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Sources écrites du droit administratif (fr)

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Parmi les éléments écrits de la légalité en droit administratif, il en est qui ne soulèvent pas de difficultés fondamentales

La Constitution

La norme constitutionnelle écrite principale est, actuellement, la Constitution de la Ve République.

Les textes constitutionnels, y compris le préambule, font partie de la légalité

Le Conseil d'État peut annuler un acte administratif contraire à la Constitution[1]. Dans la Constitution, on trouve surtout des règles concernant les problèmes de répartition entre le législateur et le pouvoir réglementaire ou concernant les droits et libertés publiques, la décentralisation (art. 72).

Une incertitude a existé concernant le préambule de cette constitution : avait-il une valeur juridique ? Une décision du Conseil constitutionnel du 16 juillet 1971 l'a affirmé, tout comme le Conseil d'État en 1960[2]. Ces solutions sont fondamentales, car elles permettent d'intégrer dans les normes constitutionnelles écrites la Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen ou encore les Principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, tous deux contenus dans le préambule de la Constitution de 1946 auquel se réfère celui de la Constitution de 1958. Il faut y ajouter, depuis un arrêt d'Assemblée du Conseil d'État daté du 19 juin 2008, "l'ensemble des droits et devoirs définis dans la Charte de l'environnement" de 2004.

Au bloc de constitutionnalité, il faut ajouter dorénavant la jurisprudence du Conseil constitutionnel

Il semble en effet que le Conseil d'État reconnaisse de plus en plus sûrement l'autorité des décision du Conseil constitutionnel. Quant au contenu de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, il a trait essentiellement au fonctionnement du juge administratif, incompétence, indépendance du juge et contrôle de légalité, égalité devant la justice, etc.

Les principes généraux du droit dégagés par le Conseil constitutionnel

Un problème particulier doit être cependant être signalé; il a trait au phénomène de l'écran législatif. On vise par là le cas où un acte administratif contraire à la Constitution, est cependant conforme à la loi, c'est-à-dire, qu'une loi inconstitutionnelle s'interpose entre l'acte et la Constitution. La loi, toute inconstitutionnelle qu'elle soit, fait écran entre le juge administratif et la Constitution car le juge judiciaire ou le juge administratif ne peut pas censurer l'inconstitutionnalité de la loi. La loi inconstitutionnelle, selon cette théorie, est un plafond qu'on ne peut pas percer[3]. La théorie de l'écran législatif fit notamment obstacle à l'application du droit communautaire jusqu'à son abandon.

L'art. 55 de la Constitution reconnaît aux accords régulièrement ratifiés, et sous réserve de réciprocité, une autorité supérieure à la loi nationale

Les traités internationaux sont des sources incontestables de la légalité et leur méconnaissance par l'administration peut être sanctionnée par le juge[4]. Ces sources se sont considérablement développées : elles proviennent des conventions et [[Traité international (fr)|traités internationaux}}, du droit communautaire dérivé ou encore des « principes généraux de droit international[5] » et de la coutume internationale[6].

La valeur juridique du droit international en droit interne est reconnue pour le droit international en général, mais ne l'était pas pour le droit communautaire européen. En effet, s'agissant du droit communautaire ou du Traité de Rome, il existait des solutions originales. Il s'agit de ce que l'on nomme aussi les « sources extranationales » qui désignent les sources internationales, européennes et communautaires.

Le Traité de Rome se différencie de la plupart des traités internationaux classiques en ce qu'il assure l'application dans l'ordre juridique interne des États membres, non seulement de ses propres dispositions, mais encore des décisions des organismes communautaires. Le traité instituant le marché commun a ainsi prévu dans un certain nombre de cas l'effet self executive ou d'applicabilité directe, soit des dispositions du traité, soit des dispositions des organes communautaires. C'est ainsi que les règlements communautaires sont directement applicables dans tout État membre sans qu'il soit nécessaire de passer par une ratification en France.

« Pour l'accomplissement de leur mission dans les conditions prévues au présent traité, le Conseil et la Commission arrêtent des règlements et des directives, prennent des décisions et formulent des recommandations ou des avis.
Le règlement a une portée générale. Il est obligatoire dans tous ses éléments et il est directement applicable dans tout État membre.
La directive lie tout État membre quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens.
La décision est obligatoire en tous ses éléments pour les destinataires qu'elle désigne.
Les recommandations et les avis ne lient pas[7] ».

