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Réforme du contrat d'entreprise et les autres contrats informatique (de)

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Version du 28 octobre 2007 à 09:35 par Pierre (discuter | contributions)

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Le contrat de livraison d'ouvrage

Ce contrat a vocation à régir la vente d'une chose meuble à produire ou à fabriquer. Il se distingue, d'une part, du contrat d'entreprise et, d'autre part, du contrat de vente.

Le § 651 BGB lui applique partiellement le droit de la vente. La jurisprudence ayant qualifié de chose meuble le logiciel[1], la limite avec le contrat d'entreprise est clairement tracée. Par contre, en droit français, la qualification du contrat portant sur un logiciel n'est pas prévisible tant que la qualification du logiciel n'est pas certaine.

Le contrat de livraison d'ouvrage correspond en droit français au contrat de vente de chose à produire. À supposer que le logiciel soit qualifié de chose en droit français, se posera la question de la distinction entre contrat de vente et contrat d'entreprise. La Cour de cassation utilise plusieurs critères pour qualifier un contrat, tel que le critère de l'accessoire, comme la Cour fédérale de justice[2], ou le fait que le contrat porte sur une chose dont les caractéristiques sont déterminées d'avance[3]. Il lui arrive également d'appliquer une qualification distributive[4].

En droit allemand, avec la réforme, le champ d'application du contrat de livraison d'ouvrage s'est trouvé étendu du fait du changement du critère qui permet de caractériser ce contrat. Avant la réforme, le critère de distinction entre le contrat de livraison d'ouvrage et le contrat d'entreprise était la fabrication par l'entrepreneur d'une chose fongible ou non-fongible[5] (anc. § 651 phrase 2), c'est-à-dire d'un logiciel standard ou spécifique. C'est la transposition de la directive sur les biens de consommation[6] qui a imposé le choix d'un nouveau critère de distinction du contrat de fourniture d'ouvrage : ce contrat concerne désormais la fabrication de choses meubles. Quant à l'ancien critère du caractère fongible ou non de la chose fabriquée, il joue désormais un autre rôle : il permet de distinguer deux régimes du contrat de livraison d'ouvrage.

Pour faire la distinction entre le caractère standard ou spécifique du logiciel, il faut se référer au droit antérieur à la réforme[7]. Cette distinction dépendait de l'importance du travail réalisé pour l'adaptation du logiciel. Le critère de l'existence d'un cahier des charges, ou celui de l'obligation d'adapter le logiciel, proposés par la doctrine ne sont pas pertinents parce qu'il se peut qu'un programme standard corresponde parfaitement, ou presque, aux besoins du client[8]. C'est pourquoi, la jurisprudence a dégagé un autre critère, qu'elle applique au cas par cas : celui du dépassement de la prestation minimale[9].

Il n'existe pas de définition de ce qu'est une prestation minimale, mais on peut appréhender cette notion à l'aide des exemples suivants : l'ajout de vingt-huit fonctions, qui n'étaient pas toutes gérées par le programme original, dépasse la prestation minimale[10] ; de même, la facturation de travaux d'adaptation atteignant 27 % du prix total dénote un dépassement de la prestation minimale[11]. Avant la réforme, en l'absence de dépassement de la prestation minimale, l'adaptation n'était qu'un accessoire de la prestation principale et le contrat était qualifié de contrat de fourniture d'ouvrage. Ce critère sert désormais à distinguer le contrat de livraison d'ouvrage fongible du contrat de livraison d'ouvrage non-fongible.

Des régimes différents sont appliqués au contrat de livraison d'ouvrage suivant que le contrat porte sur une chose fongible ou non-fongible, ce qui correspond à la distinction entre logiciel standard et logiciel spécifique. Mais en pratique, la question de la distinction entre logiciel standard et logiciel spécifique va continuer à se poser à l'avenir, étant donné que les entreprises ont souvent plusieurs logiciels en réserve, qu'elles adaptent en fonction des besoins de leurs clients[12].

En ce qui concerne la fourniture d'une chose fongible à fabriquer, le § 651 phrase 1 BGB renvoie au droit de la vente, lequel renvoie lui-même à la partie générale du droit des obligations. Il faut donc prendre en compte les droits à dommages et intérêts et le droit de résolution des §§ 280 et s., 323 et s. BGB. En matière de conception de logiciel, le maître de l'ouvrage ne fournit pas les matériaux, si bien que le § 442 al. 1er phrase 1 BGB ne devrait pas s'appliquer aux contrats de fourniture d'ouvrage informatique.

