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Principes généraux du droit (fr)

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Les principes généraux du droit (PGD) ne sont pas des idées dont la connaissance permettrait de se faire une idée sur le droit (v. Introduction au droit). Les PGD sont des règles non-écrites qui ne sont formulées dans aucun texte mais que le juge considère comme s'imposant à l'administration, à l'État, dans sont activité. La violation des PGD est analysée comme une violation de la règle de droit. Ils posent problème car, indispensables, ils s'insèrent mal dans la théorie des sources de droit.

Le développement des principes généraux du droit dans la jurisprudence

Parmi les éléments de la légalité, les PGD ont pris une importance fondamentale depuis la Libération

Développement des PGD

Avant 1945

Avant 1945, on peut dire que la notion existait dans notre droit positif, mais qu'on n'en avait pas pris une conscience exacte. Le Conseil d'État était déjà nécessairement conduit à utiliser des principes non-écrits. Il recourait alors essentiellement aux principes qui étaient à la base de la législation positive et qui constituait essentiellement la philosophie politique de la révolution. C'est ainsi que les arrêts s'inspiraient souvent des principes d'égalité des citoyens devant la loi ou de la liberté du commerce et de l'industrie[1]. De même, le Conseil d'État avait consacré le principe de non-rétroactivité des actes administratifs[2].

À partir de 1945

Il est certain que c'est la crise des libertés publiques, qui a pu être observée en France dès 1940, qui a conduit le Conseil d'État à affirmer de manière plus certaine et plus solennelle les principes généraux.

L'arrêt Aramu[3] tient ici une place fondamentale. Il s'agissait d'apprécier la légalité d'une décision de révocation de fonctionnaires prise dans le cadre de l'épuration par le CFLN (Comité française de libération nationale) en application d'une ordonnance du 6 décembre 1943 ayant valeur de loi. Ce texte ne prévoyait pas de garantie, et notamment, ne prévoyait pas la communication du dossier à l'intéressé. Ce texte spécifiait seulement que les comités d'épuration devaient « entendre les personnes qui leur étaient déférées ». Le Conseil d'État a eu à définir l'étendue des garanties qui devaient être reconnues aux intéressés dans de telles circonstances. Il a à cette occasion fixé la portée de la disposition qui stipulait que la commission d'épuration devait entendre les personnes qui lui étaient déférées :

« Il résulte de ces prescriptions, ainsi d'ailleurs que des principes généraux du droit applicables même en l'absence de texte, qu'une sanction ne peut à ce titre être prononcée légalement sans que l'intéressé ait été mis en mesure de présenter utilement sa défense ».

Il apparaît ainsi que pour interpréter une disposition législative, le Conseil d'État utilise expressément la notion d'un PGD applicable en dehors de tout texte, en l'espèce, le principe des droits de la défense.

Cet arrêt allait inaugurer une jurisprudence essentielle, aux termes de laquelle les PGD seront formellement intégrés dans la légalité. La théorie des PGD deviendra une théorie fondamentale en droit français. Elle sera très admirée à l'étranger, notamment dans les pays de l'Est, et donnera lieu à d'importantes études doctrinales. Elle reste toujours très actuelle et est assez difficile.

On ne saurait donner de liste complète des PGD affirmés en jurisprudence

Il est possible toutefois, en s'inspirant d'une distinction faite par Rivero, de faire apparaître certaines catégories.

Les principes exprimant la tradition politique de 1789

C'est d'abord le principe de la liberté et du respect des droits du citoyen[4].

C'est ensuite le principe de l'égalité avec ses formes multiples : égalité devant les services publics[5].

Égalité devant l'impôt [6].

Égalité devant les charges publiques[7].

C'est encore le principe de sécurité juridique avec les principes des droits de la défense selon lequel tout individu menacé d'une sanction doit pouvoir la discuter et en connaître les griefs[8].

Il existe des PGD relatifs aux droits du travail et qui même sans comporter une véritable forme de PGD de la première génération c'est a dire des principes qui apparaissaient fondamentaux deviennent de véritables référence juridiques. On peut a cet égard mentionner l'interdiction de licencier une femme enceinte caractérisée pas l'arrêt Dame Peynet[9] et le droit a une rémunération au moins égale au SMIC pour les agents non titulaires de la fonction publique par l'arret Aragnou[10].