Le Conseil d'État a cependant longtemps refusé de faire prévaloir cette solution. Il a longtemps refusé de faire valoir la règle communautaire sur la loi nationale postérieure qui la contredisait, alors que la Cour de cassation avait retenu la solution inverse[8]. Cette jurisprudence dissidente a pris fin. Aujourd'hui, le Conseil d'État s'est aligné sur la Cour de cassation et il fait prévaloir en tout état de cause le traité sur la loi[9].

La Cour de justice des Communautés européennes a compétence exclusive en matière de question préjudicielle intéressant les actes communautaires :

« La Cour de justice est compétente, dans les limites visées ci-après, pour connaître des litiges concernant :
a) l'exécution des obligations des États membres résultant des statuts de la Banque européenne d'investissement. Le conseil d'administration de la Banque dispose à cet égard des pouvoirs reconnus à la Commission par l'article 226 ;
b) les délibérations du conseil des gouverneurs de la Banque européenne d'investissement. Chaque État membre, la Commission et le conseil d'administration de la Banque peuvent former un recours en cette matière dans les conditions prévues à l'article 230 ;
c) les délibérations du conseil d'administration de la Banque européenne d'investissement. Les recours contre ces délibérations ne peuvent être formés, dans les conditions fixées à l'article 230, que par les États membres ou la Commission, et seulement pour violation des formes prévues à l'article 21, paragraphe 2 et paragraphes 5 à 7 inclus, des statuts de la Banque ;
d) l'exécution par les banques centrales nationales des obligations résultant du présent traité et des statuts du SEBC. Le conseil de la BCE dispose à cet égard, vis-à-vis des banques centrales nationales, des pouvoirs reconnus à la Commission par l'article 226 vis-à-vis des États membres. Si la Cour de justice reconnaît qu'une banque centrale nationale a manqué à une des obligations qui lui incombent en vertu du présent traité, cette banque est tenue de prendre les mesures que comporte l'exécution de l'arrêt de la Cour de justice.[10] . L'interprétation donnée par la Cour du texte s'impose à chaque État.

Les lois

Les lois constituent l'élément traditionnel de la légalité. Les sources du droit administratif comprennent naturellement les lois dont le respect s'impose dans tous les cas à l'administration.

Le droit public français définit traditionnellement la loi d'un point de vue organique et formel : la loi est l'acte des organes législatifs élaboré selon la procédure législative prévue par la Constitution.

En réalité, la définition de la loi (au sens strict du terme) est étroitement liée au régime constitutionnel en vigueur. Il existe cependant des actes qui ne sont pas des lois mais qui leur sont assimilés. Par exemple, en France, les actes antérieurs à la Révolution qui n'ont pas été abrogés comme certains textes de droit romain. Ce sont également les actes également de la période révolutionnaire, de la période consulaire, les actes impériaux impériaux, les décrets-lois des gouvernement provisoires de 1918 ou de 1939 - 1945, les textes pris en vertu de l'art. 16 de la Constitution (1962) et les ordonnances de l'art. 37 de la Constitution.

Ainsi, la Constitution de la Vème République a ajouté au traditionnel critère formel un critère matériel (c'est-à-dire relatif au contenu).

L'article 34 de la Constitution a ainsi défini un "domaine" de la loi opposé à un domaine réglementaire (article 37) dévolu à l'Exécutif, c'est-à-dire soit au Président de la République, soit au premier Ministre. Le problème principal ici, a trait à la répartition du domaine entre la loi et le règlement[11].

On distingue plusieurs catégories de lois : loi constitutionnelle, loi organique, loi référendaire, loi de finances, loi ordinaire, ... mais toutes ont la même force obligatoire pour les autorités administratives.

Les décisions de justice

Les décision de justice sont également considérées comme des éléments de la légalité car la décision de justice jouit de l'autorité de la chose jugée.

Les contrats

Les contrats constituent des éléments de la légalité pour les parties contractantes.

Parmi les éléments écrits de légalité, les déclarations des droits et les actes administratifs exécutoires soulèvent des problèmes

Les déclarations des droits et les préambules

Le problème

Avant 1946, il y avait une tradition inaugurée dans les constitutions de l'époque révolutionnaire

La Constitution de 1793 avait en effet adopté une position caractéristique. Il y avait d'abord la déclaration de 1789, qui énonçait des droits naturels mais ne précisait pas s'ils étaient des éléments de droit positif. Il y avait ensuite la constitution elle-même, qui contenait les garanties ses droits, c'est-à-dire des dispositions qui tendaient à réaliser l'insertion des droits et libertés dans la Constitution. Enfin, l'aménagement détaillé des droits relevait de la loi. Cette conception jurisprudentielle sera souvent reprise en France.