En ce qui concerne la fourniture d'une chose non-fongible à fabriquer, seules certaines normes du droit du contrat d'entreprise sont applicables. Les §§ 650, 645 BGB donnent à l'entrepreneur le droit de se faire indemniser pour le travail fourni si le devis est dépassé parce que les matériaux ou les instructions du maître de l'ouvrage se sont avérés mauvais, et que celui-ci a résolu le contrat. Le devis est aussi un élément à prendre en compte en vue de la détermination du défaut au sens du § 434 al. 1 phrase 3 BGB.

La dernière spécificité du contrat de livraison d'ouvrage non-fongible par rapport au droit de la vente est le droit de résolution du maître de l'ouvrage (§ 649 BGB). Ce droit est indépendant de toute faute. Il ne nécessite ni délai, ni justification du maître de l'ouvrage, mais le maître de l'ouvrage doit mettre l'entrepreneur dans la même situation financière que si le contrat n'avait pas été résolu. « L'entrepreneur a le droit de demander la rémunération convenue si le maître de l'ouvrage résout le contrat ; néanmoins, il doit se laisser imputer les économies réalisées du fait qu'il n'exécute pas sa propre prestation, ce qu'il a acquis en employant sa main d'œuvre autrement, ou ce qu'il a négligé d'acquérir par mauvaise foi » (§ 649 phrase 2 BGB).

Le § 643 BGB donne un droit de résolution au maître de l'ouvrage dans le cas du § 642 BGB, qui impose au maître de l'ouvrage d'apporter son concours à l'entrepreneur. Cette obligation ressemble au devoirs de collaboration qui, en droit français, fait partie des contrats informatiques[13] et qui se traduit par l'expression de ses vœux par le maître de l'ouvrage, notamment par la rédaction d'un cahier des charges[14].

Ce devoir de concours intervient là où il est nécessaire. Comme nous l'avons vu, l'existence d'un cahier des charges n'est pas un critère suffisant pour qualifier un logiciel de chose non-fongible au sens du § 651 phrase 3 BGB. Cependant, le fait qu'il faille concevoir ou adapter un logiciel met en évidence l'existence de besoins du client non satisfaits par les logiciels standards déjà existants. La nécessité pour le client de préciser à l'entrepreneur des besoins qui ne sont pas courants est donc un indice du caractère non-fongible du logiciel à réaliser. Mais en définitive, que le logiciel soit fongible ou non importe peu, car les régimes à leur appliquer sont quasiment identiques en droit allemand[15].

En conclusion, la réforme n'a modifié le régime du contrat d'entreprise qu'en ce qui concerne le contrat de livraison d'ouvrage. D'une manière générale, les règles applicables au contrat d'entreprise sont restées les mêmes, comme nous allons le voir maintenant.

Le contrat d'entreprise

Le contrat d'entreprise est réglementé dans les §§ 631 et s. BGB. Ce qui frappe à la lecture de ces normes, c'est leur symétrie par rapport à celles consacrées au contrat de vente. L'impression est trompeuse : c'est en fait le régime du contrat de vente qui a été aligné sur celui du contrat d'entreprise, tandis que le régime du contrat d'entreprise connaissait peu de modifications, en raison des conséquences imprévisibles qu'il aurait pu avoir sur le secteur du bâtiment[16].

Le régime du contrat d'entreprise n'est pas très différent en droit français et en droit allemand. Dans les deux cas, si le prix doit être déterminé lors de la conclusion d'un contrat de vente, le contrat d'entreprise n'exige pas que la rémunération soit précisément délimitée (§ 632 BGB).

En droit français, dans le contrat d'entreprise, le transfert des risques a lieu lors de la réception (art. 1790 C. civ), comme en droit allemand (§ 644 BGB). On a pu observer la même tendance de la jurisprudence, en droit allemand comme en droit français, à retarder la réception d'un ouvrage pour faire courir la prescription le plus tard possible[17]. Ainsi, l'absence du manuel d'un programme empêche la réception de se produire[18].

En matière de responsabilité de l'entrepreneur, les règles sont identiques en droit français et allemand (art. 1789 et s. C. civ., §§ 639, 644, 645 BGB).

