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Autorité de régulation des mesures techniques (fr) : Différence entre versions

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Une demande formulée auprès de l’ARMT se fait par lettre recommandée ou par voie électronique. Selon l’[[CPIfr:R311-12|article R311-12]] du [[Code de la propriété intellectuelle (fr)|CPI]] plusieurs mentions sont obligatoires. Il faut fournir l’identité du demandeur, son adresse, le cas échéant son statut, voir le mandat donné à son représentant ou à son conseil. Doit également être apportés les pièces justifiant l’appartenance du demandeur à la catégorie autorisée à saisir l’ARMT. Doit être indiqué l’objet de la saisine, motivé et assorti de pièces mais aussi l’identité et l’adresse des parties mises en causes lorsqu’elles sont connues du demandeur. Le demandeur doit préciser “la nature et le contenu du projet dont la réalisation nécessite l’accès aux informations essentielles à l’interopérabilité qu’il sollicite”. De plus, l’ARMT n’agissant qu’après l’apparition d’un conflit, le demandeur doit apporter la preuve du refus de dévoiler les informations essentielles à l’interopérabilité. L’absence de ces éléments n’entraîne pas automatiquement l’irrecevabilité de la demande. En effet, lorsque des informations sont manquantes, une demande de régularisation est adressée au demandeur qui doit alors compléter son dossier dans un délai d’un mois.
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Une demande formulée auprès de l’ARMT se fait par lettre recommandée ou par voie électronique. Selon l’[[CPIfr:R331-12|article R331-12]] du [[Code de la propriété intellectuelle (fr)|CPI]] plusieurs mentions sont obligatoires. Il faut fournir l’identité du demandeur, son adresse, le cas échéant son statut, voir le mandat donné à son représentant ou à son conseil. Doit également être apportés les pièces justifiant l’appartenance du demandeur à la catégorie autorisée à saisir l’ARMT. Doit être indiqué l’objet de la saisine, motivé et assorti de pièces mais aussi l’identité et l’adresse des parties mises en causes lorsqu’elles sont connues du demandeur. Le demandeur doit préciser “la nature et le contenu du projet dont la réalisation nécessite l’accès aux informations essentielles à l’interopérabilité qu’il sollicite”. De plus, l’ARMT n’agissant qu’après l’apparition d’un conflit, le demandeur doit apporter la preuve du refus de dévoiler les informations essentielles à l’interopérabilité. L’absence de ces éléments n’entraîne pas automatiquement l’irrecevabilité de la demande. En effet, lorsque des informations sont manquantes, une demande de régularisation est adressée au demandeur qui doit alors compléter son dossier dans un délai d’un mois.
  
 
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Version actuelle en date du 12 octobre 2009 à 21:59


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Sommaire

Facteurs de création de l'ARMT

Le marché des œuvres de l'esprit en crise

Crise en France

Depuis la fin des années 90, le marché du disque et du cinéma connaissent une grave crise. En 2006, le Syndicat de l’édition vidéo déplorait une baisse du marché du DVD de l’ordre de 6% à 7% en valeur, soit 1,65 milliard d’euros. Quant au marché du disque, selon les derniers chiffres publiés par la SNEP, les ventes de musique ont chuté de 12,2 % au premier semestre 2008, par rapport à la même période l'an dernier. Depuis 2002, le marché a perdu 52 % de sa valeur, pour tomber à 279 millions d'euros sur les six premiers mois de 2008. Les ventes sur support physique (CD essentiellement) ont chuté de 17,7 %. Du côté des ventes numériques (13 % du total), la croissance est bien présente, mais insuffisante : + 56,9 %. Cette crise ne touche pas seulement la France.

Crise aux États-Unis

En 2003, Jack Valenti, président de la Motion Picture Association of America estimait que plus de 600 000 films piratés étaient téléchargés chaque jour sur internet aux Etats Unis, engendrant une perte annuelle pour l’industrie cinématographique évaluée à 3,5 milliards de dollars[1]. Nielsen Soundscan, qui compile les données de vente des disques aux États-Unis, indique que les ventes d'albums ont encore baissé de 11 % au premier semestre 2008, à 204 millions d'unités.

Cause imputée à la croise: le pair à pair (peer to peer)

Les industriels imputent cette crise aux téléchargements en masse d’oeuvres piratées rendues possible grâce au peer to peer. « Le principe du peer to peer est de mettre directement en liaison un internaute avec un autre internaute qui possède un fichier convoité. Il existe deux méthodes pour accomplir cette tâche. La méthode centralisée est basée sur un ou plusieurs serveurs qui possèdent la liste des fichiers partagés et qui orientent les internautes vers l’internaute possédant le fichier convoité. La méthode décentralisée utilise chaque internaute comme un mini serveur et ne possède aucun serveur fixe »[2]. Le peer to peer permet aux internautes de partager en toute illégalité leurs fichiers, ce qui permet à tous de se procurer musique et vidéo gratuitement et sans autorisation des ayants droits. Il faut noter qu’avec le développement de l’internet haut débit, le téléchargement se trouve grandement facilité et ne connaît aucune frontière géographique. Alors même que l’on peut relever d’autres causes à cette crise comme notamment l’évolution des usages de consommation à travers l’évolution des supports, le peer to peer est désigné comme seul responsable de la crise. C’est dans ce contexte, que la communauté internationale à commencer à développer une riposte, suivit par la communauté européenne et ensuite transposé aux niveaux nationaux.

Réponse à la crise: les mesures techniques de protection (MTP)

Au niveau international

Pour protéger les oeuvres de l’esprit, la communauté internationale a eu recours à la technique afin de renforcer la protection issue du droit. Les deux traités OMPI du 20 décembre 1996 ont développé une solution pour protéger le droit d’auteur en recourant aux mesures techniques de protection, les mesures techniques de protection (MTP). Ces traités sur le droit d’auteur et les droits connexes visaient à mettre au goût du jour la Convention de Berne. Les MTP sont prévues par l’article 11 du traité sur le droit d’auteur et sont reprise par l’article 18 du traité sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes. Ces articles disposent que « les parties contractantes doivent prévoir une protection juridique appropriée et des sanctions juridiques efficaces contre la neutralisation des mesures techniques efficaces » qui sont mises en œuvre par les auteurs, ou les artistes interprètes, les exécutants, et les producteurs de phonogrammes dans le cadre de l’exercice de leurs droits.