Toutefois, en 1875, le constituant avait seulement réglementé le fonctionnement des organes politiques. Les lois constitutionnelles ne définissaient pas les libertés et il n'y avait pas de déclaration des droits C'est dans de telles conditions qu'on s'est interrogé sur le problème de la valeur des déclarations des droits.

Certains ont estimé que les déclarations des droits avaient non seulement une valeur juridique mais même une valeur supra-constitutionnelle. Pour eux, les droits individuels auraient été déclarés pour toujours. Cette thèse sera fortement défendue par la doctrine française, mais il faut croire au droit naturel pour croire à cette théorie, si bien que de nombreux auteurs se sont refusés à reconnaître toute valeur supra-constitutionnelle aux déclarations des droits pour n'y voir que de simples déclarations dogmatiques.

Pourtant, à mi-chemin entre ces deux doctrines, certains auteurs proposent de reconnaître aux principes formulés dans les déclarations une valeur juridique constitutionnelle. Ils observent d'abord que la distinction entre déclaration et garantie des droits s'était progressivement estompée. La France, à la Libération retiendra l'idée d'un préambule et non pas d'une déclaration. Il sera donc aisé de soutenir que ce préambule a valeur constitutionnelle.

Après 1946 et 1958

Trois éléments nouveaux interviennent dans la Constitution. Il faut d'abord prendre en considération l'aspect extérieur ou formel des règles qui énoncent les droits. Or, à cet égard, en 1946, le contrôle de constitutionnalité qui était prévu ne commence qu'avec le titre 1er de la Constitution. La déclaration et le préambule sont donc dissociés de la Constitution.

En 1958, la déclaration est mieux intégrée dans la Constitution en ce sens que l'art. [[61 ne fait aucune réserve en ce qui concerne la déclaration et le préambule qui sont parfaitement intégrés dans la Constitution et font donc l'objet du contrôle de constitutionnalité.

On peut ajouter les arguments suivants. Le préambule a été élaboré et soumis à référendum comme la Constitution.

Enfin, sur le plan matériel, des remarques peuvent être faites, qui conduisent à exprimer certaines réserves pour intégrer le préambule. En effet, le préambule ne peut constituer, dit-on, une règle de droit que si son contenu a un caractère juridique. Or de ce point de vue, une règle de droit suppose nécessairement une prescription de conduite. Elle doit ordonner, interdire ou réglementer. Le préambule contient à côté de prescriptions précises, des prescriptions trop vagues, trop floues pour qu'on puisse en dégager une ligne de conduite sûre. C'est le cas par exemple de l'al. 9 qui prévoit la nationalisation de toute [[Entreprise (fr)|entreprise]} qui a le caractère d'un service public. C'est vague parce qu'on ne sait pas trop ce qu'est un service public. C'est le cas encore de l'al. 11, qui fait à la nation le devoir d'assurer à l'individu et à la famille les conditions de leur développement. Dans cette optique matérielle, on serait ainsi conduit à réserver le caractère juridique à certaines dispositions seulement du préambule : celles qui sont suffisamment précises.

La position du juge administratif

Le juge administratif semble enfin s'être fixé en posant comme principe que seules les dispositions qui présentent une précision suffisante constituent des règles de droit[12]. Le sieur Tallagrand demandait une indemnisation en réparation du préjudice que lui avait causé l'appropriation par l'État algérien d'une école d'enseignement privé lui appartenant. Le requérant invoquait les dispositions du préambule de la Constitution de 1946 aux termes duquel « La Nation proclame la solidarité et l'égalité de tous les Français devant les charges résultant de calamités nationales ». Le Conseil d'État a décidé que « le principe ainsi posé ne peut servir de base à une action contentieuse en indemnité ». C'est donc la preuve que le Conseil d'État n'entend reconnaître valeur juridique qu'à certaines dispositions seulement du préambule, celles qui édictent des dispositions assez précises[13].

