’autres États membres. En refusant son application sur ce marché particulier, elle confortait le sentiment portugais selon lequel cela ne pouvait suffire face à des États négligents et, surtout, précisait que sa prise de position se justifiait fortement par des risques se développant exponentiellement an raison de la prise de pouvoir d’Internet.

C / Des risque liés au développement de la communication au public en ligne.

C’est sur ce point que l’analyse de la Cour était la plus novatrice, car pour la première fois elle traitait des jeux en ligne spécifiquement et relevait « des particularités liées à l'offre de jeux de hasard par Internet ». Les conclusions de l'avocat général Yves Bot précisaient ainsi qu'il est « difficile pour les consommateurs les plus fragiles et les mineurs de se poser des limites du fait du caractère virtuel de ces opérateurs », ce qui amenait la Cour à adopter une vision plus restrictive que pour les opérateurs traditionnels de jeux opérant sur un espace physique inévitablement restreint. Elle précisait donc que sa position se justifiait par le « manque de contact direct entre le consommateur et l'opérateur » avant d'affirmer que « les jeux de hasard accessibles par l' Internet comportent des risques de nature différente et d'une importance accrue par rapport aux marchés traditionnels de tels jeux en ce qui concerne d'éventuelles fraudes commises par les opérateurs contre les consommateurs ». En conclusion, la Cour de justice considérait donc que « la restriction en cause au principal peut, eu égard aux particularités liées à l'offre de jeux de hasard par Internet, être considérée comme justifiée par l'objectif de lutte contre la fraude et la criminalité ».

Cette décision était attendue dans la plupart des pays européens puisque le modèle portugais correspondait à celui en vigueur chez la plupart d’entre eux. Elle mettait fin aux espoirs de ceux qui imaginaient que la Cour viendrait au soutien d’une libéralisation accrue de ce marché aux revenus substantiels et elle devait amener les opérateurs désireux de concurrencer les prestataires titulaires de droits exclusifs à faire évoluer sensiblement leur organisation économique.

Section 2 / La convergence entre les jurisprudences de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et de la CJUE, l’affirmation d‘une impossible libéralisation.

En retenant un raisonnement similaire à celui de la CJUE, l’OMC renforce la sensation que les jeux de hasard sont un domaine trop spécifique et surtout dangereux pour laisser des principes de liberté les gouverner. En témoigne cet arrêt que rendit l’organe d’appel de l’institution supranationale le 7 avril 2005 [20]. Dans cette affaire, Antigua - État indépendant proche de Puerto Rico - se plaignait du fait que les États-Unis interdissent à des opérateurs exploitant des sites de paris et de jeux en ligne de proposer leurs services aux résidents américains. Était mis en avant l’Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS), mais l’OMC estima que cette règlementation était nécessaire eu égard aux risques patents de blanchiment d’argent afférents à ces activités, mais également afin de protéger les mineurs. Cependant, était relevé que ces dispositions s’appliquaient différemment selon que les prestataires étaient nationaux ou étrangers, ce qui enfreignait les conventions de l’organisation. Ce raisonnement est à peu de choses près identique à celui adopté par la CJUE.

Section 3 / L’état actuel de la jurisprudence de la CJUE, la confirmation des monopoles.

À l’occasion de deux arrêts rendus le 3 juin 2010, la CJUE reprit la solution de l’arrêt « Liga Portuguesa de Futebol Profissional », confortant le cadre juridique en place [21]. Tout d’abord, dans une affaire dite « Ladbrokes » [22], la question de la cohérence de la réglementation - en l’occurrence néerlandaise - se posa à nouveau aux juges de l’Union. En effet, cette législation permet aux opérateurs profitant d’une autorisation exclusive afin d’organiser des jeux de hasard de développer de nouveaux concepts et de recourir à la publicité. La Cour répond qu’il s’agit d’une « politique d’expansion contrôlée » qui a pour ambition de détourner les joueurs des activités clandestines et de les orienter vers une offre légale et contrôlée. C’est pourquoi rendre attrayants ces jeux de hasard n’est pas antinomique de l’objectif de protection des consommateurs.

Dans la seconde affaire, dite « Sporting Exchange » [23], est confirmée la possibilité de recourir au monopole sur le marché des jeux de hasard, malgré le principe de libre prestation de services. En résulte que les États sont en droit de s’opposer à l’activité de tous opérateurs nationaux, mais aussi de tout État membre, qui proposeraient, par Internet, des services relevant de ce régime. La Cour va même loin dans cette tendance au protectionnisme en jugeant que les principes d’égalité de traitement et de transparence, qui découlent de la libre prestation de services, ne sauraient être mis en œuvre dès lors que l’opérateur unique est public et relève directement d’une surveillance étroite et directe de l’État, ou même s’il est privé, mais à condition que les pouvoirs publics soient en mesure d’exercer un tel contrôle.

Puis, la Cour poursuivit sur cette route en jugeant conforme la législation suédoise, le 8 juillet 2010 [24]. Cette dernière prohibe toute promotion des jeux de hasard en ligne par des opérateurs privés établis dans d’autres États membres de l’Union et réserve le droit d‘exploiter ces jeux à ses nationaux sitôt qu‘ils poursuivent des objectifs d‘utilité publique ou d‘intérêt général au sens de la loi. La Cour explique qu’il ne saurait être permis que des profits émanent de « l’exploitation d’un fléau social ou de la faiblesse des joueurs et de leur infortune » et qu’en conséquent le principe de libre prestation de service peut tout à fait être limité par des raisons d’ordre moral ou culturel.