Au niveau de l'Union européenne

L’Union européenne, signataire des traités de l’OMPI, a transposé en droit communautaire les dispositions de ces traités dans la Directive 2001/29 du 22 mai 2001 relative à certains aspects du droit d’auteur dans la société de l’information[3]. Le chapitre III de la directive intitulé “ Protection des mesures techniques et information sur le régime des droits” pose le droit pour les éditeurs d’utiliser les mesures techniques de protection, et l’obligation pour les États membres d’interdire leur contournement. L’article 6.3 de la directive définit les Mesure technique de protection comme « toute technologie, dispositif ou composant qui, dans le cadre normal de son fonctionnement, est destiné à empêcher ou à limiter, en ce qui concerne les oeuvres ou autres objets protégés, les actes non autorisés par le titulaire d’un droit d’auteur ou d’un droit voisin du droit d’auteur prévu par la loi ».

Au niveau national

La directive du 22 mai 2001[4] a été transposé dans la législation française par la loi DADVSI du 1er août 2006[5]. L’article 13 de cette loi a introduit l’article L331-5 du Code de la propriété intellectuelle (CPI) qui définit les mesures techniques de protection comme “toute technologie, dispositif, composant (...) destiné à empêcher ou à limiter les utilisations non autorisées par les titulaires d’un droit d’auteur ou d’un droit voisin du droit d’auteur d’une oeuvre, autre qu’un logiciel, d’une interprétation, d’un phonogramme, d’un vidéogramme ou d’un programme (...), tels que le cryptage, le brouillage ou tout autre transformation de l’objet de la protection ou un mécanisme de contrôle de la copie qui atteint cet objectif de protection”. Cette définition large permet une protection juridique de toutes les MTP, indépendamment de leur forme. En plus des MTP, la loi DADVSI ajoute des mesures techniques d'information (MTI) qui, elles visent à informer sous forme électronique l’utilisateur de la titularité des droits et du régime des droits applicable à l’œuvre. La loi sanctionne pénalement le contournement des MTP et des MTI.

Les problèmes suscités par les mesures techniques de protection

Les conséquences des MTP sur le consommateur ne sont pas négligeables, puisque celui ci se voit contraint de changer considérablement ses habitudes. Tandis que certaines MTP empêchent l’usage des oeuvres du commerce dans certains lecteurs, d’autres restreignent ou rendent tout simplement impossible la moindre copie de l’oeuvre légalement achetée par le détenteur.

La copie privée

L’objectif de la majorité des MTP est d’empêcher le consommateur de réaliser des copies de l’œuvre acquise. Face à la multiplication des MTP sur les supports des œuvres, le consommateur a tenté de faire admettre l’illicéité de ce procédé niant l’exception de copie privée jusqu’alors respectée. Cette prétention s’est illustrée dans la célèbre affaire Mulholland drive[6] où le juge a refusé de reconnaître un droit à la copie privée et a qualifié celle ci de simple exception ne pouvant faire obstacle à l’insertion de dispositifs anti-copie dans la mesure où elle aurait alors “pour effet de porter atteinte à l’exploitation normale de l’oeuvre.” Dans son arrêt du 4 avril 2007, la Cour d’appel de Paris qualifie le droit au bénéfice de la copie privée “d’exception légale au principe de la prohibition des reproductions d’une oeuvre protégée[7]. À ce titre elle serait susceptible de servir de moyen de défense, mais ne pourrait constituer un droit subjectif invocable à l’appui d’une demande principale. Au vu de la jurisprudence actuelle, le consommateur ne peut remettre en cause une MTP afin de solliciter la possibilité de faire une copie de l’oeuvre légalement achetée. Les nombreux contentieux relatifs à la présence de MTP sur certaines oeuvres témoignent du mécontentement du consommateur face à ces restrictions. Selon l’UFC Que choisir, les MTP créent “un déséquilibre inacceptable au détriment des consommateurs qui ne peuvent plus bénéficier du progrès technique, qu’ils paient pourtant au prix fort lorsqu’ils achètent des matériels de lecture et d’enregistrement, ni jouir loyalement des oeuvres artistiques et culturelles qu’ils ont licitement acquises en dépit de la taxe importante payée pour pouvoir copier”. En octobre 2003, le député Didier Mathus, a déposé une proposition de loi visant à interdire les systèmes anti-copies. Selon lui, “facilement contournables par les professionnels du piratage, ces systèmes de verrouillage portent directement et uniquement atteinte au droit des consommateurs à la copie familiale et privée sans but lucratif”[8]. La proposition de loi consistait à modifier l’article L122-5 du CPI pour préciser que les MTP ne peuvent avoir pour effet d’interdire les copies strictement réservées à l’usage privée. Pour Mathus, “il existe un risque d’esquisser une société orwellienne où les grands industriels contrôleraient la circulation de la matière grise par une sorte de droit de péage, les DRM,” Il souligne son propos en évoquant le fait que “les MTP mis en place par EMI rendaient impossible l’exercice pourtant légal de la copie privée et interdisaient même de facto la lecture des CD sur de simples autoradios”[9].

Malgré toutes ces protestations, la loi DADVSI a légalisé les MTP et a ainsi restreint considérablement l’exception pour copie privée.

Si les MTP posent des problèmes concernant la copie privée elles en posent aussi concernant l’interopérabilité.