Les principes relatifs à l'exercice des recours contentieux (principes relatifs à la justice)

  • Le principe selon lequel tout citoyen dispose d'un recours en justice et notamment d'un recours en annulation[11]. Par conséquent, le recours en annulation est un PGD.
  • Les obligations de motiver les jugements.
  • La possibilité pour le justiciable de se faire représenter[12].
  • Le principe de la non-rétroactivité des actes administratifs[13].
  • Le principe selon lequel un réfugié politique ne doit pas être remis à son pays d'origine[14]. C'est le dernier des PGD qui a été consacré. Il constitue une grande garantie en droit international.

Les grands principes qui dominent l'activité administrative, le fonctionnement de l'administration

Certains principes, qui exprimeraient le juste à l'état pur (justice, droit naturel)

C'est par exemple l'équité, comme elle a été consacrée dans le principe de l'enrichissement sans cause[15].

Les problèmes juridiques posés par la théorie des PGD

Se posent deux problèmes: le problème de la nature des PGD et le problème de leur valeur juridique.

La nature juridique des PGD

Les PGD sont considérés comme des éléments certains de la légalité

Ils ont force obligatoire pour l'administration. Un acte administratif qui a méconnu un tel principe peut faire l'objet d'une annulation et/ou entraîner la mise en cause de la responsabilité de l'administration.

On doit souligner aussi que les PGD sont utilisés par le juge dans l'interprétation de certaines lois. Sans doute, une loi peut méconnaître un PGD et le juge a le devoir d'appliquer la loi, mais il arrive souvent que le Conseil d'État, prenant en considération l'existence d'un PGD, donne alors de la loi une interprétation très hardie de nature à limiter ou à écarter la méconnaissance du principe (interprétation neutralisante). L'exemple le plus connu est Conseil d'État 7 février 1950 Dame Lamotte. Dans cet arrêt, le Conseil d'État a estimé qu'une loi « interdisant tout recours à l'encontre de certaines décisions », n'avait pas pour effet d'écarter le recours en excès de pouvoir, « recours qui est ouvert même sans texte contre tout acte administratif et qui a pour effet d'assurer, conformément aux principes généraux du droit, le respect de la légalité ».

La nature juridique à reconnaître aux PGD

À l'heure actuelle, la doctrine a tendance à reconnaître aux PGD la qualité d'actes jurisprudentiels. Sans doute, peut-on observer que le juge ne présente jamais les PGD comme étant son œuvre propre. Il affirme constamment dans ses arrêts qu'il « constate », « découvre » l'existence de ces principes et, effectivement, chaque fois que la chose est possible, il les rattache à des textes législatifs ou encore à des dispositions insérées dans les déclarations des droits[16].

En vérité, il faudrait dire qu'il s'agit plutôt d'une éthique formulée par le juge, lequel s'inspire d'éléments très variés : dispositions législatives, droit interne, [[Droit international public|droit international°], conceptions philosophiques, morales et politiques qui sont à la base de tout système juridique.

On ne peut cependant pas dire qu'il s'agit d'une simple constatation et qu'il n'y a pas création. Quant au contenu, on peut le rattacher au droit naturel.

La valeur juridique des PGD

Quelle place il convient de reconnaître aux PGD dans la hiérarchie des normes juridiques ? Cette question a reçu au cours du temps plusieurs réponses.

Sous la IIIe et IVe République, les PGD avaient la valeur législative, à égalité avec la loi. Conseil d'État 7 février 1958 Syndicat des propriétaires de chêne-liège d'Algérie. Cette affirmation a été remise en cause avec le système constitutionnel de 1958, où a été défendue la thèse de la valeur constitutionnelle des PGD. Vedel estimait qu'il s'agit d'une coutume constitutionnelle reposant sur la conviction que les principes étaient nés de leur consécration par de nombreux textes dans l'histoire.

Ces analyses ne sont plus valables aujourd'hui, compte tenu de la réponse sur ce problème formulée par René Chapus, qui soutient la thèse selon laquelle les PGD ne se situeraient ni au niveau constitutionnel, ni au niveau législatif, mais plutôt à un niveau intermédiaire entre la loi et le règlement, « à un niveau infra-législatif et supra-décretal ». Il en serait ainsi tout simplement en raison de la place qu'il faut réserver à la source formelle de ces principes : le juge. Le juge administratif, en effet, peut annuler les règlements administratifs mais il ne peut pas annuler les lois. Il devrait donc se situer entre l'autorité administrative et l'autorité législative.