Enfin, la CJUE rendit deux arrêts plus nuancés, sur questions préjudicielles, les 8 et 9 septembre 2010, précisant sa jurisprudence au sujet des restrictions apportées à l'exercice d'une activité de jeux de hasard et de paris et rappelant le besoin de respecter le principe de cohérence [25]. Dans le premier, elle explique que « lorsque a été institué un monopole public régional en matière de paris sur les compétitions sportives et de loteries poursuivant un objectif de prévention de l'incitation à des dépenses excessives liées au jeu et de lutte contre l'assuétude à celui-ci et qu'une juridiction nationale constate, tout à la fois que :

  • d'autres types de jeux de hasard peuvent être exploités par des opérateurs privés bénéficiant d'une autorisation,
  • à l'égard d'autres types de jeux de hasard ne relevant pas dudit monopole et présentant en outre un potentiel de risque d'assuétude supérieur aux jeux soumis à ce monopole, les autorités compétentes mènent des politiques d'expansion de l'offre de nature à développer et à stimuler les activités de jeu, notamment en vue de maximiser les recettes provenant de celles-ci, ladite juridiction nationale peut légitimement être amenée à considérer qu'un tel monopole n'est pas propre à garantir la réalisation de l'objectif en vue duquel il a été institué en contribuant à réduire les occasions de jeu et à limiter les activités dans ce domaine d'une manière cohérente et systématique ».

La Cour rappelle donc le besoin de cohérence - à l’instar de ce qu’elle fit à l’occasion de l’affaire Gambelli de 2003 [26] - mais accepte néanmoins l’organisation du marché sous l’égide d’un principe d’autorisation préalable dès lors que l’administration se réfère à des critères « objectifs, non discriminatoires et connus à l'avance, de manière à encadrer l'exercice du pouvoir d'appréciation des autorités nationales afin que celui-ci ne puisse être utilisé de manière arbitraire », et à condition que ce régime soit justifié par le besoin « de prévenir des dépenses excessives liées au jeu, de lutter contre l'assuétude à celui-ci et de protéger les jeunes ».

Dans le second cas, loin de remettre en cause ces précédents développements, la CJUE précise qu’en cas d’ouverture du marché à différents opérateurs, la procédure doit se faire à travers une mise en concurrence respectueuse des principes de transparence, d’égalité de traitement et de non discrimination, lesquels avaient été bafoués en l‘espèce.

Bien qu’il soit rappelé que la poursuite d’objectifs d’intérêt général doit se faire au moyen d’une réglementation proportionnée au but poursuivi, c'est-à-dire répondant au souci de l'atteindre de manière « cohérente et systématique » [27], l’heure n’est donc pas à la libéralisation des jeux de hasard au sens de la CJUE. Pourtant, la France est passée récemment d’un système totalement monopolistique à un système monopolistique pour les jeux physiques et oligopolistique dans le cadre de l’offre de service sur Internet.

Section 4 / Entre les différents États membres, « une convergence judiciaire et des divergences législatives » [28].

Si les juges se conforment et s’alignent dans leur grande majorité sur la position de la CJUE, en revanche les évolutions législatives se révèlent beaucoup plus lentes à se dessiner. À l’heure actuelle, coexistent au sein de l’Union européenne - notamment du fait de l’élargissement de 2004 - des pays aux législations sur les jeux de hasard étroites et des pays ultralibéraux tels que Malte aux cadres juridiques plus que souples.

L’institut suisse de droit comparé mena, à la demande de la Commission, une étude des régimes juridiques des jeux de hasard dans l’Union européenne. Elle conclut que tous les États membres soumettent le secteur à des réglementations visant à sauvegarder des objectifs d’intérêt général. Néanmoins, elle constata que ces normes varient considérablement d’un pays à un autre, entraînant des obstacles à la libre prestation de services insurmontables. Par exemple, au Royaume Uni - où règnent les bookmakers - cette activité est régie par une norme particulière : le Gambling Act du 7 avril 2005. Cette dernière libéralise dans une certaine mesure le marché des jeux en soumettant l’entrée sur ledit marché à l’obtention d’une licence délivrée par la Gambling Commission. Mais il n’en demeure pas moins que la réglementation en la matière est stricte et précise dans un pays pourtant réputé pour sa culture des paris et jeux d‘argent en tous genres. Comme par ailleurs l’Union européenne en général et la Commission européenne en particulier se refusent à aborder le sujet mis à part dans des cas d‘espèces, se justifiant à travers « la spécificité de ces activités qui entraînent de la part des États membres la mise en oeuvre de politiques touchant à l'ordre public et visant à protéger les consommateurs » [29], n’existe aucune réglementation commune.

Le cas français ne manque pas de poser problème.

Partie 2 / Du point de vue français, une libéralisation des jeux de hasard limitée par des « motifs d’intérêt financier ».

Chapitre 1 / Avant la loi du 12 mai 2010, un cadre stricte profitant à l’objectif inavoué d’un État croupier.

Section 1 / L’historique du cadre juridique des jeux de hasard en France.