Interopérabilité

La notion d’interopérabilité demeure un sujet de débat relancé par la légalisation des MTP. La directive du 14 mai 1991 relative à la protection juridique des programmes d’ordinateur[10], donne une définition de l’interopérabilité. Elle précise dans son considérant 10 “qu'un programme d'ordinateur est appelé à communiquer et à opérer avec d'autres éléments d'un système informatique et avec des utilisateurs; que, à cet effet, un lien logique et, le cas échéant, physique d'interconnexion et d'interaction est nécessaire dans le but de permettre le plein fonctionnement de tous les éléments du logiciel et du matériel avec d'autres logiciels et matériels ainsi qu'avec les utilisateurs”. Or elle nomme formellement cette interconnexion et interaction fonctionnelle comme étant une interopérabilité. Dès lors elle détermine cette notion comme étant “la capacité d'échanger des informations et d'utiliser mutuellement les informations échangées”[11]. En matière de propriété intellectuelle, cette interaction permet à des systèmes informatiques de communiquer entre eux et de reconnaître par exemple un code inséré en tant que protection sur le support d’une oeuvre. Par exemple, un CD sur lequel une MTP a été introduite, pour pouvoir être lu, il devra être déchiffré par le lecteur de l’utilisateur. Les MTP peuvent empêcher l’utilisation normale du support acheté car elles mettent en place des procédés de codage qui limitent l’interopérabilité. Or, certains éditeurs et producteurs bloquent volontairement l’interopérabilité afin que l’oeuvre ne soit lisible que sur leur propre matériel. Cette situation s’est révélé vrai dans de nombreux cas, notamment celui de Apple et de son catalogue de musique en ligne, sur sa plate-forme Itunes, lisible uniquement par son lecteur, l’Ipod. Ce procédé leur permet d’asseoir leur monopole dans un secteur d’activité. Ainsi, ils n’ont aucun intérêt à divulguer les informations essentielles à l’interopérabilité de leurs MTP. Face à cette réalité, le consommateur n’a quasiment aucun recours. Avant la censure du Conseil constitutionnel du 27 juillet 2006[12], le législateur avait prévu que les atteintes aux systèmes de protection ne seraient pas poursuivies si elle étaient faites à des fins d’interopérabilité. Désormais ce contournement ne fait plus l’objet d’une exception et tombe sous le coup de l’incrimination pénale prévue par la loi DADVSI[13].

Face aux dérives suscitées par les MTP concernant l’interopérabilité et la copie privée, le législateur a crée l’Autorité de régulation des mesures techniques de protection afin de trouver un équilibre entre les prétentions des consommateurs et celles des titulaires de droits.

L’autorité de régulation des mesures techniques de protection (ARMT)

L'institution

L’autorité de régulation des mesures techniques de protection communément appelée ARMT a été crée par la loi DADVSI[14].

Un collège de six membres

Selon les dispositions de l’article L331-18 du Code de la propriété intellectuelle, l’ARMT est un organe collégial composé de six membres nommés par décret. Il s’agit d’un conseiller d'État désigné par le vice président du Conseil d'État, un conseiller à la Cour de cassation désigné par le premier président de la Cour de cassation, un conseiller maître à la Cour des comptes désigné par le premier président de la Cour des comptes, un membre désigné par le président de l'Académie des technologies, en raison de ses compétences en matière de technologies de l'information, un membre du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique désigné par le président du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique, et le Président de la Commission de la rémunération pour copie privée prévue à l’article L311-5 du CPI qui participera avec voix consultative seulement aux travaux de l’Autorité comme le prévoit la loi. Par décret en date du 3 mai 2007, le ministre de la culture et de la communication a nommé les six membres de l’ARMT. Il s’agit de Jean Musitelli (conseiller d’État), Marie-Françoise Marais ( conseillère à la Cour de cassation), Patrick Bouquet ( conseiller maître à la Cour des comptes), Pierre Sirinelli ( membre du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique), Christian Saguez ( président de la commission des Technologies de l’Information et de la Communication de l’Académie des Technologies) et Tristan d’Albis ( président de la Commission de la rémunération pour copie privée).

Une Autorité indépendante

Les membres du collège sont désignés par les juridictions ou assemblées auxquels ils appartiennent. Ils sont nommés pour une durée de six ans. Leur mandat n’est ni renouvelable ni révocable. Le Président de l’Autorité est choisi par les membres parmi l’un des trois magistrats. Actuellement le Président est Jean Musitelli, conseiller d'État. Les membres exercent leur mission en toute indépendance et ne peuvent recevoir aucune instruction de quelque autorité que ce soit. Les membres de l’Autorité relèvent d’un régime d’incompatibilité strict. L’article L331-19 du CPI dispose en effet que “Les fonctions de membre de l'Autorité sont incompatibles avec les fonctions de dirigeant ou de salarié ou les qualités d'ancien dirigeant ou d'ancien salarié d'une sociétés de perception et de répartition des droits ou de toute entreprise exerçant une activité de production de phonogrammes ou de vidéogrammes ou offrant des services de téléchargement d'oeuvres protégées.” Il ne peuvent davantage “ détenir directement ou indirectement des intérêts dans une entreprise exerçant une des activités mentionnées au premier alinéa.”, ni “participer à une délibération concernant une entreprise ou une société contrôlée, au sens de l'article L. 233-16 du Code de commerce, par une entreprise dans laquelle il a, au cours des trois années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat”.

Une autorité administrative

L’article L331-20 du CPI indique clairement que l’ARMT doit être administrée par un secrétaire général placé sous l’autorité du Collège de l’Autorité, le secrétaire général ayant autorité sur les services qui seront mis à sa disposition. Les crédits nécessaires à l’accomplissement des missions de l’ARMT sont inscrits au budget de L’État. Le Président de l’Autorité est ordonnateur des dépenses. Les collaborateurs de l’ARMT sont des fonctionnaires et des magistrats de l’ordre judiciaire, détachés ou mis à disposition, et des agents contractuels de l’État.

Les missions de l'ARMT

L’ARMT doit remplir deux fonctions essentielles: une fonction générale de veille dans le domaine des MTP et des fonctions de conciliation, voire de décision de nature quasi juridictionnelle.