Les actes administratifs unilatéraux exécutoires

En ce qui concerne les décisions exécutoires, on rencontre des problèmes de valeur juridique, mais aussi, et surtout, des problèmes de hiérarchie pour les actes administratifs qui sont édictés par l'administration. Il s'agit d'une légalité que l'administration s'impose à elle même. On devra tenir compte à la fois d'éléments matériels et également d'éléments formels, à savoir la qualité des auteurs de l'acte.

Hiérarchie des actes administratifs

Pour ce faire, on retient avant tout un critère matériel fondé sur le caractère réglementaire ou individuel de l'acte. L'acte réglementaire a en principe une valeur supérieure à celle ce l'acte non-réglementaire. C'est ainsi qu'une mesure individuelle doit toujours se conformer à une mesure réglementaire.

Il en est ainsi sans hésitation lorsque la mesure réglementaire a été prise par une autorité supérieure dans la hiérarchie. Ex: la décision individuelle d'un maire ne peut méconnaître un décret ministériel réglementaire.

Il en est ainsi encore lorsque le règlement général a été pris par l'autorité qui est l'auteur de la décision individuelle elle même. On dit alors que l'autorité administrative ne peut méconnaître ses propres règlements. On invoque un vieil adage romain : « Tu dois respecter la règle même que tu as posée »[14]. Bien sûr, il est toujours possible à l'autorité administrative qui a pris un règlement, de le modifier[15].

Enfin, la jurisprudence a même décidé qu'une décision individuelle d'une autorité supérieure ne pouvait méconnaître une règlement pris par une autorité inférieure dans la hiérarchie[16].

L'élément matériel

L'élément matériel intervient aussi et contribue à préciser la hiérarchie. Les règles écrites prennent dans la hiérarchie une place qui est déterminée en fonction de l'autorité qui les a posées. C'est ainsi que les règlements administratifs sont eux-mêmes hiérarchisés. Le règlement pris par une autorité subordonnée doit respecter le règlement pris par une autorité supérieure. On trouve en première place les règlements du Président de la République, ceux du Premier ministre (dyarchie), ceux des ministres, ceux des préfets et ceux des maires des communes.

Une difficulté toutefois est soulevée par l'insertion des décisions exécutoires dans les décisions individuelles dans la légalité.

Certains auteurs hésitent à voir dans les décisions individuelles d'authentiques éléments de légalité parce qu'ils refusent de voir des règles de droit dans les règles qui ont une portée individuelle. Pourtant, il est certain que la décision individuelle est obligatoire pour l'administration. On verra que le juge administratif déclare illégales les décisions portant retrait de décision individuelles antérieures qui ont créé des droits. Le juge estime que les décisions individuelles font partie du droit.

Notes et références

  1. Conseil d'État 12 février 1960 Société Eky : Recueil Lebon p. 101
  2. C.E., Sect, 12 février 1960, Eky
  3. Par exemple Ch. crim. 26 février 1974 : Dalloz 1974 p. 273
  4. Conseil d'État 30 mai 1952 Dame Kirkwood : RDP 1952 p. 781
  5. C.E., 23 octobre 1987, Société Nachfolger Navigation Company à propos des conséquences dommageables d'une mesure de police ordonnant la destruction d'une épave en haute mer
  6. CE, 6 juin 1997, Aquarone
  7. Art. 249 al. 2 TCE, ancien art. 189 CEE. Conseil d'État 10 juillet 1970 Syndicat national du commerce extérieur des céréales : AJDA 1971 p. 29
  8. C. cass. 24 mai 1975 Société des Cafés Jacques Vabre : AJDA 1975 p. 567
  9. Conseil d'État ass. 20 octobre 1989 Nicolo
  10. Art. 237 TCE, ancien art. 177 CEE
  11. Art. 34 et 37 de la Constitution
  12. Conseil d'État 29 novembre 1968 Tallagrand : RDP 1969 p. 686
  13. Même position du Conseil d'État dans décembre 1978 G.I.S.T.I.: Droit social 1979 p. 57 à propos du droit à une vie familiale normale. Conseil d'État 27 septembre 1985 France, Terre d'asile: p. 263
  14. Conseil d'État 11 janvier 1952 Préfet de police : Recueil Lebon p. 27
  15. Conseil d'État 2 novembre 1960 Ville de Sidi-bel-Abbes : Recueil Lebon p. 928
  16. Conseil d'État 3 juillet 1931 Ville de Clamart : Sirey 1932 III p. 1 à propos de l'application par le ministre des finances d'un règlement municipal

Voir aussi