La France hérite de l’histoire un des systèmes les plus restrictifs d’Europe. Ainsi, depuis la loi du 21 mai 1836 [30], étaient interdits tous les jeux de hasard et d’argent, mis à part pour la Française des Jeux (ci-après FDJ) à qui était octroyé un monopole. Lentement, émergèrent quelques dérogations à cette situation. Ainsi le Pari Mutuel Urbain (PMU) se vit conféré un monopole sur les courses hippiques à l’occasion de la loi du 2 juin 1891 [31], puis la loi du 15 juin 1907 [32] vint permettre l’ouverture de casinos, mais en les encadrant très étroitement par des conditions liées aux jeux autorisés et surtout aux lieus autorisés (stations thermales, balnéaires ou climatiques). Plus récemment, la loi du 12 juillet 1983 [33] fut rédigée afin de réprimer les jeux de hasard ouverts au public et notamment sanctionner la tenue de « maisons de jeux », c’est-à-dire d’établissements fixes dans lesquels ces pratiques sont habituelles et permanentes. Enfin, la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l ‘économie numérique [34] dispose que les activités de jeux d’argent en ligne ne s’exercent pas librement sur le territoire national, bien qu‘elle consacre la liberté du commerce électronique. Ainsi sur Internet, espace de libertés s’il en est, le caractère particulier des jeux de hasard est confirmé

Le régime juridique en cause était donc le fruit de lois anciennes et devenait forcément archaïque à l’heure de « la société de l’information ». C’est pourquoi la loi du 12 mai 2010 revêt une importance singulière. Il sera tant d’y revenir in fine de ces développements.

Section 2 / Une source de revenus significative pour le budget national [35].

Le rapport remis en 2006 par le sénateur François Trucy évoquait un « État croupier » [36]. Cette appellation témoigne de la place substantielle occupée par les recettes liées aux jeux de hasard et d’argent dans le budget du ministère des finances français. Il n’est donc pas étonnant que le taux d’imposition à pratiquer ait été au centre des débats lors de la genèse de la loi du 12 mai 2010 puisque d‘une part il s‘agissait pour l‘État de préserver ses ressources mais, d‘autre part, un taux trop élevé posait des problèmes en terme de compétitivité par rapport aux taux de redistribution.

Ainsi, à l’instar de la politique italienne évoquée précédemment, on relève une attitude ambivalente des pouvoirs publics qui d’un côté justifient les monopoles et les réglementations très strictes par le besoin de protection des usagers de ces services particuliers afférents à des activités perçues historiquement comme immorales, et de l’autre côté mènent une politique de développement très active des offres de la FDJ - dont l’État est l’actionnaire majoritaire - afin de percevoir des recettes croissantes sur le produit de ces jeux. Dès lors, à l’image des réponses données par la CJCE dans les affaires Gambelli et Placanica (v. supra), on peut se demander légitimement si ce régime juridique visant à réduire l’offre et donc les risques lui étant liés grâce à un axe prohibition-monopole présente bien les caractères de cohérence et de systématicité exigés pat la haute Cour.

Section 3 / La jurisprudence française en la matière : chaotique et indéfinie.

A / Le Conseil d’État et le renvoi à la CJCE.

Les hautes juridictions nationales durent se prononcer à quelques reprises sur la compatibilité de la législation en matière de jeux et paris avec le principe communautaire de libre prestation de services [37].

Le Conseil d’État, à propos des lois régissant les jeux de hasard et le PMU en particulier, estima dans un premier temps - le 15 mai 2000 - qu’un décret contesté était respectueux des règles supranationales de libre circulation des services dans la mesure où les dispositions qu’il prévoyait s’avéraient tout à la fois nécessaires et proportionnées. En revanche, il saisit en interprétation préjudicielle la CJCE le 9 mai 2008 [38] sur le point de savoir si le monopole étatique en matière de jeux et paris en ligne était ou non conforme au droit communautaire. Si le juge européen n’a pas encore communiqué sa réponse, le législateur s’est permis d’anticiper largement au moyen de la loi du 12 mai 2010.

B / La chambre criminelle de la Cour de cassation et l‘indifférence à la CJCE.

De son côté, la chambre criminelle de la Cour de cassation donna à deux reprises son point de vue sur cette problématique. Tout d’abord, le 22 mai 1997, elle confirma la condamnation d’un bookmaker qui avait organisé des concours de pronostics sur les résultats du Tour de France 1989 alors que la loi du 21 mai 1836 subcitée considère que doivent être assimilées à des loteries interdites « toutes opérations offertes au public, sous quelque dénomination que ce soit, pour faire naître l'espérance d'un gain qui serait acquis par la voie du sort ». Ladite chambre se fonda sur les mêmes arguments que la Cour d’appel parisienne qui s’était prononcée en second ressort, à savoir qu’en l’absence d’harmonisation européenne les restrictions à la libre prestation de services demeuraient permises et laissées à la discrétion des législateurs nationaux, mais également que l’absence de garanties suffisantes de la part d’entreprises basées à l’étranger motivaient un contrôle strict.