Mission générale de veille

Selon l’article L331-17 du CPI, l’ARMT assure une mission générale de veille dans les domaines des mesures techniques de protection et d'identification des œuvres et des objets protégés par le droit d'auteur ou par les droits voisins. Dans ce cadre elle doit rendre compte chaque année, dans un rapport remis au Gouvernement et au Parlement, des évolutions les plus marquantes qu'elle a constatées dans ce domaine et de leur impact prévisible sur la diffusion des contenus culturels. Elle peut être consultée par les commissions parlementaires sur les adaptations de l'encadrement législatif que ces évolutions rendraient nécessaires. Le rapport annuel de L’ARMT est un document d’information, il reprend systématiquement les orientations établies au cours de l’année écoulée et les décisions rendues pour le règlement des différends. Dans cet ordre d’idée, on considère généralement que les autorités administratives indépendantes (AAI) ont un pouvoir doctrinal. En effet, les avis ou les recommandations des AAI sont très souvent suivis par les responsables auxquels ils sont adressés. L’article L331-17 du CPI qui précise les missions de l’ARMT et qui fait référence à son rôle d’information et de consultation des pouvoirs publics, traduit ce pouvoir doctrinal. Le premier rapport de l’ARMT a été rendu public le 18 décembre 2008.

Mission de régulation

Dans le cadre de sa mission de régulation, l’ARMT tente de concilier d’une part les MTP et l’interopérabilité et d’autre part les MTP et la copie privée. Pour ce faire l’ARMT intervient pour régler les différends nés entre les parties et que ces dernières ne sont pas parvenues à régler à l’amiable.

CONCILIATION MTP, INTEROPÉRABILITÉ

Selon l’article L331-5 alinéa 4 du CPI “Les mesures techniques ne doivent pas avoir pour effet d'empêcher la mise en oeuvre effective de l'interopérabilité, dans le respect du droit d'auteur.” Afin de permettre la conciliation des MTP et de l’interopérabilité, l’article L331-5 alinéa 4 du CPI préconise la communication d’informations essentielles[15]. L'Autorité de régulation des mesures techniques veille à ce que les mesures techniques n'aient pas pour conséquence, du fait de leur incompatibilité mutuelle ou de leur incapacité d'interopérer, d'entraîner dans l'utilisation d'une oeuvre des limitations supplémentaires et indépendantes de celles expressément décidées par le titulaire d'un droit d'auteur sur une oeuvre autre qu'un logiciel ou par le titulaire d'un droit voisin sur une interprétation, un phonogramme, un vidéogramme ou un programme. Les MTP empêchent souvent l’utilisation normale du support acheté car elles mettent en place des verrous technologiques et des procédés de codage qui limitent l’interopérabilité. Or le consommateur supporte mal que le support qu’il a acheté ne soit exécutable que sur une catégorie d’appareil. Il doit pouvoir jouir de la possibilité de lire n’importe quelle oeuvre sur n’importe quel appareil. C’est pourquoi l’ARMT doit veiller à ce que les MTP n’empêchent pas la mise en oeuvre effective de l’interopérabilité.

Les personnes pouvant saisir l’ARMT

L’article L331-5 alinéa 4 du Code de la propriété intellectuelle énumère les personnes susceptibles de solliciter l’appui de l’ARMT. Il s’agit de tout éditeur de logiciel, tout fabricant de système technique et tout exploitant de service. Dès lors, seules ces trois catégories ont la capacité de saisir l’ARMT afin de garantir l’interopérabilité des systèmes et des services existants. Les rédactions précédentes de la loi envisageaient une ouverture plus large de ce mode de saisine, puisque tout intéressé y avait accès. Le consommateur se trouve donc écarté de ce recours. Le législateur a estimé que les informations essentielles constituaient des données de nature très technique. Il a donc préféré privilégier la conservation du secret industriel entourant les MTP. Si le public se trouve évincé de cette procédure, le Conseil constitutionnel a garanti dans sa décision du 27 juillet 2006 que les justiciables qui ne peuvent saisir l’ARMT disposent des voies juridictionnelles ouvertes en pareille matière.

Informations indispensables à toute demande devant l’ARMT

Une demande formulée auprès de l’ARMT se fait par lettre recommandée ou par voie électronique. Selon l’article R331-12 du CPI plusieurs mentions sont obligatoires. Il faut fournir l’identité du demandeur, son adresse, le cas échéant son statut, voir le mandat donné à son représentant ou à son conseil. Doit également être apportés les pièces justifiant l’appartenance du demandeur à la catégorie autorisée à saisir l’ARMT. Doit être indiqué l’objet de la saisine, motivé et assorti de pièces mais aussi l’identité et l’adresse des parties mises en causes lorsqu’elles sont connues du demandeur. Le demandeur doit préciser “la nature et le contenu du projet dont la réalisation nécessite l’accès aux informations essentielles à l’interopérabilité qu’il sollicite”. De plus, l’ARMT n’agissant qu’après l’apparition d’un conflit, le demandeur doit apporter la preuve du refus de dévoiler les informations essentielles à l’interopérabilité. L’absence de ces éléments n’entraîne pas automatiquement l’irrecevabilité de la demande. En effet, lorsque des informations sont manquantes, une demande de régularisation est adressée au demandeur qui doit alors compléter son dossier dans un délai d’un mois.

Le déroulement de la procédure

Dans le cas ou l’interopérabilité ne serait pas assurée, l’article L331-7 du CPI dispose que tout éditeur de logiciel, tout fabricant de système technique et tout exploitant de service peut, en cas de refus d'accès aux informations essentielles à l'interopérabilité, demander à l'Autorité de régulation des mesures techniques de garantir l'interopérabilité des systèmes et des services existants, dans le respect des droits des parties, et d'obtenir du titulaire des droits sur la mesure technique les informations essentielles à cette interopérabilité c’est à dire la documentation technique et les interfaces de programmation nécessaires pour permettre à un dispositif technique d’accéder à une oeuvre protégée par une mesure technique et aux informations jointes sous forme électronique. La procédure décrite dans l’article L331-7 du CPI se déroule en deux temps. Tout d’abord, l’Autorité agit comme un conciliateur dans la mesure où la conclusion d’un accord entre les parties semble être la voie privilégiée. L’Autorité a un pouvoir de transaction, elle peut ainsi “accepter des engagements proposés par les parties et de nature à mettre un terme aux pratiques contraires à l'interopérabilité.” En cas d’accord, l’ARMT dresse un procès verbal de conciliation ayant force exécutoire, qui fait l’objet d’un dépôt au greffe du tribunal d’instance. Dans un deuxième temps, à défaut de conciliation dans un délai de deux mois à compter de sa saisine et après avoir mis les intéressés à même de présenter leurs observations, l’ARMT peut, par une décision motivée, soit rejeter la demande dont elle est saisie, soit émettre “une injonction prescrivant, au besoin sous astreinte, les conditions dans lesquelles le demandeur peut obtenir l'accès aux informations essentielles à l'interopérabilité et les engagements qu'il doit respecter pour garantir l'efficacité et l'intégrité de la mesure technique, ainsi que les conditions d'accès et d'usage du contenu protégé.” Elle doit alors définir les conditions d’accès à ces informations, en précisant clairement la durée et le champs d’application de l’accès, ainsi que l’indemnité compensatrice[16]. Les décisions sont obtenues au terme d’une procédure contradictoire ouvrant aux parties la faculté de faire connaître leur position respective, l’instruction est menée par des rapporteurs, rapporteurs qui, selon la Cour de cassation, ne pourront participer aux délibérations finales de l’Autorité.