Avec la réforme, le régime du contrat d'entreprise ne se différencie plus beaucoup de celui du contrat de vente. En dehors des normes applicables au contrat de fourniture d'ouvrage non-fongible, que nous avons déjà présentées, de la possibilité de payer par acompte (§ 632a BGB), de l'achèvement (Vollendung, § 646 BGB) et de la possibilité pour le maître d'ouvrage de réparer lui-même le dommage (§ 637 BGB), le régime du contrat d'entreprise ne se différencie plus de celui du contrat de vente.

Du fait de l'élargissement du champ d'application du contrat de fourniture d'ouvrage, le contrat d'entreprise ne peut plus porter que sur la construction ou la modification d'immeubles, ou des travaux de réparation[19]. Il faut le distinguer à cet égard du contrat de service (Dienstvertrag).

L'importance du contrat de service tient à ce que, dans la pratique, le contrat de livraison d'ouvrage est souvent couplé avec d'autres services, ce qui le fait entrer alors dans la catégorie des contrats de service[20]. La distinction entre le contrat d'entreprise et le contrat de service réside en ce que le premier crée une obligation de résultat (§ 631 al. 2 BGB), tandis que le second ne crée qu'une obligation de moyen (§ 611 al. 2 BGB). En conséquence, dans le contrat de service, la rémunération payée n'a pas à être restituée lorsque le résultat n'est pas atteint.

La distinction entre le contrat d'entreprise et le contrat de service est difficile ; elle est faite par le juge au cas par cas[21]. Les stipulations contractuelles sont à cet égard déterminantes[22]. En matière de prestations relatives à l'informatique, le contrat de service ou le contrat d'entreprise concernent tous les contrats de conseil[23], mais également les contrats de maintenance[24]. En droit français, la question de savoir si un contrat de maintenance oblige à fournir un résultat ou simplement à user de tous les moyens à la disposition de celui qui s'oblige, dépend également des stipulations contractuelles[25].

C'est en particulier à ces contrats que s'applique l'institution de la résolution pour motifs grave (Kündigung aus wichtigem Grund), codifiée au § 314 BGB, car il s'agit de contrats à durée indéterminée.

Les programmeurs imposent souvent la conclusion d'un contrat de maintenance lors de la conclusion d'un contrat relatif à un système informatique[26]. Cette pratique a été sanctionnée par la Cour fédérale de justice, qui a considéré que les programmeurs étaient ainsi payés deux fois pour la même prestation[27].

Les contrats accordant un droit d'usage

Ces contrats ne sont concernés par la réforme du droit des obligations qu'en ce qui concerne la réforme de la partie générale du BGB, à l'exception du contrat de location d'un immeuble. En raison de la qualification du logiciel faite par la Cour fédérale de justice, celui-ci peut faire l'objet de tous les contrats, tels que location, dépôt, échange, etc. Par exemple, il est admis depuis longtemps qu'un logiciel puisse faire l'objet d'un crédit-bail[28], ce qui se produit souvent en pratique concernant de gros systèmes[29]. Il est admis aussi que le logiciel fasse l'objet d'une location[30].

À l'inverse, des contrats nouveaux se fondent dans les régimes de contrats déjà existants. Par exemple, l'application service provider, contrat par lequel un utilisateur reçoit le droit d'utiliser un programme situé sur un serveur[31], peut être classifié à l'aide des critères classiques : si l'utilisation est limitée dans le temps, qu'elle se fait moyennant une rémunération périodique, il s'agit d'une location, sinon, il s'agit d'une vente[32].

La réforme du droit des obligations ainsi que la réforme du droit d'auteur ont profondément modifié les règles applicables aux contrats informatiques. L'application des contrats nommés peut être remise en cause par la qualification d'« autres objets », mais la jurisprudence ne s'est pas encore prononcée. En effet, le contrat de louage, par exemple, n'aurait plus vocation à s'appliquer au logiciel et l'on devrait alors stipuler l'exacte étendue des obligations des parties, comme dans tout contrat inommé. La doctrine antérieure à la réforme du droit des obligations reste campée sur sa position, ce qui signifie qu'elle continue à étendre par analogie la notion de chose au sens du § 90 BGB, au logiciel considéré comme objet d'un contrat accordant un droit d'usage.

On peut remarquer finalement que la question la plus importante des contrats informatiques, la qualification de chose des logiciels, se résume à un problème de droit civil. La solution allemande à cette question conduit à l'application des contrats classiques. En cela, le droit allemand démontre qu'il est possible de traiter le logiciel comme une chose sans freiner l'innovation en matière d'informatique ni malmener les notions juridiques employées.