Plus récemment, dans un arrêt du 18 novembre 2008 [39], les juges du droit durent se placer vis-à-vis de la loi du 12 juillet 1983 relative aux jeux de hasard et de sa conformité aux principes de libre établissement et de libre prestations de services. Dans cette affaire, un commerçant avait été condamné pour avoir placé des appareils de jeux de hasard en des lieux publics. Ne faisant pas droit au pourvoi qui suggérait la saisine de la CJCE en interprétation préjudicielle, ils répondaient que « les poursuites avaient été engagées sur le fondement d'un texte de droit interne à l'encontre d'un ressortissant de nationalité algérienne agissant sur le territoire national » et que la question « ne portait pas sur l‘interprétation des dispositions communautaires ». Ils eurent pu reformuler ladite question et renvoyer aux juges communautaires, mais s’y refusèrent. Pourtant, aurait pu être opportun de rechercher si les restrictions contribuaient « à limiter les activités de paris d'une manière cohérente et systématique » comme la CJCE l’avait demandé au moyen de son arrêt Gambelli du 6 novembre 2003 [40].

Le Conseil d’État s’était interrogé sur le point de savoir si le monopoles de la FDJ ou du PMU sur les jeux en ligne étaient bien nécessaires alors qu’était menée parallèlement une politique de développement commercial dynamique a priori antinomique des objectifs affichés de lutte contre la dépendance et contre la criminalité. Finalement, seul la haute juridiction administrative se permit de saisir la CJCE, et à une seule reprise. À l’inverse de l’Italie ou du Portugal, les juridictions françaises estiment cela inutile alors qu’il s’agit pourtant de considérations éminemment européennes. La chambre commerciale ne déroge pas à cette règle. Mais elle se révèle beaucoup plus attentive à la jurisprudence communautaire.

C / La chambre commerciale de la Cour de cassation et les contrariétés de jurisprudences.

À l’occasion d’un arrêt très commenté rendu le 10 juillet 2007 [41] - dans une affaire opposant le PMU à la société maltaise Zeturf - la chambre commerciale se conforma à la position de la CJCE, ce qui aboutit à des contradictions par rapport à la jurisprudence de la chambre criminelle [42]. En l’espèce, l’opérateur permettait à ses internautes de parier sur les courses hippiques françaises. Saisi par le PMU, le TGI de Paris ordonna en référé, le 8 juillet 2005 [43], la cessation immédiate de cette activité portant atteinte au monopole du PMU [44]. Cette décision fut confirmée en appel le 4 janvier 2006 [45] tandis que le juge maltais refusait de faire exécuter la décision française considérant que le règlement sur la reconnaissance et l’exécution des décisions judiciaires </ref> règlement (CE) 44/2001 du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale </ref> n’avait pas ici vocation à s’appliquer [46] ; ainsi Zeturf poursuivait son activité.

La Cour de cassation donna raison à la société de paris en ligne, censurant l’arrêt d’appel, au motif que celui-ci ne suivait pas l’interprétation donnée par la CJCE du principe de libre prestation de service dans ses arrêts Gambelli et Placanica. Ainsi « une restriction à la libre prestation de services (...) peut être justifiée soit au regard de l'objectif consistant à prévenir l'exploitation des jeux de hasard à des fins criminelles ou frauduleuses en les canalisant dans des circuits contrôlables, soit au regard de l'objectif tenant à la réduction des occasions de jeux », mais à condition de vérifier que « les autorités nationales n’adoptent pas une politique expansive dans le secteur des jeux afin d'augmenter les recettes du trésor public », ce que la cour d'appel avait omis de faire. Les juges du droit rappellent donc que la législation en cause doit réduire les occasions de jeu d’une manière cohérente et systématique. En outre, ils ajoutent que « la libre prestation de services ne peut être limitée que par des réglementations justifiées par des raisons impérieuses d‘intérêt général et s‘appliquant à toute personne ou entreprise exerçant une activité sur le territoire de l‘État de destination de la prestation de services, uniquement dans la mesure où cet intérêt n‘est pas sauvegardé par les règles auxquelles le prestataire est soumis dans l‘État membre où il est établi, de sorte que les autorités de l‘État de destination de la prestation de services doivent prendre en considération les contrôles et vérifications déjà effectuées par l‘État d‘origine de celle-ci ». Ils appliquent donc le principe de reconnaissance mutuelle, lequel sera plus tard écarté par la CJCE - donnant rétrospectivement raison à la chambre criminelle - à l’occasion de son arrêt « Liga Portuguesa de futebol » auparavant étudié.

Si les vues des chambres commerciale et criminelle semblent diverger, cette impression s’explique par le fait que l’une accepte d’analyser le droit français à l’aune de la jurisprudence de la CJCE quand l’autre s’y refuse. Ainsi, dans un arrêt de juin 2009, la chambre criminelle persiste en estimant que la législation nationale s’avère parfaitement conforme aux exigences communautaires.

Chapitre 2 / Après la loi du 12 mai 2010, un cadre juridique nouveau mais toujours conforme à l’objectif inavoué d’un État croupier.

Section 1 / Le contexte.

A / La pression de la Commission européenne.

La loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance [47] aggravait fortement les sanctions dans le domaine des jeux. Ainsi, risquait 30 000 euros d’amende quiconque produisait sur Internet quelque publicité en faveur de jeux de hasard, paris sportifs ou hippiques illégaux. Par ailleurs, était modifiée la LCEN du 21 juin 2004 par l’insertion à son article 6 d’une disposition prévoyant que les hébergeurs et fournisseurs d’accès aux services de communication au public en ligne devaient désormais mettre en place un dispositif permettant d’avertir les internautes des risques encourus en cas de violation de la loi et de tenir une liste des sites non autorisés par les autorités compétentes.