Les décisions de l’Autorité sont rendues publiques, dans les limites du secret protégé par la loi. Elles sont susceptibles de recours devant la Cour d'appel de Paris, le recours ayant un effet suspensif. En cas d'inexécution de ses injonctions ou de non-respect des engagements qu'elle a acceptés, L'autorité a le pouvoir d'infliger une sanction pécuniaire[17]. “Chaque sanction pécuniaire est proportionnée à l'importance du dommage causé aux intéressés, à la situation de l'organisme ou de l'entreprise sanctionné et à l'éventuelle réitération des pratiques contraires à l'interopérabilité. Elle est déterminée individuellement et de façon motivée. Son montant maximum s'élève à 5 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques contraires à l'interopérabilité ont été mises en oeuvre dans le cas d'une entreprise et à 1, 5 million d'euros dans les autres cas.”

Collaboration du Conseil de la concurrence

L’Autorité est habilitée à saisir le Conseil de la concurrence des abus de positions dominante ou des pratiques entravant le libre exercice de la concurrence dont elle pourrait avoir connaissance dans le secteur des MTP (16). Cette saisine est introduite dans le cadre d’une procédure d’urgence dans les conditions prévues à l’article L464-1 du Code de commerce. Le Président de l’ARMT peut saisir pour avis, le Conseil de le concurrence.

La communication entre ces deux autorités joue dans les deux sens puisque le Conseil de la concurrence, selon l’article L331-7 du CPI, “communique à l’autorité toute saisine entrant dans le champs de compétence de celle ci et recueille son avis sur les pratiques dont il est saisi dans le secteur des mesures techniques”. On peut s’attendre à des saisines croisées. Il est nécessaire pour l’ARMT de collaborer avec le Conseil de la concurrence et ce car les MTP peuvent être un moyen pour les industriels de verrouiller un marché, s’ils nient l’interopérabilité. Le droit à l’interopérabilité semble donc être un droit à pouvoir faire concurrence, rattaché à la liberté de commerce et de l’industrie.

Prééminence de la protection des MTP sur l’interopérabilité

La loi DADVSI[18] favorise la préservation de l’efficacité des MTP dans la mesure où la publication du code source et de la documentation technique du logiciel interopérant est permise sauf si le titulaire des droits “apporte la preuve que celle-ci aurait pour effet de porter gravement atteinte à la sécurité et à l'efficacité de ladite mesure technique.” De plus, le Conseil Constitutionnel a estimé qu’à défaut du consentement des titulaires de droits sur les MTP de communiquer les informations essentielles à l’interopérabilité, cette communication devra entraîner leur indemnisation. Tout est fait pour favoriser au maximum la protection des MTP.

CONCILIATION, MTP, EXCEPTIONS AU DROIT D’AUTEUR ET AUX DROITS VOISINS

En matière d’exceptions au droit d’auteur et aux droits voisins, l’article L331-8 du CPI dispose que l’ARMT doit veiller à ce que la mise en œuvre des mesures techniques de protection n’ait pas pour effet de priver les bénéficiaires des exceptions de copie privée, de recherche, de conservation et de consultation sur place et celle au profit des personnes handicapées.

Les personnes pouvant saisir l’ARMT

L’article L331-13 du CPI admet la saisine de l’ARMT par toute personnes bénéficiaire des exceptions de copie privée, de recherche, de conservation et de consultation sur place et celle au profit des personnes handicapées, aux fins de régler “tout différend portant sur les restrictions que les MTP (...) apportent au bénéfice desdites exceptions.” Cette faculté est également ouverte à toute personnes morale agréée qui la représente. Selon l’article R331-13 du CPI “sont regardées comme des personnes morales représentant les bénéficiaires des exceptions: les associations de défense des consommateurs agréées en application des dispositions de l’article L411-1 du Code de la consommation, les associations agréées à cet effet par le ministre chargé de la Culture”. Ainsi, le consommateur ou son représentant demeure l’interlocuteur privilégié de l’ARMT en matière de conciliation des MTP avec les exceptions au droit d’auteur et aux droits voisins.

Informations indispensables à toute demande devant l’ARMT

Une demande formulée auprès de l’ARMT se fait par lettre recommandée ou par voie électronique. Selon l’article R331-12 du CPI, plusieurs mentions sont obligatoires. Il faut fournir l’identité du demandeur, son adresse, le cas échéant son statut, voir le mandat donné à son représentant ou à son conseil. Doit également être apportés les pièces justifiant l’appartenance du demandeur à la catégorie autorisée à saisir l’ARMT. Doit être indiqué l’objet de la saisine, motivé et assorti de pièces mais aussi l’identité et l’adresse des parties mises en causes lorsqu’elles sont connues du demandeur. L’absence de ces éléments n’entraîne pas automatiquement l’irrecevabilité de la demande. En effet, lorsque des informations sont manquantes, une demande de régularisation est adressée au demandeur qui doit alors compléter son dossier dans un délai d’un mois[19].