Cette thèse permet effectivement d'expliquer que les règlement soient tenus de respecter les PGD mais pas la loi. Cette position a une grande qualité : elle correspond bien au droit positif. Elle a un inconvénient théorique : elle ne correspond pas à la place du juge dans la séparation des pouvoirs.

Les limites de la théorie de PGD

Il convient ici de faire apparaître le relativisme de la portée des PGD dans ses applications concrètes. Les PGD ne présentent pas, le plus souvent, un caractère et une portée absolue. On ne peut pas dire que toute méconnaissance par l'administration d'un tel principe est constitutive d'une illégalité.

On peut prendre par exemple le cas du principe d'égalité. Ce principe peut être méconnu dans certains cas par l'administration, comme, par exemple, en matière de politique économique. Dans ce domaine, l'intérêt général peut permettre une certaine illégalité[17].

De même encore, des remarques analogues peuvent être faites à propos de la liberté du commerce et de l'industrie, qui est toujours proclamée par le juge mais qui se trouve dans la réalité considérablement assouplie. Le juge admet qu'il est possible de passer outre à ce principe (« flexible droit »)[18].

Le Conseil constitutionnel sécrète lui aussi des PGD dans la sphère de sa compétence

Ces principes ont une valeur supra-législative et infra-constitutionnelle, et même la Cour européenne des Droits de l'Homme[19]. Le Conseil constitutionnel n'emploie pas l'expression de PGD mais de principes de valeur constitutionnelle. Il y a un risque: que le Conseil d'État et le Conseil constitutionnel se contredisent. En réalité, le Conseil d'État s'aligne sur le Conseil constitutionnel.

Notes et références

  1. Ex : Conseil d'État 9 mai 1913 Roubeau : p. 521.
    Conseil d'État 30 mai 1930 Chambre syndicale du commerce de détail de Nevers : p. 538
  2. Conseil d'État 10 août 1918 Arnaud : p. 837
  3. Conseil d'État 26 octobre 1945 Aramu : Recueil Lebon p. 213
  4. Conseil d'État 29 juillet 1950 Comité de défense des libertés professionnelles des experts-comptables : p. 492
  5. Conseil d'État 9 mars 1951 Société des concerts du conservatoire. Il s'agissait d'un orchestre dont la radio et la télé refusaient le passage
  6. Conseil d'État 22 février 1974 Association des maires de France : Dalloz 1974 p. 520
  7. Conseil d'État 7 février 1958 Syndicat des propriétaires de chêne-liège d'Algérie : AJDA 1958 II p. 130
  8. Conseil d'État 5 mai 1944 Dame Trompier-Gravier et CE 26.10.1945, Aramu, Recueil Lebon p. 213
  9. Conseil d'Etat, Assemblée, 1973-06-08, 80232, Publié au Recueil Lebon
  10. Conseil d'Etat, Section, 1982-04-23, 36851, Publié au Recueil Lebon
  11. Conseil d'État 17 février 1950 Dame Lamotte et Conseil d'État 7 février 1947 D'aillères
  12. Conseil d'État 27 avril 1956 Caisse artisanale d'assurance-vieillesse p. 175
  13. Conseil d'État 25 juin 1948 Société du journal l'"Aurore"
  14. Conseil d'État Assemblée 1er avril 1988 Bereciartua-Echarri
  15. Conseil d'État 14 avril 1961 Ministre de la reconstruction et du logement c/ Société Sud-Aviation : Recueil Lebon p. 236
  16. Conseil d'État 28 mai 1954 Barel. Conseil d'État 1er avril 1988 Bereciartua-Echarri, où le Conseil d'État rattache ce PGD au droit international
  17. Conseil d'État 8 octobre 1958 Société C.E.N.P.A. : p. 472
  18. Conseil d'État 28 octobre 1960 Martial de Laboulaye
  19. Conseil d'État 29 juin 1951 Syndicat de la raffinerie de souffre français p. 377

Voir aussi

Bibliographie

  • Maillot, Jean-Marc, La théorie administrativiste des principes généraux du droit, Paris : Dalloz, 2003, 766 p. ISBN 2-247-05197-9


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