Ce dispositif en réalité permettait peut-être de prévenir quelque peu les risques, mais il permettait surtout de renforcer davantage l’emprise de la FDJ et les recettes de l’État, attitude totalement à contre courant des attentes de la Commission européenne. Or, après une première mise en demeure le 12 octobre 2006 [48], cette dernière adressa un avis motivé à la France le 27 juin 2007 [49], rendant une procédure aboutissant auprès de la CJCE de plus en plus inéluctable. Elle estimait très simplement que les restrictions en place violaient le droit communautaire - le principe de libre prestation de services en particulier - en ne permettant à aucun acteur autre que la FDJ et le PMU d’accéder au marché des jeux d’argent en ligne. La France devait revenir sur sa législation et mettre en œuvre, a minima, un système d’autorisations préalables non discriminatoire afin de permettre à des opérateurs privés européens de postuler, comme en Italie, au Royaume-Uni ou en Belgique.

B / Le rapport Trucy, la conclusion de la nécessité d‘une évolution législative.

Par ailleurs, plusieurs rapports rédigés par une commission dirigée par le sénateur François Trucy aboutissaient à la conclusion qu’une évolution des lois en vigueur était devenue inéluctable. Si en 2002 [50] étaient mises en évidence les menaces de concurrence dues au développement exponentiel des jeux de hasard en ligne, notamment car - si l’installation sur le territoire de serveurs était prohibée - les joueurs français qui y recouraient n’encouraient aucune sanction ; dans sa dernière mouture [51], ce rapport se révélait plutôt explicite, comme en témoigne l’intitulé de son premier chapitre : «  le contexte : un cadre juridique devenu irréaliste et contesté par les autorités européennes ». En outre, une autre expertise, remise par l’inspecteur général des finances Bruno Durieux le 24 avril 2008 [52], préconisait à son tour une ouverture à la concurrence des jeux de hasard en ligne.

Ce fut chose faite avec la présentation en Conseil des ministres, par le ministre du budget Éric Woerth, du projet de loi relatif à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne, le 25 mars 2009 [53].

C / Les enjeux.

Officiellement, ledit projet de loi poursuivait un triple objectif : la protection des joueurs et des populations vulnérables, la sécurité des opérations de jeux et la lutte contre la fraude et le blanchiment d’argent [54]. Factuellement, il ne fait aucun doute que le texte cherchait avant tout à concilier deux exigences : la mise en conformité avec les exigences de la Commission européenne à l’égard de la libre prestation de services et la préservation des recettes de l’État par des prélèvements fiscaux consistants (v. infra). L’enjeu était de taille pour le ministre du budget puisqu’il rappelait cette statistique au moment du passage du texte devant la chambre des sénateurs : au total près de 25 000 sites proposaient des jeux de hasard dans de nombreux domaines et 5% des Français y misaient un montant total avoisinant les 4 milliards d'euros [55].

Par ailleurs, la procédure fut accélérée afin que le nouveau régime juridique soit en vigueur au cours de la coupe du monde de football s’étant déroulée du 11 juin au 11 juillet 2010. Eu égard aux retombées financières attendues, il n’était donc pas étonnant d’entendre le ministre affirmer en séance que les décrets d’application étaient déjà dans les tiroirs.

Section 2 / Le contenu.

A / Les jeux en ligne, des services particuliers nécessitant un régime particulier.

Après avoir passé sans encombre l’étape de l’examen du Conseil constitutionnel[56], la loi fut donc promulguée par le Président de la République le 12 mai 2010.

Tout d’abord, le texte rappelle sur son fronton que « les jeux d'argent et de hasard ne sont ni un commerce ordinaire ni un service ordinaire », donc ne saurait s’y appliquer un principe de libre prestation de services ordinaire. Un système d’autorisation préalable et de régulation est ainsi d’entrée justifié. Puis, afin d’éviter que n’échappent à la couverture de la loi les multiples jeux qui se présentent comme liés davantage à l’intelligence qu’à la chance, la définition du jeu de hasard fait enfin son entrée dans le corpus juridique français. Ainsi, ce dernier consiste en « un jeu payant où le hasard prédomine sur l’habileté et les combinaisons d’intelligence pour l’obtention du gain » (art. 2). Le troisième article revient sur les motifs faisant qu’une liberté de prestation de services est, dans ce secteur spécifique, inenvisageable : il faut « 1° prévenir le jeu excessif ou pathologique et protéger les mineurs ; 2° assurer l'intégrité, la fiabilité et la transparence des opérations de jeu ; 3° prévenir les activités frauduleuses ou criminelles ainsi que le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ; 4° veiller au développement équilibré et équitable des différents types de jeu afin d'éviter toute déstabilisation économique des filières concernées ». C’est pourquoi, « compte tenu des risques d'atteinte à l'ordre public et à l'ordre social, l'exploitation des jeux d'argent et de hasard est placée sous un régime de droits exclusifs délivrés par l'État ».

B / L’institution de l’ARJEL, bras séculier du nouveau régime d‘autorisation préalable.