Le déroulement de la procédure

L’article L331-9 du CPI renvoi aux titulaires de droits qui doivent prendre les mesures utiles pour ne pas priver les bénéficiaires des exceptions de leur exercice effectif. C’est seulement en cas de carence des titulaires que l’Autorité peut intervenir, c’est à dire si les bénéficiaires des exceptions sont privés de leur “exercice effectif”. L’alinéa 2 de cet article subordonne néanmoins le bénéfice effectif de ces exceptions “à un accès licite à une oeuvre il faut aussi qu'elles n'aient pas pour effet de porter atteinte à son exploitation normale ni de causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du titulaire de droits sur l'oeuvre ou l'objet protégé”. Dans le cas où ces conditions sont réunies, l’Autorité peut être saisie d’un différend opposant les ayants droits aux bénéficiaires de l’exception. La procédure visée à l’article 331-15 du CPI se déroule en deux temps. Tout d’abord, l’Autorité cherche à concilier les parties. En cas d’accord, l’ARMT “dresse un procès-verbal de conciliation, celui-ci a force exécutoire et fait l'objet d'un dépôt au greffe du tribunal d'instance”. A défaut de conciliation dans un délai de deux mois à compter de sa saisine, l'Autorité, “après avoir mis les intéressés à même de présenter leurs observations, rend une décision motivée de rejet de la demande ou émet une injonction prescrivant, au besoin sous astreinte, les mesures propres à assurer le bénéfice effectif de l'exception. Elle détermine alors les modalités d’exercice de cette exception et fixe notamment, le cas échéant, le nombre minimal de copie autorisées dans le cadre de l’exception pour copie privée, en fonction du type d’oeuvre ou d’objet protégé, des divers modes de communication au public et des possibilités offertes par les techniques de protection disponibles. L’article L331-14 du CPI prévoient que “Les personnes morales et les établissements ouverts au public visés au 7° de l'article L122-5 du CPI qui réalisent des reproductions ou des représentations d'une œuvre ou d'un objet protégé adaptées aux personnes handicapées peuvent saisir l'Autorité de régulation des mesures techniques de tout différend portant sur la transmission des textes imprimés sous la forme d'un fichier numérique.

Les décisions de l’Autorité sont rendues publiques, dans les limites du secret protégé par la loi. Elles sont susceptibles de recours devant la Cour d’appel de Paris, le recours ayant un effet suspensif.

Bilan de l'AMRT

En action depuis avril 2007, l’ARMT s'est réunie 23 fois en séance plénière, a auditionné 12 personnes dans le cadre de sa mission d'observation des mesures techniques, et participé à 12 colloques, tables rondes ou séminaires. Mais elle n'a pas rendu une seule décision, sauf les nominations de son Président et de son Secrétaire Général[20]. Faute de saisine, personne ne lui a demandé de trancher un problème d'interopérabilité ou d'abus de MTP pour lesquels la loi lui donnait compétence. Sa faible intervention s’explique par plusieurs raisons.

L’abandon progressif des mesures techniques de protection

La problématique des mesures techniques de protection qui avait occupé une place centrale dans les débats de la loi DAVDSI a perdu une part de son acuité depuis que, dans le secteur de la musique, on constate un abandon progressif des mesures techniques de protection.

Depuis 2007, on assiste à une montée en puissance de l’hostilité envers les mesures techniques de protection. Dans une lettre ouverte publiée le 6 février 2007, Steve Jobs lui même remet en cause le choix des mesures techniques de protection. Il estime qu’elles freinent la croissance des ventes de musique en ligne et appelle les majors à fournir leur catalogue sans DRM (digital rights management): “Imaginez un monde où chaque kiosque en ligne vendrait de la musique sans DRM. (...) N’importe quel lecteur pourrait lire de la musique achetée sur n’importe quel kiosque. Ce serait à l’évidence la meilleure solution pour le consommateur. Et Apple l’adopterait.” Steve Jobs estime que les DRM n’ont pas fait leurs preuves pour stopper le piratage, et ne les feront peut être jamais[21].

Certains éditeurs et producteurs ont tiré une leçon de ces différentes sonnettes d’alarme et ont alors accepté une diffusion de leurs catalogues sans MTP. Aux États-Unis, les plates-formes de téléchargement légal proposant des morceaux sans DRM se sont multipliées. EMI, quatrième maison de disque en termes de parts de marché mondial, fut la première à abandonner les DRM en avril 2007, avant que Universal Music Group, ne lui emboîte le pas en août 2007. En novembre 2008, la troisième major Warner Music Group a annoncé qu'elle allait proposer via le magasin en ligne Amazon.com des titres au format MP3, donc sans DRM. Le 29 décembre 2008, Sony BMG Music Entertainment a annoncé qu'il allait cesser de protéger par dispositif anti-copie ses titres vendus au format numérique. La deuxième plus grande maison de disque mondiale, devient ainsi la dernière des quatre majors du disque à abandonner les dispositifs DRM pour les supports dématérialisé.

En France, depuis janvier 2007, Fnacmusic.com et VirginMega.fr proposent un catalogue d’environ 200 000 titres non protégés au format MP3. Le 28 octobre 2008, les ayants droit ont accéléré le processus de levé des DRM sur le catalogue des titres français en annonçant la fin des DRM exactement un jour avant l’examen du texte sur la riposte graduée par le Sénat. Par ailleurs, depuis le 7 novembre 2008, Universal a retiré toutes les mesures techniques de protection bloquantes de ses titres. “Universal a décidé de prendre les devants. Nous allons mener plusieurs expérimentations d’ici à la fin de l’année pour tester l’impact d’une telle mesure et voir si l’absence de verrous fait grimper le nombre de téléchargements », a expliqué Pascal Nègre, président d’Universal Music France. « Si le consommateur, sensibilisé par la loi, arrête de pirater, nous n’aurons plus besoin de protéger nos oeuvres. Le choix ne se fera plus entre le payant et le gratuit mais entre le payant et le risqué.” Dans le même temps, SFR lance en partenariat avec Universal Music sa première offre de téléchargement illimité sans DRM sur mobile.