Liens et références

  1. BGHZ 102, 135 – VIII ZR 314/86 : MDR 1990, p. 223 ; NJW-RR 1988, p. 406 ; CR 1988, p. 124 ; BB 1988, p. 20 ; JZ 1988, p. 460 ; JA 1988, p. 220. BGH 9 mai 1985 – I ZR 52/83 Inkasso-Programm : BGHZ 94, p. 276 et s. ; GRUR 1985, p. 1041, NJW-RR 1985, p. 22 ; CR 1985, p. 22 ; BB 1985, p. 1747 ; MDR 1986, p. 121.
  2. Ph. Mallaurie, L. Aynès, P.-Y. Gautier, op. cit., p. 74, n° 74.
  3. C. cass. ch. com. 4 juillet 1989 : Bull. civ. IV n° 210.
  4. Ph. Mallaurie, L. Aynès, P.-Y. Gautier, loc. cit.
  5. S. Thewalt, Softwareerstellung als Kauffertrag mit werkvertraglichem einschlag, CR 1/2002, p. 1.
  6. S. Thewalt, op. cit., p. 1.
  7. S. Thewalt, op. cit., p. 3.
  8. Marly, Softwareüberlassungsverträge, p. 21, n° 48.
  9. Marly, Softwareüberlassungsverträge, loc. cit.
  10. Marly, Softwareüberlassungsverträge, p. 22, n° 51 ; OLG Köln, CR 1992, p. 1328, MarlyRC, 1992, n° 10.
  11. Marly, loc. cit., LG Augsburg ; CR 1989, 22 ; MarlyRC 1988, n° 10.
  12. A. Lucas, op. cit., p. 503, p. 501, n° 756.
  13. Ph. Le Tourneau, op. cit., p. 10 et s.
  14. Ph. Le Tourneau, loc. cit.
  15. S. Thewalt, op. cit., p. 2.
  16. K. Diedrich, op. cit., p. 473 ; F. Heseler, Le nouveau droit du contrat d'entreprise, RIDC 4/2002, p. 1005.
  17. BGH 30 janvier 1985 – VIII ZR 238/83 : BGHZ 93, p. 338, 345 ; NJW-RR 1985, p. 1333 ; BB 1985, p. 546 ; MDR 1985, p. 1013 ; JR 1985, 364. BGH 22 décembre 1999 – VIII ZR 299/98 : DB 2000, p. 567.
  18. BGH 14 septembre 1993 – VIII ZR 147/92 : NJW-RR 1993, p. 2346 ; CR 1993, p. 1755 ; MDR 1993, p. 950 ; jur-pc 1993, p. 2231 ; MarlyRC 1993, n° 69 ; DB 1993, p. 1871
  19. H. Brox/W.-D. Walker, op. cit., p. 249, n° 11.
  20. N. Müller, loc. cit.
  21. H. Brox/W.-D. Walker, op. cit., p. 221, n° 9 et s.
  22. H. Brox/W.-D. Walker, loc. cit.
  23. C. Zahrnt, op. cit., p. 240.
  24. J. Marly, Softwareüberlassungsverträge, p. 118, n° 425.
  25. Ph. Le Tourneau, op. cit., p. 149.
  26. N. Müller, loc. cit.
  27. BGH 29 janvier 2002 X ZR 231/00 : JurPC Web.dok. 168/2002, www.jur-pc.de/rechtspr/20020168.htm.
  28. BGH 20 juin 1984 – VIII ZR 131/83 : NJW-RR 1984, p. 129 ; 1984, p. 2019 ; MDR 1985, p. 315 ; JZ 1984, p. 1118 ; JuS 1985, p. 146 BGH 1er janvier 1987 – VIII ZR 117/86 : NJW-RR 1988, p. 204 ; 1990, p. 459 ; 1987, p. 1972 ; MDR 1988, p. 137 ; CR 1987, p. 591 ; MarlyRC 1987, n° 45.
  29. M. Henssler, op. cit., p. 491.
  30. OLG Stuttgart, BB 1989, suppl. 10, p. 10.
  31. M. v. Westerohlt, K. Berger, Der Application Service Provider und das neue Schuldrecht, CR 2002 p. 81.
  32. M. v. Westerohlt, K. Berger, op. cit., p. 82.