Afin de veiller au respect des objectifs de cette politique, est instituée l’Autorité de Régulation des Jeux en Ligne (ARJEL), autorité administrative indépendante délivrant aux opérateurs des agréments d’une durée de validité de cinq années leur permettant d’accéder enfin légalement au marché (art. 38). Elle dispose d’un pouvoir coercitif lui permettant de mettre effectivement en œuvre une régulation efficace du marché des opérateurs en ligne et de lutter aux côtés des ministères de l’intérieur et de la justice contre les sites illicites. Plusieurs amendements sénatoriaux furent adoptés afin de renforcer l’indépendance de l’autorité de régulation. En conséquent, à l’instar du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA), les 7 membres de l’instance sont nommés par les présidents de la République, du Sénat et de l’Assemblée nationale, ils sont soumis à une obligation de réserve et à des incompatibilités : ils ne peuvent détenir ou avoir détenu au cours des deux années précédant leurs mandats d’intérêts dans une entreprise de jeux en ligne (art. 36). En outre, les opérateurs se voient appliqué, en vertu de l’article 46 de la norme, un régime fiscal plutôt contraignant mais permettant à l’État de préserver ses marges : 7,5 % sur les paris sportifs et hippiques et 2 % sur les jeux de poker. Enfin, ils doivent s’acquitter d’un droit fixe au moment de leur demande (entre 2 000 et 15 000 euros) ainsi que d’un droit annuel à verser tous les 1er janvier (entre 10 000 et 40 000 euros).

Section 3 / Conclusion et perspectives.

A / Les contradictions entre Commission et Cour de justice européennes, méandres pour le législateur français.

Alors que le projet de loi avait été étudié et arrêté en Conseil des ministres le 25 mars 2009, l’arrêt Liga portuguesa de futebol profissional du 8 septembre 2009 de la CJCE (voir supra) vint au soutien d’un cadre juridique - le Portugais - sensiblement identique à celui alors en place en France. Pourtant, le législateur s’activait sous la pression européenne puisque il tentait de se conformer aux préconisations d’un rapport de la Commission européenne de mars 2008 [57]. Ainsi, lors de l’examen du projet de loi devant la chambre des députés, entre le 7 et le 13 octobre 2009, nombre d’entre eux ne manquèrent pas de soulever les contradictions entre instances communautaires, amenant cet arrêt de la CJCE au soutien d’un maintien du monopole des jeux en ligne au profit de la FDJ et du PMU.

En réalité, plus qu’une contrainte émanent du droit communautaire, la libéralisation du secteur était sans doute devenue un choix et un enjeu politique dépassant le simple cadre juridique.

Ces questions sont en tout cas au cœur de l’actualité et des évolutions sont à attendre comme en témoigne la conférence du 12 octobre 2010 sur le rôle des autorités dans la réglementation des jeux de hasard, organisée conjointement par la Commission européenne, la Commission belge des jeux de hasard et le gouvernement belge qui assurait alors la présidence de l’Union.

B / Une libéralisation au demeurant très limitée.

La loi du 12 mai 2010 se cantonne à une libéralisation des paris sportifs, hippiques et jeux de poker, et cela seulement dans la mesure où ils sont organisés en ligne. Pour le reste, les jeux de hasard demeurent associés à un monopole étatique et à de nombreuse dispositions pénales sanctionnant ses atteintes. Ainsi la question de la conformité du cadre juridique français aux principes communautaires de liberté d’établissement et de libre prestation de service n’a-t-elle peut-être pas fini de se poser. Quand bien même la jurisprudence de la CJCE serait favorable au maintien d’un protectionnisme fort permettant d‘encadrer ou même interdire les jeux de hasard sur le territoire national, il n’en demeure pas moins que les mesures en cause doivent rester cohérentes, non discriminatoires, proportionnées et adaptées à la réalisation de l'objectif poursuivi. Or, cela ne fait désormais plus de doute après cette étude, la politique de développement commercial et de promotion des jeux de hasard en France empêche de se conformer à ces exigences.

La première version du rapport Trucy, en 2002, avait pourtant proposé trois éléments permettant de se conformer à ce principe de cohérence : « 1°) un marketing mesuré et qui ne cible pas les mineurs ; 2°) l'existence de campagnes de sensibilisation des joueurs sur le risque lié au jeu excessif et l'aide aux joueurs compulsifs ; 3°) l'existence d'une autorité de régulation et de contrôle indépendante, à l'image du CSA ». Certes ces propositions ont bien été reprises au creux de la récente loi, mais sa porté se limitant à la communication au public en ligne, cela ne peut que demeurer à l’évidence insuffisant et inefficace aux yeux de la Cour de justice.

Partant, deux voies s’ouvriraient sur le chemin du législateur français. En empruntant l’une, il modifierait les règles permettant à la FDJ et au PMU de se développer et, en contrepartie, il déciderait que le marché des jeux de hasard doit demeurer organisé sous forme de monopole afin de diminuer les occasions de jeux et protéger les joueurs « pathologiques ». Seulement, les retombées financières pour l’État se retrouveraient amoindries. En se risquant sur l’autre, il ouvrirait le secteur à une concurrence privée, estimant qu’il s’agit de services classiques pour lesquels le principe de liberté doit s’appliquer totalement. FDJ et PMU pourraient alors légitimement continuer de vendre le mérite des jeux et paris qu’ils proposent. Mais là aussi, les recettes de l’État s’en ressentiraient affectées. Pour l’heure, le législateur hésite. Pourtant, il lui faudra un jour s’aventurer - à gauche ou à droite - car, entre les deux, il demeure sur le territoire de la réprimande communautaire.

La seule place légitime de l’État croupier aujourd’hui : la prison. Rien ne va plus.