Si les majors commencent à envisager une fin des MTP pour la musique, il en est pas de même pour les contenus vidéo. Aujourd'hui, le discours de l'industrie du cinéma, de la TV et des plates-formes qui vendent les contenus, c'est que les MTP restent indispensables pour la vidéo. Elles changeront probablement d'avis d'ici quelques années. Mais pour le moment, leur position est ferme et confirmée par l’ARMT qui assure que l'abandon des MTP sur les vidéo n'est pas à l'ordre du jour.

L’abandon partiel des MTP par les maisons de disques a considérablement amoindri le champs d’action de l’ARMT chargée de réguler ces dernières.

Complexité de la procédure

La faible activité de l’ARMT est également due à des difficultés inhérentes à l’application des textes, à la complexité de la procédure de saisine ou, encore, au risque pécuniaire que pourrait encourir le demandeur en cas de rejet de sa demande. Les aléas liés au contexte de la mise en route de l’ARMT ne retirent rien à la pertinence des missions telles qu’elles ont été définies par la loi de 2006, sous réserve d’ajustements à la marge. Si telle est la volonté du législateur, elles seront transférées sans modification de fond à la Haute autorité qui prendra sa succession. "La courte vie de l’ARMT n’aura pas été vaine s’il s’avère qu’elle a contribué, dans le cadre de ses attributions, à préparer le terrain à une stratégie plus ambitieuse des pouvoirs publics, inspirée par la volonté d’introduire un principe de régulation dans la dynamique de développement de l’internet en vue de concilier l’accès du plus large public aux oeuvres de l’esprit avec le respect des droits des créateurs et des valeurs de la culture", estime ainsi M. Musitelli[22]. Ainsi, malgré toutes les évolutions subies par l’ARMT, celle ci a vocation à subsister et même à se développer en élargissant son champs de compétence.

L'avenir de l’ARMT

De l’ARMT à l’HADOPI

Prémisses de la transformation

Le 5 septembre 2007, la ministre de la culture a confié à M. Denis Olivennes, alors Président Directeur général de la FNAC, une “mission de réflexion et de concertation destinée à favoriser la conclusion d’un accord entre professionnels permettant le développement d’offres légales attractives d’œuvres en ligne et dissuadant le téléchargement illégal de masse.” Dans ce cadre, contact a été pris par la mission avec le Président de l’ARMT en vue de son audition. Cette audition fut l’occasion de souligner qu’entre le rôle “de faciliter le téléchargement légal en veillant à la mise en œuvre de l’interopérabilité, et la mission d’encadrer un dispositif de désincitation au téléchargement non autorisé de contenus protégés, il existe une complémentarité certaine dès lors qu’il s’agit de garantir, tant pour les usagers que pour les titulaires des droits, le respect des règles de la propriété littéraire et artistique et l’équilibre des droits et des intérêts des parties.” Lors de la séance plénière du 25 octobre 2007, les membres de l’Autorité, concluaient qu’il y avait quelque logique à ce que l’Autorité intervienne également pour corriger les déséquilibres que susciterait éventuellement le déploiement du dispositif de réponse graduée. Dans son rapport de novembre 2007, la mission Olivennes envisageait, pour la mise en œuvre du dispositif de réponse graduée l’intervention d’une autorité publique qui aurait pour mission d’avertir, après plainte des ayants droits, les internautes contrevenants et, le cas échéant, de les sanctionner elle-même, ou de transmettre le dossier au juge compétent pour qu’il décide de la sanction appropriée. Le rapport Olivennes a abouti à la signature, le 23 novembre 2007, des accords de l’Élysée . Aux termes de cet accord, les pouvoirs publics s’engageaient à : proposer au Parlement les textes législatifs et à prendre les mesures réglementaires, permettant de mettre en œuvre un mécanisme d’avertissement et de sanction piloté par une autorité publique spécialisée, placée sous le contrôle du juge,dotée des moyens humains et techniques nécessaires[23].

Nouvelles missions confiées à l'Autorité

En janvier 2008, la ministre de la Culture et de la Communication a confirmé que le gouvernement avait retenu comme orientation du projet de loi en cours d’élaboration l’élargissement des compétences de l’ARMT à la protection de la création sur internet. Selon le projet de loi Création et Internet: « au titre de sa nouvelle mission de protection des œuvres, l’Autorité sera saisie, pour le compte des ayants droits dont les œuvres auront été piratées, par les agents assermentés des organismes de défense professionnelle et des sociétés de perception et de répartition de droits. Elle commencera par envoyer aux pirates des messages d'avertissement, dénommés recommandations, par courrier électronique puis par lettre remise contre signature de façon à s'assurer que l'intéressé a bien pris connaissance du comportement qui lui est reproché. Une phase préventive précédera donc d'éventuelles sanctions. (...) La Haute Autorité pourra prendre, sous le contrôle du juge, une sanction adaptée à la nature du comportement auquel il s'agit de mettre fin : la suspension temporaire de l'abonnement internet, assortie de l'interdiction de se réabonner pendant la même durée. Afin de garantir le respect des mesures de suspension qui auront été décidées, les fournisseurs d'accès à internet devront vérifier, à l'occasion de la conclusion de tout nouveau contrat, que leur cocontractant ne figure pas sur un répertoire des personnes dont l'abonnement a été suspendu, géré par la Haute Autorité. Celle-ci pourra décider de prendre des sanctions pécuniaires à l'encontre des fournisseurs d'accès à internet qui s'abstiendraient de procéder à cette vérification, ou qui ne mettraient pas en œuvre les mesures de suspension »[24].

Parallèlement à sa double fonction de veille et de régulation, l’Autorité de régulation des mesures techniques (ARMT) transformée en Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur l'internet (HADOPI) devra mettre en œuvre la riposte graduée et labelliser les outils de filtrage proposés aux internautes.

En plus de ces nouvelles missions, l’Autorité est impliqué dans le Plan de développement de l’économie numérique.

FRANCE NUMÉRIQUE 2012 : RÔLE CONFIÉ À L’ARMT

Pendant la séance plénière du 25 octobre 2007, les membres de l’Autorité se sont accordés à penser que celle-ci pourrait se voir confier la mission de favoriser la constitution d’un répertoire national d’empreintes des œuvres protégées par un droit de propriété littéraire et artistique[25].