Voir aussi

Liens externes

Notes et références

  1. Verbiest, Th et Reynaud, P., « Jeux et paris virtuels : évolution ou révolution du droit européen ? » in Communication commerce électronique, 2004, étude 39
  2. Loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne, JORF n°0110 du 13 mai 2010 page 8881 texte n° 1
  3. CJCE, 25 juill. 1991, Säger, aff. C-76/90, Rec. CJCE I-4221
  4. La directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur («directive sur le commerce électronique») (Journal officiel n° L 178 du 17/07/2000 p. 0001 - 0016) comme la directive n° 2006/123/CEdu Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur (Journal officiel n° L 376 du 27/12/2006 p. 0036 - 0068) excluent explicitement de leur champ d'application les activités de jeux d'argent
  5. CJCE, 24 mars 1994, aff. C-275/92, Schindler, Rec. CJCE 1994, I, p. 1039 ; obs. IDOT (L.), Europe 1994, comm. 195 ; CJCE, 21 sept. 1999, aff. C-124/97, Läärä, Rec. CJCE 1999, I, p. 6067 ; IDOT (L.), Europe 1999, comm. 37 ; CJCE, 21 oct. 1999, aff. C-67/98, Zenatti, Rec. CJCE 1999, I, p. 7289
  6. CJCE, 18 janv. 1979, Van Wesemael, aff. 110/78, Rec. CJCE 35, pt 28
  7. CJCE, 24 mars 1994, aff. C-275/92, Schindler, Rec. CJCE 1994, I, 1039, pt 63
  8. aff. Schindler, préc. ; Laära, préc.
  9. CJCE, 6 nov. 2003, Gambelli, aff. C-243/01, Rec. CJCE 2003, I, p. 13031 ; DECOCQ (G.), in Communication commerce électronique, 2003, comm. 124 ; DECOCQ (G.) in Europe, 2003, comm. 124 ; VERBIEST (Th.) et REYNAUD (P.), note in JCPG, 2004, II, 10172 ; DURAND (A.), « Paris sportifs : les jeux sont faits, rien ne va plus ! » in Lettre Lamy droit du sport, déc. 2003, n° 7, p. 1 et s.
  10. VERBIEST (Th.) et HEFFERMEHL (E.), « Jeux d'argent en ligne : l'impact de l'arrêt Placanica » in Revue Lamy droit de l’ immatériel, mai 2007, p. 69
  11. CJCE, 6 mars 2007, Placanica, aff. jtes C-338/04, C-359/04 et C-360/04, Rec. CJCE 2007, I, 1891, pts 52 à 55 ; obs. BROUSSY (E.), DONNAT (F.) et LAMBERT (C.) in AJDA, 2007, p. 1122
  12. FRANCILLON (J.), « Exploitation de jeux de hasard sur internet », in Revue de science criminelle, 2008, p. 101
  13. v. en particulier : Sénat, Délégation pour l‘Union européenne, rapp. d‘information n° 693, 6 févr. 2008
  14. Une étude de l'Institut Suisse de droit comparé de Lausanne, effectuée en 2006 à la demande de la Commission, révèla l'incompatibilité de la plupart des législations nationales sur les jeux de hasard avec les principes de libre prestation de services et de liberté d'établissement. La Commission lança alors des procédures contre de nombreux États membres, à savoir Danemark, Finlande, Allemagne, Hongrie, Italie, Pays-Bas et Suède
  15. CASSIA (P.), « Un monopole des jeux d‘argent sur Internet est compatible avec la libre prestation des services », in La Semaine Juridique Edition Générale, n° 46, 9 Novembre 2009, p. 440
  16. LE ROY (M.), « La régulation de l'ouverture à la concurrence des paris en ligne par la CJCE », in AJDA, 2009, p. 2184 ; CJCE, 8 sept. 2009, aff. C-42/07, Liga Portuguesa de Futebol Profissional et Bwin International Ltd
  17. CASSIA (P.), op. cit.
  18. décret-loi n° 282/2003, 8 nov. 2003, Diario da Republica I, série A, n° 259
  19. v. déjà en ce sens : concl. Tizzano sur CJCE, 11 sept. 2003, aff. C-6/01, Anomar, Rec. CJCE 2003, I, 8621, pt 78
  20. v. TENENBAUM (A.), « Les jeux d'argent sur l'Internet facilités dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce – Réflexions à propos de la décision de l'organe d'appel de l'OMC du 7 avril 2005 » in Communication commerce électronique, 2005, étude 31
  21. DEMUNCK (C.), « Réglementation des jeux en ligne : nouveaux éclairages de la CJUE » in Dalloz actualité, 15 juillet 2010
  22. CJCE, 3 juin 2010, Ladbrokes, 18 C-258/08
  23. CJCE, 3 juin 2010, Sporting Exchange Ltd, 9 C-203/08
  24. « Articulation entre réglementation des jeux de hasard sur Internet et objectifs d'utilité publique ou d'intérêt général » in Dalloz actualité, 31 août 2010
  25. arrêt Carmen Media Group Ltd, aff. C-46/08, CJUE, 8 septembre 2010 ; arrêt Ernst Engelmann, aff. C-64/08, CJUE, 9 septembre 2010
  26. CJCE, 6 nov. 2003, Gambelli, aff. C-243/01
  27. CJCE, 10 mars 2009, Hartlauer, aff. C-169/07
  28. CASTETS-RENARD (C.), « Jeux et paris en ligne » in Contrats Concurrence Consommation, n° 10, Octobre 2007, étude 12
  29. v. notamment la directive n° 2006/123/CE, 12 décembre 2006, consid. 25, JOUE n° 376, 27 déc. 2006, p. 36
  30. loi du 21 mai 1836 portant prohibition des loteries, bull. des lois, 9e S., B. 421, n° 6282
  31. loi du 2 juin 1891 ayant pour objet de réglementer l'autorisation et le fonctionnement des courses de chevaux, bull. des lois, 12e S. B. 1405, n° 23707
  32. loi du 15 juin 1907 relative aux casinos, bull. des lois, 12e S., B. 2884, n° 49846, 49951
  33. loi n° 83-628 du 12 juillet 1983 relative aux jeux de hasard, Journal Officiel du 13 Juillet 1983
  34. loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, Journal Officiel du 22 juin 2004, v. article 16, 1, 1°
  35. ANTOINE (A.), « Jeux d'argent et droit européen : vers un marché commun des jeux, paris et loteries » in La Semaine Juridique Edition Générale, n° 46, 10 Novembre 2004, p. 10172
  36. v. le rapport d’information du 7 novembre 2006 de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur l’évolution des jeux de hasard et d’argent en France
  37. v. AUBERT (B.), « Prohibition des loteries et libéralisation européenne » in Revue de science criminelle, Chronique du droit de l'Union européenne, 2010, p. 474
  38. la société zeturf demandait l‘annulation du décret n° 97-456 du 5 mai 1997 instaurant le monopole du PMU pour la gestion du pari mutuel hors hippodrome
  39. Cour de cassation, Chambre criminelle, 18 novembre 2008, 08-81.672, publié au bulletin
  40. v. AUBERT (B.) op. cit.
  41. Cass. com., 10 juill. 2007, n° 06-13.986, Zeturf, JurisData n° 2007-040137 ; PICOD (F.), note in JCPG, 2007 ; CLERGERIE (J.-L.), obs. in Dalloz, 2007, p. 1359 ; IDOT (L.), obs. in RSC, 2007, p. 641 ; SIMON (D.), obs. in Europe, 2007, comm. 298
  42. v. PORACCHIA (D.) et MARMAYOU (J.-M.) « Un an de sport dans le droit de la communication, centre de droit du sport de l'université Paul Cézanne (Aix-Marseille III) » in Communication commerce électronique, n° 11, Novembre 2007, chron. 10
  43. TGI Paris, ord., 8 juill. 2005, PMU c/ Eturf, Zeturf ; DURAND (A.), obs. in Lettre Lamy droit du sport, mars 2006,, n° 402 ; GRYMBAUM (L.), note in Communication commerce électronique, 2005, comm. 172
  44. v. la loi du 2 juin 1891 ayant pour objet de réglementer l'autorisation et le fonctionnement des courses de chevaux, bull. des lois, 12e S. B. 1405, n° 23707
  45. CA Paris, 14e ch., sect. A., 4 janv. 2006, sté Zeturf LTD c/ GIE Pari mutuel urbain ; Juris-Data n° 2006-289287 ; JEANNEREY (P.-A.), note in AJDA, 2006, p. 481
  46. CA Malte, 9 janv. 2007, MENDOZA-CAMISADE (A.), obs. in JCPG, 2007, I, 172, § 7 ; DEBET (A.), obs. in Communication commerce électronique, 2007, comm. 57 ; le litige n'entrerait pas dans le champ d'application du règlement communautaire, puisque ce dernier porte sur les matières civile et commerciale et ne couvrait pas les matières fiscales, douanières et administratives. Or, le litige, touchant au monopole du PMU, serait administratif
  47. loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, J.O. du 7 mars 2007
  48. des procédures d'infraction avaient été ouvertes contre la France, l'Italie et l'Autriche. Pour la France, la Commission s'interrogeait sur des restrictions imposées aux prestataires de paris sportifs à distance qui avaient leur licence et étaient établis dans d'autres États membres
  49. La Commission européenne rendait le 27 juin 2007 cet avis motivé à propos des spécificités (comprendre monopoles) française, grecque et suédoise entravant la libre prestation des services de paris sportifs, v. ASTAIX (A.), « Libérez le bandit manchot », blog Dalloz, 2 juill. 2007
  50. v. le rapport au Sénat n° 223, 2001-2002, sur les jeux de hasard et d'argent en France
  51. « Rapport au sénat sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée Nationale, relatif à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne », n° 209, remis le 19 janvier 2010
  52. v. EL KADI (A.), obs. in Dalloz actualité, 15 mai 2008
  53. v. LAVRIC (S.), obs. in Dalloz actualité, 26 mars 2009
  54. v. http://www.vie-publique.fr/actualite/panorama/texte-vote/loi-du-12-mai-2010-relative-ouverture-concurrence-regulation-du-secteur-jeux-argent-hasard-ligne.html
  55. v. LAVRIC (S.), obs. in Dalloz actualité, 25 sept. 2009
  56. Conseil constitutionnel, n° 2010-605 DC, 12 mai 2010
  57. v. http://www.gouvernement.fr/premier-ministre/pour-une-ouverture-maitrisee-du-marche-des-jeux