Le Plan de développement de l’économie numérique “France Numérique 2012” rendu public, le 27 octobre 2008, souligne que “développer la production et l’offre de contenus numériques repose sur un double impératif : d’une part assurer la protection des contenus, d’autre part augmenter la disponibilité des œuvres et des programmes”, il précise “qu’un répertoire national des œuvres numériques protégées pourrait servir d’ancrage aux technologies de protection de contenus, en permettant aux ayants droits et aux opérateurs de l’internet de repérer les fichiers protégés et de coopérer pour assurer leur gestion.” Le Plan préconise un recensement précis et organisé des catalogues sous droits pour assurer la protection des contenus : “le fichage méticuleux des œuvres à protéger et la mise en œuvre de procédés de vérification automatique induiront une raréfaction des copies illicites en libre accès, et rendront leur recherche moins aisées.” Il prévoit en conséquence la création d’un répertoire national des œuvres sous droits, confiant à l’ARMT un rôle de veille et de promotion en ce domaine en vue d’une pleine et libre mise en concurrence des technologies. Dans ce cadre l’ARMT sera chargée d’organiser un banc d’essai des technologies de marquage de contenus, en vue d’en faire mieux connaître les performances auprès de l’ensemble des acteurs et d’en promouvoir ainsi l’usage. Elle devra créer un observatoire public des technologies de marquage de contenus et “promouvoir le déploiement des technologies de reconnaissance sur les plates-formes de partage.” Mais aussi, constituer un groupe de travail, dans le but de proposer un mode opératoire propre à la détection de contenus sous droits sur les sites d’hébergement en vue de leur protection et de leur valorisation. Enfin, l’Autorité devra créer un répertoire national des œuvres protégées, ouvert à toutes les technologies de protection des œuvres, permettant à tout ayant droit de déclarer ses contenus sous droits et à toute plate-forme de connaître les œuvres protégées.


Voir aussi


Sources

Doctrine

  • Bitan, Hubert, « Mesures techniques de protection, consommateur et Haute autorité », Revue Lamy droit de l'immatériel, n° 31, octobre 2007, pp. 73-81
  • Rapp, Lucien, « Nature et pouvoirs de l’Autorité de régulation des mesures techniques de protection », Revue Lamy droit de l'immatériel, n° 23, janvier 2007, pp.64-67

Mémoire

  • Blanchais, Cecile, Les mesures techniques de protection face aux consommateurs
  • Morat, Guillaume, « De l’interopérabilité en droit d’auteur », Mémoire réalisé sous la direction de Madame Sandrine Albrieux, 2007: Université Panthéon-Assas Paris II, Master 2 professionnel “Droit du multimédia et de l’informatique”.

Liens externes

Notes et références

  1. Berland et Cousi, « La lutte contre la contrefaçon et le piratage des films: un combat nécessaire dans un environnement complexe », Gaz. Pal., mai 2004
  2. Blanchais, Cecile, “Les mesures techniques de protection face aux consommateurs”
  3. Directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information, Journal officiel n° L 167 du 22/06/2001 p. 0010 - 0019
  4. Directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001, op. cit.
  5. Loi n° 2006-961 du 1er août 2006 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, JORF n°178 du 3 août 2006, page 11529
  6. Cass. Civ 1re, 28 février 2006, Comm. com. électr., avril 2006, note Caron
  7. CA Paris, 4e ch., 4 avril 2007, Comm. com. electr., mai 2007, note Caron
  8. Terrier et Valentin, “Peer to peer: panorama des moyens d’action contre le partage illicite des oeuvres sur internet”, Légicom, 2004, n°32
  9. Intervention de Didier Mathus du 21 décembre 2005 contre le projet de loi de transposition de la directive européenne sur le droit d’auteur dans la société numérique
  10. Directive 91/250/CEE du Conseil, du 14 mai 1991, concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur, Journal officiel n° L 122 du 17/05/1991 p. 0042 - 0046
  11. Directive 91/250/CEE du Conseil, du 14 mai 1991, concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur, ibid, considérant n°12
  12. Décision n° 2006-540 DC du 27 juillet 2006, JORF n°178 du 3 août 2006 page 11541, texte n° 2
  13. Loi n° 2006-961 du 1er août 2006 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, J.O n° 178 du 3 août 2006 page 11529
  14. Loi n° 2006-961 du 1er août 2006 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, J.O n° 178 du 3 août 2006 page 11529
  15. La définition des informations essentielles est donnée par l’article L331-7 alinéa 2 du CPI qui dispose: “On entend par informations essentielles à l'interopérabilité la documentation technique et les interfaces de programmation nécessaires pour permettre à un dispositif technique d'accéder, y compris dans un standard ouvert au sens de l’article 4 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, à une œuvre ou à un objet protégé par une mesure technique et aux informations sous forme électronique jointes, dans le respect des conditions d'utilisation de l'oeuvre ou de l'objet protégé qui ont été définies à l'origine”.
  16. Article R331-22 du CPI. Cette compensation financière est issue de la décision du Conseil Constitutionnel (Décision n° 2006-540 DC du 27 juillet 2006, JORF n°178 du 3 août 2006 page 11541 texte n° 2)
  17. Article L331-7 alinéa 5 du CPI
  18. Loi n° 2006-961 du 1er août 2006 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, J.O n° 178 du 3 août 2006 page 11529
  19. article R331-12 du CPI
  20. Rapport annuel de l’ARMT 2008, Les chiffres clés de l’ARMT
  21. Jobs, Steve, Thoughts on music, en ligne, 6 février 2007
  22. Rapport annuel de l’ARMT 2008, Les chiffres clés de l’ARMT, Introduction
  23. Rapport annuel de l’ARMT 2008, Les chiffres clés de l’ARMT, Partie 4 chapitre 2
  24. Rapport annuel de l’ARMT 2008, Les chiffres clés de l’ARMT, Annexe Projet de loi “Création et internet”
  25. Rapport annuel de l’ARMT 2008, Les chiffres clés de l’ARMT, Partie 4 chapitre 4